Citations de Andrea Camilleri (1034)
C’est comme une assurance, il y en a tellement, sauf que celle-là est plus sûre, dans le sens que tu paies pour qu’il ne t’arrive rien et de fait, rien ne t’arrive, alors que si quelque chose t’arrive, avec une vraie assurance, tu risques qu’ils te paient pas.
L’amour réciproque naquit au premier coup d’œil.
La pire jalousie, celle pour laquelle il n’y a pas de remède. Un soir qu’il était
particulièrement de mauvaise humeur, il lui est sorti une phrase que je me rappelle parfaitement : « Tous, ils ont déjà tout eu de Michela, il ne reste plus rien qu’elle puisse me donner à neuf, plus rien de vierge. »
Il y avait aussi la copie d’un « certificat d’existence en vie », abîme sans fond d’imbécillité bureaucratique. Qu’aurait élaboré Gogol, avec ses âmes mortes, devant un certificat de ce genre ? Franz Kafka, s’il lui était tombé entre les mains, aurait pu en tirer un de ses récits les plus angoissants. Et maintenant, avec « l’autocertification », la déclaration sur l’honneur, comment allait-on procéder ? Quelle était la « procédure », pour utiliser un des termes qu’aimaient tant les bureaux ? On écrivait sur un papier une phrase du type « Je, soussigné, Montalbano Salvo déclare exister », on le signait et on le remettait à l’employé idoine.
On marche à la six-quatre-deux ! À la va-comme-je-te-pousse ! À la sans-façon, on fait ! Mais moi je dis : vous en aimez le verso ? Et après on se plaint que les jeunes se droguent, qu’ils volent, qu’ils tuent…
C’est le manque de respect qui fout en l’air l’univers créé. Vous n’étiez même pas né à l’époque de Mussolini. À l’époque de Mussolini, oui qu’il y en avait du respect ! Et si tu manquais de respect, tzac, on te coupait la tête. Je me souviens…
Les femmes donnent des descriptions minutieuses, avec des détails que, à nous, les hommes, ils nous passeraient même pas par l’antichambre de la cervelle, des détails sur ce qu’éprouve une femme pendant qu’elle fait l’amour.
À Montalbano, il vint l’idée que Mimì avait pleuré, dans une crise de repentance. Comme c’était, du reste, la mode : tout le monde, du pape au dernier des mafieux, se repentait de quelque chose. Mais non, rien du tout ! La première chose qu’Augello dit, en fait, ce fut :
— Les yeux, je suis en train de me les escagasser sur les papiers de Nenè Sanfilippo ! Je suis arrivé à la moitié des lettres.
En Sicile, on s’épouse. Les femmes, en disant « je veux m’épouser » veulent dire « je veux prendre un époux » ; les hommes, en disant la même chose, veulent dire « je veux devenir un époux »
Je me trompe toujours avec les noms, mais y suffit que je voie un visage une seule fois à la télé et je me l’oublie plus !
Un beau jeune homme, plein de vie, sympathique. Ce qu’il faisait ? Ce que font les jeunes de son âge quand ils sont libres.
Les murs de cette maison, en papier de soie ils sont ! On entend tout de tout, la moindre chose, ça s’entend ! Et alors, après qu’ils avaient mis la musique que par moments les oreilles m’explosaient, ils l’éteignaient et démarrait une autre musique ! Une symphonie !
— Par où on commence ? demanda Fazio tout en fermant la voiture.
— Par les petits vieux disparus. Le mort est mort et il peut attendre.
Peut-on dire que l’assassinat d’une personne tombe à pic ? Non, jamais : la mort est toujours la mort.
Ne t’abandonne pas trop aux cogitations et travaille, travaille autant que tu peux : il n’y a pas de meilleur remède au malheur de la vie. L’expérience me l’a appris mieux qu’à personne.
Les absurdités de la vie n’ont pas besoin de paraître vraisemblables, parce qu’elles sont vraies. Au contraire de celles de l’art, qui, pour paraître vraies, ont besoin d’être vraisemblables… Il s’ensuit que taxer une œuvre d’art d’invraisemblance et d’absurdité, au nom de la vie, est une ânerie.
Je ne suis pas né petit, et ne puis me contenter de trop peu.
Quelle générosité, et quelle pensée délicate ! Nos parents, mes tout chers, sont vraiment les plus merveilleux parents du monde, et ils méritent d’être adorés à genoux.
Ce que Père vient de faire pour moi est si grand et si beau que désormais, quoi que je fasse ou devienne, je ne pourrai lui payer la millième partie de ma dette. Aussi lui ai-je élevé un autel dans mon cœur, où je le vénère en silence et sans jamais m’en lasser.
L’amitié sicilienne est un art des plus subtils et des plus exigeants, et peut-être conviendrait-il de le désigner par un autre nom : fraternité d’âmes, consanguinité élective… Autour de deux amis siciliens se crée une sorte de cercle magique qui exclut les autres et ne laisse pénétrer ni les affaires du monde, ni même les grands événements de l’Histoire.
« Gratte ton ami là où il se démange » – ou, en termes moins crus, « Comprends ce dont il a besoin et apporte-le lui ». Tel est le devoir de l’amitié.