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4.12/5 (sur 68 notes)

Nationalité : France
Né(e) à : Clermont-Ferrand , le 24/03/1936
Mort(e) à : Toulouse , le 29/01/2022
Biographie :

Arlette Jouanna, née Galinat, est une historienne française, professeure émérite d'histoire moderne à l’université Paul-Valéry-Montpellier.

Elle est une élève de l'École normale supérieure de Sèvres (1956 L).

Elle est reçue à l'agrégation d'histoire et géographie en 1960 et poursuit ses études d'histoire à l'université Paris-Sorbonne. En 1975 elle soutient sa thèse d'État intitulée "L'idée de race en France au XVIe siècle et au début du XVIIe siècle", sous la direction de Roland Mousnier.

Elle réalise sa carrière à l'université Paul-Valéry-Montpellier dont elle est professeure émérite.

Arlette Jouanna est spécialiste de l'histoire politique et sociale du XVIe siècle en France, en particulier l'histoire de la noblesse et du protestantisme.

Elle étudie particulièrement le protestantisme du XVIe siècle, notamment le massacre de la Saint-Barthélémy en 1572, qui débute le 24 août, six jours après le mariage d'Henri de Navarre et de Marguerite de Valois, et se poursuit à Paris et dans le reste de la France.

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Source : http://histoireparis8.canalblog.com
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Arlette Jouanna - Montaigne


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Au cours de son activité de maire de Bordeaux, Montaigne a pratiqué l’art de la diplomatie ; jouant le rôle d’intermédiaire entre les camps opposés, il les a mis en relation, il a maintenu le dialogue entre eux. L’expérience ainsi acquise enracina dans son esprit une espérance obstinée que la violence ligueuse renaissante ne parvint pas tout à fait à anéantir : l’engrenage de la guerre civile pourrait peut-être encore s’enrayer si, malgré les difficultés nouvelles, la communication était rétablie entre le roi de Navarre, chef des huguenots, et le duc de Guise, chef des catholiques intransigeants ; ou bien si Henri III, détenteur du pouvoir légitime, acceptait de s’entretenir avec Navarre, l’héritier de la Couronne désigné par la loi salique. Montaigne a sans doute cru fermement à ces ultimes chances de la paix ; c’est à les saisir qu’il consacra en partie les années consécutives à ses mandats bordelais. Combat difficile : la médiation d’un homme de bonne volonté, au crédit somme toute assez limité, ne pouvait pas grand-chose. Toutes les possibilités de pacification semblèrent se fermer devant lui. Si l’année 1588 fut marquée par une nouvelle édition des Essais, enrichis d’un troisième livre et de quelque six cents additions aux deux premiers, elle offrit aussi le spectacle « des jeux tragiques de l’humaine fortune ».
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La décision de vivre désormais chez lui n’a nullement représenté pour Montaigne une césure brutale, un repli dans sa tour d’ivoire. Elle n’est que le signe extérieur d’un retournement intérieur, d’un basculement de son regard du « dehors » vers le « dedans », non pour s’y enfermer, mais pour y observer avec curiosité le jaillissement de la réflexion au contact du monde environnant. Son esprit, pour se mettre en branle, a besoin en effet de rencontres, avec ses proches, avec les acteurs de la politique de son temps ou avec les grands auteurs anciens ou contemporains. En explorateur de l’intime, il s’attache à découvrir à la fois sa propre diversité et celle des personnes côtoyées au cours de ses conversations, de ses lectures ou de ses voyages ; il « essaie » son jugement en le confrontant à celui d’autrui. Plus tard, il notera qu’il aurait volontiers publié ses « verves » sous forme de lettres, s’il avait eu à qui parler, comme autrefois il échangeait des idées avec La Boétie. À défaut d’un ami de cette envergure, c’est avec le lecteur que les Essais vont engager un dialogue, en espérant que cet interlocuteur sera « suffisant ».
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L’élection de Montaigne à la mairie de Bordeaux allait lui offrir l’occasion de mettre ses compétences au service du public. Elle a probablement été décidée lors de la signature de la paix du Fleix, au château de Germain-Gaston de Foix-Gurson, marquis de Trans, le 26 novembre 1580. Cet accord mit fin à la septième guerre civile ; outre les clauses précisant les libertés de culte accordées aux protestants, il stipulait le renvoi du turbulent maréchal Armand de Gontaut-Biron, qui cumulait les charges de maire de Bordeaux et de lieutenant général pour la Guyenne. Henri III décida de dissocier ces deux fonctions : celle de lieutenant général échut — à titre provisoire dans un premier temps — à Jacques de Goyon, maréchal de Matignon, et celle de maire à Montaigne. Le nom de ce dernier, sans doute vigoureusement soutenu par le marquis de Trans, appuyé par Catherine de Médicis et agréé par Henri, roi de Navarre et gouverneur de Guyenne, fut proposé aux jurats bordelais qui l’élurent le 1er août 1581, alors qu’il était encore en Italie.
Les aptitudes qui avaient déjà désigné le nouveau promu à l’attention du roi, confirmées par la sagacité dont témoignaient les Essais et par l’expérience amassée au cours du voyage en Italie, le qualifiaient assurément pour ce poste.
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On se souvient que Montaigne, au moment où il décida de se retirer dans son château, en 1571, fit peindre sur un des murs du cabinet attenant à sa bibliothèque une phrase latine expliquant les motifs de son choix. Une partie des mots employés a parfois été traduite de façon édulcorée ; il est donc nécessaire d’y revenir brièvement. Rappelons-en l’essentiel : Montaigne se dit « pertæsus » (dégoûté, excédé) par deux réalités bien distinctes. Il qualifie la première de « servitii aulici ». Le terme aulici est dérivé de aula, qui ne peut en aucun cas se rapporter à la cour de parlement, comme on l’a souvent cru ; il s’agit plutôt de la Cour royale, dans laquelle on s’expose à une servitude — le sens de servitium dépasse en effet beaucoup en vigueur le vocable français service. L’expression « servitude des Cours » se rencontre d’ailleurs dans les Essais à propos des « cérémonies » mondaines et correspond à un lieu commun très répandu dans la littérature morale du temps. L’autre objet du dégoût de Montaigne concerne les charges publiques (munerum publicorum), cette fois, sans ambiguïté possible, celles que Montaigne a occupées à la cour des aides de Périgueux puis au sein du parlement de Bordeaux.
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1572 : mariage de Marguerite de Valois et d'Henri de Bourbon.
Marier les adversaires et unir les contraires : le pouvoir de séduction de cet idéal provenait de la place qu'il occupait dans la vision du monde prédominante au XVI°s. Dans l'imaginaire cosmologique du temps, le miraculeux équilibre de l'univers tait fondé sur la conjonction d'éléments dissemblables, eau, terre, air et feu, "estant (comme l'affirmait le juriste et philosophe Louis Le Roy) les choses legeres empeschées par les pesantes de s'eslever, et au contraire suspendues les pesantes qu'elles ne tombent". Les mêmes règles étaient censées régir la communauté humaine, dont l'ordonnance reflétait celle du cosmos grâce à de secrètes correspondances. Chez les hommes, c'était notamment au mariage qu'il incombait de sceller le rapprochement des adversaires. Cette idée s'alimentait aux sources chrétiennes : le sacrement crée un lien indissoluble, sanctifié par la grâce de Dieu et capable de surmonter tous les facteurs de rupture. Elle s'enracinait également dans la conception lignagère de la société qui prévalait alors : l'union de deux individus alliait aussi leurs lignées, voire leurs Etats, apaisant ainsi leurs éventuels conflits.

p. 76
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(Après la Saint-Barthélémy).
L'allégresse ressentie par les militants de l'unité religieuse finira, devant la résistance de l'hérésie, par céder la place à un profond désenchantement, suivi de la résurgence d'un sentiment de culpabilité : si Dieu a relevé trop tôt le fléau de sa vengeance, n'est-ce pas que les fidèles se sont montrés trop tièdes, trop peu soucieux de sa gloire, trop attachés à leurs intérêts matériels ? Ce retour des catholiques sur eux-mêmes, effectué non pas pour regretter la fureur des matines parisiennes mais pour attribuer à leurs propres péchés l'inachèvement de la "grande purification", se traduira chez les ligueurs, après 1576 et surtout après 1585, par un vaste mouvement pénitentiel d'expiation collective : ils tourneront alors leur violence contre eux-mêmes plutôt que contre les hérétiques, notamment lors des flagellations des pénitents encagoulés menés en procession dans les villes et animés du désir pathétique de parvenir à la réconciliation avec Dieu.

p. 286
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L’entrée de Montaigne en magistrature fut assez mouvementée. Son oncle, Pierre Eyquem de Gaujac, avait acheté, on l’a dit, une charge de conseiller à la cour des aides érigée à Périgueux en 1554 ; il l’a transmise à son neveu en 1555 ou 1556 — la date précise est ignorée — avec une dispense d’âge pour ce dernier. Montaigne n’a pas exercé très longtemps dans cette ville ; peut-être même n’a-t-il pas été très assidu, car la jeune cour a dû lui paraître dès le début promise à un avenir bien incertain : les protestations du parlement de Bordeaux et des cours des aides de Paris et de Montpellier, dont les ressorts se trouvaient amoindris, furent telles que le roi dut se résoudre à la supprimer, en mai 1557, et décider que ses membres seraient incorporés au Parlement bordelais. De nouvelles difficultés surgirent aussitôt ; le Parlement n’était pas prêt à obtempérer et émit de vigoureuses récriminations. Le gouvernement royal recula et imagina alors une solution bâtarde, dont l’échec était prévisible : par l’édit de septembre 1557, il ordonna d’accueillir les nouveaux venus dans une chambre des requêtes du palais — à ne pas confondre avec les requêtes de l’Hôtel, tribunal des maîtres des requêtes — dont la création, décrétée en 1543, n’avait pas encore été mise en œuvre. Cette chambre devait s’adjoindre à celles qui existaient déjà au parlement de Bordeaux : la grand-chambre, la plus prestigieuse, qui jugeait en dernier ressort et présidait, lors des assemblées plénières, à l’enregistrement des actes royaux ; les deux chambres des enquêtes, qui instruisaient les affaires et préparaient les arrêts ; enfin la tournelle, qui s’occupait des crimes, ainsi appelée parce que les magistrats des autres chambres y siégeaient à tour de rôle. La nouvelle chambre, instituée sous le titre de « cour des aides et chambre des requêtes du palais de Bordeaux », possédait un statut spécial, puisque ses membres, en sus de l’accueil des requêtes des justiciables et du jugement en première instance des causes de certains privilégiés, conservaient pour la Guyenne leur ancienne compétence en matière de contentieux fiscal, ce qui leur valait des gages annuels de 500 livres, supérieurs à ceux des magistrats des enquêtes qui n’en percevaient que 375 — à quoi s’ajoutaient, pour les uns comme pour les autres, des épices, taxes accordées aux rapporteurs de chaque affaire traitée.
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Deux figures emblématiques cristallisent la réflexion de Montaigne sur l’importance de conquérir une autonomie intérieure : l’ami parfait et le cannibale. Elles se sont imposées à son esprit à la suite de rencontres : la première avec Étienne de La Boétie, son collègue au parlement de Bordeaux, trop tôt disparu, la seconde avec des « sauvages » brésiliens ramenés du Nouveau Monde par des marchands. Ces deux événements décisifs sont évoqués à plusieurs reprises dans les Essais ; cependant, leur réalité objective s’est souvent dérobée aux commentateurs qui ont tenté de la reconstituer. C’est qu’ils ont surtout donné matière à la construction de deux paradigmes idéalisés, propres à fournir au philosophe la solution du problème qui le hantait : comment concilier la liberté avec l’obéissance ? L’ami se soumet aux lois de son pays, mais porte sur elles un regard radicalement neuf qui lui permet d’échapper à l’asservissement ; il offre en outre la jouissance d’une douce égalité. Le sauvage, lui, vit sans lois, dans l’innocence originelle d’une humanité encore accordée aux préceptes de la nature. Chacun à sa manière propose une leçon dont Montaigne ne pouvait manquer de tirer profit.
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(Attentat contre Coligny, 22 août 1572).
Aucune des suppositions émises par les contemporains sur le ou les commanditaires du guet-apens ne réunit des preuves assez plausibles pour les étayer ; toutes, au contraire, se révèlent fragiles. Mais, avant d'aller plus loin, ne faudrait-il pas s'interroger sur cette obstination à rechercher les instigateurs du crime parmi les souverains ou les grands ? Préoccupation compréhensible chez les contemporains, pour qui il était inconcevable qu'un acte aussi hardi ait été l'oeuvre de petits personnages, mais plus difficile à expliquer chez les historiens d'aujourd'hui. L'histoire offre assez d'exemples d'attentats commis précisément au moment où des négociations de paix semblaient aboutir, dans le but de les saboter et de relancer la guerre, pour qu'on ne puisse pas imaginer que tel ait été le cas le 22 août 1572. Pour saborder la paix célébrée de façon si éclatante - et si provocante - lors des noces d'Henri de Navarre et de Marguerite de Valois, point n'a été besoin de rechercher l'aval d'un grand ; la fureur meurtrière des catholiques parisiens les plus enflammés a pu fournir une incitation suffisante aux auteurs de l'entreprise. Le fait que Maurevert, Villemur et Chailly aient appartenu aux réseaux guisards prouve seulement que ces réseaux ont bien fonctionné et ont fourni l'indispensable logistique. Rien ne dit qu'Henri de Guise ou son oncle Aumale aient été tenus au courant ; peut-être même a-t-on voulu, en les impliquant malgré eux, les obliger à sortir d'une inaction jugée scandaleuse par leurs partisans. Car l'issue de l'attentat ne faisait guère de doute : la colère des protestants allait se retourner contre les Lorrains et la guerre allait reprendre, entraînant cette fois l'éradication définitive de l'hérésie, comme pouvaient l'espérer les plus radicaux des catholiques, fomentateurs probables du complot contre l'amiral.

pp. 140-141
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... "tolérance". Ce mot, sous sa plume et sous celle de ses contemporains, ne désigne que la résignation à un mal qu'il faut supporter.

p. 166
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