Citations de Delphine Roux (55)
Le mot Homme a peut être été inventé pour d'autres que moi. Il ne fait pas partie de mon dictionnaire intime.
Je suis toujours le premier franchir le portail du cimetière s'ouvrant sur un râle régulier.(...)J'aime le calme des petits passages entre les caveaux, l'ordonnancement minéral rassurant, la stridulation tranquillisante des grillons.Je ne suis jamais triste sur ces terres recelant du familier, de l'inconnu.
[Koudou suru, agir]
Seki a beaucoup d’activités en plus de son travail. Elle fait du yoga le mercredi midi, va au cinéma le mercredi soir et, chaque samedi matin, elle suit un cours de calligraphie à domicile.
Seki est une jeune femme moderne, dans l’écho des titres de magazines, dans la maîtrise du visible. Elle dit que je devrais faire comme elle, me bouger. Que je serais certainement mieux dans mes baskets. Ses conseils amplifient mon silence.
Mes baskets et moi, je crois, nous nous entendons joyeusement.
Pour Obaasan, comme pour beaucoup de Japonais, les repas se devaient d'être aussi bons que beaux. Et je ne me lassais pas de l'observer rouler le riz des onigiris entre ses doigts, poser patiemment de petits légumes en saumure sur de fines tranches de thon ou verser le mugicha dans des céramiques fleuries.
A pas légers, Asami trottine de-ci, de-là, son petit panier sous le bras. Bien vite, mille trésors attirent son regard ...
Dans ces affirmations péremptoires, j'entends aussi tout ce qu'elle ne dit pas. Tout ce qu'en elle, elle tente, depuis tant d'années, de camoufler.
Je ne remplis guère mon temps vacant. Le plus souvent, j'observe le monde en proximité. Je n'agis pas sur lui, n'essaie pas de le modifier.
Seki nous regarde jouer. Pour le moment, elle ne participe pas. Seki prend le temps, je crois, de se défaire des coquilles vides accumulées.
Je savais qu'il faudrait du temps pour que les chocs de toutes ces années sourdes se muent en cicatrices douces au toucher.
Je ne lis jamais. A part les modes de cuisson des plats préparés, le titre des ouvrages que j'aligne, les prospectus du supermarché à la titraille si racoleuse que je ne peux l'éviter.
Le mot Homme a peut être été inventé pour d'autres que moi. Il ne fait pas partie de mon dictionnaire intime.
Grand mère a toujours été intelligente, plus fine que les événements, dans le détour des choses, sans précipitation. Le souffle coupé, j'ai embrassé ses douces joues de riz et, dans ma tête, je lui ai dit que je l'adorais.
Aujourd'hui, je regarde le monde en proximité. Je regarde les autres faire ce que je ne fais pas , ce que je ne fais plus. Voilà.
Grand-mère a toujours préféré le plaisir à la règle, alors je poursuis sa tradition, sans une once de remords. Je sais ce qui est bon pour elle. Elle a toujours su ce qui l'était pour moi.
Je ne vois pas ce qui est laid, la disgrâce matérielle glisse sur moi, je ne m'y arrête pas.