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Critiques de Alfred Pacquement (9)
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Comment travaille Pierre Soulages (précédé du P..

Une toile blanche de 200 X 160 cm accrochée au mur. De chaque côté, les palettes du peintre : deux tables de verre et l’une de marbre rouge. Et puis un large espace dans lequel l’artiste évolue comme un danseur sur une piste entre chaque application de peinture, avançant, reculant, quatre pas en arrière, quatre pas en avant, ses bras brassant l’air en grands mouvements amples, mettant en scène tout son corps dans un ballet d’improvisation où la toile devient partenaire d’une sorte de tango, tantôt amie, tantôt rivale, tantôt se donnant, tantôt se dérobant.

Nous sommes le 27 mars 1961, il est 16h07. Alors qu’habituellement il travaille de nuit dans une complète solitude, Pierre Soulages, le peintre abstrait que l’on a surnommé « le peintre du noir », a accepté que son ami, le journaliste, écrivain et scénariste Roger Vailland (1907-1965) assiste à un moment intense d’acte de création, l’éclosion en direct d’une œuvre d’art.

Pierre Soulages ouvre les portes de son atelier ; quatre heures de travail intense et méticuleux pendant lesquelles Roger Vailland, captivé, observe et retranscrit ce qui est en train de naître sous ses yeux.



Comblé, le lecteur peut alors assister à cet espace d’intimité magique où la main qui peint se met en mouvement, « enlève, pose, découvre », jusqu’à donner ces effets de matière, ces sillons, ces zébrures moirées, ces hachures nimbées d’éclat qui jouent avec la couleur noire et créent des jeux d’ombres et de lumières.

Luminosité dans la profondeur de la couleur noire, c’est là tout l’art de Pierre Soulages qui révèle le noir éclatant, le noir-lumière, l’au-delà du noir, « l’outre-noir » dans la multiplicité chromatique, et prouve qu’il est bien aussi un peintre de la couleur et pas seulement le peintre du noir.



« C’est ce que je fais qui m’apprend ce que je cherche », « ne jamais perdre de vue l’essentiel, il faut savoir sacrifier », « il faut savoir rejeter tout ce qui plaît trop. La vraie peinture, c’est de continuellement renoncer »…c’est aussi au détour de phrases, de formules percutantes et par la force de la parole que le lecteur appréhende l’univers du peintre, sa vocation d’artiste, sa volonté de ne pas faire de la peinture un objet politique ou un concept philosophique. « Cet objet ne dit rien : c’est avec des mots qu’on dit ».

La peinture de Pierre Soulages est destinée à être regardée et ne délivre aucun message. Elle n’engage que l’artiste vis-à-vis de son art et de lui-même. Là est sa signification.



Trois parties composent ce petit ouvrage à la couverture noire comme l’univers pictural de Soulages, trois textes qui permettent, en peu de pages, de découvrir un peintre à son travail, sa gestuelle, son comportement face à la toile.

La jolie préface d’Alfred Pacquement, l’organisateur en 2009 de la rétrospective de l’œuvre de Soulages au Centre Georges Pompidou, est une entrée en matière intéressante des deux articles suivants signés Roger Vailland.

Le premier, paru dans la revue L'Œil en 1961, décrit les étapes de la création et les méthodes de travail de l’artiste, où le hasard, entre retouches et renoncements, tient une large place.

Le second, daté de Février 1962, est une réponse au journal Clarté dans lequel des étudiants communistes s’interrogent sur la place du peintre dans la société : «pour ou contre Pierre Soulages, peintre abstrait ?

Participe-t-il à notre époque ou se réfugie-t-il dans les hautes sphères spéculatives? Peinture d'initiés ou aventure poétique ?»

A ce "procès du peintre », Vailland répond avec fougue et conviction, en comparant le peintre à un sportif de haut niveau, en argumentant son texte comme un chroniqueur sportif et en faisant valoir que cet artiste pour le moins original et novateur ne tient pas à « dire » mais à « montrer ». Nulle revendication chez Soulages, juste un face-à-face entre une toile et un homme dans un simulacre de combat pour accéder à l’Art dans son essence abstraite et contemplative. « Pierre Soulages est un champion ».



Livre mini, tout petit par sa taille mais grand par l’univers artistique qu’il renferme…

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Soulages

Pierre Soulages vient de nous quitter le 25 Octobre 2022 à l’âge de 102 ans. Il était et est encore l’une des figures emblématiques de la peinture abstraite contemporaine, un des plus grands représentants de la peinture informelle, connu et reconnu à l’international (exposé au MOMA ou à la Tate Gallery notamment). On le connaissait pour ses noirs et en le regardant sourire, en l’écoutant au travers d’entretiens, de vidéos dans son atelier ou sa maison auprès de sa femme Colette, on le découvrait lumineux.



J’ai eu la chance de voir l’exposition ‘’Pierre Soulages, le maître de l’outrenoir’’ au Louvre qui, à l’occasion de son centième anniversaire en 2019, lui a rendu hommage dans le magnifique salon carré. J’avais choisi un samedi, en nocturne, où l’ambiance est forcément particulière et a fait de cette visite un moment encore plus exceptionnel. Ressentais-je comme une sorte d’intimité avec les autres visiteurs qui partageaient avec moi l’attrait et le respect pour cet homme ? En tous les cas, je me plaisais à le croire et, dans les regards que j’échangeais avec certains, j’y voyais le même sourire et la même émotion à pouvoir contempler les œuvres de ce peintre magnétique.

C’est une de ces expositions qui restera pour moi parmi les plus intenses émotionnellement.



Il est alors important pour moi de lui exprimer toute mon estime aujourd’hui, quelques jours après son anniversaire -le 24 Décembre-, et de lui dire à quel point il fait partie des peintres contemporains que j’admire.

Durant l’exposition, j’ai pris le temps de m’immerger dans ses tableaux, où certains ne voient que du noir, où d’autres arrivent à apercevoir tant de nuances, toutes ces lignes de lumière… (pour ma part, il m’aura fallu quelques années pour découvrir la subtilité du travail du peintre). J’ai joué avec les distances, les points de vue, je suis restée comme en apnée devant certaines œuvres gigantesques, intimidantes. Des œuvres qui appelaient à la contemplation, à une certaine intériorisation. J’ai cherché toutes les nuances, les reflets, les palettes, les jeux de surfaces lisses et striées, le cœur battant de plus en plus au rythme de l’émotion comme suivant les rythmes des coups de pinceau de l’artiste.



Je n’aurai pas pris le temps d’aller visiter son musée à Rodez, sa ville de naissance, alors qu’il me tenait à cœur de le faire de son vivant. Mais savoir que je vais y aller un jour, tout comme j’irai admirer ses vitraux réalisés en 1994 dans l’abbatiale de Conques, me redonne le sourire. Ce serait presque comme un pèlerinage artistique puisque c’est à l’âge de 12-13 ans, lors d’une visite scolaire à l’abbaye bénédictine Sainte-Foy de Conques, qu’est née sa vocation picturale. Pendant des décennies, Soulages travaillera la matière, les contrastes, les associations avec le noir et d’autres couleurs (comme le bleu ou le blanc), avec des cycles marquant l’évolution de son travail avec la couleur noire qu’il affectionne et bien-sûr la lumière.



En pensant à Pierre Soulages, il est peut-être encore plus émouvant de savoir que le poète Christian Bobin vient de nous quitter également, le 23 Novembre, un mois après Soulages. J’avais lu ‘’Pierre’’, le récit de voyage de l’écrivain en train durant la nuit de Noël 2018 pour fêter l'anniversaire du peintre à Sète. Récit qui était surtout le témoignage de son admiration pour le peintre. Aujourd’hui, deux artistes français inestimables nous ont quittés. Deux artistes qui savaient mettre leur cœur et leur âme dans leurs créations. Et toute une palette de lumières. Deux artistes dont j’aime à penser que leurs œuvres sont éternelles.



Ce présent ouvrage d’Alfred Pacquement et Pierre Encrevé, spécialistes et passionnés de l’œuvre de Soulages, a été édité à l’occasion d’une exposition au Centre Pompidou -Paris (fin 2009-Début 2010). Les textes d’auteurs et historiens d’art permettent de mieux appréhender le parcours et l’évolution artistique du peintre. Les représentations des tableaux, quant à elles, permettront à tous les amateurs d’art, tous les amoureux de Soulages de se (re)plonger avec émotion dans l’œuvre picturale de cet artiste prolifique. Et de profiter encore et encore de toute sa lumière.



Aujourd’hui, en pensant à Soulages, mon cœur est triste, le vague à l’âme outrenoir.







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Henri Michaux

Cela ne ressemble à rien de connu. L'oeuvre picturale de Michaux est unique.

Au commencement était la ligne.



Le mouvement, la ligne le tempo.

Entrer dans l'univers visuel de Michaux est bien une expérience hors du commun.

Hors de soi sans aucun doute, hors de lui également.

D'une intériorité fébrile, féconde , Michaux le fut toute sa vie.



Une recherche, une exploration, un hors d'ici, de là, de soi et de tout autre.



Innombrable, multiple affolement d' « afoulement », déversement renversement.



Les mots sont étroits pour décrire ce que l'on voit, c'est un récit bouleversant.

Car Michaux bouleverse.



Pinceaux, tubes, bouteilles, encre, gouache, huile, pastel, aquarelle.

Il n'a pas appris à peindre. Il n'a pas appris la technique. Il est comme un enfant, il  apprend en découvrant.

Libre de tracer, de jeter, de repousser, de couler, d'aborder, de frotter, de gratter, de répandre, de « goutteler ».

Poète reconnu, confirmé, admiré, c'est à la lecture de Maldoror qu'il se décide à écrire, et c'est assez tard, vers la quarantaine qu'il lui prend l'urgence d'explorer ses mondes intérieurs.



C'est devant l'oeuvre de Paul Klee qu'il a ressenti l'immanence de ce qu'il devait entreprendre.

Klee, Ernst, Chririco, ...voilà qu'il se met à entendre.



La peinture, le dessin le « déconditionnera ».



« comme moi la ligne cherche sans savoir ce qu'elle cherche, refuse les immédiates trouvailles, les solutions qui s'offrent, les tentations premières, se gardant « d'arriver », ligne d'aveugle investigation ».



Il n'a pas de méthode, il expérimente. Il n'a rien à prouver, à démontrer. Il se moque de faire preuve.

Il trace, il avance, il explore. Il vit ses expériences. Il est à la rencontre, à la recherche.



« Je ne peux apprendre que de moi-même, même si les sentiers ne sont pas visibles, pas tracés, ou n'en finissent pas, ou s'arrêtent soudain ».



il « dessine pour être embarrasser à nouveau...sans intention particulière »



On ne parle pas d'imaginaire, on parle d'apparition.



Plusieurs décennies à se regarder dans le papier , y fouiller, y fendre, s'y élancer, s'y frotter, s'y plonger, ...



« Foule infinie = notre clan

Ce n'est pas dans la glace qu'il faut se considérer.

Hommes, regardez vous dans le papier. »



Là se situe sa ligne de force.

Par onde, par flaque, par tâche, il s'infiltre, il entre, il tente son passage.



Les dessins et peintures de Michaux alertent par leur mouvement, leur cadence, leur cri, leur défigure, par leur déflagration, leur arrachement, leur déchirement. Leurs énergies.



« Devant moi comme si elles n'étaient pas à moi…

sorties de l'obsession, de l'abdomen de la mémoire, de mon tréfonds, du tréfonds d'une enfance qui n'a pas eu son compte et que trois siècles de vie maintenant ne rassasieraient pas , tant il en faudrait, tant il en faudrait. 



« Nées les jours de pluie et sous les plafonds bas et du piétinement des besognes à faire qui ne seront jamais faites, et du pressentiment d'un avenir d'emmerdeurs qui approche et de minus habens têtus. ….Devant moi, sans le savoir…

Portées sans trêve par les vagues infimes du vivant rayonnement des êtres qui se débattent. - Leurs peines, leurs grimaces, leurs angoisses aussitôt, partout télévisées...Devant moi...Abordant tumultueusement dans ma chambre solitaire. Devant moi en grand silence qui peine ou m'épouvante et lutte sourdement pour mon autonomie. » , - les têtes Peintures, 1939.



Un langage visuel, la tentative de formulation d'une écriture picturale.



Un entour trop étroit... Son enfance souffre.

L'enfant est différent, il le sait.

Il doit partir. Partir, trouver ceux qui lui ressemblent, ceux qui savent qu'il est d'un ailleurs. .

Il en est convaincu. Il prend le large. Il quittera la Belgique, le monde lui est peut être possible.



Le voyage est sa feuille de route.

Fonds noirs, Alphabets, mouvements, dessins mescaliniens, dessins de désagrégations,, puis viendra la réagrégation.



Fond noir bourgeonnant de vie.

On ne parle pas d'esthétisme. Aucune règle établie. Pas d'école, aucun -isme ne peut lui correspondre.



La nuit remue.

De la nuit il entend le murmure frémissant de vie.



Ailleurs, hors de soi...



Prince de la Nuit…



« Prince de la nuit, du double, de la glande

aux étoiles,

du siège de la Mort,

de la colonne inutile, de l'interrogation suprême ;



Prince e la couronne rompue,

du règne divisé, de la main de bois.



Prince pétrifié à la robe de panthère.

Prince perdu. »

( Peintures, 1939)





Fond noir, caméra obscura cérébrale. Michaux déroule ses images.

«  En somme , c'est le cinéma que j'apprécie le plus dans la peinture. »



C'est un écran qui devient « boule de cristal ».

Voyant, explorateur voyant. Navigateur il le fut jusqu'à s'en arracher la chair de l'encre.



Michaux était poète par la plume et le pinceau, par les cellules ouvertes de son cerveau, par l'iris de ses mots, par l'innocence de ses mains.



Peu de portrait existe de Michaux. Là n'était pas sa mission.

Il ne confond pas intériorité et intimité. L'intimité se livre aux clichés,

son intériorité seule libère la pensée.



Ses oeuvres furent exposées pour la première fois en 1937. Mais il fallu du temps pour que son oeuvre picturale ne soit plus regardée comme un travail secondaire à son activité littéraire.



«  le déplacement des activités créatrices est un des plus étranges voyage en soi que l'on puisse faire. »



La nuit remue.



Sismographies d'un espace intérieur. « Vibrances d'illusions subies ».

Échos sémiologiques.

La mescaline, alcaloïde tiré du peyolt, le fera «  prisonnier d'un atelier du cerveau », introspection « insupportable, intolérable ». Et pourtant ses expériences stupéfiantes lui permettront d'explorer la profusion d'un habité dans lequel il se verra intensifié.

Sillon, colonne, vaisseau, plaie, passage, béance… Cheminement contractile, vibratile, violent, électrique, échographique, insaisissable. Phénoménal.

Ether, LSD, opium, hachisch, alcool,mescaline, psilocybine…Le navigateur cherche la clé pour passer les rugissants. Il traverse, aucune sirène n'arrêtera pourtant son voyage. Il ne sera jamais dépendant.

Aquarelle, encre, gouache, huile, pastels, lithographie, crayons.

L'outil est au service du navigateur. Et non l'inverse.



Il aurait voulu filmer ses voyages, les rendre, les donner, plus exactement, plus fidèlement .

En pouvoir rendre la vitesse, le rythme, les cadences, mais la technologie n'était pas encore assez développée.

Un film « images du monde visionnaire » d'Eric Duvivier tentera la rédaction de ce carnet de voyage. Intéressant. Insuffisant.

Alors ces dessins, ces encres, ces peintures, même figées, images arrêtées, nous livrent les plus justes, fantastiques passages.



« Je crois donc montrer, ayant plusieurs fois pendant des heures été en sa présence alors prodigieuse, je crois montrer l'arbre sans fin, l'arbre de vie qui est une source, qui est, piqueté d'images et de mots et proposant des énigmes, l'écoulement, qui, sans interruption, même d'une seule seconde, traverse l'homme du premier instant de sa vie au tout dernier, ruisseau ou sablier qui ne s'arrête qu'avec elle. » , Paix dans les brisements, 1959.



Alfred Pacquement nous permet à travers les pages de ce livre d'entrer, un peu, dans l'univers foisonnant, trouble, et extrêmement vivant, d'Henri Michaux.

Les oeuvres picturales questionnent, les textes bouleversent.

Ses intérieurs lointains tendent vers l'infini.

Invitation à progresser, à se soulever, à entreprendre.

Plus loin, hors de notre clos que nous pensons trop vite défini.

Lucidité fut le geste majeur de Michaux.

Lucidité comme cette déflagration d'une blancheur violente qui apparaissait lors de ses explorations mescaliniennes.

Éclatante, pénétrante et déchirante comme un papier de cristal offrant au poète la vision épiphénomènale d'un éternel commencement.



Michaux , comme un Big-bang.

Au commencement était la ligne.

Depuis, le cerveau de l'Homme ente son verbe.



Astrid Shriqui Garain

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Soulages

Le maître de l’outrenoir s’est éteint à l’âge de cent deux ans. Outrenoir, un mot inventé par l’artiste en personne pour caractériser « un autre champ mental que celui du simple noir », un vaste continent de créativité qu’il a commencé à explorer dès 1979, année charnière dans sa carrière et son œuvre.



Dans mon roman L’Enfant-Mandragore, l’un des personnages centraux évoque en ces termes le travail de Soulages dès l’après-guerre et durant ses trois premières décennies de création : « Ses brous de noix sur papier, ses goudrons sur verre, ses huiles noires sur fond clair rehaussées d’éclats bleus ou bruns, tracent des symboles kabbalistiques et des architectures imbriquées qui empruntent à la figure de l’arbre, et qui sont moins des emblèmes du monde intérieur de l’artiste que des portes ouvrant sur un processus de confrontation avec la forme et la matière. Ses toiles sont des arènes silencieuses où l’ombre de la cendre lutte avec la lumière du renouveau. »



Vient ensuite la plongée dans l’outrenoir, l’irruption de ces peintures monolithiques et monumentales où l’artiste sculpte dans la matière acrylique résineuse, alternant noirs d’ivoire mats ou brillants, des stries, sillons et crevasses capturant ou reflétant la lumière. Ces « Outrenoirs » lui offriront une consécration mondiale.



Le présent catalogue, édité à l’occasion de la grande exposition monographique de 2009 au Centre Pompidou, débute par une série de textes signés par différentes personnalités du monde de l’art. Ces chapitres retracent le parcours de l’artiste, les grandes étapes de sa carrière, l’évolution de sa démarche et de ses techniques jusqu’à l’émergence d’un art nouveau entièrement axé sur les profondeurs insoupçonnées du noir. Vient ensuite un catalogue des œuvres de celui qui a été ami avec l’écrivaine Nathalie Sarraute et le peintre franco-chinois Zao Wou-Ki. L’ouvrage se termine avec une chronologie illustrée de 1919 à 2009. Un bel ouvrage édité par le Centre Pompidou, pour découvrir ou redécouvrir le maître des ténèbres lumineuses.
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Claude Viallat

Si une œuvre est bien repérable entre toutes, c’est sûrement celle de Claude Viallat avec son curieux motif d'éponge peut-être, apparu en 1966 dans ses oeuvres et répété au fil des bâches, des draps, des tissus, des rideaux ou d'autres toiles récupérées, où certains pourront comme moi, voir plutôt ou reconnaître la forme d’un osselet ou alors celle plus improbable d'un haricot.



« Mais en art il faut bien entendu se méfier des apparences » comme le rappelle judicieusement Alfred Pacquement dans le catalogue de cette exposition coproduite par la ville de Montpellier et celle d’Annecy en 1997 avec le soutien de la DRAC du Languedoc-Roussillon et qui présente des œuvres de Claude Viallat réalisées entre 1990 et 1996. Ce motif pourrait bien en cacher d'autres autrement dissimulés.



Claude Viallat est né à Nîmes en 1936 et a fait très brièvement partie de ce que l’on raffole, il faut bien le dire, d’appeler en France : une avant-garde. Membre fondateur, pour ce qui le concerne du groupe « Supports-Surfaces » dont il s'écarte dès 1971.



Nombreux parmi les artistes appartenant à cette mouvance, étaient ceux qui lorgnaient du côté de l'Amérique et décidèrent de la reformulation, plus ou moins radicale, des moyens de leur peinture en se proposant de la sortir des limites du "cadre" imposé depuis la Renaissance, rien de moins : exit donc la composition, la figuration ou autre narration. Se réapproprier les éléments primordiaux du tableau tels que la toile ou le châssis (le support et la surface) afin de reconquérir l’espace pictural, tel était le programme. La peinture pour ce qu'elle est. Un retour aux fondamentaux ? Oui mais lesquels ?



Claude Viallat a pour sa part fait le choix de se débarrasser du châssis et d’explorer par la toile les possibilités infinies d'une forme unique, et souvent monochrome, ressassée à l'envi. Option minimaliste qui n'est pas, loin s'en faut, sans contraintes. Son geste d'artiste l'a conduit à traiter le sol comme un nouveau support, à reconsidérer de fond en comble les questions d'accrochage et d'espace. A force de rapprocher ou d'assembler ses toiles, de les tendre ou de les pendre, de les poser au sol bout à bout ou de les rapiécer, d'accoupler ses motifs ou de les séparer, la polychromie s'est déployée.



Claude Viallat est aussi un récupérateur invétéré. Cordes, ficelles, osier, stores, tentes, sacs ou parasols, les matériaux s'imposent en toute liberté pour ce qu'ils sont et s'ils tendent à désacraliser les oeuvres, n'ont pas non plus vocation à les rabaisser. Bouts de toile arrimés à des cerceaux de barriques prennent soudain la forme d'étranges et fragiles entités. La forme initiale suscite d'autres mises en formes, peinture ou sculpture, la création s'est ainsi transmuée. Elle existe pourtant, elle est là, à quoi bon la répertorier. Car, loin d'être enfermées dans un formalisme stérile, les oeuvres en mouvement de Viallat ont su, au fil des ans conquérir des territoires insoupçonnés, c'est ce que montre si bien cet excellent catalogue.



Une rétrospective est consacrée actuellement à Claude Viallat au Musée Fabre de Montpellier jusqu'au 2 novembre, où l'on peut découvrir aussi la partie figurative de son oeuvre, liée à son goût pour la tauromachie.

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Soulages au Louvre

Je ne suis pas un grand fan de Pierre SOULAGES même si il est reconnu comme "grand artiste" avec un musée de son vivant. Le livre de l'exposition, il faut l'admettre, est un bel objet, avec les tranches des pages noires. On y retrouve des photographies de l'oeuvre et du travail du peintre, un tracé de l'exposition mais également des clichés particulièrement intéressants de son atelier.
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Soulages

Alfred Pacquement qui vient tout juste de quitter la direction du MNAM Centre Pompidou (fin déc. 2013) y avait aussi organisé pour les 90 ans du plus célèbre artiste français vivant cette magnifique rétrospective qui fit courir les foules fin 2009-début 2010. Comme nul autre artiste avant lu, Pierre Soulages donne à voir "la lumière de la couleur noir".

Pour les amateurs, il faut aussi aller voir les vitraux qu'il a réalisés pour la basilique de Conques - soit quelques sept de recherche pour mettre au point le matériau translucide des vitraux d'abord avec Saint Gobain, puis en Allemagne
Lien : http://www.pierre-soulages.c..
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Comment travaille Pierre Soulages (précédé du P..

Un texte très court mais captivant et sans doute unique sur la création "live" d'une toile abstraite par un maître. On voit pratiquement le tableau apparaître devant les yeux.
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Comment travaille Pierre Soulages (précédé du P..

Ce tout petit livre fort élégant (édité aux éditions Le Temps des Cerises) abrite un texte sidérant de Roger Vailland sur l'art de Pierre Soulages, ce grand peintre de l'abstrait. L'écrivain nous décrit avec minutie toute la préparation et la conception d'une oeuvre que Soulage réalisa en 1961.

Ce témoignage est absolument à lire pour les amateurs de peinture, mais également à tous les détracteurs de l'art abstrait ! "Le procès de Pierre Soulage" est le parfait complément de ce petit trésor noir.
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