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Citations de Gabriel Chevallier (140)


- La plus grand faute aux yeux de l’Église et des hommes, est de tuer son semblable. Et aujourd’hui l’Église me commande de tuer mes frères.
- Ils sont les ennemis de la Patrie.
- Ils sont cependant les fils du même Dieu. Et Dieu, ce père, préside à la lutte fratricide de ses propres enfants, et les victoires des deux camps, les Te Deum des deux armées lui sont également agréables. Et vous, juste, vous le priez pour qu’il ruine d’autres justes. Comment voulez-vous que je m’y reconnaisse ?
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Une chronique satirique de la vie d'un petit village du beaujolais à l'heure où l'anticléricalisme est de mise. La fermentation donne lieu à un certain nombre de poncifs et autres préjugés ainsi qu'à des scènes au comique vitriolé. Bref un fort bon moment de franche rigolade!
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Les artilleries tonnent, écrasent, éventrent, terrifient. Tout rugit, jaillit et tangue. L'azur a disparu. Nous sommes au centre d'un remous monstrueux, des pans de ciel s'abattent et nous recouvrent de gravats, des comètes s'entrechoquent et s'émiettent avec des lueurs de court-circuit. Nous sommes pris dans une fin du monde. La terre est un immeuble en flammes dont on a muré les issues. Nous allons rôtir dans cet incendie...

Le corps geint, bave et se souille de honte. La pensée s'humilie, impore les puissances cruelles, les forces démoniaques. Le cerveau hagard tinte faiblement. Nous sommes des vers qui se tordent pour échapper à la bêche.
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Mgr B. : « J’ai là votre travail. C’est intéressant et j’y ai trouvé beaucoup de choses que j’ignorais, des choses qui paraissent troublantes, en effet. Mais j’ai réfléchi, et je crois que vos arguments portent à faux, en ce qui concerne, par exemple, la formation que donne le séminaire. Voyez-vous pour supporter certaines vérités, il faut des têtes exceptionnellement solides. Nos curés de campagne, qui sont le plus grand nombre, n’ont pas besoin de connaître toutes les discussions qui ont entouré la mise au point du dogme, ni les conflits qui ont pu diviser autrefois les dignitaires de l’Eglise. Cela ne pourrait que troubler l’esprit de ces braves gens. Le dogme c’est exactement la théorie du soldat : on ne doit pas raisonner avec lui. Et les sous-officiers n’ont pas à se mêler de stratégie. L’Eglise, qui se propose de mener les hommes, a choisi ses moyens. Je crois qu’elle les a bien choisis. La discipline rend plus de services que l’intelligence. L’esprit de fanatisme est supérieur à l’esprit philosophique, qui fut toujours un dissolvant, l’histoire est là pour le prouver. Ce que vous avez découvert dans vos recherches d’autres ne l’ont pas ignoré, qui n’étaient pas les premiers venus. S’ils ont laissé le silence recouvrir peu à peu certains évènements du passé, soyez persuadé qu’ils avaient de bonnes raisons de le faire »
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Onze heures.
Un grand silence. Un grand étonnement.
Puis une rumeur monte de la vallée, une autre lui répond de l'avant. C'est un jaillissement de cris dans les nefs de la forêt. Il semble que la terre exhale un long soupir. Il semble que de nos épaules tombe un poids énorme. Nos poitrines sont délivrées du cilice de l'angoisse : nous sommes définitivement sauvés.
Cet instant se relie à I9I4. La vie se lève comme une aube. L'avenir s'ouvre comme une avenue magnifique. Mais une avenue bordée de cyprès et de tombes. Quelque chose d'amer gåte notre joie, et notre jeunesse a beaucoup vieilli.
A cette jeunesse, pendant des années, pour tout objectif, on a désigné l'horizon couronné d'éclatements. Mais nous savions cet objectif inaccessible. La terre molle, gorgée d'hommes, vivants et morts, semblait maudite. Les jeunes gens, ceux du pays de Balzac et ceux du pays de Goethe, qu'ils fussent retirés des Facultés, des ateliers ou des champs, étaient pourvus de poignards, de revolvers, de baïonnettes, et on les lançait les uns contre les autres pour s'égorger, se mutiler, au nom d'un idéal dont on nous promettait que l'arrière ferait un bon usage.
A vingt ans, nous étions sur les mornes champs de bataille de la guerre moderne, où l'on usine les cadavres en série, où l'on ne demande au combattant que d'être une unité du nombre immense et obscur qui fait les corvées et reçoit les coups, une unité de cette multitude qu'on détruisait patiemnment, bêtement, à raison d'une tonne d'acier par livre de jeune chair.
Pendant des années, après qu'on eut lassé notre courage et bien qu'aucune conviction ne nous animât plus, on a prétendu faire de nous des héros. Mais nous voyions trop que héros voulait dire victime.
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[...] Ainsi s'etait-il ménagé partout des sympathies. Cette conduite lui valut les plus beaux éloges posthumes.

Le lendemain de l'accident, le Petit Dauphinois consacrait un important article nécrologique à M. Constant Euffe, fondateur de La Filoche, juge au Tribunal de Commerce, président du Syndicat de l'Alimentation et de la Mutuelle des Consommateurs, vice-président de l'Automobile-Club dauphinois et de la Fédération départementale des Sociétés de chasse de l'Isère, membre bienfaiteur de l'Académie delphinale, membre honoraire de la Société des Amis des arts de Grenoble, de la Société des Alpinistes dauphinois, du Football-Club de Grenoble, du Cyclo-Tourisme dauphinois, etc.
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Offensé, Mme Euffe se tourna vers le zèle paroissial et les manifestations d'une ostensible piété. Elle mit Dieu dans son jeu, mais elle l'y mit d'une façon étroite et qui ne pouvait que le rendre détestable, [...]
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L'horreur de la guerre est dans cette inquiétude qui nous ronge. Son horreur est dans la durée, dans la répétition incessante des dangers. La guerre est une menace perpétuelle. « Nous ne savons ni l'heure ni l'endroit. » Mais nous savons que l'endroit existe et que l'heure viendra. Il est insensé d'espérer que nous échapperons toujours. C'est pourquoi il est terrible de penser. C'est pourquoi les hommes les plus frustes, les plus illogiques sont les plus forts. Je ne parle pas des chefs : ils jouent un rôle, ils tiennent l'engagement qu'ils ont contracté. Ils ont des satisfactions de vanité et plus de confort (et certains faiblissent pourtant). Mais les soldats ! J'ai remarqué que les plus courageux sont les plus dépourvus d'imagination et de sensibilité. Cela s'explique. Si les hommes du petit poste n'avaient pas été habitués, par la vie déjà, à la résignation, à l'obéissance passive des misérables, ils fuiraient. Et si les défenseurs du petit poste étaient tous des nerveux et des intellectuels, très vite la guerre ne serait plus possible. Ceux de l'avant sont des dupes. Ils s'en doutent. Mais leur impuissance à penser longuement, leur habitude d'être la foule et de suivre, les maintiennent ici. L'homme du créneau est pris entre deux forces. En face, l'armée ennemie. Derrière lui, le barrage des gendarmes, l'enchaînement des hiérarchies et des ambitions, soutenus par la poussée morale du pays, qui vit sur une conception de la guerre vieille d'un siècle, et crie : « Jusqu'au bout ! » De l'autre côté, l'arrière répond : « Nach Paris ! » Entre ces deux forces, le soldat, qu'il soit Français ou Allemand, ne peut ni avancer ni reculer. Aussi, ce cri qui monte parfois des tranchées allemandes : « Kamerad Franzose ! » est probablement sincère. Fritz est plus près du poilu que de son feld-maréchal. Et le poilu est plus près de Fritz, en raison de la commune misère, que des gens de Compiègne. Nos uniformes diffèrent, mais nous sommes tous des prolétaires du devoir et de l'honneur, des mineurs qui travaillent dans des puits concurrents, mais avant tout des mineurs, avec le même salaire, et qui risquent les mêmes coups de grisou.
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Ils déclarent sans vergogne : "On est là parce qu'on ne peut pas faire autrement !" Ils sentent qu'ils sont les manœuvres de la guerre, et ils savent que les bénéfices ne profitent jamais qu'aux patrons. Les dividendes iront aux généraux, aux hommes politiques, aux usiniers. Les héros retourneront à la charrue et à l'établi, gueux comme devant.
P. 192
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Gabriel Chevallier
La peur n'évite pas le danger. Je connais ce refrain et je sais que c'est aussi une vérité. Hélas, le danger n'évite pas non plus la peur. C'est aussi vrai. Quand Chevalier a écrit sur cette honte, je crois bien que j'ai eu aussi peur que lui et peut-être même un peu plus. Son témoignage sur les horreurs de la guerre et les blessures qu'elle peut provoquer dans l'âme est cruel de vérité. On ne sort pas complétement indemne de ce récit. C'est à mettre au crédit du talent de cet écrivain qui n a pas fait appel à des effets spéciaux pour nous éprouver à notre tour.
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Le désarmement
peut attendre : ça fait cinquante mille ans qu’il attend. Mais Clochemerle n’attendra pas, et
ses abrutis, là-bas, vont me flanquer une interpellation dans les quarante-huit heures, tels que
je les connais !
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À toutes les concessions que nous avons déjà consenties à la guerre, nous ajoutons celle de la sincérité. Notre sacrifice ne pouvant être estimé à son prix, nous alimentons la légende, en ricanant.
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Dès qu'un bataillon était hors de combat, on faisait avancer le bataillon suivant pour attaquer, sur le même terrain couvert de nos blessés et de nos morts, après une préparation d'artillerie insuffisante. L'inutile victoire qui consistait à enlever un élément de tranchée allemand se payait d'un massacre des nôtres. Nous regardions les hommes bleus étendus entre les lignes. Nous savions que leur sacrifice avait été vain et que le nôtre, qui allait suivre, le serait également. Nous savions qu'il était absurde et criminel de lancer des hommes sur des fils de fer intacts, couvrant des machines qui crachaient des centaines de balle à la minute.
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Il fallait que des officiers supérieurs justifiassent de leurs fonctions devant le pays par quelques lignes de communiqué qui sentissent la victoire. Nous n'étions plus là que pour acheter ces lignes de notre sang.
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Par les nuits très noires, où je me conduis au toucher, j'ai parfois des arrêts brusques du cœur, lorsque quelque chose craque que je ne peux distinguer. La nuit déforme les choses, les grandit, leur prête un aspect poignant ou menaçant ; le moindre souffle d'air les anime d'une vie humaine. Les objets ont des silhouettes d'ennemis, je devine partout des respirations retenues, des yeux dilatés qui m'observent, des mains crispées sur des détentes : j'attends à chaque seconde l'aveuglante rayure de feu d'une arme. On peut me tuer pour le seul plaisir de tuer.
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Les hommes sont bêtes et ignorants. De là vient leur misère. Au lieu de réfléchir, ils croient ce qu'on leur raconte, ce qu'on leur enseigne. ils se choisissent des chefs et des maîtres sans les juger, avec un goût funeste pour l'esclavage. Les hommes sont des moutons. Ce qui rend possible les armées et les guerres. Ils meurent victimes de leur stupide docilité.
P. 19
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[...] ... Justine Putet entre en scène : parlons d'elle. Qu'on se représente une noiraude bilieuse, desséchée et vipérine, ayant mauvais teint, mauvais oeil, mauvaise langue, mauvais circuit intestinal, et tout cela recouvert d'agressive piété et de douceur sifflante. Un parangon de consternante vertu, car la vertu incarnée sous de pareils traits, est détestable à voir, et cette vertu d'ailleurs paraissait s'inspirer d'un esprit de vengeance et de misanthropie, plus que d'une naturelle aménité. Exaltée, brandisseuse de chapelets, fervente diseuse de litanies, mais aussi semeuse effrénée de calomnies et de paniques clandestines. En un mot, le scorpion de Clochemerle, mais un un scorpion camouflé en bête à Bon Dieu. La question de son âge ne se posait pas, ne s'était jamais posée.On peut lui donner un peu plus de quarante ans mais personne ne s'en souciait. Tout prestige physique lui avait été retiré dès l'enfance. Pas plus qu'elle n'avait d'âge, Justine Putet n'avait d'histoire. Morts ses parents, de qui elle tenait onze cents francs de rente, à vingt-sept ans elle avait entamé sa carrière de vieille fille solitaire, au fond de l'impasse des Moines, à l'ombre de l'église. De là, elle veillait jour et nuit sur le bourg, dont elle dénonçait les infamies et les concupiscences au nom d'une vertu que les hommes de Clochemerle avaient soigneusement laissée de côté.

Durant deux mois, Justine Putet observa les allées et venues autour de l'édifice et sa fureur chaque jour augmentait. Tout ce qui était viril ne lui inspirait que haine et ressentiment. Elle voyait les garçons agacer gauchement les filles, les filles provoquer hypocritement les garçons et l'entente peu à peu se faire entre les petites saintes-nitouches et les bons rustauds, spectacle qui lui donnait à penser que ces jeux acheminaient la jeunesse vers d'effroyables abominations. Plus que jamais, elle voyait les moeurs en grand péril, par la faute de l'urinoir. Enfin, l'impasse des Monies, avec les chaleurs, commençait à sentir fortement.

Après avoir longuement médité et prié, la vieille fille décida d'entreprendre une croisade et de porter son premier effort sur la citadelle la plus éhontée du péché. Bien garnie dans ses dessous de scapulaires et de médailles saintes, ayant mêlé le miel de l'onction à son venin, elle se rendit un matin chez la possédée du Diable, l'infâme, la chienne, Judith Toumignon, sa voisine, à qiui, depuis six ans, elle n'avait pas desserré les dents. ... [...]
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La guerre !
Tout le monde s'y prépare. Tout le monde y va.
Qu'est-ce que la guerre ?
Personne n'en sait rien...
La dernière date de plus de quarante ans. Ses rares témoins, qu'une médaille désigne, sont des vieillards qui radotent, que la jeunesse fuit et qu'on verrait bien aux Invalides.
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On retrouve le plaisir de l'écriture des auteurs du début du XXeme siècle, ces descriptions des personnages, de leur vie sociale, familiale, professionnelle, de leur cadre de vie... Bref on plonge complètement et avec plaisir dans l'univers de l'époque. Mais trop de longueurs et l'on se prend à s'ennuyer et à se dire que l'on va passer quelques pages... Dommage...
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C'est rare que les gens méchants soient heureux, vous ne croyez pas ? Ils s'empoisonnent eux-mêmes.
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Enfin l'urinoir étant à deux places, on s'y rendait généralement par paire, ce qui provoquait l'agrément de tenir un bout de conversation tout en faisant la chose, ce qui rendait plus agréable tant la conversation que la chose, du fait qu'on éprouvait à la fois deux satisfactions.
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