Comme il y a des scènes de la vie conjugale, il y a des scènes de la vie amicale. On ne fait pas de thérapie entre amis et pourtant. En amitié aussi, il y a ceux qui aiment plus, qui donnent plus, ceux qui sont bourreaux, ceux qui sont victimes. Il y a ceux qui gagnent, ceux qui perdent, ceux qui admirent, ceux qui sont admirés. Le problème avec l’amitié, c’est le polyamour. On n’est pas forcément exclusifs. On a plusieurs partenaires. Peut-il y avoir infidélité en amitié ?
Revenir à Paris est une chimère. La possibilité de faire me rassure, mais il faut croire que faire ne m’intéresse pas. Pas même une expo. En même temps, ce serait peine perdue vu qu’il faut réserver de plus en plus longtemps à l’avance. La réservation généralisée pour à peu près tout : ciné, musée, restau, visite, stationnement, hôtel, voiture, train, avion, concert, nécessitant une connexion internet, exigeant la création d’un compte, imposant la création de mots de passe avec un caractère spécial, une lettre majuscule, un minimum de 12 caractères et un chiffre, est un fléau contemporain. L’avenir est à ceux qui se connectent tôt.
Un couple merdique, c'est du pain bénit pour l'harmonie des autres. « Je ne sais pas comment il fait. Dieu merci, tu es moins chiante qu'elle. » Tu es heureuse, ton mari te compare et te préfère. Il y en a même qui sur-jouent le bonheur conjugal. C'est lui qui vient passer une main dans le dos de sa femme et lui dépose un bisou sur la tempe. Ils s'exposent en couple témoin. Il y a bien des appartements témoins. Et le couple qui se sépare, ça fait quoi à part mettre le bazar et faire éclore des conflits de loyauté ?
(p.121-122)
Le crapaud à la princesse : Si tu m'embrasses, je me transformerai en prince charmant.
La princesse, après avoir réfléchi : Je préfère avoir un crapaud qui parle.
Traduction d'un dessin de John Atkinson. (p. 89)
Je fuis si on me parle logistique
Je n'organise pas les vacances
Je ne peux pas faire deux choses en même temps
Je n'ai jamais demandé à mon mari s’il m'aimait
Je laisse traîner mes chaussettes
Et si j'étais un homme ?
(p.86)
Insta, Insta, dis-moi qui est la plus belle ?
Et Insta répond : Ce n'est pas toi, ma naine.
Tu as une belle maison, mais Blanche-Neige en a une plus belle que toi.
Tu as de beaux enfants, mais Blanche-Neige en a de plus beaux que toi.
Tu as des enfants intelligents, mais Blanche-Neige en a de plus intelligents que toi.
Tu passes de belles vacances, mais Blanche Neige en passe de plus belles que toi.
On peut décliner les possessions, les loisirs, les attitudes ad vitam. Et on y retourne. On se fait tous blancheneiger. Chacun a sa Blanche-Neige qu'on aimerait faire buter ni vu ni connu dans une forêt domaniale. Mais au fond, on préférerait surtout la voir se planter. Qu'elle mange un peu la poussière, qu'elle connaisse un revers de médaille, qu'elle ne retombe pas sur ses pattes, qu'on puisse trouver un peu de justice dans ce bas monde. On aimerait qu'elle rencontre un peu de lose surtout. Il ne suffit pas d'être heureux, encore faut-il que les autres ne montrent pas qu'ils sont plus heureux.
(p.92-93)
C'est comme les gens qui marchent et jamais ne font un pas de côté pour qui arrive devant. Je fais partie de ceux qui ont le réflexe de dire pardon et qui, la seconde suivante, enragent de l'avoir dit, de s'être frottés au crépi rugueux afin de céder le passage.
(p.206)
À l'heure du consentement, est-ce bien raisonnable de prendre quelqu'un par surprise en lui organisant son anniversaire?
La publicité multiplie les désirs à l’infini. Les magazines féminins aussi. L’agora Instagram encore plus.
En sortant, je manque d'avaler ma Nicorette en évitant de justesse un vélo. On me dit que je suis folle d'envisager un retour à Paris, que la ville a changé. Pour l'instant, je trouve surtout que ce sont les cyclistes qui ont changé. Les personnes à vélo sont les nouveaux chauffards parisiens. Je traversais au passage piéton dans mon bon droit, le petit bonhomme était bien vert. Un jeune trentenaire avec une barbe à la mode, habillée chez Carharrt, au guidon d'un triporteur, un vélo cargo, à contresens, m'a frôlé les pieds et le visage en brûlant le feu rouge. Mobilité douce ET conduite agressive. {…] La morale de l'histoire, c'est qu'on est toujours le connard d'un autre. On est toujours le piéton d'un cycliste, le cycliste d'une voiture, le scooter électrique d'un SUV, le train d'un avion.
(p.40)