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Critiques de Gabriel Chevallier (88)
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La Peur

Merci à dechosal qui m’a conseillé cette lecture. Rien à voir avec Clochemerle. Ce que tout le monde ressent en le taisant, lui, le dit : la peur. La chose la plus terrible dans cette guerre de 14-18 qu’il ne fallait pas avouer sous peine d’être traité de lâche. Nous sommes en plein cœur des tranchées, des cadavres, des hommes déchiquetés, de la souffrance, du froid, de la faim, de la soif, des poux. J’ai aimé son côté anarchiste mais j’ai quand même trouvé long les passages d’action. Ce témoignage est certainement le plus sincère d’un homme à la guerre.
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Clochemerle

Depuis belle lurette à Clochemerle , ça pisse dru à tous les coins de rue.

Piéchut le maire qui se voit déjà préfet tient à laisser une trace de son passage. Ce sera celle d'un urinoir public dans l'impasse des moines.

La goutte fait déborder le vase...

C'est du propre s'insurgent les bénitiers du curé qui voient là un déballage public... de tous les attributs masculins.

De quoi je me mêle braillent les buveurs de crus qui se font la main...

Autant pisser dans un violon, tout le fiel accumulé remonte à la surface.

Le maire laisse couler ...

Mais les petits ruisseaux font les grandes rivières....

Je n'ai pas été déçu de mon séjour dans le beaujolais village.

Tout ce petit monde en prend plein le pif..les arsouilles !

Mais aussi du blaze et de l'arrière train pour certains,

des histoires de coucheries, de cocus et tout le m'a tu vu.

Rien de nouveau sous le soleil provincial franchouillard

sauf que Gabriel Chevallier n'y va pas avec le dos de la cuillère.

Il en rajoute des louches, fait dans la caricature et le grotesque

bref en fait des tonnes avec truculence et une belle pointe d'ironie.

On l'a souvent imité mais rien ne vaut la recette originale du terroir.

Clochemerle, laisse pisser ou pas, à toi de voir !

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Clochemerle

En 1922, à Clochemerle-en-Beaujolais, le maire Piéchut décide d'installer dans sa commune une vespasienne, pour le confort urinaire de ses administrés, et pour faire la nique à la réaction locale ; la baronne, le curé et le notaire.



Paru en 1934, le roman de Chevallier connut un succès qui ne se dément pas.



Adapté au cinéma en 1948, (film interdit au moins de 16 ans à sa sortie !) Clochemerle est passé dans le langage courant; on évoque parfois encore ce nom pour parler d'une querelle locale un peu ridicule, exemple au hasard: Un "néo-rural" qui se plaint du bruit des cloches ou du chant du coq…



Au-delà de la farce et de la critique sociale sous-jacente, il faut signaler la qualité de l'écriture de Gabriel Chevallier ; riche, drôle, imagée, elle est infiniment plaisante.



Il est bien dommage que cet auteur soit tombé dans l'oubli, car il semble que Clochemerle soit son seul roman encore réédité et disponible en librairie de nos jours -en l'occurrence au Livre de Poche- citons aussi son roman sur son expérience de la première guerre mondiale "La peur", occasionnellement réédité.



Chevallier, n'est donc pas l'auteur d'un seul roman emblématique, je vous invite cordialement à le découvrir !
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La Peur

Comme le dit si bien Tardi, "c'est le meilleur récit sur la guerre de 14-18, avec le Voyage" au bout de la nuit.

Nous suivons le quotidien effroyable des Poilus, obligés de participer à des combats sans merci contre des inconnus qu'ils ne peuvent donc détester, et surtout réduits à se terrer dans des boyaux puants et peu sûrs, entendant jour et nuit le fracas du carnage, et craignant même d'aller "aux feuillées" faire leurs besoins, souhaitant même être blessé pour échapper à tout cela.

La peur en fait les véritables héros, bien loin de ceux qui ne méritent pas leurs décorations de pacotille, les boute-feu de l'époque, qui appellent au combat, bien planqués à l'arrière.

Comment ne pas ressentir une haine viscérale de cette guerre, de toutes les guerres, puisqu'il y en a eu, en a et en aura bien d'autres depuis, à la lecture de ce récit éprouvant ?
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La Peur

Parmi les films qui vont sortir en plein milieu du mois d'aout- pas forcément le mois le plus approprié pour les films qui ne sont pas des blockbusters, notons la sortie du film LA PEUR de Damien Odoul le 12 aôut prochain qui traite d'une guerre dont on a beaucoup parlé ces derniers temps, centenaire oblige, je veux parler évidemment de la première guerre mondiale .

Damien Odoul a cette fois ci adapté un roman autobiographique éponyme de Gabriel Chevallier, un livre fort et dur centré sur Gabriel, jeune homme introverti, qui rencontre la peur et l'atrocité des carnages dans l'enfer des tranchées entre 1914 et 1918.



Au bout de cette effroyable expérience intérieure, pleine de bruit, de fureur et de sang, il découvrira à travers le conflit sa propre humanité...
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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La Peur

Dartemont Jean, un mètre soixante-douze, soixante-sept kilos, dix-neuf ans. Même s’il ne pensait pas « qu’il y eût de la grandeur à plonger une arme dans le ventre d’un homme », il a accepté cette consigne, comme « vingt millions d’imbéciles » qu’on avait « persuadés que tel était leur devoir ». « Qui a peur ? Personne ! Personne encore… Vingt millions d’hommes, que cinquante millions de femmes ont couverts de fleurs et de baisers, se hâtent vers la gloire, avec des chansons nationales qu’ils chantent à pleins poumons. Les esprits sont bien dopés. La guerre est en bonne voie. Les hommes d’État peuvent être fiers ! » Contre ses convictions mais de son plein gré, par curiosité, il se présente au conseil de révision en décembre 1914, commençant à craindre « qu’elle se terminât sans [qu’il y fût] allé ».

(...)

Gabriel Chevallier livre un témoignage de première main, à la fois saisissant, sans fard et d’une sincérité poignante.



Article complet sur le blog :
Lien : https://bibliothequefahrenhe..
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Clochemerle

Clochemerle, 1922.



Petite commune du beaujolais qui vit de la culture de la vigne. On y lève le coude aisément, et par voie de nécessité on s'y soulage fréquemment et aisément au milieu et dans les recoins de l'espace public.



Les autorités locales, soucieuses de marquer elles aussi leur empreinte sur ce territoire décide l'installation d'un urinoir.



Décision qui ne réserve pas un avenir doré aux Clochemerlins tant l'usage immodéré de ce nouvel équipement en vient à faire émerger de vives tensions entre cléricaux et anti-cléricaux.



Mais Clochemerle ce n'est pas que des histoires de pipi, c'est également des histoires de cocus, de vices, d'ambitions et de jalousies.



Une galerie de personnages joliment troussés et de jupons souvent retroussés.



Cette chronique de village ne se lit pas en un jet. On prend le temps de se repetre de ces phrases savoureuses à n'en plus finir. On profite jusqu'à la dernière goutte de ce roman rabelaisien d'une autre époque, un peu éloigné des canons actuels mais qui satisfait pleinement un besoin intemporel et de lecture.

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Clochemerle

S'il est certain que Gabriel Chevallier fut un auteur populaire, et que son roman a fait la joie de plusieurs générations, on ne peut pas dire qu'il se soit montré indulgent pour certains de ses contemporains.

L'univers clochemerlesque fait penser irrésistiblement aux dessins de Dubout, dans lesquels se côtoient des personnages grotesques ou vaniteux, couples dépareillés, foules en délire ou en furie, populace débraillée et forte en gueule. Fortes matrones ou vieilles filles desséchées, godelureaux naïfs ou vieux grigous bilieux, on est certes dans la caricature appuyée, pas loin du stéréotype. Grâce au style du portraitiste, qui ne se prive pas de nous fournir tous les détails, au physique et au moral, de ses personnages, le théâtre Guignol devient digne de Molière.



Mais au-delà de la caricature, transperce la tendresse pour le genre humain, ses faiblesses et sa fragilité. Ses travers et sa drôlerie souvent involontaires, ses bouffées d'orgueil et son incurable optimisme. Le récit passe de la bouffonnerie au drame, mais c'est toujours le rire qui l'emporte. Chevallier n'a pas oublié les leçons de Maitre Rabelais, et Clochemerle est le lieu de guerres Picrocholines, de banquets et de beuveries mémorables, ou le curé et le sacristain sont de la partie. Le jus de la treille réjouit les gosiers et les coeurs, il s'ensuit une belle ardeur qui annonce d'autres réjouissances de la chair.



Passées les agapes et les batifolages villageois, au détour d'un chapitre, Chevallier ne se prive pas de glisser des discours violemment anti-militaristes et anti-cléricaux. La tradition lyonnaise des canuts ne se trouve pas que dans la consommation des pots de beaujolais. Il y a ici de la critique sociale qui attaque aussi bien les bourgeois étriqués et les aristos décatis que les politiciens sans scrupule.



Clochemerle est ainsi une lecture résolument subversive, qui prône la liberté de vivre et de penser, plus libertaire et contestataire qu'on ne le croirait, plus proche de Brassens que de Chasse, pêche, nature et traditions.

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Clochemerle

Bien sûr, tout le monde connaît l'expression "Clochemerle" mais combien en connaissent l'origine, cette truculente chronique d'un petit village beaujolais ? Des portraits au vitriol oscillant entre vacheries, coups de griffes et polissonnerie. Quelle poilâde ! Inutile de dire que cela fait mouche : le politicien roublard, l'instituteur bouffeur de curé, le curé bonasse et un peu dépassé, la vielle bigote aigrie et rance, l'épicier cocu, la belle épicière qui fait tourner toutes les têtes, la brave fille engrossée par son galant, la vieille comtesse arrogante qui a connut son heure de gloire, les ganaches abruties...Et tout cela avec style, une belle langue, riche, fruitée, à déguster dans son ballon comme un bon beaujolais, plutôt Moulin à Vent que Beaujolais primeur le troisième jeudi de novembre. Cette lecture fut un vrai ravissement, un pur délice. A rééditer d'urgence et à consommer sans modération.
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La Peur

J'ai acheté ce livre sur les champs de bataille de la somme, surpris qu'une œuvre censurée en 1939 soit vendue dans un musée militaire.

C'est effectivement une œuvre crue, réaliste, qui raconte précisément la guerre, les tranchée, la boue et les attaques diverses mais c'est aussi un roman psychologique, sur cette peur qui taraude tous les jours et surtout avant d'attaquer. On est en plein dans les combats et surtout dans l'attente du combat, dans l'ennui et la misère.

Le héros nous fait voyager entre ses différents postes sur le front, entre ses différents rôles qui l'amènent à communiquer entre les lignes. Il y a aussi les passages où, blessé, il est à l'arrière, à l'hôpital, avec les blanques de caserne et là aussi l'ennui.

il ne se passe pas grand chose dans ce roman, on peut ressentir de l'ennui comme l'auteur et surtout sa peur si bien exprimée.

Ce qui est surprenant, c'est que Gabriel Chevalier va se tourner ensuite vers une littérature plus légère, comique et politique avec Clochemerle. Ce témoignage contre la guerre et ce qu'elle fait vivre, représente un besoin de se libérer de ce fardeau, comme si ensuite, il pouvait enfin écrire après avoir vidé son sac.

Un roman de plus sur la guerre de 14-18, "celle que j'préfère" comme chantait Brassens, mais un témoignage capital car neutre et sans emphase.
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Clochemerle

ISBN : inconnu



Françaises, Français ...



... Ah ! ah ! avouez que je vous ai fait peur ! Mais si, je vous ai vu sursauter, là, vous, dans le coin, qui tentez de vous cacher derrière votre camarade ! Vous vous êtes dit sans doute : "Pour son anniversaire, elle a complètement pété les plombs !" mais rassurez-vous, il n'en est rien : je commençais ainsi parce qu'il est dommage que le rédacteur de "La Peur" (roman terrible sur la non moins terrible Grande guerre) ou encore de "Sainte-Colline" (récit d'une scolarité malheureuse) ne soit resté dans la mémoire de la majorité d'entre nous (et sur la majorité de nos étagères de bibliothèque) que pour un seul roman, il est vrai digne de Rabelais mais en moins pédagogique : "Clochemerle." Quand je suis née - il y a de cela cinquante-six ans - on interdisait sévèrement aux enfants d'y porter ne fût-ce que le regard le plus indifférent : c'est vous dire combien les vilains garnements (dont je ne fus jamais ) cherchaient à en savoir plus. D'autant que, dans l'édition qu'il y avait chez ma grand-mère (et que j'ai rachetée chez un bouquiniste par la suite), les illustrations avaient un charme baroque, un peu à la Peynet. L'un des personnages, qui soulève son chapeau melon devant "Les Galeries Beaujolaises" et la flamboyante Judith Toutmignon, ressemble d'ailleurs presque comme un frère à l'Amoureux de Peynet. Mais comme, à l'époque, on ne signalait pas le nom des illustrateurs à moins que leur nom ne fût déjà bien connu (manie détestable et injuste réapparue depuis quelques années d'ailleurs dans notre monde des quatrièmes de couvertures), il m'est impossible de vous garantir que c'est effectivement Peynet qui conçut la première jaquette de "Clochemerle" pour "Le Livre de Poche."



Roman inusable, indémodable, "Clochemerle" fait partie de ces succès de librairie qu'on réédite régulièrement et qui fit, d'ailleurs, la fortune de son auteur, le Lyonnais Gabriel Chevallier né l'année même où les frères Lumières inauguraient ... le cinéma. Pourquoi un tel succès pour un livre qui insiste - parfois lourdement - sur l'aspect grivois de l'intrigue et qui se rebelle plus ou moins ouvertement contre le système - encore et toujours lui - même si le déclenchement du Grand Soir n'en est pas le thème principal ?



Eh ! bien, peut-être parce que "Clochemerle" symbolise toute une part de notre littérature, la part rabelaisienne et humaniste, le tout en un style beaucoup plus fin que ne se l'imaginerait quelqu'un qui ne l'a jamais lu, le tout fondé sur des personnages truculents et qui, bien que solidement typés pour la plupart, n'en font pas moins terriblement authentiques. A Clochermerle, paysans ou notables, on ne triche pas. En tous cas, pas avec le lecteur. On dit ce qu'on pense, dans la langue de Molière, en trébuchant parfois sur les syllabes parce qu'il faut bien rappeler que ce livre est aussi un roman de terroir et l'on n'y a aucune honte de ce coq emblématique associé à notre pays, qui célèbre avec ardeur le retour du soleil et laisse traîner ses ergots dans le fumier avec la plus totale indifférence : "Rien ne se perd ..."



"Clochemerle", c'est la France rurale qui sort de la Grande guerre - nous sommes en 1922 - et qui, sous un soleil éclatant, voit se ranimer en ses murs la vieille querelle entre cléricaux et anti-cléricaux. Le maire, Barthélémy Piéchut, enfant du pays, a en effet pour projet de faire bâtir un nouvel édicule auprès de l'église, fief du paisible abbé Ponosse. Mais attention ! Pas n'importe quel édicule ! Non, messieurs-dames, Piéchut, avec sa roublardise joviale et gardant toujours en vue un avenir de sénateur (et pourquoi pas ? On a vu bien pire, non ? ... ) entend "moderniser" sa municipalité en y faisant élever ... un urinoir où ne seront évidemment autorisées à s'exprimer que les vessies de sexe mâle. Or, outre sa frappante proximité avec l'église, le lieu choisi par Piéchut donne d'un côté sur l'Impasse des Moines et, de l'autre, sur une autre impasse au nom tout aussi réjouissant. Mais c'est dans l'Impasse des Moines que réside, si mes souvenirs ne m'ont pas encore lâchée, la redoutable et redoutée Justine Putet, "vieille fille" attitrée du bourg, à la langue implacable et aux obsessions innombrables, surtout dans le domaine sexuel. Justine Putet possède de surcroît, on ne peut le lui contester, un sens de la repartie absolument fracassant qui lui fera jeter à sa rivale en piété, la non moins redoutable Clémentine Chavaigne - que le pharmacien du coin, perdant la tête, avait anesthésiée dans son arrière boutique dans des buts ... euh ... mystérieux mais à coup sûr répréhensibles - qu'elle "s'était fait poilpharder." Expression désormais passée dans le langage courant clochemerlin et issue du nom du malheureux apothicaire à la dérive de ses fantasmes : Poilphard.



Alors, comptons ensemble, si vous le voulez bien : l'église, le curé Ponosse, sa fidèle servante-maîtresse (chuttt ! ) Honorine et Justine Putet d'un côté et, de l'autre, le maire et son premier adjoint, l'instituteur Ernest Tafardel, célibataire intouchable portant lorgnon et petit bouc, grand amateur et rédacteur de discours anti-calotins, jacobin de première main et d'une honnêteté scrupuleuse que certains événements actuels scandalisent certainement, dans ce Paradis des Livres qui illumine mon humble logis. Soutenant Piéchut et Tafardel, tous les radicaux "de gauche" (oui, de gauche, vous voulez que j'épelle ?) de la commune, ceux qui ne vont pas à la messe très régulièrement mais qui, en général, font toujours baptiser leur progéniture.



Entre les deux, l'urinoir et ce à quoi il est destiné.



Et, partout, partout, avec une bonne humeur rabelaisienne (je sais, j'insiste, tant pis ! ), les femmes et filles de Clochemerle qui ragotent et cancanent sur le mode suraigu. Comme leurs hommes d'ailleurs, ces dames connaissent tous les scandales, ceux qui ont éclaté, ceux qui éclatent au moment où je tape sur ce clavier, et surtout ceux qui vont éclater dans pas longtemps. Ainsi, tenez, le cas de la Rose Bivaque, honteusement chassée de la confrérie des Enfants de Marie en raison d'un petit ventre qui se fait un peu trop proéminent depuis que le Claudius Brodequin - un beau gars, et pas fier, et travailleur, et dont les parents ont du bien - est parti au régiment. La Rose Bivaque, le Bon Dieu, le curé Ponosse - qui est un bon gros naïf, de l'avis de toutes les dames-patronesses du coin, lesquelles le considèrent à la fois avec le respect dû à sa fonction et le mépris absolu du sexe faible pour un curé qui croit tout ce qu'on lui raconte - continuerait à le lui donner pratiquement sans confession, tous les dimanche, si seulement il n'y avait pas ce ventre ...



Mais sans l'urinoir, mesdames, messieurs, sans l'urinoir diabolique des non moins sataniques Piéchut et Tafardel, ce ventre n'aurait jamais grossi comme ça, tout seul, dans la nature, alors qu'il se promenait en toute innocence avec le Claudius Brodequin - un pervers, celui-là, démoniaque lui aussi et à qui on devrait infliger le sort jadis imaginé par le bon et miséricordieux chanoine Fulbert envers ce satyre d'Abélard !



Oui, Mesdames, oui, Messieurs : il FAUT détruire l'urinoir ! Le lapider, le raser, le piétiner, lui cracher dessus, répandre du sel sur ce qui fut ses fondations puantes, le ...



Et encore, je ne vous donne ici qu'un bien modeste aperçu du climat de tensions et de haines, laïcardes comme religieuses, qui a entrepris de détruire Clochemerle et les Clochemerlins !



Cet urinoir, ce ventre, ces dame-patronesses, celles qui n'en sont pas comme Judith Toumignon la Sans-Vergogne, qui fait cocu son François d'époux, un parfait abruti , à tous les coins de rue (et peut-être même dans l'urinoir, qui sait ? ) ou encore sa rivale, Adèle Torbayon, la bistrotière du coin, qui trompe aussi allègrement son mari (celui-là, c'est Arthur ) mais dont le rêve, d'ailleurs atteint, est de le tromper avec l'amant en titre de Judith, le bel Hippolyte Foncimagne, et surtout ces vieilles filles estampillées "Pureté et Chasteté" comme la Putet et la Chavaigne, sans oublier les ivrognes du coin (ils sont assez nombreux et, côté cancans, bien qu'appartenant au sexe prétendu "fort", ils en remontrent parfois à Justine Putet en personne, c'est vous dire ! ) et tous ces imbéciles, jeunes et vieux, qui, émergeant de l'urinoir, ont omis - volontairement ou non, nous ne nous prononcerons pas - de rajuster leur braguette un peu débraillée tout en adressant de grands signes amicaux de la main à la malheureuse Justine Putet - oui, toujours elle - qu'on soupçonne de satisfaire ces plaisirs qu'on dit charnels en espionnant à sa fenêtre les allées et venues autour de l'urinoir piéchutesque ...



... tout ça crée une gigantesque cocotte-minute avant l'heure qui va exploser avec la remontée triomphale de la grand-rue clochemerline par une Justine Putet qui n'a plus toute sa tête et qui s'est décidée à se rendre à la grand-messe dans le plus simple appareil, à l'exception d'un chapelet probablement destiné, dans son esprit détraqué, à protéger en dernier recours ce qu'elle possède de plus précieux.



Sous ces dehors rabelaisiens, Gabriel Chevallier inscrit en filigrane la critique féroce d'une société qui, lentement, se délite, obsédée qu'elle est par l'argent, le statut social et le sexe. Oh ! les mots ne sont pas prononcés mais, dans l'"héneaurme" silence typiquement gaulois de "Clochemerle", ce sont eux que le lecteur attentif entend bien au-delà les vociférations et fanfaronnades d'une tel ou d'une telle.



En ce sens, on peut dire sans exagération - je ne pense pas que notre amie Lydia me contredise - que "Clochemerle", sorti initialement en 1934, assure le lien avec les fabliaux de notre Moyen-Âge, l'oeuvre de Rabelais, les flopées de libelles licencieux qui se prélassent tout au long de l'histoire de notre littérature, les "gauloiseries" d'un Paul de Kock dont, paraît-il, se régalait le Chancelier de Fer, pourtant si peu francophile et ce type d'ouvrages qui, de tous temps, certains avec talent, d'autres avec une vulgarité rare, ont contribué à la survie d'une certaine partie (oh ! peut-être pas la plus glorieuse, je l'admets ! ) de la littérature française. J'oserai même aller plus loin en précisant que les fantasmes sexuels du pharmacien Poilphard ont bel et bien quelque chose de sadien ...



Pour en terminer, n'allez pas croire que Chevallier se contente de se moquer des malheureuses comme Justine Putet. Bien au contraire. Sous le grotesque de leurs excès, il pose la question, là aussi en filigrane : "Qui les a rendues ainsi ? Ne sommes-nous pas un peu responsables, dans le fond, nous qui avons eu plus de chance qu'elles ?"



Gabriel Chevallier, féministe avant la lettre ? Peut-être. En tous cas un homme intelligent, qui se posait pas mal de questions et qu'il est bon de découvrir (ou plutôt de redécouvrir) non seulement avec sa trilogie de "Clochemerle" (bien que le premier volume soit le meilleur, vous vous en doutez) mais aussi avec bien d'autres livres dont "La Peur", lequel vaut largement, voire même dépasse "Le Feu" de Henri Barbusse. ;o)
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Sainte-Colline

Quelle bouffée de fraîcheur. Découverte fortuite chez un soldeur. Une plongée dans un internat catho catho en 1912 d'une subtilité inouïe. On suit la vie de ce pensionnat de la rentrée à la remise des récompenses. Tout y passe par une galerie de portraits des enfants, aux prêtres en passant par les parents. Dépaysant, intelligent, servi par une langue d'une pureté et d'une souplesse au top des tops. Tout dans la nuance, la tendresse et le sourire. A recommander en XXL ! Un auteur oublié mais remarquable.
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Clochemerle

Le récit est un vrai bijou de trouvaille dans la façon dont il est agencé et dans le contenu !



Tout commence dès le premier chapitre avec le maire, M. Piéchut (admiré le nom) qui décide de moderniser son village de Clochemerle et pour cela de faire installer un urinoir, une pissotière.. bref... une bombe à retardement aux conséquences hallucinantes !!!



Les habitants du bourg sont invraisemblables ... perso, je ne voudrais pas habiter dans ce village. Je vous présente quelques habitants :

- le curé succombant aux péchés de la chair avec sa servante et partant se confesser toutes les semaines.

- la femme de l'épicier... la Bimbo du coin.... une nymphomane dont le seul homme à ne pas être au courant est son mari.

- le docteur... Dr Frankenstein ! Pour lui, les anesthésies c'est INUTILE et la douceur également. Je vous laisse imaginer le personnage

- le pharmacien et son penchant pour le morbide (

- le notaire et sa vision anti-humaniste et pro-pécuniaire dans ses jugements

- l'instit ... monsieur je vous asphyxie de mon haleine !!

- la vieille fille ... la scène finale est d'une drôlerie !



Bref, suite à l'installation de l'urinoir, deux clans voient le jour : les urinophobes et les urinophiles :D (désolé pour les néologismes)

Très vite, la guéguerre prend de telle proportion que cela en arrive aux oreilles du gouvernement, voire même internationale (le passage lors de la conférence pour le désarmement est génial !



Côté structure... un récit frais, drôle avec un côté rustique pour ne pas dire régionale avec des expressions de patois. L'auteur n'hésite pas à faire parler certains habitants pour relater les faits et cela apporte un véritable aspect vivant au récit.



Une superbe satire de notre société et du monde politique. Quand on le lit, on pourrait aisément le transposer à notre époque où les politiques sont imbus d'eux-mêmes et non là pour servir une cause ou un pays.



Pour résumer : à lire sans la moindre hésitation parce que vous allez avoir droit à de vrais moments de rires
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La Peur

Un témoignage remarquable sur cette guerre absurde, comme toute les guerres qui pourra rejoindre les magnifiques pages de « ceux de 14 » de Maurice Genevois. Plusieurs années à subir, la peur au ventre chaque jour qui se lève, chaque changement de fonction, chaque changement de chef, à souhaiter mourir vite pour ne pas souffrir. Une inhumanité quotidienne imposée, un statut de poilu chair à canon, une loterie quotidienne, vie ou mort qui se répète sur environ 1500 jours, la probabilité d’en sortir vivant est faible et l’exaltation du soldat héros qui défend la patrie fleur au fusil est bien démystifiée.
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La Peur

On suit ici ce poilu qui fait la guerre du premier au dernier jour. Son témoignage sans concession est parfois un peu opaque parce que nous ne maîtrisons pas le vocabulaire des troupes. Mais à 90 % son récit est sans concession, troublant, tragique, on en sort écoeuré.

Ce qu'il vous retranscrit est tellement à vif, qu'on en a la chair de poule, on a envie de se révolter devant pareille injustice et pourtant, cette boucherie a eu lieu. Tout y est : le fracas des armes, la misère des planques, la faim, le froid, la vermine qui grouille, les corps qui pourrissent, la honte où l'on vous plonge, même si vous êtes un homme droit, cette déchéance, cette perte de dignité que la survie vous imposent. La fin est d'une clairvoyance extraordinaire. C'est un livre d'or.
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La Peur

Après avoir été conquis par la restitution gaillarde et licencieuse du microcosme de "Clochemerle", j'ai voulu continuer ma découverte de Gabriel Chevallier dans un registre différent

Dans "La peur", point de légèreté humoristique bon enfant, l'auteur y restitue tout le bruit et la fureur imbéciles du premier conflit mondial qu'il a vécu de l'intérieur, à travers le récit de son alter-ego fictionnel, Jean Dartemont.



La "peur" dont il est question dans le titre est celle qui liquéfie les entrailles, ce sentiment humiliant qui relève de la panique primale et irraisonnée, ce sursaut atavique pour sauver sa peau lorsque la mort dégueulasse et injuste vous frôle trop souvent pour espérer y échapper éternellement. De mémoire de lecteur, jamais je n'avais lu une telle lucidité dans la restitution chirurgicale de cette émotion.



On pourra parfois trouver rébarbatifs certains passages purement descriptifs de telle ou telle bataille, embuscade, ou préparatifs de campagne, mais il faut lire ce livre qui jamais ne sombre dans le sordide, le pathétique, le voyeurisme ou la violence gratuits.

Chevallier déroule dans un récit fluide et tétanisant, toute l'horreur et la bêtise de la guerre, la hideur de la chair outragée par le métal, la tristesse révoltante de la jeunesse et de la Vie humaine soustraites injustement aux êtres qui mènent les combats sous la contrainte.



On le sait, tout le monde le sait : la guerre est une ineptie sans nom mais le talent de l'écrivain transcende ce témoignage brut, littéraire juste ce qu'il faut, unique par sa vivacité, plus de cent ans après les événements qu'il décrit.
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La Peur

Plongée effroyable dans la guerre des poilus dans ce roman de @Gabriel Chevallier.

Un roman autobiographique dont on sent bien la véracité des horreurs subies par le personnage de l'histoire et ses compagnons d'infortune.

Un témoignage d'une rare intensité qui met en lumière la stupidité de cette guerre dont les tranchées furent le théâtre principal.

Une œuvre puissante en totale immersion dans l'apocalypse.
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La Peur

A la relecture de ce témoignage- car il en va bien plus du témoignage que du roman- je comprends pourquoi j'avais été incapable, il y a deux ans, en plein travail de recherches avec mes amis lecteurs ( Amis de la Bibliothèque municipale de mon village), d'écrire une quelconque critique. Tout au long de ce récit, on assiste impuissant au saccage meurtrier qu'a été cette Grande Guerre. L'auteur relate très simplement- très atrocement devrais-je dire) la confusion, la désorganisation, l'envoi au combat en sachant que la cause est perdue... Et bien sûr, LA PEUR qui en découle, le sentiment d'incompréhension, d'injustice, la souffrance...

Allez, pour "alléger tout ça, je vous fais un petit cadeau : Traité de civisme de Boris Vian - qui rejoint ce thème- interprété par Dominique Pinon et Silvia Lenzi

https://vimeo.com/397932956?ref=fb-share&1&fbclid=IwAR3VyhdH3_6XYLiyQWoBhd50ypPOm7z7KB9I4ErXhSLuBV4Q30W7m9bLY1w
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La Peur

Gabriel CHEVALLIER, alias Jean DARTEMONT nous décrit sa « Grande Guerre ». Surtout LA PEUR omniprésente au fil des jours et des nuits. Son témoignage affreusement réaliste nous emporte et nous fait réaliser les ordres aberrants voire insensés qui sont parfois donnés aux troupes. La vie du soldat ne vaux vraiment pas chère ! De la « chair à canon » ! C’est un récit difficilement acceptable, dur à lire, effroyable. Un véritable carnage au sens propre du terme. Livre magnifique qu’il faut lire absolument pour connaître ce qu’on vécut nos poilus.
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Sainte-Colline

Très bon roman, à la fois tendre et drôle, avec un ton un peu à la Marcel Aymé, une ironie douce et compréhensive. Un bouquin qui rappelle Enfantillages de Jacques Perret ou le film Zéro de conduite. Un livre qui donne envie de revivre les années collège/lycée pour refaire les 400 coups, pour retrouver la guérilla élèves/profs. Vive la lutte des classes!
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Détective consultant britannique, je suis connu pour mon sens aigu de l'observation. J'acquiers la célébrité grâce à mon collègue et ami, le docteur Watson, qui aime relater mes exploits dans le Strand Magazine. Quand je n'enquête pas pour arrêter de redoutables criminels comme Moriarty ou le Colonel Sebastian Moran, j'aime jouer du violon ou écrire de « passionnantes » monographies sur les cendres de cigarettes. Je suis... (Indice : c'est presque moi !)

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