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Citations de Amal El-Mohtar (77)


Je veux être un corps pour toi. Je veux te pister, te trouver, je veux être évitée, taquinée, adorée. Je veux être vaincue et victorieuse : je veux que tu me coupes, m’aiguises. Je veux boire un thé avec toi dans dix ans ou dans mille. Des fleurs poussent, loin sur une planète qu’ils appelleront Céphale, et ces fleurs ne fleurissent qu’une fois par siècle, quand l’étoile vive et le trou noir qui lui correspond entrent en conjonction. Je veux t’en faire un bouquet, cueilli sur une durée de huit cents ans, afin que tu puisses embrasser d’un regard notre engagement tout entier, tous les âges que nous avons façonnés ensemble.
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Je mords dans des pancakes aux myrtilles nappés de sirop d’érable, avec un supplément de beurre ; ce moelleux aéré, l’éclatement des baies sous mes dents, le beurre qui fleurit dans ma bouche. J’explore textures et suavités. N’ayant jamais faim, je ne me jette pas sur la bouchée suivante. Je mange du verre et, tandis qu’il entaille mes gencives, je savoure minéraux, métaux et impuretés ; je vois la plage sur laquelle un pauvre type a tamisé le sable. Les petits cailloux ont un goût de rivière, d’écailles de poisson, de glaciers disparus depuis longtemps. Ils croustillent, craquent comme du céleri. Je partage ces sensations avec d’autres aficionados ; ils m’envoient les leurs en retour, même si ça lague et que la granularité des capteurs reste un problème prégnant. Bref, une manière détournée de dire : j’adore manger.
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J'ai été des oiseaux et des branches. J'ai été des abeilles et des loups. J'ai été l'éther inondant le vide entre les étoiles, enchevêtrant leur souffle en réseaux de chansons. J'ai été poisson, plancton, humus, et ils ont tous été moi.
Mais si je suis maillée dans cette globalité, elle ne me constitue pas entièrement pour autant.
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Elle cherche Bleu. Elle escalade une mangrove qui pousse dans un océan de mercure, des araignées aussi grosses que ses mains lui tombent dessus et chatouillent l’arrière de ses bras, de son cou, avec la légèreté d’une plume. Leurs soies l’interrogent et elle répond à chaque défi par un souvenir de Bleu. Bleu qui tresse des herbes. Bleu qui prend le thé. Bleu, le crâne rasé, qui vient voler Dieu. Bleu qui brandit un gourdin, un rasoir ; Bleu qui enfante des futurs.
Les araignées la marquent de leurs crocs, une manière périlleuse de donner des indications. Mais bien que ce savoir brûle dans ses veines, la femme que devient Rouge ne meurt pas.
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Les mots peuvent blesser, mais ce sont aussi des ponts. À moins qu'un pont puisse également être une blessure ? Pour paraphraser un prophète : " Les lettres sont des structures, pas des événements. Les tiennes me fournissent un espace dans lequel je peux vivre.
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Je ne cesse d’éviter de mentionner ta lettre. J’ai l’impression que d’en parler restreindrait l’effet qu’elle m’a fait, l’amenuiserait. Je ne veux pas faire ça. J’imagine que sous certains aspects, je suis davantage la fille de Jardin qu’elle ne le pense. Même la poésie, qui défait le langage pour lui donner du sens, même la poésie se pétrifie avec le temps, à la manière des arbres. Ce qui est souple, vif, doux et frais s’endurcit, se caparaçonne. Si je pouvais te toucher, poser mon doigt sur ta tempe et me couler en toi comme le fait Jardin… Alors peut-être. Mais cela n’arrivera pas.
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« Chère Bleu…
Je ne peux pas…
Je
Merde
En bref :
Ils savent.
Pas tout. Pas encore. »
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Elle se lève et les brins d’herbe tombent de sa main comme des graines. Elle suit l’hirondelle, la regarde déposer une demoiselle dans le nid avant de s’éloigner.
Elle grimpe, ôte l’insecte des brindilles boueuses, descend d’un bond. Dans le corps en aiguille de l’insecte à damier noir et bleu, elle lit une lettre.
Son attention passe de la demoiselle au désordre qu’elle a causé dans ses pensées, poignées de vert et d’or entassées, inutiles, et elle ne ressent qu’une joie déchirante, tortueuse, quand elle ouvre la bouche pour la dévorer tout entière, ailes comprises.
Des années plus tard, l’ombre d’une Fouilleuse parcourt l’herbe où Bleu était assise. Elle en cueille une poignée, puis se dissout.
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Quand Rouge gagne, il ne reste qu’elle.
Le sang nappe ses cheveux. Elle exhale de la vapeur dans la dernière nuit de ce monde mourant.
(incipit)
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Après une mission, plane un silence grandiose, définitif. Ses armes et son armure se replient en elle comme des roses au crépuscule. Une fois que les pans de pseudopeau ont repris leur place et guéri, que la matière programmable de ses vêtements s'est retissée, Rouge ressemble, de nouveau, vaguement à une femme.
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Une mousse argentée dévore le métal, des fleurs violettes étouffent les fusils silencieux. Si la planète survit assez longtemps, les vignes qui poussent dans les bouches des morts porteront des fruits.
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Elles ont vécu si longtemps sans se connaître, combattant à travers le temps. Elles étaient isolées, ne se parlaient pas, mais chacune a modelé l'autre et a été modelée en retour.
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Je t'aime et je t'aime et j'ai envie que nous comprenions ensemble ce que cela signifie.
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Pour paraphraser un prophète : " Les lettres sont des structures, pas des événements." Les tiennes me fournissent un espace dans lequel je peux vivre.
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Elle déchire l'enveloppe avec son pouce et lit ; dès la deuxième ligne, sa joue est douloureuse, tant elle sourit.
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Après une mission plane un silence grandiose, définitif. Ses armes et son armure se replient en elle comme des roses au crépuscule. Une fois que les pans de pseudopeau ont repris leur place et guéri, que la matière programmable de ses vêtements s'est retissée, Rouge ressemble, de nouveau, vaguement à une femme.
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Je veux te dire, maintenant, avant que tu puisses me prendre de vitesse : Rouge, quand je pense à cette graine dans ta bouche, je m'imagine l'y avoir placée moi-même, j'imagine mes doigts sur tes lèvres.
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La faim que tu décris, cette lame qui saille de la peau, cette érosion semblable à celle d'un versant balayé par les orages, ce vide, tout cela semble aussi beau que familier.
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Toutefois, les guerres regorgent de causes et d'effets, de calculs et d'étranges attirances, a fortiori les guerres dans le temps. Une vie épargnée peut compter davantage pour l'autre camp que tout le sang qu'a fait couler Rouge aujourd'hui. Une fugitive devient reine, scientifique ou pire, poète.
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Les mots sont des abstractions, qui se détachent de la verdure ; les mots forment des motifs semblables à des clôtures ou à des tranchées. Je peux les cacher tant que je les éparpille dans mon corps : lire tes lettres reviens à cueillir des fleurs en moi, un bouton par-ci, une fougère par-là, à les arranger et à les réarranger pour agrémenter une pièce ensoleillée.
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