A. Zavarelli

L’anonymat me donnait la liberté de me confesser auprès de quelqu’un que je ne pouvais pas voir.

Ivan a des couilles, mais pas de neurones. Il a reçu trop de coups sur la tête, et à ce stade, il ne lui reste plus que les muscles. Je trouve qu’il aurait sa place dans un cirque plutôt que dans la mafia russe.

J’ai appris à être combative et à ne jamais m’excuser d’exister. Il m’a montré que je n’étais pas obligée d’être la plus grande ni la plus coriace, mais que je devais savoir frapper là où ça fait mal.

Hors de question. Je n’aimais pas prendre des femmes pour cible, et désolé pour ce que je vais dire, mais j’en avais marre de Vasily et de son merdier. Une semaine sur deux, une nouvelle personne était condamnée à mort.

Elle est terrifiée à l’idée de me perdre, et ce n’est pas seulement parce qu’elle a peur. C’est tellement plus. J’ai envie de mettre un genou à terre et de faire d’elle ma femme, mais je ne veux pas que ce soit dans cette situation.

C’est difficile de ne pas être ému lorsque je vois cette bague. C’était le même bijou que mon père a donné à ma mère, il y a longtemps, pour symboliser leur amour. C’est une bague des années 1920, avec un saphir bleu qui brille comme au jour où il le lui a offert, ou du moins, c’est ce que j’aimerais croire.

C’est à ce moment-là que je jouis, alors que ses coups de reins redoublent, que ses doigts caressent mon clitoris. J’enfouis mon visage dans un oreiller et c’est là qu’il s’enfonce jusqu’au fond, qu’il commence à me baiser. À me baiser pour de vrai.
Je vais d’orgasme en orgasme, déboussolée, l’esprit embrumé. Quand je le sens palpiter en moi, quand il se vide enfin, je jouis à nouveau, une dernière fois. Il se laisse tomber de tout son poids sur moi, comme s’il était épuisé, lui aussi, comme s’il m’avait tout donné.

Je comprends maintenant. Je comprends pourquoi il doit mourir. C’est un poison. Il détruit tout ce qu’il touche…

Je ne vais pas me dégonfler et me cacher. Ce que nous faisons en ce moment, c’est te protéger, toi et Josh, et me laisser assez de temps pour rassembler des preuves. Pour trouver quelque chose sur mon oncle qui mettra un terme à tout cela.

L’avortement n’avait jamais été une possibilité pour moi. Je comprenais que certaines femmes choisissent cette voie, mais je ne l’avais même pas envisagé. Peut-être à cause de mon enfance, bien que l’inverse soit plus logique. En tout cas, je savais déjà que je pourrais l’aimer. Peut-être l’amour qui m’a manqué durant toutes ces années a-t-il été décisif. Je voulais avoir mon propre enfant et lui donner tout l’amour du monde, combler tous ses besoins. Comme si c’était la chose la plus naturelle. Ça devrait l’être.

Il y avait une femme. Il y a très longtemps. Vasily l’utilisait comme un pion. Elle a eu une liaison avec Gleb Mikhailov et faisait remonter les infos à Vasily. Ce plan marchait très bien jusqu’à ce que Vasily se heurte à des problèmes avec elle. Elle a essayé de se cacher, mais il l’a trouvée quelques années plus tard. Il voulait que je lui règle son compte. Mais je ne savais pas qu’elle avait un enfant. À l’instant où j’ai vu ça, j’ai fait marche arrière. Enfin, aucune importance. Il l’a quand même fait buter.

J’ai fait ce qu’on m’a dit de faire pendant de longues années, mais quand j’ai commencé à poser des questions, Vasily n’a pas apprécié. Il aime que ses soldats soient sourds, débiles et aveugles.

Quand on risque à n’importe quel moment de devoir prendre ses affaires et tout abandonner, il n’y a aucun intérêt à s’entourer d’objets.

S’il y a bien une chose que je sais à propos de Maxim, c’est qu’il aime son whisky. Je doute que cela ait changé. C’était un putain d’ivrogne.

Je détruirai le monde de Vasily si c’est ce qu’il faut pour garder ma famille unie. S’il veut nous pourchasser, ce sera moi qui le pourchasserai à la place. Je n’arrêterai pas tant que je n’aurai pas détruit sa vie et pris autant que ce qu’il m’a enlevé.

Je crie quand le plaisir me traverse, et il plaque sa bouche sur la mienne, absorbant mon cri tout en gémissant lors de son dernier coup de reins. Quand il s’immobilise, je le sens jouir, je sens la pulsation rythmée de son sexe qui se vide en moi. Lorsqu’il a terminé, alors que nous sommes épuisés, il laisse tomber sa tête sur mon cou, le front en sueur à cause de l’effort. Je m’accroche à lui et écoute nos respirations conjointes,qui retrouvent peu à peu leur cadence normale.

Il me regarde pendant un long moment, puis m’attire à lui et me rend mon baiser. Je glisse mes mains jusqu’à la boucle de sa ceinture et la détache. J’ouvre la braguette de son jean et passe ma main à l’intérieur pour empoigner son sexe, le caresser. Il devient raide dans mes mains alors que je regarde ses pupilles se dilater et son regard s’assombrir.

Je ne suis pas la petite femme que tu laisses pieds nus et enceinte dans la cuisine, Lev. Je ne le serai jamais. Qu’est-ce que tu fais avec ça ? Pourquoi est-ce en ta possession ? Et que vient faire ma mère dans cette histoire ?

Quand je découvre ce qu’il contient, un frisson soudain me parcourt. Mes mains deviennent moites et le sang cogne dans mes oreilles. Je n’entends même pas le bruit sec du verrou. Je ne l’entends pas entrer, obsédée par la photo dans le dossier. Celle de la femme aux cheveux roux et aux yeux vert clair, avec le sourire le plus éclatant que j’aie jamais vu.
Ma mère.
Elle devait avoir dix-huit ou dix-neuf ans sur ce cliché. Elle était magnifique. J’en avais une plus petite, mais identique, il y a longtemps, or après que la famille George m’a accueillie, elle a disparu. Bien sûr, ils ont nié l’avoir prise, et j’ai perdu la dernière partie de ma mère.
La revoir à présent, dans un format plus grand, ni froissée ni usée, la voir sourire de cette façon-là, ça me fait mal au cœur.
— Qu’est-ce que tu fais, Katerina ?
Je sursaute en poussant un petit cri. Le dossier glisse de mes genoux, éparpillant les pages sur le sol.

Les secrets exercent un pouvoir sur nous, et d’une certaine manière, quand on les prononce tout haut, qu’on les dit à un autre être humain, on retrouve son pouvoir. Je ne m’en étais pas rendu compte jusqu’à l’autre soir.