"Leçons d'un tueur" de Saul Black : n'ayez pas peur !
Saul Black - pseudonyme de l'écrivain britannique Glen Duncan - signe "Leçons d'un tueur" aux éditions Presses de la Cité. En savoir plus : http://bit.ly/1DzXfKX Repérer, traquer, tuer,...
La capacité du monde à continuer pesait lourd sur mes épaules ; il produisait un jour singulier après l'autre, il faisait éclore guerres et conversations, il donnait naissance à des bébés sanglants et gobait les morts en silence.
L’inconscient collectif humain ne le supporte pas, il ne supporte pas la pensée que les choses continuent à jamais, alors il a décidé (inconsciemment, collectivement) de mener la planète à sa fin.
L'éco-apocalypse ne doit rien au hasard ; c'est au fond un stratégie de l'espèce.
Les grands espaces rapetissent les dieux américains : Elvis, John Wayne, Marilyn, Charles Manson, JFK ne sont dans ces immensités que des nuages fragiles qui se déchirent sur un néant bleu infini.
Tout le monde n'a pas la tête assez solide pour le supporter, les Etatsuniens en sont conscients. Poussé par l'intuition collective, ils se rassemblent sur les côtes.
( Le Vatican vous dirait que les Limbes, c'est fini. N'en croyez pas un mot, elles sont toujours pleines d'idiots et de morts-nés. Pas marrant comme endroit.
Les monstres disparaissent lorsque l'imagination collective cesse d'en avoir besoin. La mort d'une espèce de ce genre n'est qu'une évolution du programme psychologique commun. La bête que recèle tout homme restait autrefois cachée dans le noir, reniée. La transparence de l'histoire moderne a rendu cette dissimulation impossible : nous nous sommes vus dans les camps de concentration, les goulags, la jungle, les champs de mort de Cambodge, nous nous sommes reconnus dans les lectures des annales du crime. La technologie a allumé les projecteurs et personne ne peut plus méconnaître les faits : la bête est superflue. C'était nous, tout du long.
On a longtemps expliqué le faible pourcentage de femmes infectées d'une manière très romantique : la possession d'une matrice était sensée conférer à ces dames une douceur qui leur rendait tout simplement insupportable la férocité d'un coeur de lycanthrope. Les garous du beau sexe se suicidaient sans doute en nombre étourdissant, affirmait la mâle idiotie.
La première pleine lune venue, les malheureuses se transformaient, dévoraient un être cher, se révélaient incapables de vivre, écrasées sous le fardeau de remords, et s'en allaient discrètement avaler dans un coin une boucle d'oreille en argent.
Comme l'a si bien dit ce grand boche de Kant, masturbateur chronique à face de carlin, l'être humain est enfermé dans les limites du temps et de l'espace.
Qu'est-ce que ça peut-être énervant quelqu'un qui sait tout, hein?
[...]
Dieu n'a qu'une réponse à tout ce que vous pourriez bien avoir envie de Lui dire - que votre frère est en train de mourir du sida, par exemple, et que vous Lui seriez sacrément reconnaissant de vous donner un petit truc sympa pour vous distraire. Il n'a qu'une chose à vous répondre : Oui, je sais.
Dans mon CV à moi, la naïveté brille par son absence.
Ami lecteur, je l'ai mangé.
Trois heures environ après avoir décidé de n'en rien faire.
(au sujet du nombre de personnes envoyé en enfer)
Jamais je n'aurais penser atteindre les quatre-vingts pour cent. franchement. On ne parlait que de ça en Enfer, vous pensez bien, on trouvait ce résultat fantastique - "huit sur dix. Compris ? Je n'accepterai pas moins. Il faut travailler la terre, mes petits, et travailler dur...".
Mais honnêtement, je me serais contenté de cinquante pour cent. Merde, quoi, je me serais estimé heureux avec vingt pour cent. C'était ça mon ambition. Deux sur dix.
Ça aurait suffi à contrarier Papy. Vu les chiffres aujourd'hui, il doit être carrément fumasse.