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Citations de Hirô Onoda (11)


Qu'allait-il se passer ? Le major Taniguchi avait dit que je pouvais rentrer tout de suite au Japon, mais l'idée d'y retourner et de vivre au milieu de gens normaux m'effrayait. Je ne parvenais même pas à l'imaginer.
Lorsque je m'étais envolé de nuit de l'aéroport d'Utsunomiya, tant d'années auparavant, j'avais abandonné tout espoir personnel concernant l'avenir. A l'époque, je m'étais dit que je devais laisser tout cela derrière moi. Ensuite, à chaque fois que je commençais à penser à mon foyer et à ma famille, je me forçais à chasser ces souvenirs de mon esprit. Cela était devenu une habitude, et finalement ces pensées cessèrent. Depuis plus de vingt ans maintenant, l'idée d'un foyer m'avait à peine effleurée, et pas une seule fois je n'avais rêvé de ma famille. Ma mission était devenue toute ma vie.
Maintenant, cette vie prenait fin, et j'étais brutalement privé de ma raison d'être. Alors que je regardais l'épais bouquet d'arbres de l'autre côté du fleuve, le visage de mon frère Tadao se mit à flotter devant mes yeux.
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Puis, en me regardant droit dans les yeux, il ajouta : "Il vous est formellement interdit de mourir de vos propres mains. Cela peut prendre trois ans, cinq ans, mais quoi qu'il arrive nous reviendrons vous chercher. En attendant, tant qu'il vous restera un soldat, vous devrez continuer à le commander. Vous devrez peut-être vous nourrir de noix de coco. Si cela devait être le cas, faites-le ! Mais en aucun cas, vous ne pouvez vous donner volontairement la mort."
Le commandant, un petit homme au visage agréable, m'avait donné cet ordre d'une voix douce. On aurait dit un père s'adressant à son enfant. Lorsqu'il eut terminé, je répondis d'un ton aussi énergique que possible : "Oui, chef !"
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Lorsque je suis arrivé dans les Philippines en 1944, la guerre se passait mal pour le Japon, et au pays la phrase ichiosu gyokusai* était sur toutes les lèvres. Cela voulait dire que le peuple japonais préférait mourir que se rendre. Je prenais cela à la lettre, tout comme, j'en suis sûr, bon nombre de jeunes Japonais de mon âge.
Je croyais sincèrement que le Japon ne se rendrait jamais tant qu'un seul Japonais serait encore en vie. Et réciproquement, si un seul Japonais était encore en vie, le Japon ne pouvait s'être rendu.
Après tout, c'était là le serment mutuel que nous, les Japonais, avions fait. Nous avions juré que nous résisterions aux démons américains et anglais jusqu'à la mort du dernier d'entre nous. S'il le fallait, les femmes et les enfants se battraient avec des bâtons en bambou, tuant un maximum de soldats avant de mourir. En temps de guerre, les journaux martelaient cette résolution avec les mots les plus forts possible : "Combattez jusqu'au dernier souffle !", "Il faut protéger l'Empire à tout prix !", "Cent millions de morts pour le Japon !". Ce sont les mots d'ordre avec lesquels j'ai grandi.

(*) Littéralement : "Un million d'âmes meurent vaillamment comme un diamant brisé."
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L'unité de recherche laissa des journaux et des magazines. La plupart étaient récents et beaucoup d'articles étaient consacrés au mariage du prince héritier. Les journaux, qui couvraient une période d'environ quatre mois, faisaient une pile de près de soixante centimètres. Nous pensions qu'il s'agissait de réimpressions de véritables journaux japonais trafiqués par les services secrets américains de façon à effacer toutes les informations qu'ils voulaient nous cacher. Nous ne pouvions rien envisager d'autre, car nous croyions que la guerre du Pacifique se poursuivait.
Et d'une certaine façon, ces journaux confirmaient que c'était bien le cas, parce qu'ils parlaient beaucoup de la vie au Japon. Si nous avions réellement perdu la guerre, il n'aurait pu y avoir la moindre vie au Japon. Tout le monde serait mort.
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Quand nous trouvions des tracts, nous étions heureux. Nous considérions ces "faux" messages comme des encouragements. Ils contenaient de nombreuses informations sur ce qui se passait au Japon et sur la santé de nos familles, car parfois il y avait des photographies. Par exemple, un tract qui tomba en 1957 contenait une photo avec la légende : "La famille d'Onoda-san". On y voyait mes parents, ma soeur aînée Chie et ses enfants, ma jeune soeur Keiko et plusieurs autres membres de la famille. Tout paraissait authentique, sauf qu'un voisin qui ne faisait pas partie de la famille se trouvait lui aussi sur la photo. C'était comme la fois où un parent éloigné de Shimada figurait sur ce qui était censé être une photo de sa famille proche.
Un autre détail n'allait pas : il n'y avait aucune raison d'ajouter le suffixe -san après mon nom. "La famille d'Onoda" aurait été plus approprié selon les règles de l'étiquette japonaise.
Il y avait également une photo de "La famille de Kozuka-san". Celui-ci déclara : "Comment voulez-vous que j'y croie ? Pourquoi est-ce que ma famille se prendrait en photo devant une maison neuve qui ne nous appartient pas ?"
Nous ignorions que les villes japonaises avaient été massivement bombardées et que Tôkyô avait quasiment été réduite en cendres.
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Parfois, Shimada disait d'une voix douce : "Je me demande si c'est un garçon ou une fille".
Lorsqu'il est parti de chez lui, sa femme attendait leur deuxième enfant. Le premier, une fille, n'était pas encore entrée à l'école primaire. Un jour, alors qu'il était en train de parler d'elle, Shimada soupira et dit : "Je parie qu'elle doit être en âge de s'intéresser aux garçons maintenant". Puis il regarda le sol devant lui tandis que la pluie tombait.
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Comme pour les journaux que nous avions reçus, nous ne crûmes pas un mot de ce que nous entendîmes à la radio au sujet des questions militaires et des relations internationales. Nous tenions pour acquis que nous n'étions pas en train d'écouter des émissions en direct, mais des enregistrements américains qui avaient censuré ou modifié tout ce qui leur était défavorable.
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C'était exaspérant. Je me retrouvais là sans aucun pouvoir, avec des troupes désordonnées dont aucun soldat ne comprenait rien aux bases de la guérilla que nous aurions à mener sous peu. Je me mis à espérer que l'ennemi en vienne à débarquer. Au moins, cela remettrait les choses en ordre ! Cela se produisit trois jours plus tard.
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"Je croyais sincèrement que le Japon ne se rendrait jamais, tant qu'un seul japonais serait encore en vie. Et réciproquement, si un seul japonais était encore en vie, le Japon ne pouvait s'être rendu."
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Nous étions certains que, même si l'ennemi se posait au Japon, la victoire finale nous reviendrait. Comme presque tous nos concitoyens, nous considérions le Japon comme l'invincible pays des dieux.
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A l'époque, si un soldat fait prisonnier parvenait à s'évader et à retourner au Japon, il passait en cour martiale et risquait d'être condamné à la peine capitale. Même si la sentence n'était pas appliquée, il était si violemment ostracisé par ses compatriotes, qu'il aurait mieux valu qu'il meure. Les soldats étaient censés donner leur vie pour la cause, et non pour se mettre à plat ventre dans les camps de prisonniers ennemis.
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