Citations de Emma Green (1717)
Le premier amour, ce n’est pas pour de faux. Ce n’est pas un jeu.
Quand on s’est battues pour arriver là où on est, pour avoir le boulot qu’on voulait, le mec qu’on ne pouvait pas avoir, l’avenir qu’on ne nous promettait pas… On ne baisse jamais les bras. On continue à prendre sa vie en main, tous les jours. À avancer. On peut être tentées de s’arrêter, parfois. De faire une pause, avec la fac, avec le garçon, avec la vie… Mais ça ne dure pas. On regarde droit devant, on se remonte les manches, on s’aiguise les talons, on relève le menton et on y va !
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Au milieu de la chambre, je trouve Harry, les yeux fous, ses cheveux mouillés tout en désordre, les muscles des bras crispés, les mains agrippées à la nuque, les dents qui mordent ses lèvres, le corps tendu encerclé par une quinzaine de garçons furieux.
- Quinn est en train de péter un câble! Il a ouvert toutes les fenêtres sans rien demander à personne.
- T'es pas tout seul ici mon gars!
- Si tu veux qu'on règle ça dehors, y a pas de soucis!
- C'est quoi ton problème?
- Tu te prends pour qui, Harry?
Mon amour d'enfance ne répond pas à leurs provocations. Mais je lis dans son regard, dans sa gestuelle, dans son souffle court qu'il est à deux doigts de craquer. D'en venir aux poings pour se libérer du cercle d'étudiants qui l'enferme. Je fends la foule et me jette sur lui, l'attrape par le sweat et l'entraîne vers la sortie en repoussant plusieurs corps sur mon passage. Je le sens résister mais je dévale les marches avec lui, sans jamais le lâcher. Il finit par rabattre sa capuche sur sa tête et accélère le pas pour retrouver l'air frais. Par chance, on ne croise aucune tête connue sur notre chemin. Et on quitte l'auberge de jeunesse comme on s'évaderait d'une prison.
Une fois dehors, Harry court encore. De plus en plus vite et de plus en plus fort. Je le suis comme je peux, à m'en cramer les poumons, je comprends où il va quand j’aperçois la plage de Miami Beach et l'océan à perte de vue dans la nuit. Mon meilleur ennemi de ralentit qu'une fois sur le sable. Et va se planter tout au bord de l'eau, les yeux vers l'horizon, là où il peut enfin respirer. Il continue à avancer lentement dans l'océan, à s'en tremper les baskets, le jean, le sweat. Je tremble mais je le laisse faire. L'imprudent s'arrête quand il a de l'eau jusqu'au pectoraux. Puis revient s'asseoir sur le sable, avec ses fringues qui lui collent à la peau. Et ses yeux gris remplit de lune.
Je l'entends battres à tout rompre.Comme les ailes d'un phoenix qui s'envole.Et je m'envole avec lui.
- Je mourrais,sans toi...gemis-je.
- On mourra ensemble,alors
Ses lèvres déposent un baiser délicat sur les miennes. Puis,gourmande,je glisse ma main sous sa chemise noire et sa langue douce et chaude s'invité dans ma bouche en m'arrachant un soupir.
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Tristan Quinn, producteur de musique rebelle, à contre-courant, connu et reconnu. Corps de rêve, regard de braise, gueule d'ange et caractère de cochon sauvage. La beauté personnifiée mais surtout, le grand frère dans toute sa splendeur. Celui qui est venu LE chercher, sept ans plus tôt. Celui qui me l'a enlevé.
Mon Zachary. Son Harry.
- Harry, ramène-toi! l'appelle son aîné. J'ai besoin de tes muscles pour mettre fin à cette mutinerie!
Mon souffle se fait plus court. Mes yeux s'embuent derrière mes jumelles. Harrison Quinn, le cadet de cette fratrie de trois garçons, vient d'apparaître dans mon champs de vision. Un milliard de souvenirs se pressent autour de mon cœur, m'empêchant de respirer normalement. Ce garçon souriant, qui se marre en rejoignant son frère, c'est mon amour d'enfance. C'était mon double. Mon seul ami. Mon unique réconfort. Mon rendez-vous secret. Mon compagnon d'infortune. Il s'est volatilisé un jour d'hiver, j'avais 10 ans à peine. Lui, bientôt 11. Je le retrouve adulte, ou presque, et quelque chose se brise en moi, en même temps qu'un espoir renaît.
S'il s'en est remis, pourquoi pas moi?
J'ai déjà reçu un bon nombre de gifles dans ma vie, mais celle-ci est sans comparaison. Harry me semble deux fois plus haut, deux fois plus large, deux fois plus présent.
Je glousse, il soupire et accélère le pas.
Nous traversons un grand pré, une petite route, empruntons un sentier de terre et débouchons sur une belle carrière de sable blanc entourée d’une clôture en bois clair. À l’intérieur, deux chevaux déjà sellés qui patientent à l’ombre.
– Des poneys ! m’écrié-je en sautillant.
– Des mustangs, me corrige le ténébreux.
– Qu’ils sont jolis, ils ont des taches comme les vaches !
Mon cow-boy lève les yeux au ciel, puis m’ordonne :
– Approche-les avec douceur, ils sont nerveux. Et ne te place jamais derrière eux.
– Je comprends, personne n’aime qu’on lui reluque les fesses. Surtout quand on ne se connaît pas bien !
– Tu me fatigues... souffle le brun
– Vous savez ce qui manque dans une voiture ? dis-je doucement pour détendre l’atmosphère.
– Un bouton mute ? propose Dante avec un regard amusé vers la fille.
– Non mais franchement ? De nos jours, les bagnoles les plus luxueuses ont des sièges chauffants, des diffuseurs de parfum, des télés dans les appuie-tête et même des minibars… Mais toujours pas de mouchoirs ! Juste un rouleau de Sopalin quelque part, quoi ! Ça éviterait à certains de s’essuyer sur leur T-shirt et à d’autres d’être maquillées comme des pandas. Vous ne trouvez pas ?
Le bonheur ne m’a jamais paru aussi éphémère.
Putain de passé.
J’entends la petite râler, lui dire que c’est pas juste, qu’il court trop vite et qu’il n’avait pas le droit. Quand il la libère, elle lui balance une poignée de sable rageuse, croise les bras comme j’ai vu Lennon le faire puis se remet à bouder avec cette petite moue adorable.
Serait-elle un peu du genre chiant, elle aussi ?
On va le retrouver ! décide-t-il soudain comme s’il m’en faisait la promesse.
– Le bébé ? demande Sol avec les yeux qui brillent.
– Callie, tu as accouché sous X ? On peut toujours retrouver la trace…
– Je sais où elle est, lâché-je pour le stopper dans son élan.
Les amoureux me fixent, abasourdis, comme si je venais de lâcher une bombe. C’est probablement ce que j’ai fait. C’est aussi ce que j’ai ressenti quand j’ai découvert l’existence de cette petite fille. Ma fille.
Ce matin, je suis plus fraiche. Plus enjoué. Plus moi. J'ai décidé de sortir de ma cage. De vivre, enfin.
Coincés dans des vies qui nous vont à peu près, même si on rêve à d’autres. Un tour du monde en bateau. Un aller simple pour la Patagonie. Un road trip qui n'en finirait jamais. Un petit goût de liberté et un gros grain de folie.
Un boulot pénible qui oblige à décompresser. Un ou une collègue avec qui on n'aurait pas dû flirter. Un ou une boss à qui on aurait bien claqué la porte au nez. Des engueulades à refaire dans sa tête. Des réunions à revivre pour savoir si on a été si mauvais que ça. Des entretiens où on aurait voulu dire tellement plus, tellement moins. C'est fou me nombre de gens seuls qui remuent les lèvres comme s'ils parlaient à quelqu'un. Alors que les duos, les trios ou plus se parlent finalement peu. Ils l'ont déjà fait toute la journée : là, ils ont seulement besoin de boire un coup, de souffler un peu, de regarder les autres et de s'assurer qu'il y a plus malheureux qu'eux.
Dans cette chambre d'hôtel vide et sombre, la lumière se fait et la vie remplit tout. Je tombe dans un tout autre gouffre : celui de l'amour, du désir. Celui où il est si bon de s’abandonner. Parce qu'il y a toujours des bras pour vous serrer. Une autre bouche pour vous aider à respirer. Un corps solide, puissant, invincible, pour vous rattraper.
Parce que ces informations sont une vraie bombe à retardement. Parce que cette bombe, je la tiens désormais entre les mains. Parce que j'ai à nouveau un choix cornélien, crucial, atroce à faire. Parce que je me retrouve à nouveau déchirée entre mon défunt mari et l'homme de ma vie.
Dans sa voix, au fond de son regard ébène, pas la moindre émotion. Illisible, incernable, comme le jour de notre rencontre. Je ne suis plus invitée dans sa bulle. Sous sa peau. Et la mienne me brûle.
Et puis son grand corps se lance vers moi, le mien se lève, et nos bouches se retrouvent, avides, intrépides, insoumises. Dante m'embrasse farouchement, je lui arrache sa chemise, il déboutonne mon jean, je m'occupe du sien et récupère le petit emballage qu'il pose au creux de ma paume. Mon ténébreux me prend contre le mur, sauvagement, brusquement, passionnément. Nos souffles s'emmêlent, nos respirations s'affolent et nos peaux fusionnent.
Et je prie encore et encore pour que ce ne soit pas la dernière fois.
Nos bouches se soudent, nos corps se percutent, nos larmes se mélangent et nos cœurs insoumis cognent l'un contre l'autre, en secret.
L'ombre ou la lumière. Le passé ou l'avenir. La mort ou l'amour.
Je pense à ce Lennon Hathaway, le père adoptif de ma fille. Que je ne connais pas encore. Que je vais devoir apprendre à ne pas détester. Pas trop vite. Pas juste parce qu’il est un homme. Et qu’il a pris ma place.
Et sa mère adoptive ? Qui est-elle ? Pourquoi la lettre ne la mentionne même pas ? Y a-t-il une femme dans la vie de ma petite fille ?