Il souffla un rond de fumée parfait et ferma les yeux.
Un bref ricanement lui échappa. Il aurait aimé connaître toutes les langues du monde pour parvenir à décrire ce qu’il ressentait et ce qu’était Geneviève. En imagination, il revécut l’instant où il l’avait sentie voler en éclats entre ses bras, la sensation qu’il avait éprouvée quand elle l’avait accueilli en elle. Il se sentait bête, neuf et béni.
Il soupira et se dit qu’il devrait se contenter de songer que c’était beau.
Et voilà. Il avait été battu à son propre jeu. Il était assez grand pour le reconnaître. Comment était-ce arrivé ?
Comme la rougeole, l’amour est dangereux s’il survient tard dans la vie.
Lord Byron avait dit cela, et le fait que Moncrieffe puisse trouver de la sagesse dans les mots de ce maudit imbécile prouvait bien qu’il traversait une mauvaise passe. Mais il comprenait. Avant, il était trop jeune pour vraiment comprendre ; il avait aimé et s’était marié parce que c’était ce qu’on attendait d’un jeune homme. Mais à présent, il comprenait qu’on puisse écrire des choses comme : « Elle marche, pareille en beauté à la nuit. »
Parce Que la poésie était un rempart contre les émotions brutes. Elle distillait celles-ci sous la forme d’une musique supportable, permettait de les apprivoiser petit à petit.
Il avait connu le genre de perte qui vous faisait sombrer dans le néant comme si vous tombiez du ciel. Il avait senti le vent de l’abîme siffler derrière lui.
Alors oui, il avait peur. Bien sûr qu’il avait peur.
Parce qu’il risquait de connaître une nouvelle perte.
Mais cela ne faisait pas de lui un lâche pour autant.
Quand il regagna sa chambre, ce ne fut pas pour dormir. Car il savait désormais ce qu’il allait faire.
Et aucun homme n’aurait pu dormir la veille d’un tel événement.
Il était si proche qu'elle discernait les nuances d'argent dans ses prunelles, les petites rides au coin des yeux.
Dès que ses lèvres touchèrent les siennes, elle ne vit plus rien. Ses paupières se fermèrent tandis que son baiser explosait en elle.
Presque douloureux dans son indicible douceur.
Puis se fut fini. Rouvrant les yeux, elle comprit pourquoi. Tom avait reculé d'un pas, son regard était aussi sombre que l'étain. L'espace d'un instant, ils demeurèrent pétrifié. Se jaugeant mutuellement.
D'un seul baiser plutôt chaste, ils avaient réussi à se dépouiller de faux-semblant, de tout badinage, de tout ces petits subterfuges dont ils usaient pour se protéger l'un de l'autre. Ils se retrouvaient à égalité. Et tout aussi incertains l'un que l'autre.
Ce fut Tom qui, le premier, surmonta cette incertitude. Se rapprochant de la jeune femme, il prit doucement son visage entre ses mains. Puis attendit. Il ne respectait pas les règles du jeu, en effet, car il l'obligeait à choisir.
La plupart des hommes trahissaient leur nervosité en jouant avec les boutons de leur veste ou en pianotant contre leur jambe. Celui-ci était calme, mais pas figé. Il possédait cette tranquillité née de l’habitude d’observer.
Et l’objet de son observation, c’était elle.
Il y avait cultivé une capacité à transformer des moments de vide abyssal en diversions. Il ne pouvait s’empêcher de noter des bagatelles, ce minuscule grain de beauté qui attirait le regard sur cette lèvre supérieure en forme de demi-cœur.
Elle tourna vivement la tête vers lui. Ses yeux étaient immenses, remarqua-t-il, et d'un bleu si foncé qu'ils semblaient presque violets. Les coins de sa bouche s'affaissèrent et sa lèvre inférieur se mit à trembler sous l'effet du choc.
Quand il s’agissait des femmes, il n’était vraiment qu’un sot. Jamais il n’aurait imaginé que cette délicate poitrine drapée d’azur pouvait abriter un cœur aussi froidement mercantile. Il était impressionné, déstabilisé, fasciné, et inexplicablement soulagé. Désormais, il verrait les femmes sous un autre angle, scrutant dans leur regard les rouages de leur esprit et dansant avec elles comme s’il avait une grenade entre les mains. Et surtout, il s’intéresserait davantage à ce qu’elles lui tairaient qu’à ce qu’elles lui diraient
Jonathan avait appris nombre de choses sur les indigènes et leurs fléchettes empoisonnées en discutant avec son frère Miles, célèbre explorateur qui avait failli se faire dévorer par une tribu de cannibales dans les mers du Sud.
Naturellement, il s’était plus intéressé aux beautés exotiques à la peau sombre qui allaient seins nus et faisaient preuve d’un tempérament particulièrement affectueux. Néanmoins, d’autres éléments étaient restés gravés dans sa mémoire. Jonathan n’oubliait jamais rien de ce qu’il apprenait.
Chase n’était pas un homme loquace. Ce qu’il voulait exprimer, il l’exprimait avec son corps. Que ce soit pour faire la guerre… ou l’amour.
Comment vous expliquer... Je reste dubitative face à ce livre. Je n'est pas perçu la petite touche qui fait que j'ai envie de dévorer le bouquin. Les personnages sont "vides" ou du moins ils n'ont pas de saveur. L'intrigue est compliquée et les personnages ne sont pas bien identifiables. Bref, cette lecture ne laisse un goût d'inachevé et je ne pense pas lire le tome 2.
On prétendait qu’il excellait sans effort dans tout ce qu’il entreprenait. C’était faux. Il se focalisait sur ce qu’il voulait maîtriser et y consacrait toute son énergie, méthodique et implacable, qu’il s’agisse de mathématiques, de cricket, d’escrime, de tir au pistolet. Ou d’une femme. Il obtenait effectivement toujours ce qu’il voulait, mais il veillait à cacher le travail acharné qu’il lui avait fallu fournir pour cela. Il connaissait depuis toujours le pouvoir de la subtilité et de l’effet de surprise. Chez les Redmond, c’était inné. Au bout du compte, s’il avait le choix, Lyon déciderait probablement de rester lui-même.
Il avait cependant de plus en plus l’impression d’être un taureau de concours condamné à rester enfermé dans un enclos doré, du moins jusqu’à ce que son père, Isaiah Redmond, juge que le moment était venu pour lui de féconder la génisse aristocratique qu’on lui aurait au préalable sélectionnée.