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Citations de David Cooper (109)


L’état eknoïde à gauche du diagramme est l’état normal du citoyen conditionné et toujours obéissant. Dans cet état, l’homme est étranger à tous les aspects de son expérience, à toute véritable raison d’agir, étranger aussi à son propre corps quand il n’est pas objet d’exploration pour les autres ; il refuse prudemment toute possibilité de changement, si bien que l’on peut dire, sans crainte d’une métaphore déplacée, qu’il a perdu la tête.
La plupart des gens, dans le premier monde, se soumettent à cet assassinat chronique en murmurant seulement quelques plaintes et en oubliant vite leur désaccord. De cet assassinat, la compensation est manifeste : on peut devenir riche ou du moins « aisé », diriger une grosse entreprise ou un Etat, ou même se réjouir de la dévastation écologique d’énormes surfaces au profit de valeurs admises.
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Je crois que la difficulté principale se trouve dans l’idée qu’il faut « traiter » les patients. Traiter est un terme si ambigu : on traite du pétrole brut, des cuirs, des aciers ou des patients. On parle généralement de traiter chimiquement des matériaux bruts afin qu’ils aient meilleur goût, qu’ils soient plus utiles ou qu’ils durent plus longtemps. Traiter est essentiellement une perversion mécanique des idéaux médicaux, qui s’oppose de bien des manières à la tradition authentique de la guérison.
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Mais qui sont les hommes normaux ? Comment se définissent-ils eux-mêmes ? Les définitions de la santé mentale proposées par les experts se ramènent généralement à cette notion : la conformité à un ensemble de normes sociales plus ou moins arbitrairement admises ; ou bien elles sont si commodément générales –du type : « la capacité de tolérance et de développement à travers les conflits »- qu’elles se privent elles-mêmes de toute signification opératoire. On en vient à cette amère pensée que les hommes normaux sont peut-être ceux qui n’ont pu se faire admettre dans un service d’observation mentale. C’est-à-dire qu’ils se définissent eux-mêmes par une certaine absence d’expérience.
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« Je suis allé seul à une manifestation avec des amis. »
Si un grand nombre de personnes disaient cela, Grosvenor Square serait à feu et à sang.
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Le bon repas que nous recherchons dépasse certainement la satisfaction orale et peut n’être qu’un caillou dans notre bouche. C’est un peu mieux que de ricaner lorsqu’on entend un appel urgent, dépassant toute expression personnelle, et qui réclame que quelqu’un dise la vérité. Telle qu’elle se déploie dans le langage, la structure du mot « dire » est ambiguë. D’après ses origines linguistiques, ce mot se rapporte à n’importe quel acte, depuis décompter des entités quelconques jusqu’à raconter, ce qui est une violence poétique contre l’arithmétique. Raconter, c’est dire une histoire vraie qui pisse inexorablement sur la table de multiplication et se rit, avec quelque compassion, de l’absurdité avec laquelle certaines personnes croient qu’elles apprennent aux autres que deux et deux ne font ni cinq, ni six, ni trois. Pour que quatre soit possible, nous devons le proscrire en tant que possibilité jusqu’à ce que nous soyons en mesure de l’accepter ou de le refuser.
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L’essence profonde du désir est d’être autodestructeur. Finalement, ce que nous mangeons, ce sur quoi nous chions, ce à quoi nous nous soumettons, c’est nous-mêmes !
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[Le désir d’évacuation] se manifeste dans le besoin excessif de chier ou de péter sur les gens, de pisser de haut sur eux et de leur cracher au visage à cause des provocations excessives qu’ils nous font subir. Il atteint des limites psychotiques […] avec l’emploi de bombes et de fusils. Ce fut le cas du massacre de Song-My Lai au Vietnam, belle démonstration du désir d’évacuation. Que quelqu’un l’éprouve au point de lâcher la bombe H ou de déclencher une guerre chimique, c’est une autre affaire.
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Toute nourriture est un sacrifice caché, toute gourmandise, de la nécrophilie déguisée.
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Jusqu’ici, il semble encore impossible, dans notre culture, de recevoir sans angoisse et sans panique une communication qui élude les platitudes stériles et évasives du discours social courant.
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Le bonheur repose toujours sur la sécurité, c’est-à-dire sur une limitation apparemment confortable de nos possibilités. La joie, elle, est traversée par le désespoir qui, en bout de course, la rejoint. Alors que le bonheur est un sentiment égal, monotone, dérivant de la sécurité, la joie exprime pleinement et simultanément tout un spectre : joie à un extrême, désespoir au centre, puis joie encore.
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A un niveau plus subtil, la jalousie semble avoir pour modèle la monade et non la triade. L’une des pires fatalités qui pèsent sur les relations à deux […] est que ces deux personnes entrent dans des rapports symbiotiques tels que chacun devient le parasite de l’autre et que chacun se trouve dans l’esprit de l’autre. On cherche A et on le trouve dans l’esprit de B, on trouvera B dans l’esprit de A ; on traversera ainsi une série d’intériorisations des intériorisations de l’autre, et de l’autre intériorisé. […] A et B disparaissent au profit d’une entité composte A-B. C arrive alors, il n’est le troisième qu’apparemment puisque A et B sont une plutôt que deux personnes distinctes. C, être illusoire, a des « relations » avec B, qui en tant que B est, lui aussi, illusoire. A est troublé par ces relations. La « jalousie » signifie ici que A se voit dans le regard de C. Autrement dit, C c’est A regardant A : la violence avec laquelle A et B ont supprimé leur existence autonome s’étend maintenant à C, qui cesse d’être lui, quoiqu’il ait été auparavant, et devient l’incarnation autoréfléchissante, jusque-là refusée, de A. Le résultat est la rupture soudaine de la pseudo-unité symbiotique A- ; A doit ainsi pour la première fois se voir isolé dans le monde, affronter seul l’avenir et faire de nouveaux chois à partir de sa nouvelle situation de liberté non désirée.
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Il est à noter que des rêves au cours desquels nous faisons l'expérience de notre propre démembrement, précèdent dans bien des cas soit une crise psychotique,soit une période de développement spirituel - disons : soit une période de crise, soit une période de création. D'une possibilité à l'autre, la différence tient principalement à l'intervention de certains processus d'invalidation sociale, lesquels peuvent se révéler tout à fait destructeurs. L'expérience psychotique, judicieusement conduite, peut amener à un état d'humanité plus avancé : mais elle est trop souvent convertie par l'intervention psychiatrie en un état où la personne est bloquée et ridiculisée.
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Dans une large mesure, la "maladie" ou l'illogisme du schizophrène trouve son origine dans une maladie de la logique autour de lui.
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La menace que crée la satisfaction des instincts est, je crois, plus frappante dans le cas d’instincts oraux. Cette menace revêt évidemment une plus grande ampleur parce qu’il s’agit d’une fin ontologique. La satisfaction des instincts signifie, dans tous les cas, la suppression des barrières intérieures et devient par là l’équivalent de la folie. Si ce n’est la folie elle-même. Si nous voulons, maintenant, comprendre la répression dans ses fondements, nous devons la voir comme une panique collectivement renforcée, institutionnalisée et formalisée, la panique de devenir fou, de laisser l’intérieur envahir l’extérieur, et vice versa, la panique devant la fin de l’illusion de l’être.
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Comment apprendre à se mêler de ses propres affaires, comme le fit le poète japonais Basho ? Dans son journal de voyage La Route étroite de l’Extrême-nord, Basho raconte que, peu après s’être mis en route, il vit de l’autre côté d’une rivière un petit enfant abandonné qui pleurait. Il aurait pu revenir au village voisin et procurer à l’enfant une sorte de foyer. Il choisit néanmoins de continuer son voyage solitaire, parce qu’il l’avait ainsi projeté. La pitié de Basho s’exprima abondamment en vers, mais son voyage devait passer d’abord. Il savait qu’il ne pouvait rien pour l’enfant tant qu’il ne savait quoi faire pour lui-même.
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Pratiquement, élever un enfant c’est détruire une personne.
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Il y eut un brouillage progressif des rôles entre les infirmières, le médecin, l’ergothérapeute et les patients. J’ai déjà examinés quelques-unes de ces ambiguïtés entourant le processus par lequel on « devient un patient ». J’essaierai à présent de mettre en lumière un certain nombre de questions gênantes et apparemment paradoxales : par exemple, les patients peuvent-ils « soigner » d’autres patients, et peuvent-ils même traiter les soignants ? Les soignants peuvent-ils prendre conscience et reconnaître franchement dans la communauté leurs propres zones d’incapacité et de « maladie », et leur besoin d’un « traitement » ? Si oui, qu’arriverait-il, et sous le contrôle de qui ? Finalement, ces catégories de « maladie » et de « traitement » n’étaient-elles pas elles-mêmes suspectes ?
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Il y a, relativement parlant, quelque chose de remarquablement sain chez le schizophrène chronique, préoccupé par son monde intérieur, passant sa journée penché sur le chauffage central dans une arrière-salle décrépie : s’il n’a pas de solution à l’énigme de la vie, au moins se fait-il moins d’illusions.
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Si l’on pose le problème de la schizophrénie de cette manière, c’est-à-dire comme celui d’une personne aspirée hors d’elle-même par les autres ou exprimée hors d’elle par elle-même (dans l’amoureuse soumission à l’ingestion vorace d’autrui), de telle manière qu’à la fin plus rien d’elle-même ne lui soit laissé puisqu’elle appartient entièrement à autrui, alors nous devons constater que, si l’internement en hôpital constitue un destin particulier, la schizophrénie n’est rien moins que notre lot à tous.
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On a noté que le malade dit schizophrène avait dû à plusieurs reprises faire face à des exigences contradictoires dans sa famille, et parfois même à l’intérieur de l’hôpital psychiatrique. Certains chercheurs américains ont employé ici le vocable de « double contrainte ». […] on peut dès maintenant l’illustrer par l’exemple banal de la mère qui fait une déclaration contredite par sa conduite : elle dit à son fils : « Va, trouve toi-même tes propres amis et ne sois pas si dépendant de moi », mais en même temps elle montre (hors de toute verbalisation) qu’elle serait bouleversée s’il la quittait vraiment, fût-ce dans cette faible mesure.
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