La Roseraie des Cultures et des Arts - 8ème édition
Table ronde : "Des artistes aux Singulières destinées"
Invité(e)s :
- Alain Paucard, Écrivain.
Titre de son intervention : « Une figure de la France emblématique, Jean Gabin ».
Livre « La France de Jean Gabin », aux Éditions Xénia 2016.
- Thierry de Carbonnières, Acteur.
Titre de son intervention : « Savoir saisir le moment ».
Livre « Saluts et applaudissements », aux Éditions Riveneuve 2016.
- Anca Visdei, Auteure et metteur en scène.
Titre de son intervention : « Rencontres avec des personnes remarquables dont Jean Anouilh ».
Livre « Jean Anouilh-une biographie », aux Éditions Fallois, 2012.
- Philippe Lorin, Peintre, illustrateur, dessinateur.
Selection Titre de son intervention : « Légende d'un poète éternel ».
Livre « Chez Brassens - Légende d'un poète éternel », aux Éditions du Rocher, 2015.
Modérateur : Laurent Desvoux-D'Yrek, Professeur de français, président de l?Association du Verbe Poaimer.
http://www.laroseraiedescultures.fr/edition2016/mb-table-ronde-2-Des-artistes-aux-Singulieres-destinees.html
Association "La Roseraie des Cultures et des Arts" le 3 septembre 2016 - Moulin de la Bièvre
Salon du Livre et des Arts de L'Haÿ-Les-Roses
http://www.laroseraiedescultures.fr
Réalisation : M.D'E
+ Lire la suite
Un air burlesque, moitié tarte à la crème moitié mélo, plane sur l'assemblée.
MARINA :
Pauvre Vincent… On en est tous là : on se vendrait volontiers… pourvu qu'un étranger veuille bien nous acheter. On a essayé d'abord de vendre nos industries mais Katia et deux ou trois autres excités ont hurlé : "nous ne vendons pas notre pays"... et plus personne n'a voulu l'acheter. Désormais, le peuple, qui a un solide bon sens, lui, se vend par pièces détachées… Tu connais un acheteur pour une femme médecin à demi folle avec deux vieux parents et un adolescent délinquant à charge… ?
Il n'y a que Shakespeare et toi à féliciter.
(p. 16)
Toc, nous ne sommes pas dans le monde des choses qu'on mérite mais dans celui des choses qui, tout simplement, arrivent.
La lecture est embuée d'émotion car, quel que soit le copiste, fougueux et vindicatif ou maniaque et pointilleux, on y trouve toujours ce mélange d'extrême violence et d'infinie douceur. Ailleurs aussi il y a des sentiments mais jamais de tels extrêmes. La nostalgie de ce pays est la nostalgie de la passion dévastatrice et vitale…
LE CLIENT RAISONNABLE :
C'est n'importe quoi…
LA CLIENTE FATALISTE :
… ça l'a toujours été : c'est l'espace balkanique qui veut ça…
Le congrès a duré trois jours. L’admiration un peu moins. On m’a demandé de lire mes textes dans notre langue. J’ai protesté : J’ai traduit mon texte en français ! Il est important que vous sachiez de quoi je parle.
Tu vas être étonnée. Ils m’ont répondu : Nous préférons vous entendre lire dans votre langue, nous aimons sa musique, comme la flûte de Pan, le violon tzigane. Moi : Mais vous n’allez pas comprendre ce que je veux vous dire ! Eux : Nous imaginons : la belle plaine du Danube, les chars tirés par les bœufs, les costumes folkloriques, vos si belles danses populaires ! Vous savez ? Nous connaissons et aimons votre pays. Nous avons passé une semaine à un congrès d’écrivains héros du peuple au bord de la mer Noire.
J’ai donc lu en roumain. Que personne ne comprenait dans l’assistance. Qu’ils ont trouvé splendide et « tellement slave » ! Je les ai déçus en leur précisant que nous parlions la seule langue latine de l’Est. J’ai dit à une consœur marocaine qu’il ne manquait plus qu’une chose : qu’ils me demandent d’interpréter une mélodie populaire à la flûte de Pan. Elle m’a confié que le plus sérieusement du monde, les organisateurs l’avaient priée d’exécuter une danse de son pays. Il s’agissait de la danse du ventre. Cela tombait bien : elle est homosexuelle et féministe.
Don Giovanni : Quel plaisir trouve-t-on à s'étourdir avec un bon vin ? Ou à se gaver de gâteaux nageant dans la crème Chantilly. Le temps passe plus agréablement, donc plus vite. Il faut huiler avec des plaisirs le char grinçant et hésitant du temps…
KATIA :
Mais quelle révolution, pourquoi une révolution ? Nous étions tous si bien avant : c'était dur mais il y avait des lois. Si on les respectait rien de mal, ou presque rien, ne pouvait vous arriver… des lois souvent pas écrites mais tout le monde les savait puis, tout d'un coup : des coups de feu, une société bouleversée, des incendies et le monde a basculé. Aujourd'hui, plus personne ne sait où il est, de quel côté, plus personne ne sait qui il est… il y a des divorces pour des raisons politiques, des parents qui dénoncent les enfants, des gens de valeur qui se retrouvent sans travail, sans même une tribune pour s'exprimer…
BIANCA (se met à rire) :
Excusez-moi... excusez-moi : c'est nerveux… (rit) c'est Katia. […]
A Paris, l'autre jour, on m'a présenté quelqu'un dans un dîner. On m'a dit : tenez, c'est un Roumain, comme vous. Alors l'autre, une gueule de stalinien orthodoxe, enfin : le type n'était pas responsable de sa tête, il me toise longuement, il ne serre pas ma main tendue, il dit juste d'un ton péremptoire et soupçonneux : "Vous êtes Roumaine ? Pourquoi je ne vous ai jamais vue aux manifestations devant l'ambassade ?" (elle se remet à rire) Comme si la place d'un Roumain était obligatoirement … (elle rit)
Long silence…