Beaucoup de victimes que j’ai rencontrées ont peur d’être des monstres. (…) Elles ont été contrôlées, et par la suite elles se contrôlent elles-mêmes, sans fin, et elles s’auto-censurent. Et si on leur dit qu’elles sont méchantes elles y croient. Elles ont peur d’être méchantes. (p.47) Muriel Salmona, citée par Charlotte Pudlowski
Plus l’amour est présent, le respect, le sentiment d’être redevable et dépendant, plus le risque est grand de faire exploser son socle, ses proches, sa famille, et plus la révolte semble impossible, la dénonciation ingérable, ou pas tout de suite, ou tard, ou au prix de l’exclusion du foyer. (p.225)
Si le silence ressemble aux hivers inéluctables, la parole doit avoir l'obstination des printemps
N’importe quel mot, n’importe quelle sensation peuvent se transformer en projectiles potentiels et faire exploser la douleur, parce que cette guerre-là s’est menée dans la banalité du quotidien. Rien n’est circonscrit dans un ailleurs. Les mines sont tout autour et le sentiment de peur peut être permanent. Vivre dans la peur, ou essayer de s’en protéger. (p.152)
Il y a toujours une partie de moi qui est détruite pour toujours. J’ai complètement reconstruit autour, un échafaudage lumineux, mais la réalité c’est qu’il y a un endroit de moi qui est mort, quelque chose que je n’ai pas, qu’on m’a pris, qu’on a tué, qu’on a détruit. (p.124) Témoignage de Laure, citée par Charlotte Pudlowski.
J’ai été frappée, pendant mes recherches, de constater à quel point le patriarcat se cache ou se légitime par des proverbes qui passent pour des vérités générales, une sagesse populaire. Qui aime bien châtie bien. Qui ne dit mot consent. Ce qui ne nous tue pas nous rend plus forts. Les femmes et les enfants d’abord. (p.245)
Le système de domination de l’inceste sévit dans la plus petite unité sociale qui soit, celle de la famille. Il normalise tout de suite la violence, l’écrasement. Il codifie le silence. (p.163)
On ne se révolte pas contre ceux que l’on aime. C’est ce qui fait de l’inceste une arme de domination si puissante. (p.225)
L’inceste, c’est l’outil premier d’exercice de la domination qui prépare et permet toutes les autres dominations. (p.227)