Après avoir été impressionnée, il y a quelques décennies, par les premiers livres de la série des Fourmis, j'ai peu à peu eu une sensation de répétition qui m'a dissuadée longtemps de relire du
Werber. "
Le Père de nos pères" m'a été prêté il y a longtemps déjà; je le regardais avec une certaine méfiance; j'ai fini par l'ouvrir. Ouf, pas d'ennui dès le début. le double récit prend plutôt bien, même si les chapitres "proto-historiques" ne convainquent pas vraiment. Peut-être le contraste avec la partie "polar" plus actuel que je trouve amusante, à défaut d'être vraiment crédible.
A la moitié du roman, les impressions sont de plus en plus mitigées :
- le 'IL' proto-humain me tape sur le système (cynisme? brutalité excessive? regard faussement neuf/neutre de la narration?)
- et surtout les exposés scientifiques (on sent d'ailleurs que le roman date, oh, déjà, de 1998, la paléontologie a fait des bonds en deux décennies), bref les passages d'érudition semblent prendre toute la place, en une succession d'exposés, rendant artificiels et maladroits les efforts pour rendre vivante une histoire qui perd de plus en plus en crédibilité.
Déception devant des approximations ou des incohérences, pour un écrivain de haut vol :
- des répétitions, des constructions hasardeuses qui conviendraient à l'oral seulement, par exemple : "les animaux seraient au préalable parqués dans une enclos triangulaire afin d'être sûr que la gazelle serait dans l'impossibilité de s'enfuir". "Sûr", il va avec quoi? ni les animaux ni la gazelle. Phrase grammaticalement incorrecte.
- le contraste entre les deux personnages d'enquêteurs, avec leur physique opposé, était souligné avec insistance (lourdeur?) dès le début, mais les allusions régulières au surpoids d'Isidore sont... lourdes, et incohérentes avec les informations données lors de la première description du personnage : en effet, une personne d'1,90m pour 120kg est certes massive, imposante, mais nullement dégoulinante de graisse (c'est répété).
Quand on fait l'érudit, on devrait aussi le faire dans les détails du réalisme de base.
Bref, la lecture est agaçante. Et pourtant addictive. Je ne lâche pas le livre. L'érudition est étalée en permanence mais les mots sont simples, on comprend tout, alors la vulgarisation scientifique est réussie. Les ficelles sont énormes, artificielles, maladroites, tout ce qu'on veut, mais quand même, je reste, je veux savoir la suite, je dévore le roman, jusqu'au bout.
En conclusion, l'image du porc, centrale dans l'intrigue, est applicable à la lecture de ce roman : de même que j'enlève le gras du jambon, que tout ne me semble pas bon dans le cochon, et que j'ai pourtant plaisir à déguster parfois des rillettes ou un filet mignon, de même, j'ai eu finalement plaisir à lire ce roman.