Citations de Alex Bell (85)
C'est alors que l'eau du bain se mit littéralement à geler autour de moi. La surface de l'eau se recouvrit peu à peu de glace avec un crépitement sonore. La morsure glaciale me brûlait le corps, j'avais l'impression qu'on m'arrachait la peau, comme si je n'étais plus constituée de chair et d'os, mais d'une porcelaine qui pourrait se briser à tout moment.
Stella devait admettre qu'ils formaient un étrange groupe. Ce n'était pas tous les jours qu'on voyait quatre explorateurs, quatre fées de jungle, une chasseuse, une apprentie sorcière, un chameau, un sac de grenouilles caoutchouteuses flap-flop, un tyrannosaure nain et un morse avec un casque colonial.
— Vous êtes une princesse des glaces ! lui rappela le miroir d’une voix sévère.
Stella serra les poings.
— Je ne veux pas être une princesse. Je veux être une exploratrice !
— Nul ne peut changer sa destinée, répliqua le miroir.
— Bien sûr que si. On ne naît pas avec une destinée ! On choisit soi-même ce qu’on veut devenir.
— Oh, ma chérie, c’est une très mauvaise idée de jalouser les autres à cause de leur peau. Ou de leurs possessions, de leur chance, de leurs victoires. Cela ne sert qu’à devenir amer. L’homme — ou la femme — qui passe son temps à comparer sa vie à celle d’autrui ne sera jamais heureux.
— Mais je suis différente de tous les autres. Personne n’a les cheveux ou la peau blanche. On m’a traitée de fantôme ! Pourquoi est-ce que je ne suis pas normale ?
Felix l’avait prise dans ses bras et l’avait embrassée sur les cheveux.
— J’ai essayé d’être normal, autrefois. Cela m’a rendu très malheureux. J’ai donc arrêté, et depuis, je vais très bien. Être comme tout le monde n’est pas un exploit, Stella. Cela vaut beaucoup mieux d’être différent, crois-moi.
Il avait deux ans que je l'avais eu, ce qui lui en faisait huit maintenant, ce qui commençait à faire beaucoup pour un berger allemand. Il avait parfois une démarche plus raide, et quand maman l'avait amené chez le vétérinaire le mois dernier, on lui avait dit qu'il avait un début d’arthrite. On lui avait suggéré de lui laisser prendre sa retraite et de trouver un nouveau chien d'assistance. Comme si nous pouvions le renvoyer à l'organisme d'où il venait, tel un bagage encombrant.
- Pas question, avais-je répondu. Je ne veux pas d'autre chien, je veux Bailey.
- C'est juste que, bientôt, il ne pourra plus faire toutes ces choses dont tu as besoin, avait insisté le vétérinaire.
- J'ai juste besoin qu'il soit mon ami. Je m'en fiche s'il ne peut plus m'aider. Je me débrouillerai... comme avant. Bailey est un membre de notre famille. Je ne vais pas le renvoyer. Il penserait que je l'ai abandonné.
La dernière fois que j'avais vu mon père, c'était le jour de l'accident et le revoir maintenant était bizarre. Une part de moi voulait courir vers lui et une autre voulait s'enfuir, et les deux envies irrépressibles étaient sur le point de me déchirer en deux au milieu de la rue, comme si je n'étais qu'une poupée de papier. C'est comme ça quand on aime quelqu'un qui vous fait peur, je suppose le pire sentiment au monde.
Jem pleurait, mais c'étaient des pleurs silencieux il me disait tout le temps que je devais apprendre à pleurer sans bruit, sans sanglots, râles ou gémissements, car cela énervait papa. Le problème, c'est que tout énervait papa. Parfois, c'étaient les voisins ou la météo, ou le ciel ou la mer. Et toute cette colère, c'était un peu comme une quatrième personne vivant avec nous une personne dangereuse qui dormait la plupart du temps et qu'il ne fallait surtout pas réveiller.
Je sais qu'elle sera ravie. Et si elle n'est pas toute seule, son imagination arrêtera peut-être de s'emballer. C'est plus facile d'imaginer des choses quand tu es seule dans le noir.
Je ne sais pas ce que c'est, mais l'auberge n'est plus juste hantée, elle est en colère.
Quelque chose me frôla le pied et je me dis que ce devait être le gant de toilette et ne bougeai pas. L'eau m'arrivait aux chevilles, maintenant, et le gant était coincé sous mon pied gauche. Mais quelque chose me refrôla le pied droit. Et le talon. Que pouvait-il bien y avoir dans l'eau ?
Je fronçai les sourcils et ouvris les paupières.
Je baissais le regard, m'attendant à voir le gant, et peut-être une bouteille de gel douche.
Mais non.
L'eau me parut noire et durant un instant de confusion je me dis qu'on avait dû y verser de l'encre. Et puis, je compris enfin ce que j'avais sous les yeux.
La baignoire était remplie d'ailes.
Remplie d'ailes, remplie d'ailes, remplie d'ailes.
Pas d'oiseaux,d e becs ou de serres, juste des ailes trempées, en loques saccagées, avec des filets de sang tourbillonnant entre les plumes alors qu'elles flottaient mollement à la surface.
Une fois que vous avez vu la sorcière, il n'y a pas de retour possible. Une fois que vous avez vu son visage, tout est fini.
J'avais utilisé toute une boîte de clous. Ces derniers n'étaient plus enfoncés dans le bois, mais répandus au sol, à mes pieds. Je me tournai vers Shell, penchée au-dessus de la balustrade.
- D'accord, écoute, je ne vais pas me mettre en colère, mais dis-moi la vérité. Est-ce toi qui les as enlevés ?
- Avec quoi ? Mes dents ? répondit-elle sarcastique. Je n'y ai pas touché, Jem, ils sont tombés tout seuls.
Je me penchai pour ramasser un clou et le faire rouler entre mon pouce et mon index. Peut-être que la dilatation du bois les avait vraiment fait tomber.
- Il y a quelque chose dans la cave, continua-t-elle. Je le sais.
- Mais mamie, dis-je gentiment, tu as toujours raconté que les aubergistes de Cornouailles inventaient des histoires de fantômes pour attirer les touristes.
- La plupart font sans doute ça, répondit-elle, peut-être tous, je ne suis plus si sûre. Mais je sais que le Waterwitch est différent. Il y a... une présence mauvaise. Oh, je sais à quel point ça doit paraître fou, je sais vraiment. Mais si tu avais vu ce que j'ai vu ces derniers mois, Emma, tu ne douterais pas un seul instant.
Il y avait une sirène me montrant les dents. Et ce n’était pas une jolie fille à queue de poisson mais bien un prédateur aux crocs acérés, la bouche grande ouverte, me crachant presque sa haine depuis la rampe de bois.
J’aime la pluie, dit-elle en secouant la tête. Particulièrement quand elle a le goût de la mer.
Ceux qui comme nous travaillent en mer savent que les bateaux ont une âme. C’est un fait historique avéré que des hommes ont été assassinés sur le Waterwitch et de toute évidence, le bois s’en souvient.
Le navire était représenté lors d’une tempête, la lumière argentée de la lune brillant sur l’écume sombre qui tourbillonnait sur les flots. La figure de proue était une femme au long cheveux noirs portant une robe blanche. Aux premiers abords, elle semblait belle, mais en l’observant de plus près, il y avait quelque chose d’un peu fou dans son regard. Ses yeux étaient trop grands, vides et un peu trop écartés. Et ses lèvres étaient peintes de telle sorte qu’il était dur de dire si elle souriait ou grimaçait....
Elle passa devant nous en courant, titubant à moitié. Je ne voyais pas ce que je pouvais faire pour l'aider, ni même si je devais l'aider, mais le temps que je réfléchisse, Piper avait grimpé les marches du perron et disparu dans la maison.
Une nuée de mains blanches jaillissant du sable noir, leurs doigts minuscules repliés telles des griffes. Cela me rappela instantanément le rêve que j'avais fait lors de la première nuit que j'avais passée ici, et cette sensation d'être pincée, griffée, agrippée de toute part.
Lilia planta son couteau dans son steak, et il y eu un bruit sourd lorsqu'il rentra en contact avec un os.
C'est là qu'elle se mit à crier.
C'était un cri strident, à faire froid dans le dos, et qui me donna la chair de poule.