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Citations de Adèle Van Reeth (148)


Pourquoi la vie possible est-elle plus séduisante que la vie réelle ? Le possible est commode : il se tient à égale distance du réel et de l’ailleurs. Il ouvre la porte et n’en franchit jamais le seuil. De loin, on ne voit pas les croûtes ni les cicatrices, on ne sent pas l’odeur de renfermé, on n’entend pas le hoquet ni les soupirs. La vie ordinaire est une vie de détails, une vie vue de très près, de beaucoup trop près, ça colle, on s’englue, et on finit par ne plus bouger. À l’inverse, le possible nous donne la vie sans l’ordinaire, la vie en mieux, vécue de loin. Les amants du possible sont allergiques au microscope.
La vie possible n’a rien d’extraordinaire. Elle ne contient ni pouvoirs magiques ni super-héros. Mais c’est une vie filtrée, sans miroir, où les heures ne traînent jamais en longueur et les réveils sont toujours de bonne humeur, une vie dans une maison qui ne se salit pas, un corps qui ne vieillit pas, de l’argent qui ne manque pas et du sommeil qui répare pour de vrai. Pour les endeuillés du possible, la vie ordinaire est l’ultime défaite, ce que le réel a de plus réel – et donc de plus repoussant.
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« Cinquante choses à ne pas oublier de faire avant de mourir», selon Georges Perec. «Aller dans les Ardennes », « ranger une fois pour toutes sa bibliothèque », « une promenade sur un bateau-mouche ».

Y a-t-il des gens à qui la certitude de n'avoir plus que quelques mois à vivre donne envie de ranger leur bibliothèque?

Mon père n’achetait que des bandes dessinées, et notait chaque nouvelle acquisition dans un petit carnet. Au cours des deux années de sa maladie, il a vaguement émis le souhait de référencer la totalité de sa bibliothèque, mais face aux deux mille BD sagement rangées sur les étagères du salon, il a préféré se rasseoir sur le canapé et s’endormir devant son ordinateur en pleine recherche Google sur les boîtes de chicorée qu'il collectionnait.
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En fait, dans le deuil il y a toujours un double deuil. Il y a la mort de la personne aimée, et la mort de cette part de soi qui lui était consacrée.
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Adèle Van Reeth
La sexualité est cet univers où tous les rôles sociaux s’annulent.
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Que va-t-il rester de ce que je n’aurai pas décrit ? Mais te décrire c'est aussi te tuer encore un peu, on ne parle jamais aussi bien des gens qu'une fois qu'ils sont morts, car alors leur image se fixe et ils n’ont plus rien de nouveau à nous proposer, ce qui nous laisse du temps pour parler de ce qui a été sans être perturbé par ce qui va arriver. Ils ne sont plus là, donc nous avons désormais le temps de trouver les mots justes sans prendre le risque d’être contredits ni démentis par un événement futur.
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L’ambivalence de notre rapport à l’existence se trouve dans la cigarette. La cigarette détente et la cigarette carburant, le plaisir de savourer une suspension des activités et le dégoût de savoir que nous sommes en train d'accélérer le pas en direction de la mort. Celui qui fume sait ce qu'il fait, il regarde la mort bien en face et s'invente un goût pour ce face-à-face. Vous ne fumez pas ? Comme la vie doit manquer de saveur... Fumer, c’est jouer avec le feu, c’est s’ôter des minutes de vie tout en intensifiant celles qui restent. Vivre moins, mais vivre plus.

C'est aussi le dernier degré de l’aliénation, l’asservissement à un poison auquel on veut faire l’amour plusieurs fois par heure. Il y a une érotique de la cigarette. Comme il y a une métaphysique du filtre, et une éthique du fumeur.
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Le drame, c'est l'eau tiède. La vie qui continue après la fin du film et dans laquelle il ne se passe rien. Les secondes qui se suivent et se ressemblent, d'année en année. On en viendrait presque à la souhaiter, la fin, pour qu'enfin il se passe "quelque chose". Interrompre le flux par tous les moyens, quitte à y laisser sa peau. En pourtant, ça continue.
Comment endurer la durée ?
La nouveauté est dans mon ventre.

(p. 12)
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Adèle Van Reeth
Le démon de Nietzsche ne dit pas autre chose : imaginez que votre vie recommence exactement telle que vous l’avez vécue, un nombre incalculable de fois. Seriez-vous prêts ? Sinon, que voudriez-vous changer ? que vous manque-t-il pour pouvoir dire oui ? Le confinement est notre démon : il nous pose la même question. Rassurez-vous : non seulement le démon n'existe pas, mais le confinement ne durera pas.
(extrait du magazine Le 1 du 15/04/2020)
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Adèle Van Reeth
La philosophie est également dans le cinéma, dans la littérature, dans les choses du quotidien. C'est aussi le goût de poser des questions, une forme de curiosité qui consiste à interroger ce qui paraît évident. C'est pour ça que la philosophie marche très bien à la radio.
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Adèle Van Reeth
Philosopher, c’est le goût de s’étonner, d’ouvrir des portes dont on ne soupçonnait pas l’existence, de formuler les questions qui nous préoccupent.
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Cette année encore la nature va renaître mais je n'en ai pas envie. Recommencer, une fois de plus, l’arrivée du printemps, le froid qui s’étire un peu plus longtemps que prévu, le faux départ du printemps, les fleurs sont déjà sorties mais il gèle à nouveau et les récoltes sont perdues, recommencer les matins qui durent plus longtemps, «ne ratez pas votre matinée de printemps», lançait Jankélévitch à ses étudiants de la Sorbonne, c'est une invitation à saisir le temps qui passe et qui ne dure pas, ne ratez pas votre matinée de printemps comme vous pourriez rater un train, c’est une seule fois par jour, le lendemain sera un autre jour et celui-là vous serez passé à côté à tout jamais.
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«  L’inconsolable nous porte vers la consolation comme le désir vers son asservissement .
Mais quand à cet inconsolable originaire s’ajoute une tristesse nouvelle dont on sait qu’on ne reviendra pas, que se passe t - il ? »
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«  C’était fini. La fin tant redoutée et tant attendue. La libération du calvaire et la tristesse pour l’éternité. […..]
Une séparation sans retour . C’est le débat des plus jamais . Plus jamais tes bras autour de moi. Plus jamais les trois notes que tu sifflais en rentrant du travail. [ ——]
Qu’est-ce qu’il va rester ?.
Qu’est ce que je vais garder ? .
Qu’est ce qui va changer ? » ..
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« En fait, dans le deuil il y a toujours un double deuil. Il y a la mort de la personne aimée, et la mort de cette part de soi qui lui était consacrée. »
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...le seul moyen de supporter l’existence, c’est de s’étourdir dans la littérature comme dans une orgie perpétuelle. Le vin de l’art cause une longue ivresse car il est inépuisable. C’est de penser à soi qui rend malheureux.
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Une séparation sans retour. C'est le début des plus jamais. Plus jamais tes bras autour de moi. Plus jamais les trois notes que tu sifflais en rentrant du travail. Plus jamais les petits sourires en coin et les blagues qui ne faisaient rire que moi, plus jamais tes mains sur la guitare, plus jamais tes yeux sur mon fils, plus jamais les "je t'aime", plus jamais la musique avec toi, plus jamais ton numéro qui s'affiche, plus jamais tu ne prendras de mes nouvelles, plus jamais je ne pourrai prendre des tiennes. Tout ce que je ferai à partir de maintenant, ce sera sans toi.
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« Tuer l’ange du foyer » C’est ainsi que Virginia Woolf nomme le premier geste à faire pour une femme qui désire écrire. L’ange du foyer, c’est la femme qui donne chaque jour sa vie en offrande pour maintenir l’harmonie domestique. (Page 146)
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Comment être de plain-pied dans le monde, s’y sentir chez soi, sans être aspirée par l’extérieur, sans renoncer à ma singularité , à ce qui fait que je ne suis pas pierre, ni plante, mais quelqu’un, ça demande du travail, du défrichage , et parfois, on n’en a tout simplement pas envie, on voudrait renoncer, pourquoi ne pas simplement se laisser être, devenir objet, inerte, laisser le temps faire son œuvre en se contentant de faire le nécessaire pour survivre ? Se foutre la paix, faire l’autruche, se gaver d’ordinaire et attendre que ça passe sans trop souffrir ? (pages 32-33)
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Mais mon père se meurt. Mon père meurt à moi. Et moi je continue, je vis, sa vie n'est pas la mienne, mais je manque de tomber. Mon père se meurt, le temps s'étire et s'épaissit. Toute tentative de consolation est vécue par moi comme une offense faite à ma douleur. Ne me proposez pas d'esquiver ce mur que je vois venir : je le percuterai à toute vitesse la tête la première, les yeux grands ouverts.
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Puisque l’existence humaine est à la fois provisoire et continue, puisque rien ne dure et que le temps ne se retient pas, la tranquillité n’est pas de ce monde. Et c’est tant mieux. Que le dard de l’intranquillité vous pique encore et encore! Demandez-vous, au moins une fois, si le nombre d’années parcourues, les épreuves et les angoisses endurées, si vous avez vécu tout ça pour vous réfugier dans la mauvaise foi de l’émerveillement ordinaire, sans jamais vouloir fouiller en dessous
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