Payot - Marque Page - Andrew J. Graff - Le radeau des étoiles
Elle adorait sa voix de Texan, évocatrice de thé glacé, de serpent à sonnette et de paysages désolés. A quelques kilomètres de la frontière nord du Wisconsin, un homme originaire du Texas, c'était carrément exotique.
Sur sa gauche, la rivière coulait comme un rai de lumière à travers les arbres. Les conifères se réveillaient, diffusaient leur musc dans la forêt.
Trop de familiarité détruit l'autorité.
L'air était frais. Elle fouilla dans son sac en quête de l'écharpe qu'elle y avait mise. Le cou bien au chaud, sous les étoiles qui dérivaient entre les branches, Tiffany songea qu'elle n'avait pas dormi depuis longtemps. Le remous rythmé de l'eau semblait mettre de l'ordre en toute chose, et elle eut le sentiment étrange d'être exactement à l'endroit où elle était censée être à ce moment précis, flottant sur une rivière à la belle étoile sur une planète qui flottait dans l'espace. Ça lui donnait l'impression d'être une gamine, émerveillée et rêveuse face à un feu de camp.
Le soleil s'était couché, et les lucioles commençaient à s'élever au-dessus de l'herbe, à flotter parmi les pommiers, parlant sans bruit des choses que les lucioles ont à se dire.
Les étoiles étaient immenses dans le ciel, déployaient une carte effrayante de bleus, de verts, de jaunes.
La rivière les portait et les étoiles (...) offraient en effet un spectacle magnifique. Le ciel, incurvé, donnait l'impression d'un bol renversé englobant la terre, piqueté de lumière.
C’était un homme qui pouvait laver le monde avec ses mains, les agiter en l’air pour tout remettre en ordre.
Le soleil était presque couché. Seule une toile de fond rouge et orange brillait dans les interstices de la forêt.
C'est un mystère, ce degré de beauté qu'on peut atteindre, et de médiocrité aussi.