Je ne sais pas si, comme le laisse entendre la quatrième de couverture, Eyja l'héroïne " parviendra à écrire le roman auquel elle pense depuis des années ", mais moi, je ne parviendrai pas à terminer ce roman. Je suis péniblement parvenue à la 208ème page - j'ai terminé un chapitre - et je n'ai pas tourné la page suivante.
C'est rare, très rare même, mais je n'accroche définitivement pas.
L'intrigue promettait pourtant : promesse d'un nouveau départ après un mariage raté, projet d'écriture sensé accompagner un renouveau. Bref, je m'étais laissée séduire par le résumé. Mais voilà, je n'éprouve aucun plaisir à poursuivre la découverte de la vie compliquée et pour moi sans saveur de l'héroïne qui, à presque la moitié du livre, n'a toujours pas véritablement commencé à écrire, se perd dans des détails de sa vie sans intérêt, passe sans aucun fil conducteur du présent au passé et vice-versa.
Malheureusement, le " style vif et sans fioritures " m'a également souvent agacée par son manque de recherche littéraire ; son caractère brut voire journalistique ne m'a pas permis de savourer un style justement, et j'ai eu souvent l'impression que la traduction n'était peut-être pas à la hauteur du texte original. Je m'explique : il m'a semblé étrange de devoir relire certaines phrases pour en saisir le sens. Ça casse le rythme de lecture et finit par lasser.
Merci néanmoins à Babelio qui grâce à masse critique m'a déjà permis de découvrir des horizons littéraires nouveaux. Dommage, pas cette fois-ci !
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je n'ai pas été au bout de ce livre et c'est rare mais je n'accroche pas. Pourtant je l'avais choisie car je trouvais la 4ème de couverture prometteuse
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Cent mille couronnes. Une somme rondelette que la grand-mère d'Eyja lui propose pour un nouveau départ, pour accompagner la cousine Rúna en Suède, peut-être écrire le livre dont elle parle depuis longtemps, et surtout quitter son mari, un homme de vingt ans son aîné, surnommé le Coup de vent, un ivrogne avec qui elle entretient une relation destructrice. Eyja hésite, elle aime son mari, croit encore pouvoir l'arracher à ses démons, pense qu'il sera perdu sans elle. Finalement, elle cède, pressée aussi par sa mère et suit Rúna, la Reine du ski, dans son camp de vacances suédois. La cousine, femme forte et volontaire, lui impose une sorte de rééducation, à coup de lever matinal, nettoyage des chalets, baignade dans le lac, refuse de lui passer le Coup de vent au téléphone et l'encourage à coucher avec un autre homme. Entre retours sur le passé, souvenirs d'enfance et profondes réflexions, Eyja se reconstruit et couche sur le papier les mots qu'elle gardait au fond d'elle depuis si longtemps.
Dame Joliette de France, c'est ainsi que dans cette famille les femmes appellent l'aînée de leurs filles. Une famille où l'écriture tient une place importante, le grand-père d'Eyja, dit le Poète National a d'ailleurs reçu le prix le plus prestigieux. Sa mère écrivait, elle aussi, jusqu'à ce que les mariages successifs et l'alcool la coupent des mots. Et quand Eyja écrit son premier article, sa mère cesse définitivement d'écrire. La fille a-t-elle volé son don à la mère ? Quoi qu'il en soit, la culpabilité ne la quitte plus et elle ressent le besoin de sauver les gens, quitte a se perdre. Mariée presque par hasard à un écorché vif qu'elle croit pouvoir consoler et guérir, Eyja veut réussir là où elle a échoué avec sa mère. Le livre, largement autobiographique, puisque le grand-père d'Audur JÓNSDOTTIR n'est autre que Halldór Laxness, récompensé d'un prix Nobel, explore la transmission et aussi le travail d'écriture, riche de difficultés et de satisfactions mêlées. L'auteure écrit sans souci de linéarité temporelle, passant du passé au présent, sautant vers le futur. Ce procédé est déstabilisant de prime abord, mais il faut, pour apprécier cette lecture, entrer dans le monde particulier d'Eyja où la colère et la folie cachent une tendresse pudique. L'écriture saccadée, brouillonne, fouillis, prend sens dans la vie chaotique d'une femme qui tente de se remettre sur les rails. C'est un livre difficile à appréhender mais riche d'enseignement sur la création littéraire et la difficulté de se construire dans l'ombre d'un grand homme. Sensible, puissant, loufoque par moment, un roman à découvrir.
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Pour une fois nous ne sommes pas dérouté par la prononciation des prénoms islandais, le coup de vent, la reine du ski, la fille aux yeux d'oiseau marin, grand mère ou maman, c'est compréhensible pour nos petits neurones de français.
Nous ressentons l'étouffement qui laisse exsangue Eyja, sur cette île, si refermée sur elle même, coincée par l'atmosphère, la culture, les préjugés, l'isolement.
Alors la solution est elle ici aussi l'exil ?
Drôle de roman, on s'y ennuie, on s'y amuse, on n'y comprend rien, on croit tout deviner .... c'est comme dans la vie, c'est dans ce roman.
Ai je aimé, pas vraiment.
Me suis je ennuyée, oui parfois.
Suis je aller jusqu'au bout, oui car un fil ténu me tenait ...
Il était important d'aller jusqu'à la fin de l'histoire, de l'histoire de ces femmes, de leurs amours, pour qu'elles continuent d'exister comme nous souhaiterions toutes que nous mêmes, que nos mères, que nos grands mères laissent aussi leurs traces dans l'Histoire.
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Lorsque j'accepte de participer à une masse critique intermédiaire, c'est toujours parce que pense qu'un livre est susceptible de me plaire, mais pour une fois, hélas, je me suis trompée.
Eyja est une jeune femme qui se laisse allée, mariée à un ivrogne de l’âge de son père. Sa grand-mère et sa cousine la prennent en main, pour l’aider à tourner la page de cet homme et qu’elle se mette enfin à vivre pour elle et à écrire.
Se reconstruire, prendre un nouveau départ, écrire, le postulat de départ me plaisait bien, mais je me suis vite enlisée dans le fouillis de ce roman.
Dans un premier temps, les flash-back ne me posaient pas de problème, surtout que je parvenais encore à les situer chronologiquement.
Mais au fur et à mesure qu’on avance dans l’histoire, celle-ci devient aussi embrouillée que l’esprit d’Eyja. Le passé proche, lointain, le futur et le présent se mêlent et se mélangent parfois jusque dans le même paragraphe, on perd le fil de l’histoire…et malheureusement on se lasse et on n’en voit plus le bout.
Eyja tourne la page, mais à quel prix pour le lecteur !
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Bien que j'entende les critiques négatives, je suis en colère. Surtout contre l'éditeur d'avoir oublié ce roman qui semble le seul à avoir été traduit de Auður Jónsdóttir. Cette femme est la petite fille de Laxness, et par ce fait est assez connue en Islande. Ce livre est quasi autobiographique même s'il ne se vend pas comme tel, et pourtant....les personnages présents dans ce roman sont assez connus par la plupart des islandais. A sa sortie ce livre avait fait du bruit.
J'ai lu le livre et je l'ai adoré. Ayant vécu quelques années en Islande j'ai reconnu des personnages public. Et oui....C'est un peu le bordel dans les chapitres, la chronologie, et les histoires, bienvenue dans la vraie tête d'un islandais (rire, quoi que)
Par contre pour un public étranger, je comprends la perte.
Mais quelle honte de ne pas publier d'autre romans de cette fabuleuse auteure !
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Eyja est une jeune femme qui a fait les choses dans le désordre. Poussée par le besoin de s'émanciper, elle s'est mariée à un homme de vingt ans son aîné. Son mari, qu'elle appelle le Coup de Vent est un alcoolique notoire qui ne fait rien pour s'arranger. Poussée par sa famille, et notamment par sa grand-mère, Eyja est invitée à passer quelque temps chez sa cousine, Runa (aussi appelée la Reine du Ski) en Suède. Loin de ses racines et de ses attaches maternelles (sa mère, sa grand-mère et sa soeur Agga la hantent en permanence), elle tente d'écrire pour prendre un nouvel élan vital.
Mais la Reine du Ski ne l'entend pas de cette oreille et l'occupe à la location et au nettoyage des cottages qu'elle détient. Elle est aussi priée de s'occuper des enfants de la cousine et surtout de ne pas tenter d'évoquer un quelconque retour en Islande (du moins certainement pas mariée au même homme). Eyja subit, endure et ne tente même pas de s’enfuir car cette nouvelle expérience loin de chez elle l’empêche de prendre de vrais décisions pour son couple auprès de son mari. C’est si facile de s’éloigner lorsque la famille cautionne et paie la virée libératrice hors du ménage !
Les personnages féminins tiennent une place de choix dans ce récit où tous sont rebaptisés : Dame Joliette de France pour la mère, la Reine du Ski pour la cousine Runa...
Toutes sont sympathiques et semblent vouloir exclure l'homme s'il est trop faible (c'est le cas de l'alcoolique de mari d'Eyja) et dépassé. Le texte est échelonné entre l'Islande, la Suède et Berlin, où Eyja pourrait bien rencontrer ce qu'elle nomme le Mari à Venir. Ce décloisonnement des frontières et ces noms fantasques rendent l'histoire presque onirique et sans véritable ancrage chronologique.
Les écrivains Islandais sont surprenants (l'auteur est ici la petite-fille de Halldor Laxness... tout s'explique !) et si vous êtes ouvert à un récit original et qui fait fi de la linéarité, arrêtez tout, ce roman a été écrit pour vous !
Merci à Babelio et aux Presses de la Cité de m'avoir permis de lire ce livre dans le cadre d'une Masse critique spéciale.
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Eyja, jeune fille d’une vingtaine d’années, mariée avec un homme de vingt ans son ainé et accessoirement alcoolique, se voit offrir la possibilité de « Tourner la page » : sa grand-mère lui donne 100 000 couronnes si elle quitte son mari et part en Suède avec la cousine Runa. Cet éloignement lui permettra de terminer son roman, de rompre avec le Coup de Vent mais aussi de faire le point sur son passé et celui de sa famille.
Auður Jónsdóttir a publié jusqu’ici six romans depuis ses débuts en 1997 et a été primée plusieurs fois. « Tourner la page » est son seul roman traduit en français à ce jour. Tout comme l’héroïne de son roman, elle est la petite-fille d’un auteur islandais célèbre, Halldór Laxness que l’on ne présente plus.
D’emblée Auður Jónsdóttir déroute par son style très particulier : les lieux, les époques se mêlent, les personnages se chevauchent, difficile parfois de suivre le rythme effréné des situations sans y perdre le nord ! Petit à petit comme l’on met en place les pièces d’un puzzle, l’histoire personnelle de Eyja se dessine et le fil de sa vie devient plus clair. À la lumière des anecdotes sur ses ascendants, le jour se fait finement sur les mauvais choix et penchants du personnage. Il faut donc s’accrocher dans une grande partie de la lecture assez décousue pour comprendre les cheminements psychologiques de l’intrigue.
Il faut jongler dans le déroutant affrontement du présent, du passé et du futur : si le récit est bien raconté au présent , de nombreux flash-back apparaissent régulièrement dans les chapitres afin de situer le personnage principal dans la saga familiale. Mais ce présent n’est que le passé d’un futur déjà en place : certains chapitres relatent l’histoire de l’héroïne plusieurs années après son voyage en Suède.
Les personnages secondaires (en dehors de la famille) portent des surnoms très symboliques, on ne s’encombre donc pas de noms islandais imprononçables et sans intérêt, ce qui simplifie grandement la lecture et a le mérite de situer chacun dans son rôle en un seul coup d’œil (ex : Coup de Vent, Reine du Ski…), ce qui se rapproche assez de la lecture des sagas traditionnelles.
Je retrouve dans ce roman divers thèmes chers à beaucoup d’auteurs islandais contemporains : les voyages (initiateurs de changements), les rudesses du climat, l’alcoolisme, la complexité des rapports humains au sein des familles, la place du destin dans les choix de vie, le poids du passé des ancêtres entre autre, qui ne sont pas si loin des sujets déjà abordés en d’autres temps dans la littérature islandaise médiévale.
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Tourner la page n'est pas un roman banal ni facile. Pour apprécier son charme envoûtant autant que déroutant, il m'a fallu oublier ma grille de lecture habituelle, me mettre en état de lâcher-prise littéraire, et me laisser emporter dans l'univers diffracté d'Audur, bien éloigné de celui qui m'est familier.
Le pitch tient en deux lignes et c'est dommage : Eyja est mariée à un ivrogne de 20 ans son aîné surnommé le Coup de vent. Le couple bat de l'aile, Eyja sait que parfois, aller prendre une bouffée d'air à l'étranger est nécessaire aux femmes pour comprendre que leur couple ne marche pas. C'est ainsi que sa grand-mère lui offre, à la condition qu'Eyja quitte son mari, 100 000 couronnes pour se rendre au pays des insectes et des serpents d'eau, en Suède, chez une cousine, où elle pourra enfin travailler sur le roman qu'elle rêve d'écrire.
Eyja-Audur est une jeune femme capable à la fois de tenir un stylo et de parler le langage de la campagne. Prête à s'emparer du passé comme de n'importe quelle vision fantasmagorique. Elle convoque ses souvenirs familiaux et au-delà, islandais, et les raconte dans un ordre aléatoire qui est celui imposé par sa mémoire et son lent et douloureux travail de renaissance. Dans des chapitres aux titres très explicites, elle évoque surtout la vie de sa mère et de sa grand-mère, ainsi que d'autres femmes aux surnoms poétiques : “la reine du ski”, “la fille aux yeux d'oiseau marin”, “la cantatrice”, mais également une avalanche tueuse qui est gravée dans la mémoire collective islandaise, la venue de David Lynch à Reykjavik, un club d'occultisme réservé à des femmes spirituelles, une rencontre sexuelle avec un météorologue qui est dans les nuages. Tous ses souvenirs baignent dans une atmosphère onirique comme s'ils étaient floutés par le brouillard islandais. L'évocation de comptines ou histoires traditionnelles qui se transmettent oralement ajoute encore du mystère à ce roman dans lequel l'intrusion de sylvestres diablotins ou d'une armée de trolls paraîtrait naturelle à tout lecteur qui s'est laissé embarquer par Audur.
Dans la seconde partie de “Tourner la page”, Audur expose un guide de sa rééducation en 10 étapes. Et enfin : “La magie, dans l'écriture d'un roman c'est de savoir l'achever. L'écrivain doit boucler la boucle pour chacun de ses personnages. Ceux qui ne se plient pas à cette règle et oublient de conclure chaque détail ne savent pas raconter une histoire.”
Et bien, je vous le dis, Audur Jonsdottir sait raconter une histoire, une belle histoire sensible de femme islandaise. “Tourner la page” est un roman insulaire et féminin, poétique, attachant, singulier et novateur, que j'ai été enchantée de découvrir.
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Roman masse critique que j'étais ravie de recevoir, étant vivement intéressée par la littérature scandinave ;-)
J'ai peiné!!! En fait, le style m'a plu, mais les constants allers et retours dans le temps, sans qu'on sache explicitement de quand il s'agit, passé, présent, futur, forcent le lecteur à s'interroger continuellement sur "où" il se trouve, là... et c'est fatigant! D'un côté, on apprend des pans de vie au fur et à mesure, mais de l'autre, la cohérence se perd... En plus, des questions restent sans réponse (genre, y'avait quoi dans les carnets conservés par la voisine de la grand mère???? on sait que c'est de l'écriture automatique, mais l'auteur sous entend que ces carnets ont impacté de façon importante la vie de notre héroïne, Eyja, et on n'a jamais su ce qu'il y avait dedans!!!!!!!!!!!!)
Donc voilà, bof en fait, un peu déçue quand même...
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Eyja, jeune islandaise, a épousé un homme de vingt ans son aîné, qui l’a emmené vivre dans un petit village de pêcheurs. Elle rêve d’écrire mais passe ses journées à l’usine pendant que son mari se noie dans l’alcool. Sa grand-mère lui propose de lui financer un séjour en Suède, à condition qu’elle quitte cet homme toxique.
Tourner la page a un sujet qui semble des plus rebattus : le portrait d’une femme qui se trouve à la croisée des chemins, qui sait qu’elle ne pourra pas revenir sur le choix qu’elle va faire. Mais au fil des pages, la structure narrative se complexifie, l’auteure multiplie flashbacks et flash forwards, au point que l’on se perd parfois dans l’histoire, sa chronologie et sa narration, d’autant que les dialogues ne sont pas séparés du reste du texte.
Apparaît alors petit à petit, en filigrane, le portrait d’une jeune écrivaine qui a des difficultés à écrire, se demande comment rédiger un bon texte, essaie de conquérir sa liberté et de devenir maîtresse de sa destinée. Avec elle, mais aussi sa mère, sa cousine Rúna ou sa grand-mère, Audur Jónsdóttir nous propose de suivre l’histoire de beaux personnages féminins, riches et complexes, pleins de doutes et d’imperfections.
Tourner la page n’est pas un roman à lire en dilettante. Mais il en vaut la peine. Merci à Babelio et aux Presses de la cité de m'avoir permis de le découvrir.
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La page se tourne au beau milieu du livre.
C'est toujours difficile et douloureux de tourner la page : il faut une bonne raison pour le faire. Donc cela demande un temps de réflexion, se retourner sur sa vie passée, faire un point, espérer un sacré mieux dans le futur pour sauter le pas.
C'est l'histoire certainement un peu autobiographique que nous raconte avec beaucoup de finesse, de tendresse et de pudeur Audur Jonsdottir.
L'action se situe des années 90 à nos jours. Toute la première partie se situe en Islande et la seconde , d'abord au soleil estival de la Suède et puis, en différents pays d'Europe (mais cela n'a plus alors d'importance : le monde lui appartient)
Le livre débute quand la grand-mère la met devant une réalité, la réalité d'Eyja. Eyja a un désir, un besoin profond d'écrire, mais n'y arrive pas. Elle vit auprès d'un homme qu'elle aime et qui l' aime, dans des conditions financières plus qu'aléatoires, entre beuveries et dettes. Le marché proposé à Eyja est de partir en Suède avec sa cousine Runa pour s'éloigner de cet homme et se mettre réellement à écrire.
Dans cette première partie c'est toute l'errance d'Eyja, les souvenirs qui lui reviennent en tête, interférant avec ce qu'elle vit aujourd'hui ; c'est en désordre, comme lorsque l'on doit prendre une importante décision et que tout se bouscule dans la tête que l'on n'arrive pas à ordonner sa pensée ...Et c'est avec ce charivari que l'auteur nous parle d'Eyja.
De la difficulté de vivre dans une famille de toqués des mots …
Elle est fascinée par les mots et éprouve ce besoin impérieux de les voir imprimés sur du papier, toujours émerveillée que l'agencement de ces mots construisent, s'agencent en un roman, un article.
Elle a déjà publié quelques articles, avec des fulgurances comme l'interview d'une strip-teaseuse mais son grand projet c'est de publier un roman avec tous ses mots, ses mots rien qu'à elle
Et c'est bien sur ce désir aussi inextinguible qu'une soif, comme celle des alcooliques, que la grand-mère va utiliser comme un levier pour la faire abandonner sa vie actuelle, son Coup de Vent et cet sorte de brouillard dans lequel elle évolue
Eyja a du mal à se reconnaître en tant que femme ; les femmes qui l'entourent ou sont comme Grand-mère, parfaite maîtresse de maison, assistante parfaite du Poète National, mère et grand-mère parfaite et toujours accueillante et attentionnée. Maman mettant des enfants au monde et écrivant des articles. La féminité, la maternité, ça lui fait peur...
Ce qui caractérise Eyja c'est aussi sa culpabilité, culpabilité vis à vis de sa mère qui ne décroche pas de l'alcool ; mais qui arrête d'écrire quand sa fille publie ses premiers articles. Culpabilité d'Eyja face au drame de l'avalanche qui a détruit le village de son amie. Elle se sentira inutile devant cette catastrophe et préférera prendre un avion pour aller à l'autre bout de l'Islande pour travailler à une chaîne de congélation et créer de nouveaux liens avec des inconnus
Comment comprendre qu'elle soit mariée à ce ...Coup de Vent
Quand elle fait une crise d'épilepsie, il n'appelle pas les secours, il lui donne un KitKat et un verre d'eau et elle s'endort. Rassurant ; C'est certainement une des raisons pour laquelle elle se sent si bien avec lui : sa présence la rassure, comme un pilier, un rocher qui a affronté des tempêtes et se moque des ...aléas . Lui seul arrive peut-être à la libérer, lui faire oublier toutes ses culpabilités : « elle s'estimait heureuse d'avoir enfin rencontré quelqu'un qui ne s'encombrait pas de toutes ces broutilles que les gens croyaient devoir faire chaque jour »
L'absence des hommes : Mari passé, Mari à venir, le météorologue, le biologiste, le Poète national (ne pas oublier la majuscule à poète) parce que le seul véritable homme, à la virilité de viking c'est son mari à elle : Le Coup de Vent. Non il n'est pas rejeté par la famille d'Eyja pour preuve, sa sœur cadette Agga préfère vivre au foyer conjugal d'Eyja que dans la maison de leur mère ; avec le Coup de vent, Agga partage en douce la dope, l'alcool, les livres et les parties de scrabble. Faut dire que chez Maman l'atmosphère est souvent aussi alcoolisée et tumultueuse. Entre Eyja et le Coup de Vent il existe une harmonie : celle d'un couple qui « fonctionne ». Alors pourquoi faut-il les séparer ?
C'est la neige et l'obscurité et le froid glacial en Islande mais la chaleur et la tendresse l'entoure. La grand mère , la femme du poète nationale le véritable socle de cette famille : toujours accueillante et qui sait ce qu'il y a à faire.
Dans ce roman il y a ceux qui ont des surnoms et les autres. Pour les plus proches elle n'utilise pas de surnom Grand-mère, Maman, Agga sa soeur : elles sont sa chair Et pour le second cercle une distance, comme cette amie déchirée par la catastrophe ; la Fille au regard d'oiseau marin et sa cousine, boule d'energie Runà, la Championne de ski
Pour le mari d'EYJA, le Coup de Vent ; on ne connaîtra jamais son véritable nom. Dans le dernier tiers du livre on apprendra que ce surnom lui a été attribué pour son impétuosité à entrer en bagarre. Mais pour Eyja quel beau nom : élément climatique qui souffle quand on ne l'attend pas , renverse tout sur son passage et conséquemment apporte une grande bouffée d'oxygène. Et c'est bien ce qu'il est pour elle.
Beaucoup de passages émotionnellement forts, avec ces phrases courtes, ces dialogues sans ponctuation, qui donne toute la force de ces paroles échangées et/ou intérieurs. Comme la scène sur le palier quand Coup de Vent vient la chercher et qu'Eyja se trouve coincée entre cet homme, son homme,et les femmes de sa famille. Il lui est refuge et elle lui est refuge. Comment peuvent-ils continuer ces deux là ? Et comment ne pas donner raisons à ces femmes aux gants de caoutchouc, un vaporisateur d'Ajax dans une main, un verre d'alcool dans l'autre, aux lèvres maquillées d'un rouge à lèvres acheté en promotion ! Elles mettront tout en œuvre pour l'éloigner maintenant qu'elle a accepté de partir un peu. La douleur, l'égarement d'Eyja et Coup de Vent sont palpables
Et puis un souvenir revient et on fait une embardée dans le passé récent,pour se retrouver sur ce palier sauf que l'arrivée de grand-mère change le ton ; certes Eyja n'a rien d'une bonne ménagère. Il n'y a rien a y faire et le ton devient léger presque ludique. Sauf pour Eyja. Comment être différente ? Son Coup de vent la prend comme elle est ; pas sa famille, pas ses amies. Question fondamentale : comment être soi sans accepter de se contorsionner pour entrer dans le moule ?
Et puis, basculement brutale : Runa et Eyja sont en Suède. Runa l'emmène dans son camps de vacances et elle va la rééduquer en dix leçons. Elle a un côté un peu « Full Metal Jacket » dans ses méthodes la Reine du ski : en priorité ne pas lui transmettre les appels téléphoniques de son Coup de Vent, réveil aux aurores, nage dans le lac, nettoyage intensif des chalets, aller au-delà de son épuisement, repousser ses limites et l'épreuve la plus difficile : coucher avec un autre homme. Avec toute la folie, la tendresse de Runà. Et ça marche. Un soir elle lira au enfants au feu de camp ce qu'elle vient d'écrire ; « Ils ressentent l'histoire qui émane de sa plume. » et tout à coup elle prend conscience de tout ce qui ne va pas « Le chapitre est rempli de fautes d'orthographe et de solécismes, de phrases incohérentes, d'expressions décousues, de contradictions et le pire : de pensées confuses qu'elle-même ne comprend pas. »
La suite, c'est son chemin et de femme et d'auteur.
Un très, très beau, prenant, dérangeant , percutant roman.
Son écriture est incisive, dérangeante avec des fulgurances comme le passage, dantesque, dans la rue des prostituées. Dans la seconde partie, l'atmosphère est plus ludique, plus drôle. Elle va à l'essentiel comme le passage où une adolescente partage leur vie pendant que la mère de celle-ci meurt d'un cancer : « Et puis un jour passa. » Rien à ajouter. Tout est dit.
Je ne suis pas prête d'oublier ce moment de lecture où j'ai ressenti le changement d'écriture quand elles arrivent en Suède. Un choc !
C'est rare de découvrir un nouvel auteur aussi prometteur. Inventivité de l'écrit et profondeur de la réflexion : un livre que je ne vais pas tardé à relire.
Quand la Masse critique offre deux livres en un seul et chacun d'aussi belle qualité !
Et puis un dernier clin d'oeil : un des conseil d'écriture est qu'un roman doit boucler, et là, il « boucle » :
première phrase : « Au début, on devra contempler la fin »
dernière phrase : « En avant toute »
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Merci à Babelio et à Masse Critique de toujours et encore donner l’opportunité de découvrir des autres univers, d’autres écrivains. J’ai souvent eu de bonnes surprises...
Ici, hélas, tourner la page (de ce livre) a été pour moi… Un calvaire, tant j’ai trouvé l’écriture pesante, nombriliste et souvent maniérée. Je suis passé complètement à côté de cette histoire de rupture, de ces pérégrinations entre l’Islande et la Suède, de ces heures d’introspection autour des activités ménagères (ah le ménage, entre femmes, présenté comme un exutoire,…), de cette histoire, ou au final les hommes en prennent pour leur grade, relayés dans un anonymat brumeux, à l’arrière-plan, sans nom (certes, souvent, ils le méritent bien…), mais où les femmes (les mères surtout, et les copines des mères,…) ne valent finalement pas mieux.
Cette rupture a sans doute été douloureuse pour la narratrice. Pour nous elle est pesante, jusqu’à la dernière page et la rupture libératrice.
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Vous voyez cette couverture avec une jeune femme en apesanteur, une machine à écrire qui semble la fuir, des feuilles dactylographiées qui s’envolent… ? Je trouve qu’elle représente bien l’histoire de ce roman.
Pour se retrouver, Eyja désire écrire ; livrer sa vie et par la même occasion celle des autres, des âmes islandaises, abruptes et caillouteuses (deux termes pris dans le roman pour décrire les monts). Elle commence à tâtons des chapitres qui s’éparpillent entre des lendemains, des veilles, des temps nouveaux et des passés, puis s’affirme au fil des confidences. Ça semble brouillon, éparpillé, peu évident, difficile et contrarié, mais ça vient des entrailles. Sa poésie est très personnelle, passionnée, fantasque, échevelée, en construction d’une vie qui tente de renaître.
Eyja est une jeune femme éteinte, qui va quitter son mari qu’elle appelle le Coup de Vent. De vingt ans son aîné, alcoolique, drogué par les barbituriques, destructeur, il est une épave qu’elle ne peut plus assumer. L’existence est devenue tellement pesante, si inutile ! C’est sa grand-mère qui l’incite au divorce et qui va l’aider à s’extraire de ce bourbier en lui offrant ses économies. Elle la bouscule, la ranime, la traite de feignasse et lui propose d’aller retrouver sa cousine en Suède.
Les premiers chapitres du roman qu’elle entreprend sont ceux des souvenirs et des questionnements sur son divorce. La déchirure de cet amour ancien et défait est douloureuse. Dans un style sauvage, authentique, elle nuance son présent et ce passé d’atmosphères colorées froides et chaudes, taiseuses et exubérantes. Ce coup de vent, comme elle l’a aimé !
Elle met en scène les personnes qui l’entourent et comme pour les indiens, elle leur attribue des surnoms et des légendes. Sa cousine est la Reine du ski, son amie est la Fille aux yeux d’oiseau marin… il y a le Sauveur et la Cantatrice… sa grand-mère, sa mère et tous les autres qui ont survécu à l’avalanche, une catastrophe qui n’en finit pas de causer la désolation. Leurs vies, sa vie, sont intimement liées et on perçoit quelques mystères.
Dans le milieu du roman, elle cite deux titres de Kundera qui pourraient être les siens, « L’insoutenable légèreté de l’être » et « La valse aux adieux ». L’auteur utilise une palette de personnages aux tempéraments bien distincts, puissants, écorchés, et sillonne de l’un à l’autre comme le fait Eyja.
« Tourner la page » n’est pas une lecture facile. J’avoue que je m’y suis noyée. J’ai aimé les aspérités, les résonances, l’âpreté des paysages, mais je n’ai pu m’attacher aux personnages. Les labyrinthes ont perdu la lectrice que je suis. Cependant… c’est un livre que je conseillerai.
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Eyja est une jeune femme islandaise de 23 ans. Sous l’impulsion de sa grand-mère, elle décide de quitter son compagnon, Coup de Vent, un alcoolique de vingt ans son aîné qu’elle a épousé sans réfléchir. Avec sa cousine Runa, elle va en Suède dans l’intention d’écrire. Toutefois, entre l’envie et l’écriture elle-même, le chemin est grand…
Je n’ai pas beaucoup lu de romans islandais mais ceux-ci sont toujours un peu particuliers à leur façon. Pour lire celui-ci, il faut prendre le temps de s’immerger dans le monde d’Eyja, sa famille, ses problèmes, son passé… Le début est un peu difficile, entre les allers-retours dans le passé/présent/futur et le repérage des dialogues, et on est tentés de lâcher prise et pourtant, ça serait une erreur. L’histoire est riche, l’auteur montre la culture islandaise à travers le personnage d’Eyja et surtout elle y glisse des instants autobiographiques quand Audur Jonsdottir parle du grand-père d’Eyja qui a reçu un grand prix de littérature, en référence à son grand-père, Halldor Laxness qui a reçu le Prix Nobel de littérature en 1955. Le récit rebondit entre souvenirs, présent chaotique et futur, entre des moments désenchantés : la difficulté de se retrouver dans une famille déchirée, l’impasse avec Coup de Vent et des moments joyeux avec sa retraite suédoise avec sa cousine Runa qui possède un sacré caractère. D’ailleurs, cette façon de nommer les personnes de son entourage donne son originalité au roman. Je regrette le personnage d’Eyja auxquels les paroles semblent moins puissantes que ses pensées, celui de Runa parait plus fort.
Tourner la page ou comment passer à autre chose, laisser le passé derrière soi. Une très belle histoire, pleine d’émotions. Je ne sais pas quelles parties peuvent se raccrocher à la vie d’Audur mais l’évocation de la carrière littéraire de son mère sacrifiée semble receler une part de vérité. En tout cas, contente d’avoir découvrir cet auteur à travers ce roman sur la famille, les femmes et l’écriture.
Merci à Babelio et aux Presses de la Cité pour cette lecture.
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