Le soir, après le dîner, on écoute les histoires des survivants. Adultes, on lit leurs mémoires, ce qu'ils ont écrit ou raconté, recueillant avec une douloureuse peine les terribles souvenirs de leurs expériences, les bribes de leur vie paisible au pays perdu, la nostalgie qui, pour toujours, les dévore. On veut en savoir plus, on veut comprendre. On se plonge dans les manuels scolaires, mais il n'y a rien. Un silence menaçant plane sur l'histoire du premier terrible génocide du XX°siècle. Ceux qui veulent en parler, ceux qui s'interrogent et s'informent, s'entendent conseiller de regarder ailleurs. Parce que non seulement les Arméniens ont disparu de leurs terres ancestrales, mais il faut en plus faire comme s'ils n'avaient jamais existé. Leur culture millénaire fut balayée de l'Anatolie en un seul été, ce maudit été 1915.
(Préface de "Medz Yeghern" de Paolo Cossi)
Les survivants se sont éparpillés aux quatre coins du monde, et le monde les ignore. Mais que s'est-il passé ? Que s'est-il réellement passé ? Ces dernières années, la curiosité et l'intérêt pour cette immense tragédie, qui eut lieu pendant la Première Guerre mondiale sur le territoire de l'actuelle Turquie, se sont indubitablement réveillés. Pourtant, pour comprendre vraiment ces horribles événements et leurs conséquences, pour saisir, non seulement avec l'esprit mais aussi avec le coeur, et à travers les images, la terreur, le sang des victimes et la brutalité des assassins, les statistiques et les manuels d'histoire ne suffisent pas.
(Préface de "Medz Yeghern" de Paolo Cossi)
Le jour le plus funeste, pour un Pays, est celui où, pour se sentir uni, il ressent le besoin d'éliminer une partie de ses citoyens inermes.