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Critiques de Grégory Cingal (5)
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Ma nuit entre tes cils

Ce livre est un joyau d'écriture littéraire avec des références au cinéma et à la chanson.

Je le perçois comme un livre d'heures d'autrefois.

Je le lis, je le pose, je le reprends pour lire et relire les mots qui viennent. Avec précaution et silence pour respecter la souffrance de cet homme qui écrit pour ne pas oublier la femme qu'il aimait.

Celle aux cheveux emmêlés comme des algues, il revoit son sourire, réentend sa voix, sent sa fragilité comme un écho à la sienne à prendre la vie comme elle vient.

Un moment passé ensemble, un regard pris à la dérobée, une expression du visage, et l'instant d'elle est posé sur le papier. Jamais avec lourdeur et apitoiement mais léger comme un baiser.





" Sa chemise oubliée, couleur de lait d'abricot, furieux j'y plonge ma tête, l'effluve sucré m'envahit tout entier, la nuit folle est là, à portée de lèvres, ébouriffée. Mes jambes se dérobent, je me raccroche à une marche, l'étoffe chagrineuse s'échappe le long de l'escalier, dessine sa silhouette repliée, narquoise, assoupie. Allons, courage garçon." (page 61).

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Ma nuit entre tes cils

Il l’a aimée, elle est morte. Il l’aime encore mais elle n’est plus là. Et lui doit continuer et risquer de l’oublier. Petit à petit, chaque jour. Un effacement lent et sûr dont il ne veut pas. Alors, il a noté tout ce dont il se souvenait encore : un regard, une dispute, un lieu, une lumière… avec elle. Et puis, de toutes ces notes, il n’en a gardé que quelques- unes, pour faire un livre qu’il a intitulé Ma nuit entre tes cils.

C’est ce petit livre à la couverture bleu nuit que je viens de finir et je peux dire que j’ai fait une rencontre, celle de K. Une initiale. Evidemment, je peux supposer, proposer des prénoms. Je ne saurai jamais quel était le sien, ni qui elle était vraiment. Ce « portrait mosaïque », ces quelques fragments réunis, ces petits instantanés, comme un puzzle aux pièces manquantes, me permettent seulement d’entrevoir, de m’approcher un peu d’elle, et de lui aussi.

Elle était professeur de philosophie et avait du mal à trouver un sens à tout cela. Elle avait dû chercher, y réfléchir longtemps. Certains ont pu penser l’avoir aidée. Mais ils s’étaient trompés. Tous. Lui aussi, le garçon, comme elle l’appelait. Même l’amour n’aura rien changé.

Il a tenté alors de lui redonner une forme de vie, de la peindre en mouvement afin de « mieux (se) persuader… que le destin aurait pu tourner autrement, qu’il n’avait rien d’une fatalité, qu’il s’est joué à un cheveu… » Et ce petit livre nous la montre en vie, celle qui ressent « un écrasement généralisé, sans lieu, indolore », celle qui est « disparaissante ».

Elle est moulin à paroles, danse le tango jusque tard dans la nuit, mange et fume comme dix, se passionne pour l’œuvre de Thomas Bernhard, traîne dans les salles des ventes de Drouot, contemple la vie autour d’elle, ses voisins de bistrot, les passants dans la rue. Elle venait de « tomber très fort dans Polnareff » disait le dernier SMS qu’il avait reçu d’elle, « relique digitale » qu’il a effacée, par erreur. Mais rien ne l’a retenue.

Alors, pour tenter de l’empêcher de disparaître définitivement, Grégory Cingal puise dans les mots : ils ne sont pas forcément justes, ils mentent et déforment souvent, sont impuissants à traduire l’immense douleur, mais ils sont là et cet « émiettement verbal » vaut « peut-être mieux, au bout du compte, que la blancheur abyssale de l’oubli. »

Un très beau texte sensible et fin dont l’écriture précise, ciselée traduit la peur de l’oubli, de la disparition, de l’extinction dirait Thomas Bernhard.

Grégory Cingal livre ici un portrait fragmenté - parce que les mots ne peuvent tout dire, ni recréer un être de toutes pièces - de celle qui a été sa compagne pendant dix ans, s’interrogeant sur le rôle de l’écriture dans cette lutte contre l’absence, la disparition et se révoltant contre l’impossibilité d’évoquer l’être aimé sans parler de soi-même, comme si l’auteur devenait l’ombre incontournable et ineffaçable de celle qu’il a aimée, le tuteur désormais obligé et nécessaire de la femme qui ne peut maintenant avancer toute seule et qui n’existe, dorénavant, qu’à travers l’autre.


Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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Le revers de mes rêves

"A peine esquissés, nos gestes de tennis trahissent notre histoire intime, ils sont la marque irréductible de notre identité profonde, le signe irrécusable de notre présence au monde."



C'est un fou de tennis qui a commis ce livre, pour le plus grand bonheur d'autres fous de la petite balle jaune. Mais c'est un auteur, un peu philosophe, un poil poète qui tente d'expliquer ? de traduire ? de raconter ? comment cet engouement a dépassé le stade de la passion pour envahir sa vie entière. Le tennis comme un révélateur de personnalité, comme une métaphore de l'existence. Le tennis comme un fil conducteur, un truc qui le rattache à la terre. Malgré la souffrance, les désillusions, l'esclavage du joueur lambda occupé à gravir peu à peu les étapes du drôle de barème que constitue le système de classement national où les meilleurs sont "négatifs".



C'est un fou de tennis, mais pas si fou que ça. Celui qui adule McEnroe et Federer ne peut que recevoir mon admiration en retour. Celui qui peut vous raconter en détail les matchs les plus fameux de ses idoles alors qu'il ne se souvient pas de ce qu'il a mangé la veille a toute mon attention. Celui qui est capable de décrire avec tant de passion et de poésie la majesté du coup droit de Federer et la façon de voler sur un court de John McEnroe reçoit à son tour tout mon amour.



J'en ai connu plein de ces crocodiles des courts qui passent leurs soirées et leurs week-ends à écumer les tournois régionaux, rêvant de victoires épiques, se contentant de quelques succès poussifs dont ils rejoueront les moindres instants dans leur tête jusqu'au match suivant. Le tennis est un virus inguérissable. Même blessé on reste tennisman, non pratiquant c'est tout.



La balade que nous propose Grégory Cingal à travers quelques courts chapitres est une sorte d'autobiographie navigant entre réalité et fantasme, celle d'un grand enfant éternellement amoureux du jeu. Elle ne peut que ravir ceux pour lesquels comme pour lui (et moi), le tennis est une part non négociable, inextricablement mêlée à la vie quotidienne. Et représente surtout une sorte de vie idéale car "quel autre sport a la bonté d'offrir à chaque engagement une deuxième balle ?". Une autobiographie, oui. Celle d'un homme qui avoue sa difficulté d'adaptation au monde et trouve dans le tennis un refuge réconfortant, une bulle de survie.



"Le simulacre de vie qu'offre un match de tennis suffit à mon existence. Ce n'est que dans cet espace rectangulaire séparé en son exact milieu par un filet tendu à quatre-vingt-treize centimètres du sol que je me repais de la contrainte, des mille et une servitudes d'une vie au quotidien pour laquelle je n'ai aucun goût, fuyant toute espèce de responsabilités avec la même célérité que je tente de rattraper une amortie rétro. N'ayant aucun talent pour considérer le monde comme un jeu, je pratique le jeu à l'écart du monde. La seule vie convenable est dans la lecture des livres, entre les bras des femmes et sur un court de tennis."



Et si la vérité sortait de la plume d'un amoureux fou d'un tennis de rêve ?
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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Ma nuit entre tes cils

"Le baume du temps qui cicatrise les blessures, je ne connais rien de plus répugnant" nous dit l'auteur vers la fin de ce livre, comme une injonction tardive à la prudence: lecteur avide de sensiblerie niaise, passe ton chemin. Ce qu'évoque Grégory Cingal dans ce récit d'à peine nonante pages est aussi beau et terrible que les peintures du Caravage et agit sur le lecteur un peu comme la sonate au clair de lune de Beethoven - c'est du grand art, et, pour être encore plus précis : c'est de la littérature (on se passera de "vraie" ou "bonne" d'ailleurs). On pourrait ne s'arrêter que sur la forme, le travail sur la phrase, le vocabulaire riche et parfois inattendu, pour dire à quel point ce livre est magnifique, ainsi on ne divulgacherait rien de ce livre. Car oui, futur lecteur de Grégory Cingal, tu seras confronté aux souvenirs, à Eros et Thanatos, au désir et à l'absence, aux rêves, à Maurice Blanchot et à la possibilité d'impuissance ontologique de la littérature. Et puis tu seras confronté aussi aux simples détails de ce qui fait la vie d'un couple, détails banals sur le moment, mais qui, au final, et ainsi tous rassemblés, sont autant de touches de couleurs qui donnent la patine d'originalité à cette œuvre qui tente de nous dire que oui : il se pourrait bien que l'amour soit plus fort que la mort, même si celle-ci a généralement le dernier mot.
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Ma nuit entre tes cils

Difficile de faire un résumé de cet ouvrage sans perdre la poésie du texte. Il aime K. Il aime cette femme et ses taches de rousseur, ses copies corrigées dans un bar, ses addictions du moment, ses réflexions philosophiques, ses achats compulsifs, ses manières de ne pas être tout à fait à lui. Il l'aime et elle lui manque. Elle n'est plus là. Elle ne sera plus jamais là.

C'est un très joli texte, poétique, amoureux, sensible. Des souvenirs qu'on égrène au fil des réminiscences du passé. Les bons comme les mauvais. Le manque. L'incompréhension. L'absence. La douleur. Le vide. C'est toutes ces facettes de l'amour et du deuil que l'auteur explore et dévoile. C'est un texte qui peut se grignoter page après page, souvenir après souvenir. Ou se dévorer d'un coup, comme un besoin irrépressible de se gorger des souvenirs qu'il reste pour qu'ils ne s'échappent pas, pour décrypter, pour comprendre.
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