Citations de Dominique Viart (13)
«La mort de l’enfant fit référence, parce qu’elle possède le caractère déterminant du non-accompli.»
Je ne pouvais tolérer la perte de ce lecteur fictif qui feignait, avec de si tendres égards, de me croire gros d'écrits à venir : il y avait longtemps que moi-même n'y croyais plus, et en elle seule survivait un semblant de croyance ; elle était en quelque façon, sous mes yeux et dans ma main, tout ce que j'avais écrit et pourrais jamais écrire.
"Ce n'est pas particulièrement autour de moi que je regarde le monde, c'est en moi. Ce que je cherche à saisir est à l'intérieur de moi-même, et non à l'extérieur. Le monde passe toujours par le filtre de ma propre sensibilité, par le tamis de mon regard. Je ne cherche pas à saisir l'esprit du temps indépendamment de ce que je ressens intimement, j'essaie à chaque fois d'exprimer ma vision du monde, et tant mieux si, comme dans "La salle de bain", c'est en adéquation avec l'esprit du temps."
Jean-Philippe Toussaint.
"j'essaie de créer du temps présent"
Jean-Philippe Toussaint.
"Je suis écrivain, je ne propose pas d'analyse explicite du monde contemporain, j'essaie simplement de faire surgir le présent, de le rendre vivant, de le restituer."
Jean-Philippe Toussaint.
"J'écoute dans mon coeur comme dans une écluse
Affluer, avec un immense clapotis,
Les rêves, les désirs des hommes. J'engloutis
Un morceau de cité dans ma poitrine accrue.
Le rythme de mon pouls émeut toute la rue.
La rue avec ses feux, ses gestes et ses cris,
Gravite ramassée autour de mon esprit ;
J'attire puissamment les chose qui s'ignorent ;
Et l'âme que diffuse en vagues incolores
Les mélange des chairs, des âmes, des maisons,
Forme un vague halo qui nimbe ma raison. "
Jules Romains (La vie unanime)
ORTIES
extrait 1
Tu te déplaces entre les couleurs
amour étranglé
autrefois avec les loups
avec les voix
sur la mer
nulle trace de pas
dans l’allée
S’exfiltrer dehors
sans briser
la coque, altérer
la nacre ― d’autres s’en chargeront
simplement sortir
tuer
soi, et l’autre
― même balle
je ne sais que du coup de grâce
que la terreur
d’une inscription affamée
sur la feuille, sur la pierre,
dans la langue
que le trait
ressassé, transparent
infini comme l’herbe blanche
et la nuit
soustraite à la nuit
pp.15/16/17.
// jacques Dupin
"Je n'ai pas le dilettantisme du chaos."
Jules Romains
La mutation de la littérature depuis 1980 est un vrai mouvement de fond.
La littérature française a vécu, en un quart de siècle, l’un de ses plus prodigieux renouvellements, une « relance » comme peu de périodes dans l’histoire de la littéraire donnent exemple : de celles qui fondent une esthétique dont la postérité se souvient.
Cet ouvrage présente ce qui caractérise la littérature française depuis l’importante mutation esthétique qu’elle a connue au début des années 1980. Soulignons d’abord qu’elle fait preuve d’une prodigieuse vitalité : loin de suivre un cours tranquille sur des voies balisées, elle invente des formes : « autofiction », « lyrisme critique », théâtre du quotidien » … et, celles que nous avons nommées « récits de filiation », « fictions biographiques », « fictions critiques », « poésie prosaïque »... Elle se saisit à bras le corps de question décisives pour notre temps : l’être social, l’inscription dans l’histoire, la confrontation au réel, la méfiance envers les discours, l’usage du quotidien, le renouvellement des formes de l’engagement…
Un autre jour paraît. Il faut encore faucher, par exemple, le pré du Clerc, qui n'est qu'une pente, une combe de brouillard dans le souffle noir des sapinières, vers le col de Lalléger ; on y entend une seule faux : des grives débusquées trouent la brume, des injures brusques sortent de terre, à peine suspendue la faux invisible retombe.
Ce que disait ce coeur, c'était une fureur impotente et passionnée, comme un sanglot de vieille victime tenant à merci son bourreau, imaginant avec une défaillance d'amoureux qu'il va employer à se venger les brodequins et les poucettes dans lesquels il a si longtemps gémi, mais il ne sait pas s'en servir, ses mains exaltées tremblent et dans cet émoi les outils tombent, s'éparpillent, en vain il s'emporte et hurle sous l'oeil du bourreau impavide.