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Le machineur Étienne Lantier a quitté Lille pour avoir presque tué son patron. Il crève la faim et marche droit au milieu de la nuit noire dans le grand vent de la plaine flamande. Ah! s'il avait mieux écouté, posé son oreille sur la boue gelée des champs de betteraves, n'aurait-il pas entendu le bruit des rivelaines creusant pouce après pouce les veines charbonnières à trois cents mètres sous terre? N'aurait-il pas entendu la marche lente du peuple sous le joug d'un invisible dieu capitaliste cynique dans son lointain tabernacle? Peut-être même que, s'il avait posé la main sur le sol, peut-être aurait-il perçu la vibration, la tension surfacique qui précède les tremblements, la poussée de révolte, la force de ce peuple prenant conscience de sa force, prêt à germer comme un végétal capable de faire vaciller la société sur son socle. Mais non il est trop tôt pour qu'il se rende compte de tout cela, les seules choses qu'il voit sont deux feux rouge sang qui marquent l'entrée de la fosse où il va s'enfoncer sans vraiment le vouloir, pour la simple raison que deux yeux verts limpides et francs lui ont souri et qu'il a souri lui aussi en retour…

Germinal est un roman phare de notre littérature, un cri poussé en 1885 par quelqu'un qui ne pouvait pas savoir que la plante dont il sentait la lente germination allait marquer à sang le siècle qui suivait. Un livre qui n'est pas qu'un monument, qui est aussi une intrigue, une romance, un roman que l'on ne peut plus poser une fois lue la première phrase.
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Mars 1884, Anzin. Une violente grève éclate à la mine d'Anzin, dans le Nord de la France. Les ouvriers, révoltés par une nouvelle baisse de salaire imposée par La Compagnie, refusent de retourner croupir sous terre sans pouvoir ramener du pain à leur famille. La loi Waldeck-Rousseau autorisant les syndicats est votée à la fin du mois de mars. Ça, c'est l'histoire vraie.

Mars 1884, Montsou. Etienne Lantier, un ancien machiniste, vient d'être licencié pour avoir giflé son chef. Il arpente les plaines du Nord à la recherche d'un travail, n'importe lequel pourvu qu'il ait un toit et du pain. À Montsou, il rencontre les Maheu, une famille de mineurs qui descend dans la fosse depuis la création de la première Compagnie un siècle plus tôt. Suite à la mort d'une herscheuse, Etienne est embauché à la fosse du Voreux. Écoeuré par la misère des ouvriers qui s'oppose à l'opulence dans laquelle vivent les bourgeois de Montsou, Etienne fait rapidement germer dans l'esprit des ouvriers la graine de la révolution… Ça, c'est la fiction.

Zola frappe fort avec ce 13e roman de la fresque des Rougon-Macquart. Entre 1871 et 1893, Zola écrit 20 volumes sur une famille du Second Empire condamnée par les lois de l'hérédité. Il brosse un portrait exhaustif de toutes les strates de la société, et publie en 1885 le premier livre qui donne une voix à l'ouvrier : Germinal symbolise l'accession à la dignité de gens qu'on avait toujours cru indignes d'être des personnages de roman.

Roman documentaire sur le monde des mineurs au XIXe siècle, il reçoit un accueil mitigé. Certains y voient un roman anti-peuple, d'autres le premier grand livre sur le peuple. Germinal finit par rencontrer un succès fulgurant, amplifié grâce à de nombreuses adaptations à l'écran. À l'enterrement de Zola en 1902, une délégation de “gueules noires” (surnom des mineurs à l'époque) fait le déplacement. En esthétisant leur misère, l'auteur a donné une conscience à la société face à la condition ouvrière. @

Germinal m'a littéralement fendu le coeur. Je l'ai terminé dans un TGV Lyon-Paris, ne pouvant retenir mes larmes sur les 50 dernières pages. À peine arrivée chez moi, tourmentée et obsédée par le sort de la famille Maheu, j'ai immédiatement ouvert mon ordinateur et visionné le film de Claude Berri, sorti en 1993. Je n'ai absolument rien à redire sur ce livre, tout y est. Et l'histoire de l'écriture du roman est tout aussi passionnante que le récit.

Zola a conduit un véritable travail journalistique, presque scientifique pour aboutir à ces 670 pages magistrales. Il se rend à Anzin entre le 27 février et le 4 mars 1884, en plein mouvement gréviste. Il visite les corons (les logements des ouvriers), descend dans la fosse Thiers à plus de 500m sous terre pour documenter le quotidien des mineurs, lit de nombreux ouvrages sur la mine, les problèmes économiques, le socialisme et les grèves. Zola éprouve le besoin d'aller voir par lui-même la misère humaine, de se mettre à la place de ces ouvriers, de s'identifier à eux pour vivre leur vie, pour la sentir à l'intérieur. Henri Mitterand raconte à propos de la méthode de travail de Zola : “C'est du mimétisme. Qu'est-ce que le journalisme sinon cela ?”

Je clôture cette chronique sur l'explication du choix du titre “Germinal”, qui a failli s'appeler “Les affamés”, “L'assiette au beurre” ou encore “Château branlant”. Autant Zola savait exactement où il voulait aller dans l'écriture et la construction du récit, autant il a longuement hésité sur le titre. Il tombe un jour sur l'article « germinal » dans le Grand Dictionnaire Universel du XIXe siècle de Pierre Larousse. Il s'aperçoit alors que Germinal signifie étymologiquement la germination, la renaissance des forces nouvelles, permettant une formidable métaphore avec la naissance de l'ouvrier de l'insurrection. Germinal était aussi une révolution populaire en 1795, et correspond au début du printemps selon le mois du calendrier révolutionnaire.

Bref, je vais m'arrêter là même si je pourrai continuer à parler pendant des heures de Zola, auquel je vais d'ailleurs prochainement consacrer un portrait d'auteur. En résumé : ce livre c'est vraiment trop de la balle. Vous l'avez probablement déjà lu au lycée, mais faites-moi confiance et replongez-vous dedans. Vous ne le regretterez pas.
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Il est toujours délicat d'entamer une critique (ou une chronique) sur une oeuvre qui, au fil des années, parfois des siècles, a acquis un statut de mythe. Si tout n'a pas été dit, bien des choses l'ont été, et ma foi, on risque fort de faire dans la redite ou la redondance. Mais nous qui ne sommes pas critiques littéraires, mais simples amateurs de lecture, nous nous bornons à donner simplement un avis personnel, même pas, un "ressenti" personnel, forcément subjectif, sur l'oeuvre en question, indépendamment (croyons-nous) de ce qu'en ont dit ou pensé les autres...
Difficile donc de parler des oeuvres classiques comme "Les Misérables" ou "Germinal" en faisant abstraction de ce que nous avons appris à l'école, au collège, au lycée, à la fac, et plus tard dans la vie, bref difficile d'être objectif tout en étant subjectif !
Moi, "Germinal", c'est un copain qui me l'a fait lire en classe de quatrième (Raymond, si tu m'écoutes...) Je ne connaissais pas du tout Zola, que je n'étudierais que plus tard, en Terminale, avec "Le Rêve". Inutile de vous dire que ce fut un choc. Je n'étais pas habitué à lire des choses abruptes, violentes, qui me bousculeraient autant. Parce que, autant vous le dire (mais vous le savez déjà), "Germinal" est un livre qui vous remue :
C'est d'abord une atmosphère, une ambiance, toute en rouge et noir (couleurs symboliques s'il en est : la mine et le sang, la mort et la liberté...), pleine d'odeurs, de poussière, de sueur, de misère, de violence latente, d'amour et de camaraderie, et chez les patrons, de morgue ou d'indifférence.
C'est ensuite un décor. La mine, qui domine l'ensemble du roman, et même écrase de sa masse les maisons huppées des grands patrons, est même plus qu'un vaste décor, c'est un mythe : c'est le dieu Baal dans la fournaise duquel des centaines de victimes sont jetées. Les corons, que chantera plus tard Pierre Bachelet, sont le cadre d'un quotidien miséreux et sordide, mais, à l'instar de la buée des bains, plein d'une douceur et d'une chaleur qui reposent les corps et les coeurs.
C'est aussi, et surtout, des portraits saisissants : la Maheude, femme forte et attachante, me fait penser à la Pilar de "Pour qui sonne le glas", roman que j'ai lu à peu près à la même époque. Etienne, incarnation d'une pensée humaniste et prolétarienne, reste par certains côtés furieusement romantique, comme Catherine, et comme Chaval, d'une autre manière, qui campe le méchant de service. Les mineurs, Toussaint Maheu, qui paiera de sa vie son dévouement à la mine, son père le vieux Bonnemort, que le chagrin poussera à la folie et au crime, Souvarine, l'anarchiste qui mettra le feu aux poudres. Et puis les patrons et leurs serviles adjoints, les Hennebeau, Deneulin, Negrel, Grégoire, plus préoccupés de leurs affaires personnelles, qu'elles soient financières ou privées (égoïsme, adultère, arrivisme) que du bien-être des ouvriers...
Enfin "Germinal" c'est un message "socialiste". Je mets ce mot entre guillemets car sa signification, à l'époque, est beaucoup plus large qu'aujourd'hui : c'est l'espoir d'un monde meilleur, où la misère serait abolie, où les hommes et les femmes vivraient en harmonie. C'est un message politique, forcément, mais au-delà c'est carrément une profession de foi humaniste. le dernier paragraphe du roman explicite toute la pensée de l'auteur :
"Et, sous ses pieds, les coups profonds, les coups obstinés des rivelaines continuaient. Les camarades étaient tous là, il les entendait le suivre à chaque enjambée. N'était-ce pas la Maheude, sous cette pièce de betterave, l'échine cassée, dont le souffle montait si rauque, accompagné par le ronflement du ventilateur ? A gauche, à droite, plus loin, il croyait en reconnaître d'autres, sous les blés, les haies vives, les jeunes arbres. Maintenant, en plein ciel, le soleil d'avril rayonnait dans sa gloire, échauffant la terre qui enfantait. du flanc nourricier jaillissait la vie, les bourgeons crevaient en feuilles vertes, les champs tressaillaient de la poussée des herbes. de toutes parts, des graines se gonflaient, s'allongeaient, gerçaient la plaine, travaillées d'un besoin de chaleur et de lumière. Un débordement de sève coulait avec des voix chuchotantes, le bruit des germes s'épandait en un grand baiser. Encore, encore, de plus en plus distinctement, comme s'ils se fussent rapprochés du sol, les camarades tapaient. Aux rayons enflammés de l'astre, par cette matinée de jeunesse, c'était de cette rumeur que la campagne était grosse. Des hommes poussaient, une armée noire, vengeresse, qui germait lentement dans les sillons, grandissant pour les récoltes du siècle futur, et dont la germination allait faire bientôt éclater la terre."
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Incontournable, monumental, sublime, essentiel, emblématique, les qualificatifs ne manquent pas pour qualifier Germinal, le 13ème opus du cycle des Rougon-Macquard du non moins incroyable Émile Zola.
Ma 1ère lecture de ce roman naturaliste s'il en est date...du lycée… Marqué du sceau de l'obligation scolaire, il ne me fut pas aisé à l'époque d'ingurgiter le pavé et de le digérer. Il m'en restait cependant le souvenir d'un Étienne Lantier romanesque, de luttes sociales et de drames.
Quelques 30 années plus tard, à l'occasion d'une LC, s'est profilée pour moi la possibilité d'une re-lecture et ce, pour mon plus grand plaisir.

Re-lire, c'est découvrir à nouveau, mais sans entrave, sans impatience. Connaissant ainsi l'intrigue d'avance, j'ai pu m'attarder plus longuement sur la démarche créative de l'auteur, me laisser envahir par ces trois couleurs : le noir des mineurs et du charbon, le noir de la nuit et de la misère ; le blanc en pendant, le blanc des bourgeois mais aussi de la pâleur des visages sous la suie ; le rouge enfin, le rouge du sang, de la révolte et du feu. J'ai pu prendre le temps de découvrir tous les personnages avec attention, dans le respect de leurs histoires et de leurs convictions, dans l'investigation de leur évolution politique et sociale.
Re-lire, c'était aussi prendre rdv avec moi-même, avec mes souvenirs de lecture d'antan et de la personne que j'étais à cette époque : d'autres envies, d'autres attentes, d'autres besoins. Ce fut la surprise de constater la sélection naturelle opérée par mon positionnement de l'époque et le constat de mon évolution naturelle propre, de mes yeux ouverts sur de nouveaux passages, de nouvelles émotions, de nouveaux constats.
Re-lire, avec d'autres lecteurs, c'était enfin prendre rdv en dehors de moi-même, en symbiose et en choeur, nourrie par des réflexions autres que les miennes, mais rythmées par les mêmes pages, bercées par les mêmes mots. Lire seule et en bonne compagnie.

Au final, c'est l'intemporalité de l'oeuvre qui m'a frappée. Certes, les mines ont fermé, les conditions de travail des ouvriers se sont améliorées. Cependant, les questions posées sur l'exploitation de l'homme par l'homme, de la crise économique, du maintien de l'économie à tout prix au profit de quelques-uns mais au mépris des plus pauvres, de la condition des femmes, de la vanité liée au pouvoir si petit soit il, du syndicalisme et de son pouvoir… bref, toutes ces interrogations me paraissent finalement si contemporaines et actuelles que j'en suis restée troublée.

La lutte continue...
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C'est grâce à la proposition de faire une lecture commune avec deux autres babeliotes que je me suis enfin décidée à me mesurer à cette légende de la littérature française.
Ne l'ayant pas étudié en classe et n'ayant pas vu le film, j'étais vierge d'a priori.

J'ai été bien sûr subjuguée par le style de l'auteur. Qui est à la fois très descriptif et très percutant, qui parvient à nous faire entrer dans cet univers de la mine qui m'était tout à fait inconnu.

Mais c'est l'objet du roman et son intrigue qui m'ont le plus frappés. Cette exposition d'une profonde misère sociale, d'un monde totalement inimaginable sans description aussi réaliste, m'a vraiment touchée.

Nous rentrons directement dans le vif du sujet et avec Etienne, le fils de Gervaise (que je découvre en ce moment dans l'assomoir) nous découvrons l'univers des corons, le travail difficile, mal rémunéré, sans oxygène, dangereux. Grâce à la puissance évocatrice de l'auteur nous cotoyons les mineurs, le noir, l'univers clos. Et ça m'a glacé.
Puis nous découvrons les familles. Leur extrême pauvreté, aussi bien du côté des logements que de la nourriture, mais aussi la cohabitation avec des voisins très proches. Et la misère sociale, où les hommes boivent, les femmes cherchent à nourrir leur famille et éduquer leurs enfants, pendant que les jeunes filles copulent, parfois malgré elles, jeunes et avec l'espérance d'être mariées à leur tour, ce qui entraînera sa famille dans une plus grande pauvreté puisque l'argent qu'elles gagneront ira au nouveau ménage.

Comment ne pas être atterrée?

Et puis nous découvrons l'univers bourgeois et capitaliste, totalement inconscient de la misère environnante.

Tout cela mènera à une grève d'une grande envergure, dans laquelle les hommes oublieront qui ils sont devenus par leur éducation et l'ordre social pour devenir ce qu'ils sont quand ils ne se laissent guider que par les tripes et la faim.

Un roman dans lequel nous nous enfonçons peu à peu, toujours plus dans l'horreur de la misère. La famille Maheu, la mère et Catherine surtout, m'a beaucoup émue. Leur courage et leur abnégation sont un modèle de force et d'impuissance.

Les idées montrées dans le livre me semblent assez modernes, et j'ai vraiment eu l'impression d'assister à une scène réelle. Derrière l'intrigue, nous pouvons voir une dénonciation de la bourgeoisie, du capitalisme mais aussi de l'absence d'éducation, de la soif de pouvoir. Je dirais que j'en retiens la même sempiternelle question: Comment réagirions-nous à leur place? Entre l'acceptation de son sort, la lâcheté, ou la résistance au risque de perdre tout ce qu'on a?

Un monument que je suis très heureuse d'avoir découvert et qu'il était beaucoup plus facile de lire que je ce que j'imaginais.
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Un homme, sans le sou, arrive, à pied, dans une mine, se fait embaucher et connait les conditions déplorables de ces forçats des sous sols du nord de la France.

Rapidement, la misère, la faim et de nouvelles mesures économiques restrictives amènent à cette colère qui gronde, comme un orage lointain, puis éclate violemment.
C'est la grève, la révolte de ceux qui n'ont plus rien et ne demandent que le minimum. Vivre.

C'est un roman dur, comme l'était la condition des mineurs. Très bien écrit, un style superbe, mais terrible, comme était la vie de ces hommes et femmes courageux. Un livre à lire.
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Je sais que je ne suis pas encore au bout de mon aventure lecture/relecture des Rougon-Macquart, que je ne suis, finalement, qu'à un peu plus de la moitié du chemin avec ce treizième tome, mais c'est pour l'instant indéniable - l'on verra si je me trompe - : Germinal est le tome qui me vrille le plus les tripes, en ce que je le trouve, pour l'instant, le plus engagé des romans zoliens.

Peut-être davantage que dans L'Assommoir, qui est déjà impressionnant dans son genre, le romancier nous prend par le bras et nous jette au milieu de la déchéance des mineurs, au moment où Etienne, fils de Gervaise justement, rejoint le Voreux, mine de Montsou, créature terrible avalant femmes, hommes, enfants, pour nourrir la bête Capitalisme en la personne de familles bourgeoises comme les Hennebeau, les Grégoire, ou encore les Deneulin, parfois directeur, parfois actionnaire, parfois propriétaire d'une mine, capitalisant sur la misère de ceux qui y travaillent, rognant de plus en plus sur le prix des chariots remontés, menant fatalement à la grève de ceux qui ne parviennent plus à vivre de leur besogne éreintante et mortifère.

Comme à son habitude, grâce au travail journalistique fourni avant l'écriture de ce treizième roman, nous entrons de plain-pied dans le quotidien des mineurs, de leurs journées de travail à leur jour chômé, le dimanche, de la vie emplie de fatalisme des jeunes filles qui, dès quatorze ou quinze ans, sont déjà enceintes, de gré ou de force, bientôt mariées avec celui à l'origine de leur grossesse, de gré ou de force aussi. Moi qui avais surtout été touchée par le personnage d'Etienne à ma première lecture, par son idéalisme pur, même si naïf, j'ai cette fois été émue, révoltée plus encore, par le destin de Catherine, fille des Maheu, famille de mineurs avec qui Etienne va fraterniser à son arrivée, puissant symbole de cet état de fait dévolu à la condition féminine, que la misère et le travail de forçat mènent indubitablement vers cette voie, et dont les exemples sont légion au fil du roman.

Et puis, bien sûr, Germinal, c'est le printemps, du 21 mars au 19 avril du Calendrier Républicain, c'est la germination des graines, enfin ici plutôt de la révolte, qui sourd depuis de nombreuses années, qui n'attendait qu'une impulsion, celle d'un jeune idéaliste épris d'idées socialistes, à l'heure de la multiplication des syndicats ouvriers pour contrer les actionnaires et le Capitalisme grandissant. C'est la grève, qui devient, au fil des mois, véritable révolte, violente, viscérale, comme un cri de souffrance contenu depuis bien trop longtemps face à ce monde qui s'enrichit sur le dos des ouvriers, mais qui se terminera, sans surprise avec Zola, tragiquement.

C'est en somme un grand roman, mêlant comme toujours à la perfection réalisme cru et poésie épique, en une description d'un monde qui va toujours plus vite, en dévorant toujours plus fort, celui qui oeuvre à son évolution. Une description tellement juste, et toujours aussi actuelle.
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Je réclame la 6eme étoile sur Babelio !
Chef d'oeuvre qui prend immédiatement la pole position dans mon coeur parmi les 13 premiers romans des Rougon Macquart que j'ai lu à ce jour.
Je n'en ferais pas une chronique, cela me semble totalement inutile et puis face à ce monument les mots me manquent forcément.
Un texte qui malheureusement résonne toujours autant en 2022.
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"Après Les Indes noires, j'ai relu Germinal,
Chef d'oeuvre lu trop jeune et digéré fort mal.
Peinture émouvante du labeur des mineurs,
De leur vie si ingrate et injuste, de leur moeurs,
Sous terre, chez eux, en grève, on suit tout un coron,
Sans oublier ses ingénieurs et ses patrons.

Récit écrit à l'aune des mines d'Anzin,
C'est ainsi un roman réaliste à l'extrême,
Où nul détail n'est épargné, presque voisin
Du reportage, auquel s'ajoutent tout de même
Un souffle épique et plus puissant que la misère,
Les émois d'une fille, d'un homme et d'une mère.

On entre dans Germinal au Nord, à Montsou,
En suivant d'Étienne Lantier la longue errance.
Voué par Zola au meurtre, à l'ivrognerie,
Il devient chef de la révolte malgré lui,
Fleuron portant du communisme l'espérance,
Après l'échec social et l'anarchisme fou.

Des mineurs on voit les parangons, les Maheu,
Se tuant à la tâche à travers tous les âges,
Les parents, les enfants, les jeunes, les aïeux.
Autour d'eux, des ménages malheureux surnagent :
Le noir capitalisme est ainsi au complet,
Montrant de l'industrie la triste renommée.

Germinal est un texte aux multiples facettes,
Naturaliste, politique, engagé, de fait.
Dénonçant l'injustice d'une société
Indifférente et méprisant l'humanité,
C'est la terrible pensée d'un peuple en éveil,
C'est des hommes la soif de devenir pareils.

Roman parlant d'amour comme d'égalité,
Tous deux sont avortés, refoulés, bafoués.
Les maris sont dans leur droit en battant les femmes,
Les enfants sont des bouches à nourrir, sans âme,
Et l'espoir terminal de tous ces pauvres hères
Rappelle à coup sûr Les Raisins de la Colère. »

Émilie – Apprentie Bibliothécaire
Lien : http://www.paulinedeysson.co..
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Je lis la saga des Rougon-Macquart dans l'ordre chronologique de parution.
Cette suite romanesque, qui a aussi valeur de documentaire historique et sociale, tant son auteur s'est attaché à enquêter longuement, comme le journaliste qu'il est aussi, me passionne littéralement.
Bien sûr, certains livres ont marqué mon esprit plus que d'autres : La fortune des Rougon, l'assommoir, Nana, au bonheur des dames, pot bouille. Mais, germinal laissera une trace indélébile dans ma mémoire.
Les conditions de travail des mineurs, hommes, femmes et enfants. La très grande pauvreté, le plus complet dénuement dans laquelle vivent ces familles dans leurs corons. Et puis, le mépris, l'aveuglement de la bourgeoisie qui exploite et vit outrageusement du travail de ces forçats. le mur de l'incompréhension, même parmi ceux qui manifesteraient quelques empathies, finissent par pousser les ouvriers à la colère, à la révolte. Les longues semaines de grève, accentuant encore la misère et la famine des « gueules noires », n'apportent aucune solution dans le règlement du conflit. Face à l'intransigeance de la direction, les grévistes pacifiques se transforment en émeutiers et investissent les carreaux des mines, provoquant la réaction armée de la troupe occupant les lieux.
Plusieurs ouvriers trouvent la mort. La révolte est matée. L'instigateur Etienne Lantier, porteur d'espoir d'un possible changement est devenu le responsable de ce drame. Il reprend sa route, les mineurs « redescendent » et tout recommence : l'exploitation, la misère, immuable.
Comme Victor Hugo l'est au misérables, Emile Zola est, à tout jamais, associé à son oeuvre la plus marquante : Germinal dont le titre fût choisit parce qu'il évoque cette période révolutionnaire mais aussi le germe des graines au printemps.
Le jour des obsèques du grand défenseur des causes perdues !!! les « gueules noires » viendront lui rendre hommage en criant « Germinal !!!! Germinal!!! »
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