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Citations de Hemley Boum (62)


 L’humiliation est une bien étrange émotion, elle enchaîne le bourreau et sa victime dans un corps-à-corps d’une telle intimité que nul ne peut en présager l’issue.
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Les préjugés et les assignations annihilent la possibilité d’une première bonne impression. Les expériences ultérieures avec les autres, les deuxième, troisième impressions seront peut-être meilleures. Encore faut-il en avoir l’occasion. Comment ne pas en vouloir à ceux qui chargent une barque déjà fort lestée ?
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Comme ma mère, je me suis tenu au bord du précipice toute ma vie. Je n’ai jamais vraiment renoncé à la séduction de la chute, l’attraction du vide. Se laisser choir, enfin lâcher prise. Toute une vie à affronter le néant en moi. Je comprends Dorothée mieux que personne. 
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Cette communauté, ce village et tous ceux le long de la côte, constituaient tout l'univers de Yalana. Elle connaissait chaque recoin des terres, celles qui avaient été longtemps exploitées et devaient être laissées en jachère quelques années pour se régénérer, celles qui supportaient d'être brûlées et nourries à la cendre des plantes calcinées avant d'être à nouveau cultivées, celles qui étaient riches et fécondes, sur lesquelles on pouvait labourer et semer. Elle savait le nom secret de chaque plante, celles qui soignent et celles qui empoisonnent. Yalana connaissait chacune des rivières qui traçaient leur route vers le fleuve, puis se jetaient dans l'océan, le nom et l'histoire de toutes les familles le long de la côte jusqu'à l'intérieur des terres. Elle n'ignorait rien du sens caché des coutumes, de la sagesse transmise par les contes, les légendes, les superstitions. Ce savoir faisait partie d'elle. Ce n'était pas une compétence acquise, quelque chose qu'elle aurait dû apprendre de façon explicite, comme on va à l'école pour acquérir des connaissances que l'on ne posséderait pas autrement, mais un espace amniotique hors duquel elle suffoquait. Aussi fut-elle désarçonnée, effrayée d'être exclue de sa communauté.
(p.164)
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Julienne posait sur moi un regard singulier, scrutateur, elle relevait des détails dont je n’avais pas conscience et les commentait : « J’aime ton rire. Comme si tu essayais de retenir la joie qui déborde de toi, tes lèvres sont closes, ton regard brille, tu as ces soubresauts dans la poitrine, et pour finir, tu laisses aller, tu ouvres grand la bouche et tu rejettes la tête en arrière. J’aime la façon dont ton rire s’échappe de toi. » Son attention continue et bavarde me déconcertait : qui prend la peine de décrire un rire ?
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Mais je saurai prendre soin de votre fille, je vous le promets.
Promesse fallacieuse que les hommes se font depuis la nuit des temps au sujet de femmes capables de prendre soin d'elles-mêmes.
(p.252)
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 Les regrets, Petit Pa’, sont l’autre côté de la vie. Chaque fois que nous faisons un choix, nous renonçons à autre chose et parfois nous nous trompons, nous voudrions revenir en arrière, savoir ce qu’aurait été notre existence si nous avions opté pour tel chemin plutôt que tel autre. Nous fantasmons ce qui aurait pu être, ce qui est à jamais perdu.
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À cette étape de ma vie, j’étais persuadé que l’on pouvait se soustraire à ses souvenirs, s’absoudre de ses fautes simplement en se dissociant de celui que l’on était au moment de les commettre. Je pensais qu’il suffisait de décider d’être heureux et d’aller de l’avant pour que le passé disparaisse comme par magie et que la vie redevienne une page vierge. Je suppose que quelque part en enfer, le diable rit encore de ma naïveté.
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Chaque fois que nous faisons un choix, nous renonçons à autre chose et parfois nous nous trompons, nous voudrions revenir en arrière, savoir ce qu'aurait été notre existence si nous avions opté pour tel chemin plutôt que tel autre. Nous fantasmons ce qui aurait pu être, ce qui est à jamais perdu. Ils sont conçus dans nos désirs déchirants, contradictoires : il faudrait ne rien avoir vécu pour espérer échapper aux regrets.
(p.337)
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Toutes ces subtilités ne faisaient pas partie des choses que j’avais envie de raconter sur moi. Comme un de ces fils qui dépassent d’un vêtement trop porté, tirer dessus comporte le risque de voir le tissu s’effilocher entre vos doigts. Le mieux était de faire un nœud, le plus discret possible, et d’espérer qu’il tienne. Ma vie était une étoffe fragile retenue par une multitude de nœuds. Si j’en défaisais un, le reste partirait en lambeaux.
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Avoir été si heureux, si pleinement à sa place et avoir eu l’arrogance de prendre cela pour acquis. Ce serait la plus grande souffrance de sa vie. Au-delà des deuils impossibles, des déchirures et de la solitude, il y aurait la culpabilité sans remède d’avoir vécu ces heures-là en les trouvant presque méritées, ne pas en avoir perçu la fragilité. Elle ne cesserait de s’étonner que l’air marin soit toujours aussi doux en fin de journée, que le soleil s’effrite crépuscule après crépuscule en milliers d’éclats arc-en-ciel dans la mer. Au désastre de sa vie, à sa perte immense, répondrait l’indifférence tout aussi insondable de cette nature qu’elle avait crue protectrice et alliée.
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Il n’y a pas si longtemps, il aurait parlé en leur nom avec autorité, maintenant, il redoutait le moment où elles se mettraient à convoiter une vie qu’il ne pouvait pas leur offrir. 
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À l’endroit où le fleuve se précipite dans l’Atlantique, l’eau est ardoise et tumultueuse. Elle s’éclaircit à mesure qu’elle s’éloigne des côtes, en nuances de gris de plus en plus claires, pour finir par refléter la couleur du ciel lorsque celui-ci devient le seul horizon.

Incipit
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Nos périples à nous ne prévoient aucun retour, nous ne sommes pas des voyageurs mais des exilés. L’exil est un bannissement et une mutilation, il y a là quelque chose de profondément inhumain. Quel que soit le danger que l’on fuit et le soulagement de s’en éloigner, chacun mérite de garder quelque part en lui l’espoir d’un retour.
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J'avais tout en mémoire : elle dans mon ventre. J'étais enceinte de quatre mois et elle grattait comme une petite puce impatiente. Elle avant sa naissance, sautant dans tous les sens, martyrisant ma vessie, et puis la main de son père posée sur mon ventre. Il fallait au moins ça pour la calmer. Elle venait se frotter à sa chaleur, je pouvais presque entendre ses nombreux ronronnements de petite chatte à naître.
(p.328)
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Cette nuit-là, il ne faisait pas assez froid pour espérer mourir frigorifié dans la rue, mais il pleuvait. Pas une de nos pluies à Douala. Il faut avoir connu d'autres pluies pour aimer la violence sans nuance des orages sous nos tropiques. Ceux où les enfants s'ébrouent dans la boue collante et ouvrent grand la bouche pour gober les trombes d'eau tièdes, celles qui crépitent sur les toits de tôle. Et la terre desséchée qui se met à embaumer.
Ici, il s'agissait d'un crachin glacial qui vous pénétrait jusqu'à la moelle, obscurcissait jusqu'au souvenir du soleil et amplifiait à l'infini l'écho de vos fragilités. Comme s'il pleuvait à l'intérieur de vous.
(p.245)
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Sa relation avec Julienne était tressée de ses mots à elle. Elle nommait les émotions, les liens, les souvenirs, lui restait souvent silencieux. Il était payé pour le savoir, les discours en disent toujours moins qu'on ne le pense et bien plus qu'on ne le voudrait. Ce qui s'exprime va au-delà de l'intention et parfois la trahit.
[…] Dans cette parenthèse inespérée, à cette étape de sa vie, les mots étaient les fils d'or avec lesquels ils retissaient patiemment l'histoire commune dont jusqu'ici chacun possédait une part impossible à comprendre, énigmatique parce que fragmentaire.
(p.325)
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 Il devint mon tuteur, exactement comme ces piquets qui aident certaines plantes à pousser droit : l’homme imparfait et malgré tout fiable que je voulais être un jour, quand je serais grand. 
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La région est traversée par des centaines de petites rivières qui tracent des méandres à travers des kilomètres de forêts, creusent dans la terre des sillons d'eau claire, polissent les rochers. Dans le lit des ruisseaux flottent des jacinthes d'eau, leurs fleurs lilas bleuté et leurs racines ébouriffées. Des torrents, des cascades... Sur le sillage de l'eau vive se mouvant vers l'océan la forêt est drue, le sol fertile, la vie luxuriante, presque envahissante. Puis il y a le fleuve, le Ntem majestueux et sa sylve de mangrove. Lorsqu'on s'en approche, la forêt se fait marécageuse, sous-bois serré de palétuviers aux racines aquatiques profondément enfoncées dans l'eau. Et enfin l'embouchure, rencontre et fracas. D'un côté, le fleuve assombri en son fond par un tapis de racines et de feuilles, de l'autre déjà l'Atlantique, son sable, son sel, la puissance de ses courants. Car le fleuve ne glisse pas sereinement dans l'océan, il s'y jette et s'y brise, il s'y engouffre puissamment. À quelques mètres seulement à gauche, ces eaux sont encore douces, accueillantes, et un peu plus loin à droite, l'océan s'apaise. Tous les jeunes pêcheurs apprennent dès leurs premiers coups de rame à contourner le Vidodo, l'embouchure, même les enfants pour qui la plage, l'océan, le fleuve sont incessants et inépuisables terrains de jeu savent que le Vidodo est l'arbre interdit planté au cœur de leur paradis.
(p.18-19)
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Que savaient-ils de l’indigence ? De nos vies bradées, nos rêves avortés, la pauvreté de nos horizons ? De la proximité et de la violation de toute intimité qu’elle suppose ? De l’ignorance crasse qui contraint à nager à contre-courant de soi-même pour espérer rattraper un peu de l’humanité dont d’aucuns ont hérité à la naissance ? Que savaient-ils de l’exil ? Je n’étais jamais aussi conscient de mes limites que lorsque j’étais face à eux. Je n’avais aucun souvenir de la première fois où j’avais dû faire face au racisme, et même si cela m’était arrivé, à cette époque je n’en concevais pas d’amertume inconsolable. 
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