AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Anna Burns (40)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Milkman

L’auteure conte l’Irlande du Nord , elle s’inspire de la période des Troubles dans les années soixante - dix qui ensanglanta la province britannique durant trente années .

Dans ce roman à la première personne , la jeune fille en question n’est jamais nommée excepté par le qualificatif de «  sœur du milieu » .



Grande lectrice , elle lit en marchant , ce qui attire méfiance et quolibets .

Elle agit par réflexe , pense et pense sans cesse , nous emporte dans le flot rigide et agité , très agité de son esprit .

Elle ne désire pas que sa mère découvre celui qui est «  peut - être son petit ami » , ainsi que pour cacher à tous qu’elle a croisé le chemin de ce milkman qui la poursuit de ses assiduités .

Les lieux ne sont jamais nommés , les hommes et les femmes non plus , l’auteure situe son histoire dans un village «  de ce côté de l’eau » , loin de l’Angleterre et des loyalistes , proche mais quand même loin, résolument fermé à leur influence.

«  Sœur du milieu » la narratrice habite dans un district de «  renonçants » nationalistes déterminés , vit dans une famille endeuillée comme beaucoup. …

Bientôt «  un laitier » qui ressemble plutôt à un paramilitaire jette son dévolu sur elle , vingt - sept sans les séparent .

Bien sûr cancans , commérages , indiscrétions , rumeurs enflent ….

Silence et refus d’entendre , harcèlement ne cessent …



J’ai été engloutie , alourdie , engluée capturée par cette langue , une logorrhée hallucinée autant que l’héroïne piégée dans ce milieu orthodoxe catholique , orthodoxe et rebelle ….

Cette logorrhée hallucinée plonge le lecteur dans une ambiance sombre , déprimante , sinistre , lointaine .

Les répétitions , les longues , très longues phrases ayant pour toile de fond les troubles de ces années - là en Irlande signent une écriture imaginative , inventive , tout à fait singulière , étrange audacieuse , un livre très exigeant , doté d’un style où le lecteur doit prendre le temps de s’habituer .

Un ouvrage sous tension , original, immersif, à l’action très lente , au cœur du conflit nord- irlandais .

Une adolescente raconte avec ses mots à elle la violence et les rumeurs multiples d’une société entière déchirée par la guerre civile ….

Un livre troublant qui fait réfléchir .
Commenter  J’apprécie          353
Milkman

Ce roman hypnotise, la logorrhée hallucinée de la narratrice englue le lecteur dans l'action lente, et cette ambivalence crée une sorte de charme impossible à rompre. L'anonymat de chacun et de chaque lieu, les phrases longues et la ponctuation briseuse de rythme confèrent à Milkman une singularité intense et le pouvoir de redonner vie à une atmosphère, à un monde, celui de l'Irlande du Nord dans les années 1970 (plus de détails : https://pamolico.wordpress.com/2021/05/05/milkman-anna-burns/)
Lien : https://pamolico.wordpress.c..
Commenter  J’apprécie          280
Milkman

C’est le troisième roman d’Anna Burns qui lui a permis de remporter en 2018 le Booker Prize, et une reconnaissance internationale, avec la traduction en français parue dès 2021.



Nous sommes dans une ville qui n’est jamais nommée, mais dans laquelle tout le monde reconnaît Belfast des années 70. Une jeune femme de 18 ans, jamais nommée, essaie tant bien que mal à vivoter dans un pays en proie à la guerre civile. Elle essaie de passer inaperçue, tout en tentant de sauvegarder son espace de liberté personnelle. Car le monde dans lequel elle vit, en plus d’être dangereux, est un monde dans lequel tout le monde observe tout le monde, juge tout le monde, et souvent condamne ceux qui sortent d’une norme non écrite, mais impossible à contourner. Mais elle a attirée l’intérêt d’un paramilitaire influent, qui dresse autour d’elle un entrelacs pour se l’approprier. Il connaît ses moindres habitudes, se place sur son chemin, laisse planer des menaces, fait ce qu’il faut pour que toute la communauté la pense à lui. Elle ne paraît pas avoir d’échappatoire.



C’est sans doute une description fidèle du ressenti d’un certain nombre d’habitants de Belfast pendant cette période difficile, ce sentiment d’impuissance, d’instrumentalisation, d’impossibilité de pouvoir être soi-même et de mener une vie à sa convenance. Et tout cela encore bien plus difficile pour une femme, soumise au pouvoir de ceux qui ont la violence pour eux, légitimée par leur communauté. Mais j’ai trouvé aussi quelques évidences, et surtout je n’ai pas adhéré au style, à l’écriture. Personne n’est appelé par son nom, tout et tous son nommés par des sortes de paraphrases, qui répétées deviennent un peu lourdes. Le moindre mini événement est décrit avec un luxe de détails, dans lequel il se dilue. L’action du livre s’étire aussi un peu à mon sens, il y a des histoires parallèles, un peu longues à mon goût.



Une rencontre qui ne s’est pas vraiment faite pour moi.
Commenter  J’apprécie          214
Milkman

Mon coup de coeur de l'année.

Anna Burns nous invite à une plongée en apnée dans le conflit nord-irlandais à travers les yeux d'une jeune narratrice de 18 ans. Il faut retenir son souffle et se laisser porter par le flot, les vagues de souvenirs, réminiscences, divagations qui déferlent en longues phrases et paragraphes couvrant toute la page sans alinéa et ne donnant pas de répit.

Elle a tant à dire et à raconter cette "Soeur du milieu", confrontée, après ses années de lycée, à une entreprise de harcèlement sexuel de la part d'une figure du mouvement paramilitaire de lutte contre le gouvernement, dans un contexte que l'on pourrait qualifier de guerre civile. Le coup de génie de l'autrice est d'avoir croisé la dimension sociale et politique du conflit et le vécu d'une adolescente qui fait l'expérience des relations avec les hommes dans une société patriarcale marquée par la violence et les crimes quotidiens. La petite histoire individuelle d'une prédation sexuelle rencontre et percute la grande Histoire de l'Irlande du Nord et les deux histoires se potentialisent.

Bien que les fratries soient décimées, que les règlements de compte soient fréquents, les mouchards exécutés, que la paranoïa entre les quartiers, les familles ou les membres d'une même famille règne, le ton du récit, dense, profond, intelligent, n'est ni larmoyant, ni pathétique et c'est la deuxième réussite du livre.

Milkman est une sorte de conte, grotesque, où les personnages qui n'ont pas de nom sont un peu caricaturaux. Les neuf frères et soeurs de la narratrice sont désignés en fonction de leur rang, son petit ami est "peut-être-petit-ami", le persécuteur le "laitier"... Il y a le pays "de l'autre côté de la route" et celui "de l'autre côté de l'eau". Les "défenseurs de l'Etat" combattent les "renonçants à l'Etat". Cette mise à distance donne une portée universelle au propos de l'autrice.

Et puis, il y a les "dépasseurs-de-bornes" dont fait partie Soeur du milieu car elle refuse de se conformer aux règles de cette société sclérosée, corsetée, rongée par les ragots et les préjugés, meurtrie par les tensions sociales, ethniques et religieuses.

Certaines scènes du livre sont marquantes, celle de la professeur de français qui fait découvrir à ses élèves un peu bornés que le ciel n'est pas toujours bleu, et surtout celle de la tête de chat, que la narratrice découvre dans un endroit qui échappe à la réalité et qu'elle veut absolument enterrer. C'est un concentré de poésie et d'ésotérisme.

Milkman est un magnifique livre sur une jeune fille à qui on prête une liaison avec un terroriste, et qui, prise dans un faisceau de tensions et de contradictions, essaie désespérément de se protéger et de trouver son chemin et son autonomie dans un pays en guerre.







Commenter  J’apprécie          205
Milkman

Je pense que ce roman est important, car il retrace de façon approfondie l'ambiance délétère de la période des Troubles en Irlande du Nord (le lieu n'est jamais nommé); il fait le choix de retranscrire en continu le monologue intérieur d'une jeune fille. Je comprends qu'on puisse le trouver fascinant.

Pour ma part je n'ai pas du tout, du tout, accroché à l'écriture d'Anna Burns. La traduction de Jakuta Alikavazovic n'est pas en cause, son travail me semble parfait, mais je n'ai pas réussi à entrer dans l’œuvre, malgré plusieurs tentatives. Ce style d'écriture, peut-être inspiré de James Joyce (que j'ai eu aussi du mal à lire) n'est pas mon truc. Donc, selon l'adage : “Si tu n'aimes pas, n'en dégoûte pas les autres”... je ne le note pas, à vous de le découvrir.

LC thématique d'octobre 2021 : ''Cap au Nord !''
Commenter  J’apprécie          200
Milkman

Bon allez, j’annonce directement la couleur : ce roman m’a éblouie. L’évidence du coup de coeur m’a frappée dès le début de lecture. L’impression que des vannes venaient brusquement de s’ouvrir, un fourmillement, une jubilation. Élan, enthousiasme, admiration. Le besoin constant d’y revenir, l’envie de noter des pages entières, de relire certains passages pour comprendre saperlipopette mais comment réussit-elle à en dire autant ?! L’impression sidérante d’avoir été téléportée, à une autre époque, dans une autre vie. Un récit passionnant qui offre autant de contenu que d’émotion. Et quel humour !



Milkman était sur mes étagères depuis quelques semaines et j’attendais le bon moment pour m’y plonger, pensant que la prose serait ardue et l’histoire pas forcément très attachante. En fait, Milkman, c’est tout le contraire. J’ai eu envie de le commencer en lisant la chronique de Sonia (à découvrir sur son blog Books, moods and more, ici – un grand merci à elle). Bien sûr, en bonne brestoise habituée à un océan à seize degrés au mois d’août, avant de plonger j’y ai trempé un orteil et demi – histoire d’être sûre de ne pas y laisser des plumes… Verdict : au bout de même pas deux pages, je faisais le sous-marin en éclaboussant partout, transformée d’allégresse en chien fou.



Certes, Milkman est un roman singulier, et le flux de conscience de la narratrice impose des pauses régulières pour reprendre son souffle. L’action est lente, mais l’ivresse – et souvent les émotions –, intense(s). Pendant cette lecture, j’ai vécu une immersion comme jamais auparavant dans l’époque des Troubles en Irlande du Nord.



Dans ce roman, personne n’est nommé, aucun lieu, aucun pays. C’est « peut-être-petit-ami », « troisième beau-frère », « première soeur »… Il y a les gens « de l’autre côté de la route », ceux « de l’autre côté de l’eau » et « de l’autre côté de la frontière ». Honnêtement, je pensais ne pas accrocher à cette absence de noms, ou qu’au mieux cela alourdirait considérablement ma lecture ; et bien pas du tout. On se fait très bien à ces noms génériques pour la famille, les amis, les voisins, les Protestants, les Britanniques, ceux de la République d’Irlande, et au contraire, tout prend beaucoup plus de corps – et de vision –, dans cette distanciation anonyme.



« Tous les jours de la semaine, qu’il pleuve ou qu’il vente, sous les balles ou sous les bombes, en période d’accalmie ou en pleines émeutes, je préférais rentrer à pied en lisant mon tout dernier bouquin. Un livre du dix-neuvième siècle, à tous les coups, car je n’aimais pas ceux du vingtième, comme je n’aimais pas ce siècle. »



Milkman, c’est le monologue intérieur d’une jeune femme pendant une guerre civile qui ne dit pas son nom. Soeur du milieu d’une fratrie (très) nombreuse, elle aime lire en marchant et ne pas se faire remarquer, mais devient brusquement la cible des commérages de toute une communauté, lorsqu’un laitier qui n’en est pas un s’intéresse à elle – plus âgé, marié, haut placé chez les paramilitaires renonçants-à-l’État : la rumeur publique leur prête derechef une liaison. Elle nous emporte dans sa vie, au fil de l’eau, de fil en aiguille, la vie de ceux qui « tentent de vivre en civils des vies aussi ordinaires que les problèmes politiques, ici, le permettaient ». Elle raconte et explique, s’interroge et digresse, essaye de comprendre mais voudrait aussi ne rien savoir sur cette réalité de la vie de tous les jours, dans laquelle tout devient politique, même gagner à une loterie le carburateur d’une voiture dont on est raide dingue, avoir un chien ou regarder un coucher de soleil. La rumeur et les commérages s’emparent de tout et le plus souvent, de rien, pour en faire une montagne, voire un piège. Elle raconte comment les vies sont broyées par l’époque et ses continuelles et aliénantes violences militaires et sociales – et on plonge avec elle.



« C’est que je ne parlais de rien à personne – en partie parce que je n’avais pas l’habitude de confier quoi que ce soit à qui que ce soit, en partie parce que je n’aurais pas su comment ni quoi dire, et en partie aussi parce que je n’étais pas encore sûre qu’il y ait quoi que ce soit de précis à raconter. »



Il y a du génie dans la plume d’Anna Burns, fluide, rythmée et parfaitement maîtrisée. Elle met en scène tout un monde, une galerie de personnages pittoresques, et l’ensemble est à sa place en perpétuel mouvement, chaque digression apparente servant un but précis. Elle va du général au particulier, de son histoire à l’Histoire, du district à la ville, de l’individu à la société, puis elle nous recentre sur le roman présent par une anecdote, un lieu, une rencontre, avant de recommencer plus loin, plus tard, son assaut d’un horizon plus vaste. L’ensemble est passionnant, souvent implacable et glaçant, mais toujours l’auteure, en allant de plus en plus loin dans la réflexion, distille avec habilité humour, auto-dérision et pincées de légèreté, ce qui rend ce roman à l’équilibre impeccable purement addictif. La traduction admirable de Jakuta Alikavazovic est aussi à saluer.



« Attends un peu, j’ai fait. Tu veux dire que lui peut se balader avec du Semtex mais que moi je ne peux pas lire Jane Eyre en public ? »



A mesure que j’avançais dans ma lecture, j’ai également ressenti avec intensité la portée universelle de Milkman. La distanciation anonyme met en lumière les mécanismes à l’oeuvre dans la rumeur publique, la manipulation, les pressions sociales, et permet de percevoir avec une grande acuité comment une situation politique donnée peut déboucher très vite sur un système totalitaire verrouillé à tous les niveaux de la société. Comme Orwell racontait Winston Smith en 1984, la novlangue et le double-penser, Anna Burns nous laisse ici entendre la voix de Sœur du milieu, « de ce côté-ci de la route ». Une voix unique, splendide d’intelligence et d’émotion, de profondeur et d’humour. Et nous ? Où en sommes-nous ?



Milkman est un roman singulier, un pur chef d’oeuvre à la portée universelle. Ne passez pas à côté, il est à découvrir absolument !



« C’était, sous les traumatismes, sous l’obscurité, une normalité qui essayait d’advenir. »
Lien : https://lettresdirlandeetdai..
Commenter  J’apprécie          2021
Milkman

MILKMAN d’ANNA BURNS

Dans un pays jamais mentionné mais dont l’identité fait peu de doute( Irlande du nord), dans les années 70, la narratrice, « sœur du milieu »,marche en lisant des romans du 19 ème siècle et fait son possible pour cacher à sa mère l’existence de « peut-être-petit-ami « ainsi que sa rencontre avec le Laitier, qui bien sûr, n’en est pas un( de laitier).

Elle court souvent avec » troisième beau frère » passionné de course à pied et qui réalise rapidement que le Laitier a fait des avances à » sœur du milieu ». Dans cette ville microcosme où tout, déformé et faux dans le cas présent, se sait et se colporte,« sœur du milieu » est déjà la maîtresse de Laitier, quand elle n’est pas enceinte de lui. Sa mère la harcèle, lui dit qu’elle est »dépassant-les bornes »et ferait mieux de se marier avec « un du même bord » qui pratique la »bonne religion »et habite « le bon côté de la ville ».

« Sœur du milieu »se trouve piégée au milieu d’un faisceau de ragots et racontars, elle est prise au piège par tous les protagonistes, police, militants des deux bords, religieux, famille jusqu’à une série de meurtres dont celui d’un laitier, le vrai cette fois ci!

Un passionnant roman, auréolé de prix, qui dans un style très spécial met en scène cette femme qui, tout en menant une vie »normale « se retrouve au centre d’une attention qu’elle ne souhaite en aucun cas et pour cause, les cadavres jonchent régulièrement les rues, alors un profil bas est indispensable. La pression journalière, sourde, non formulée est magnifiquement rendue. Il faut simplement dépasser le fait qu’aucun personnage n’est nommé, ce qui rend la lecture étrange et, demande( pour moi en tout cas) un temps d’adaptation. A lire vraiment.

Anna Burns est irlandaise, née en 1962 et c’est son troisième roman.
Commenter  J’apprécie          170
Milkman

Des prix prestigieux, des louanges de babelionautes, l'enthousiasme de Yakuta...il a fallu tout cela pour que je n'abandonne pas...je suis passée à côté de ce livre sur lequel j'ai traîné.

Tout est anonymé: l'époque, le lieu, les personnages et cela m'a agacée (me rappelant Désorientale et les oncles).

Tout m'a paru long, redondant.

Rumeurs et harcèlement dans un contexte politique explosif. C'est ce que j'ai retenu!

Mais les termes revenant sans arrêt de "presque petit ami", renonçants paramilitaires, fille aux cachetons, premier beau-frère (et les autres) les chtites soeurs, soeur du milieu etc. ont eu raison de ma patience.

Intéressant cependant de décortiquer une rumeur: elle lit en marchant et cela suffit à la rendre suspecte et la rumeur lancée par premier beau-frère enfle faisant entrer Laitier, renonçant important dans l'affaire.

Elle (la narratrice anonyme) est tantôt naïve, tantôt roublarde. J'ai souvent oublié qu'elle n'avait que dix-huit ans et peu au courant des événements; elle va découvrir que tout est politique...

Rumeurs et harcèlement demeurent indépendamment de la situation et du lieu jamais nommés.

Commenter  J’apprécie          120
Milkman

Un roman qui me laisse très partagée. La longue logorrhée de la narratrice m'a très souvent agacée, voire fatiguée, de même que l'absence de caractérisation des personnages. Pourtant, comment ne pas voir en ce monologue lancinant et torturé l'âme de l'Ulster et de ses habitants déchirés par un conflit larvé et fratricide.

Si je ne peux pas affirmer avoir apprécié ce roman, en revanche, je sais qu'il le restera longtemps en tête.
Commenter  J’apprécie          60
Milkman

Bienvenue en Irlande du Nord à l’époque des Troubles, bienvenue dans ce pays secoué par les violences et l’agitation politiques, bienvenue dans cet endroit fermé où morale et commérages dictent les rapports sociaux et où aller voir un coucher de soleil a quelque chose de subversif. Bien que cela ne soit jamais explicitement indiqué, l’histoire de "Milkman" se déroule probablement à Belfast, dans les années 70, pendant la période dite des Troubles, période de violences en réponse à l’occupation britannique. Bien que depuis, les différents belligérants aient déposé les armes, le conflit n’a jamais totalement cessé et semble même vivre un regain de violence en raison du Brexit. Le récit est construit en paragraphes copieux et denses et en chapitres très longs, ce qui exige une bonne concentration de lecture. Il raconte les expériences d’une jeune fille considérée comme non-conformiste parce qu’elle aime « lire-en-marchant », ses tentatives pour se frayer un chemin à travers le champ de mines des ragots et des intrigues politiques de la Belfast catholique. Elle parle, raconte, rumine et réfléchit sur un rythme répétitif, frénétique, insistant, parfois même obsessionnel, mais sans jamais oublier d’y mettre une petite dose d’ironie qui illumine et réchauffe le tout. Comme de nombreux catholiques, elle est issue d’une famille nombreuse, de sorte que ses frères, ses sœurs et les beaux-frères se voient attribuer des ordinaux. Parmi les autres personnages figurent le « peut-être-petit-ami », le vrai laitier (alias l’homme qui n’aime personne), le faux laitier (un militant républicain qui semble harceler la narratrice), la fille aux cachetons et sa sœur, Machin McMachin et son frère, le garçon nucléaire. La mère de la narratrice occupe une place importante et puissante, elle croit plus aux rumeurs de sa communauté qu’aux dires de sa propre fille, tout en ressassant les mauvais choix de sa vie, comme celui de son mariage. Anna Burns décrit brillamment cette période des Troubles et le courant de violences sous-jacent, les suspicions entre groupes, les conventions étouffantes, les haines intercommunautaires et la morosité pesante. Elle rend à merveille la claustrophobie qui étouffe la ville, ses habitants et le peuple tout entier. La narratrice est à la fois un produit de son environnement avec des idées plutôt conformistes, mais elle manifeste également le désir de découvrir le monde hors des limites étroites ou des restrictions dans lequel elle est censée évoluer. Dans sa prise de conscience de l’existence d’une réalité plus vaste, elle est aidée par son « peut-être-petit-ami » et par une enseignante de français qui lui offrent par exemple de regarder différemment les couleurs du ciel. Mais elle se sent tirée vers le bas par les agissements du faux laitier, par les menaces et les violences du quotidien, par les ragots, les insinuations et les commérages du voisinage et par sa relation de plus en plus tendue avec son « peut-être-petit-ami ». Reste l’écriture d’Anna Burns qui, bien qu’originale et novatrice, ne plaira pas à tout le monde. Il y a tout d’abord le choix de ne pas nommer les personnages, choix déroutant au début de la lecture. Il y a ensuite la transcription des pensées de la narratrice, mélange de divagations intenses et d’états d’âme frénétiques, la narratrice cherchant de façon obsessionnelle à tout comprendre ou tout expliquer. Il y a enfin le style varié avec, par moment, une écriture viscérale (le massacre des chiens du quartier), une écriture sombre (la violence et la mort font partie du quotidien), une écriture tendre (les relations entre des personnages proches) ou une écriture absurde (les pointes d’ironie de la narratrice), mais toujours une écriture imaginative et inventive dans son utilisation de la langue. Bref un livre audacieux et novateur que j’ai aimé, un livre également prémonitoire en raison du choix de l’écrivain de parler de la période des Troubles à l’heure où la stabilité irlandaise est menacée par le Brexit.

Commenter  J’apprécie          60
Milkman

« Soeur du milieu » a 18 ans. Elle habite un endroit qui n'est pas nommé mais dont on devine aisément qu'il s'agit de l'Irlande du Nord des années 1970, théâtre de ce qu'on appelait les « troubles » pour minimiser la violence de la guerre civile qui opposa d'une part les catholiques favorables à l'indépendance et d'autre part les protestants favorables au maintien dans la Couronne et soutiens de l'armée britannique.

Dans ce petit bout de terre où la religion régit les consciences et où la surveillance est permanente, on peut être assassiné parce qu'on arbore le drapeau de l'ennemi, on peut être mal vu parce qu'on donne un prénom trop britannique à son enfant et se faire traiter de pédé parce qu'on aime cuisiner.

« Soeur du milieu » est une « dépassante-de-bornes » parce qu'elle lit en marchant des romans du 19ème, signe de sa haine du siècle dans lequel elle vit. Elle est harcelée par un homme surnommé le laitier qui n'est pas un vrai laitier. Au lieu de la plaindre, ses proches et la population locale la jugent responsable des agressions quotidiennes qu'elle subit et qui l'angoissent. De victime elle devient coupable dans l'esprit des bien-pensants et les femmes ne sont pas les dernières à la blâmer. Y compris sa mère alias « m'ma » qui ne pense qu'à la marier pour avoir des petits-enfants.

Bref, « sœur du milieu » est piégée par le regard de l'autre. Et ses tentatives d'invisibilité et ses silences ne font que conforter ses torts supposés. Heureusement qu'il y a ses chtites sœurs, trois fillettes énergiques et bien vivantes à la curiosité débordante. Elles représentent l'idée qu'il est possible de s'extraire de cette communauté étouffante.

Dans un style original et puissant fait de circonlocutions, de périphrases, de redondances, de digressions et de trouvailles langagières savoureuses qui distillent quelques notes d'humour et de légèreté, « Milkman », lauréat du Man Booker Prize en 2018, nous glisse dans le cerveau d'une jeune femme en construction assaillie par les doutes et la peur.

Le grand talent d'Anna Burns, qui a vécu la période des « troubles », est d'avoir inventer un monde manichéen, paranoïaque, misogyne, absurde, venimeux et violent à la dimension universelle comme le sont les tragédies. C'est pour le lecteur une expérience oppressante, dérangeante, singulière mais essentielle. Pour une fois l'expression « vous ne sortirez pas indemne de cette lecture » prend tout son sens.



EXTRAITS

- Parler de rien, c'était ma façon de rester à l'abri.

- Le mariage, ce n'était pas censé être une partie de plaisir. C'était un décret divin, (…) c'était avoir des bébés de la bonne religion...

- Personne n'a jamais vu un chat s'excuser et, si jamais ça arrivait, il serait évidemment manifeste qu'il est tout sauf sincère.

- Dans la vie certains ne méritent pas la vérité.




Lien : http://papivore.net/litterat..
Commenter  J’apprécie          50
Milkman

Lauréat du Booker Prize 2018, Milkman se démarque par son style, son univers lexical. Une singularité qui pourrait bien perdre son lecteur si elle na cachait une évocation parfaitement maîtrisée des situations de harcèlement et de peur.



Nous sommes dans les années 70, dans une ville qui n’est pas nommée soumise à des troubles liés à deux factions de religion différente. Bien sûr, nous comprenons facilement que nous sommes au coeur de la guerre civile irlandaise. Mais le vocabulaire restera imagé avec le pays « de l’autre côté de l’eau » ou le camp « de l’autre côté de la route ». L’auteur entretient le mystère, la dissimulation, le silence. Effectivement, dans ce climat de terreur, aucun habitant ne peut dire franchement les mots. Mais, peut-être, est-ce aussi pour laisser une place à l’histoire individuelle de la narratrice, une histoire de harcèlement qui peut se passer n’importe où.



La narratrice a dix-huit ans, elle ne sera jamais nommée que « soeur du milieu ». Elle vit avec sa mère et les trois dernières filles, les « ch’tites soeurs ». Deuxième et quatrième frère ont disparu suite au conflit, l’un a été abattu, l’autre est en cavale. Les gens n’ont pas de prénom. D’ailleurs beaucoup sont interdits. Alors, elle fait du footing avec « troisième-beau-frère », a une relation avec « peut-être-petit-ami ». Vous l’avez compris, le décor est plus ou moins poétique et étrange. Mais cela ne s’arrête pas aux dénominations. Les comportements, les lieux sont eux aussi singuliers.



A cause des Troubles, personne ne voit plus ni ne se comporte plus normalement. Pour les habitants, le ciel est bleu. Impossible d’en saisir d’autres nuances.



Même enfant je savais – peut-être parce que j’étais enfant, justement – que ce n’était pas vraiment un phénomène physique; je savais que cette impression lugubre, voilée, cette déformation de la lumière avait à voir avec les problèmes politiques, avec les douleurs, les troubles accrus, l’espoir perdu, le manque de confiance, et une nouvelle incapacité mentale que personne ne semblait vouloir ni pouvoir surmonter.

Chaque geste est mesuré par crainte des ragots, d’être photographié, fiché. Ne vous promenez pas dans « la zone des dix minutes », il ne reste que ruines et engins explosifs. L’époque était paranoïaque.



La rumeur, on commence, on continue, on s’y embourbe, on n’arrive plus à s’en sortir, voilà, en gros, pourquoi on ne m’arrêtait plus.

C’est dans cette ambiance que la vie de la narratrice, harcelée par le Laitier, un renonçant haut placé et marié, va basculer. Elle qui lisait-en-marchant, essentiellement de la littérature du XIXe siècle, une manière de refuser de voir et de savoir, qui vivait son histoire d’amour avec peut-être-petit-ami, sans vouloir trop s’engager pour trois raisons bien identifiées, travaillait, prenait des cours de français va devenir la proie d’un prédateur et la victime de tous.



L’auteur excelle à montrer comment s’installe la peur, comment elle bouscule le corps. Colère, cauchemars, refus de voir les gens qu’elle aime pour ne pas les impliquer. Son monde s’évanouit. Par tous, elle est vue comme une « dépassant-les-bornes. »



De manière étrange, avec un roman d’initiation dans lequel se pose le choix du bon partenaire de vie, Anna Burns illustre l’ambiance d’une ville en pleine guerre civile, traumatisée par les rumeurs et les peurs d’un conflit où chacun est l’ennemi de l’autre.
Lien : https://surlaroutedejostein...
Commenter  J’apprécie          50
Milkman

Roman un peu étrange avec une écriture à laquelle j’ai dû prendre le temps de m'habituer pour apprécier pleinement ce style singulier, dense et, au bout du compte, savoureux.

Pas de lieu, de prénom ici. On se devine en Ireland du Nord, une région un peu troublée par des revendications. La narratrice a 18 ans, nous décrit, en décortiquant tous les événements et ses pensées, comment elle est poursuivie par un homme bien plus âgé qu’elle, menacée même alors que personne autour d’elle n’en fait grand cas.

Car la rumeur dit qu’elle est la petite amie de cet homme qu’on appelle le laitier mais qui n’en ai pas un. La rumeur c’est ce personnage qui est créé, ces habitants, ceux qui gravitent autour de sa famille, qui inquiètent sa mère si pieuse en faisant croire que sa fille entretient une liaison avec un homme marié et bien plus âgé qu’elle.

Derrière la distance avec laquelle les événements sont décrits, c’est une histoire très inquiétante à laquelle on assiste.

C’est un livre immersif dont j’ai adoré les tournures, l’ironie tout en étant plongée dans une atmosphère anxiogène, dans l’incompréhension face au harcèlement dont est victime cette jeune fille et l'indifférence générale.

C’est aussi finement lumineux grâce à des petites touches apportées par le “presque -petit-ami” et le vrai laitier qui sera le seul à être intrigué par la situation.

J’ai adoré la narratrice qui lit en marchant, qui nous livre ses pensées, ses inquiétudes, son indignation face à sa situation.

Commenter  J’apprécie          40
Milkman

Quel bouquin ! Quelle expérience de lecture !

Il n’y a pas de noms, ni de lieux dans cette histoire.

On sait qu’elle se situe entre le pays « de l’autre côté de l’eau » et le pays « de l’autre côté de la frontière ».

Donc, plus que probablement l’Irlande du Nord et dans les années 70.

Mais elle pourrait se passer n’importe où, elle pourrait être imaginaire, et c’est d’ailleurs écris ainsi, comme si cela se passait dans un pays imaginaire.

Cette histoire, c’est la « sœur du milieu », la fille qui lit en marchant, qui nous la raconte.

La fille qui marche et ne s’arrête jamais de penser.

La fille qui marche n’a pas de prénom, d’ailleurs personne n’a de nom dans ce roman.

Cette fille qui marche a dix-huit ans, elle travaille, court, lit beaucoup de romans du 19ème siècle, va a ses cours de français ou de « greco-romain » le soir, s’occupe de ses trois plus jeunes sœurs (les « chtites »), s’interroge sur sa relation amoureuse avec « peut-être-petit-ami ».

« Premier beau-frère » a lancé la rumeur de sa liaison avec le Laitier, enfin, pas un vrai laitier, et que depuis tout le monde se méfie d’elle.

Pourtant, il ne s’est rien passé avec ce « Laitier », elle aimerait l’ignorer, mais il la harcèle et sait toujours où la trouver. Et à cause de lui, à cause de ce qu’il est, probable chef chez les « paramilitaires », respecté et craint, un homme qui a le pouvoir de vie sur les autres de notre côté de la rue, toute la vie de « sœur du milieu » devient plus compliquée.

Quand j’aurai dit cela, je n’aurai rien dit de ce roman.

Lire ce roman s’apparente plus à une expérience littéraire vertigineuse, fascinante.

Décidément l’écriture des écrivains irlandais est une forme de poésie.

Jamais je n’avais lu pareille façon de raconter la vie pendant cette période sanglante de l’histoire de l’Irlande du Nord, celle des « Troubles ».

Anna Burns réussit à dessiner une société, un pays et une époque déterminés. Le poids de la religion, les tensions entre communautés, les incompréhensions familiales, la jeunesse, la vieillesse, les ragots, la pression paramilitaire… sont décrits à travers de minuscules détails.

Vertigineux est le mot, je crois.

Vertigineux et drôle !

C’est un flot de mots et de pensées qui déferle, qui ne s’arrête jamais.

Les mots sont extraordinaires, au vrai sens du terme, souvent inventés (je tire mon chapeau à la traductrice, qu’il faut citer : Jakuta Alikavazovic) et jamais on ne s’y perd, et toujours on est addict, encore une ligne, encore une page…

Ah, zut, c’est déjà fini…

Un très grand roman.
Commenter  J’apprécie          20
Milkman



"Milkman" est une histoire liquide.

Les lieux et les personnages du roman ont la nature liquide du lait : ils sont innommés sinon par des périphrases qui les définissent au sein de la communauté.

Aussi devine-t-on à mots couverts où l'intrigue se situe, dans un lieu en pleine guerre d'indépendance contre "le pays de l'autre côté de la mer". Au fil de l'histoire, nous comprenons où nous sommes.



Au coeur de cette communauté majoritairement "renonçante", c'est-à-dire indépendantiste, une jeune fille se retrouve progressivement cernée par Milkman, le Laitier.

Pour sa famille, cette héroïne jamais nommée est "soeur du milieu". Pour le garçon sur qui elle fonde des espoirs d'amour, elle est "peut-être petit amie depuis presque un an".

Vous le comprenez, en entrant dans "Milkman" vous entrez en terre liquide.

Les mots jusqu'aux choses qu'ils désignent ont une réalité visqueuse, impalpable, intangible.

Une chose non nommée est une chose inexistante.

Au contraire, une chose inexistante prend finalement vie par la seule force des mots, de la rumeur, du cancan.

Dans un tel monde, le harcèlement impalpable et intangible d'un homme sur une femme n'existe pas.

En revanche, dans ce même monde, les ragots infondés mais nommés font advenir la réalité qu'ils créent de toute pièce.

Si "soeur du milieu" est incapable de nommer ce que Milkman lui fait vivre, alors la communauté aura sa propre interprétation biaisée des faits, et l'interprétation aura valeur de vérité. Car "soeur du milieu" est plus liquide et insaisissable que le monde où elle évolue. Son affront est de ne rien donner d'elle à une communauté avide de ragots et d'indiscrétions. Voilà sa bizarrerie, ce que personne ne lui pardonne quand elle se permet, comble de mépris, de "lire-en-marchant". Dans un monde en guerre où il faut avoir une opinion sur chaque événement politique et sur chaque personne, "soeur du milieu" se retranche derrière ses livres des siècles passés. Le langage même lui devient suspect, cette chose qui produit plus d'incompréhension mutuelle que d'éclaircissement. A défaut de pouvoir parler, les autres parleront pour elle et l'enfermeront dans une identité que son silence leur refusait.



La langue d'Anna Burns a le caractère liquide, accidenté et pourtant fluide de l'histoire qu'elle raconte, ce même mélange de précision et d'imprécision, de répétitions, de détours, de termes abscons, de périphrases, de compréhension et d'incompréhension. C'est une écriture dense, insaisissable et saisissante. Le roman flirte avec le conte, parfois même avec une certaine forme théâtrale, car dans cette zone liquide où tout est dit sans être nommé, une surréalité affleure.



"Milkman" est aussi le roman de la peur. De la même façon que les mots peuvent créer à eux seuls une réalité, la peur conditionne les vies. On préfère alors des "peut-être relations" à des amours risquant de vous arracher au quotidien gris et prévisible. Dans un monde où le langage substitue une réalité à une autre, les êtres procèdent de même avec l'amour, interchangeant des amours vraies avec des amours de convention.



Je ne peux en dire plus sur "Milkman". Il m'échappe à mesure que je m'en saisis.

Commenter  J’apprécie          20
Milkman







Une lecture exigeante pour une écriture et un style extraordinaire qui vous fera forcément sortir des sentiers battus et vous demandera une attention particulière mais qui au final vous laissera perplexe.



Il faut être curieux, accepter d’être bousculé, pour découvrir à votre tour ce fabuleux roman, terriblement atypique qui a remporté en 2018 le Man Booker Prize, le Orwell Prize for fiction et le National Book Critics’ Circle Award en 2019.



Chronique complète sur mon blog ma dose d’encre lien ci-dessous :
Lien : https://madosedencre.overblo..
Commenter  J’apprécie          20
Milkman



Ce livre est étonnant, il faut le savoir…



Ecrit à la première personne, sans paragraphe, d’une traite, comme si la jeune fille n’avait pas le temps… ou débitait tout comme une mitraillette…

Cela peut paraître ardu, aride, déroutant.



Nous sommes en présence d’une jeune fille de 18 ans qui n’est pas nommée, juste par son qualificatif « sœur cadette », elle aime lire (beaucoup), partout (en marchant notamment), le jogging, et s’isole ainsi de la violence autour… car nous sommes plongés, sans la nommer, dans l’Irlande du Nord, en plein dans la guerre sanglante, et l’oppression, la puissance et la peur se ressentent, justement, dans cette écriture au cordeau.



Un jour, cette jeune fille est prise pour cible par un homme, plus âgé, « le laitier », un mec d’un groupe armé… et par son beau-frère dont elle a éveillé la curiosité… Étrange famille également, citée uniquement par « sœur aînée, troisième beau-frère » et son « peut-être petit-ami »…



Il y a très peu de dialogue, ça va et ça vient, des digressions çà et là, des conversations incluses dans un paragraphe, comme ça, posées là, un peu brutalement.



On sent la violence de cette guerre, à travers l’histoire de la famille (un frère tué par balle, un beau-frère dans une voiture piégée, un autre frère en fuite, une sœur exilée mariage à un protestant, etc.)…



La vie quotidienne est décrite et la séparation aussi… il y a « nos » et « leurs », à propos de tout ; il y a les magouilles des uns et des autres, les paramilitaires dans les deux camps qui pointent la population au gré des règlements de compte, la méfiance envers la police et les autorités (ne pas se faire remarquer, ne pas se faire remarquer !)…



On suit alors les on-dit, les défiances, les ragots, la descente de la jeune fille, sa vie, ses peurs…



C’est âpre mais fascinant, rude mais brutal.



C’est un livre exigeant surtout au niveau de l’écriture de l’auteur, de l’assemblage de mots… on ressort lessivé(s) de sa lecture, essoré, haletant comme si on avait vécu cette période sanglante, oppressante et douloureuse…



Si vous avez les romans aérés, avec dialogue, sans de trop longues phrases alambiquées, passez votre chemin…



Si vous aimez les chemins tortueux avec prise de tête (et quelques bons mots, à l’humour irlandais), suivez la lectrice en marchant !
Commenter  J’apprécie          20
Milkman

An interesting book on a subject (the separation of Ireland and its civil war) I didn't know much about. The author makes us feel the oppression, the power of the rumour, the fear, the blackmail.

There are a lot of digressions, which make the reading slowler. I also got surprised that there is no dialogs in the book. When there is a oral exchange, it is all in the same sentence. It makes the narrative heavier.



I like the "reading during walking" habbit. If only, I could do this !
Commenter  J’apprécie          21
Milkman

Je me permets de reprendre ici une phrase de MadameU dans la critique Babelio de ce bouquin : « Quand il n’y a pas de plaisir à lire, il vaut mieux s’épargner »

C’est ce que j’ai fait après m’être ennuyé pendant quelques dizaines de pages, qui m’ont semblé être un verbiage stérile, une véritable logorrhée comme on dit savamment. De plus, le style m’a paru lourd, fait de longues phrases pas toujours bien construites.

J’aurais peut-être dû être plus patient, mais en feuilletant quelques pages plus loin dans le roman, je n’ai pas aperçu de changement.

Commenter  J’apprécie          13
Milkman

Et bien, c'est rarissime : j'abandonne ce roman au premier tiers...

Trop bavard, trop alambiqué, trop fourni, trop soliloquant, trop.

Le propos est pourtant fort intéressant : une jeune nord irlandaise nous rend compte de sa réalité dans les années 70, dans une Irlande plus divisée que jamais.

D'un côté la violence en filigrane alors que la narratrice s'évertue à lire les grands auteurs en marchant plutôt que d'être vigilente à tous moments.

De l'autre, les on-dit, la rumeur, la surveillance et le jugement de tous qui n'est pas sans rappeler l'Allemagne de l'Est...

Une jeune femme qui ne veut pas se laisser aller à ce qu'on attend d'elle : le mariage, une première grossesse précoce et l'assujettissement à l'homme, qu'elle souhaite des plus "viriles" néanmoins.

Elle s'instruit, ne diffuse pas les ragots et s'astreint au footing, loin de ses sœurs et surtout de sa mère, grenouille de bénitier, des dépressions successives du père, hanté par l'holocauste.

C'est un roman ambitieux et fort dont la lecture m'a fatiguée...

Quand il n'y a pas de plaisir à lire, il vaut mieux s'épargner.

Commenter  J’apprécie          10




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Anna Burns (114)Voir plus

Quiz Voir plus

L'apache aux yeux bleus

Quel âge a le personnage principal ?

3 ans
6 ans
13 ans
11 ans

10 questions
277 lecteurs ont répondu
Thème : L'Apache aux yeux bleus de Christel MouchardCréer un quiz sur cet auteur

{* *}