Citations de Alex Sol (118)
Après tout, il y avait déjà un cadavre parmi eux. Assane repensa à Charlotte. Rashed l’avait laissée boire parce qu’elle avait vomi. Peut-être se trompait-il. Il l’espérait. Néanmoins, une idée parasite tournait en boucle dans sa tête : si c’était le cas, si Rashed commençait à faire des pronostics sur qui allait pouvoir sortir en vie de cet endroit, n’aurait-il pas raison ?
Lorsqu’on enseigne, ce n’est pas seulement son domaine de prédilection, il faut pouvoir transmettre large.
Fréquemment, lorsqu’il entendait le rongeur tenter une sortie, il se levait, tapait du pied devant la trappe et revenait s’asseoir à son poste d’observation.
J’ai vu trop de pourritures comme lui retourner dans les rues, voire ne pas être inquiétées… Je ne pouvais pas le permettre… Je devais l’arrêter. Les affaires de viol sont déjà les pires à mener, alors si c’est pour voir un salopard de plus s’en sortir…
Vous avez toujours été la plus sévère, vous l’avez reconnu vous-même. Une femme à votre position, une femme seule, célibataire, sans enfants, vous vous deviez d’être parfaite parce que les hommes ne vous laissaient aucune chance.
En jouant au justicier ! Vous avez enfreint la loi et VOUS avez permis à un criminel de s’échapper ! Il existait d’autres moyens de le coincer et vous le savez ! Mais vous ne pouviez pas attendre, vous vouliez ce type derrière les barreaux le plus vite possible. Résultat des courses ? Il a probablement violé des dizaines de femmes qui n’en ont même pas conscience depuis et il en a tué une autre !Rashed secoua la tête.
Il a fait partie des suspects interrogés. Mais on n’avait trouvé aucun ADN étranger sur elle, et il n’y avait ni lésions vaginales ni annales. L’enquête n’avançait pas, on savait que le non-lieu était presque inévitable. Enfin, « on »… Je n’étais pas encore impliquée, mais David suivait l’affaire. Il était chargé des relations avec la police.
Coline Gauthier ne se souvenait pas d’avoir été violée. Elle s’est réveillée un matin, dans un squat délabré. Ses vêtements étaient déchirés et elle avait tous les symptômes d’un empoisonnement au rohypnol. Elle se rappelait être arrivée à une soirée organisée par je ne sais quel DJ à la mode à ce moment-là dans un lieu interlope. Enfin, Coline se souvenait d’avoir pris un verre avec ses deux amies et puis rien… le trou noir… Tout le reste était flou.
Normal ou pas, Assane trouvait cela dégueulasse et effrayant. Toutefois, il dépassa sa peur et son dégoût et avança de nouveau. Face à lui, Stéphane fit de même, le visage figé par l’horreur. Il était évident que l’ex-juré se forçait pour faire bonne figure.
Assane savait qu’il n’avait rien à craindre d’un cadavre, il ne pouvait rien lui faire, après tout, mais tout de même, il y avait quelque chose d’effrayant à l’idée de toucher cet homme. Il avait été enlevé comme eux, mais ne s’était jamais réveillé. Et s’il avait été le plus chanceux de tous ? Sa mort avait peut-être été une délivrance, tel un acte de charité du destin. Quoi que les autres s’apprêtaient à vivre, David Kwang en avait été épargné.
C’était étrange, cette sensation qu’il ressentait en posant les yeux sur lui. Il était terrifié par sa mort alors qu’ils n’avaient jamais échangé un seul mot.
Le fait de pouvoir à nouveau bouger et se déplacer lui avait donné assez d’espoir pour refouler son angoisse. C’était bien, pour elle. Pour lui, pouvoir bouger ne changeait rien, ne pas savoir pourquoi ils étaient là et ce qu’ils devaient faire était sa plus grosse source d’anxiété. Après tout, si une bouteille et un seau avaient été préparés pour eux, c’était qu’il était déjà prévu qu’ils pourraient se détacher.
De l’argent ? Dis-nous ton prix ! Allez ! Je peux payer ! Je peux payer pour eux tous s’il le faut ! J’ai les moyens ! Si tu as fait des recherches sur moi, tu le sais forcément. Annonce ton prix ! Je paierai !Malgré l’éclat de colère que plusieurs d’entre eux jugèrent impulsif et idiot, ils se mirent tout de même tous à espérer que la proposition de paiement de l’ex-juré fonctionne.
Il avait soif, il se sentait épuisé et en même temps, il avait envie de tout détruire. Ce nom, il avait tout fait pour ne plus l’entendre, tout fait pour se forcer à ne plus y penser, et voilà qu’il était enfermé avec des personnes ayant un lien avec lui. Pourquoi ?
Il devait se forcer à penser, à décortiquer chaque seconde, à analyser tous les détails, même les plus superflus. Il y avait forcément quelque chose.
Ce nom… Il espérait ne plus jamais avoir à l’entendre de sa vie et voilà qu’il déclenchait toutes sortes de choses alors qu’ils étaient prisonniers.Prisonniers ? Enlevés ? Séquestrés ? Qu’étaient-ils au juste ? Que se passait-il ? Pourquoi eux ?
Assane se tendit et sonda l’homme à l’allure militaire du regard. Maintenant que ses yeux s’étaient habitués à l’obscurité, il reconnaissait ses traits. Oui, il l’avait déjà vu. Cet homme l’avait interrogé à de multiples reprises. Il avait avoué avoir joué la carte du délit de faciès en raison de la couleur de peau d’Assane : noire.
Tout était flou, brumeux, comme si on avait effacé de sa mémoire les dernières vingt-quatre heures. Combien de temps était-il resté inconscient ? On ne pouvait pas droguer quelqu’un plus de quelques heures, n’est-ce pas ? Ou peut-être que si…
Apercevoir un objet avec lequel il pourrait se défaire de ses liens : un couteau, une paire de ciseaux… ou même une arme ! Quelque chose qui lui permettrait de se défendre et de s’enfuir !
Il devait enlever le bandeau de ses yeux, il devait s’en défaire. Non. Il valait mieux attendre, réfléchir. Était-ce une bonne idée ? Il avait été kidnappé ; si son assaillant savait qu’il pouvait le voir, il pourrait décider de le tuer pour protéger son identité. C’était bon signe qu’il lui ait bandé les yeux, n’est-ce pas ?