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Citations de Jean-Luc Cattacin (75)


Ne vous inquiétez pas, a-t-elle ajouté soudain sérieuse comme si elle avait lu dans mes pensées. C'est normal de ne rien y comprendre au début. On s'y perd dans ces langues bizarres, même... mais c'est ça qui en fait le charme, tous ces détails étranges, non ? Et puis sur l'instant le petit éclat ironique est revenu dans son œil d'ambre et elle a ajouté : vous allez voir comme vous allez adorer le rongo-rongo : c'est écrit en boustrophédon inversé.
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Ce ne sont pas des caractères, comme dans notre alphabet, mais des logogrammes.
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Elle m'a dit qu'elle aimait boire une tasse de thé en rentrant du travail et m'a demandé si j'en voulais une et je n'aime pas ça mais j'ai dit oui et quelques minutes plus tard nous étions tous deux, une tasse à la main, devant la bibliothèque qui couvrait entièrement le mur du fond de son salon. La pièce était pleine de livres posés un peu partout ouverts ou fermés, d'où dardaient d'innombrables marque-pages, et pleine aussi de statuettes et d'objets divers de pierre blanche, de terre rouge ou de bois sombre, caricaturalement grossier ou au contraire infiniment fins mais que j'identifiais tous en bloc comme exotiques sans pouvoir être plus précis.
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J'ai quand même voulu dire quelque chose d'intelligent avant de partir : c'est drôle je pensais que personne ne connaissait rien à l'île de Pâques ici et en fait visiblement il y a au moins deux personnes un peu au courant... vous la connaissez, Sarah Svatti ? Là elle m'a regardé avec l'air patient d'un adulte qui explique la fin d'un film à un enfant qui ne l'a pas comprise et elle a dit : C'est moi qui les écris, ces livres et j'ai dit mais... et elle a dit oui Sarah Svatti ce n'est pas mon vrai nom et, touchant du doigt son sein : je m'appelle Élisabeth.
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L'après-midi même j'ai emporté le livre avec moi au bord de l'océan. Pour l'instant je ne l'ai pas encore ouvert. Je suis dans l'eau. Déjà l'après-midi touche à sa fin, et pourtant il y a encore du monde, dont les Parasols Rouges, une famille qu'on voit sur la plage depuis des années. Ils viennent chaque été, les parents et leur fille, et sont presque chaque jour installés sur les Belles. On les appelle les Parasols Rouges parce qu'ils en avaient un, il y a longtemps, quand avec Arielle et mes parents on s'amusait à observer et renommer tous les gens de la plage dès lors qu'ils réapparaissaient un tant soit peu régulièrement. Oh non regarde revoilà les braillards. Tiens, les garçons du tas d'algues vont jouer aux raquettes. Elle grandit dis donc la fille des Parasols Rouges.
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Depuis aussi loin que je me souvienne je suis heureux d'être ici, dans la lumière d'argent du ciel, les parfums mêlés des pins et des îles, les formes arrondies de la dune et, montant de derrière elle, le battement du cœur d'eau de l'océan.
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Je ne l'ai connu que tard, car avant de revenir à Préterny il a passé la plus grande partie de son enfance dans un internat en province où sa tante, qui habitait à deux rues de l'établissement, l'avait inscrit pour soulager son frère qui ne s'en sortait plus, seul avec Ficelle après la mort de sa femme. Il fallait que Ficelle s'éloigne.
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Je ne suis pas roux mais Ficelle m'a appelé Rouquin dès la première fois où il m'a rencontré au lycée et j'ai ri et nous sommes devenus inséparables, pour le meilleur et pour le pire. Mes parents qui ne connaissent que le meilleur aiment bien Ficelle, et ils m'ont dit qu'il serait mieux ici cet été avec moi au bord de la mer et qu'à Préterny.
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La femme en ciré jaune n'avait qu'un étal minuscule et lorsque je suis passé devant la table de jardin sur laquelle elle avait disposé les objets qu'elle vendait elle enlevait la grande feuille de plastique dont elle l'avait recouverte pendant la pluie. C'est peu dire que cela avait été inefficace : tout était trempé. Mais comme elle soulevait la bâche transparente dans le soleil revenu afin qu'il évapore l'eau qui du ciel avait tout gagné quelques heures plus tôt, la tablette brune couchée là sans vie m'a soudain comme sauté aux yeux de son corps de bois sombre. Sorte de sole solide, ni rectangle ni ovale, plaque allongée plate et trapue à la fois aux angles arrondis aux tranchants émoussés, évidente et tout de même étrange, elle s'affinait sur l'un de ses côtés, poissons de bois sans nageoires, sans queue ni tête. Le contact de l'eau sur une partie de sa surface l'avait rendue bicolore, pie, camée miel et châtaigne, cuir sec / cuir humide, caramel/ chocolat. M'arrêtant alors je vis que comme d'écailles elle semblait partout recouverte de marques irrégulières, de petits dessins grossiers alignés, et sans réfléchir soudain curieux j'ai tendu vers elle ma main qui serrait un billet donné un peu plus tôt par mon père, et posé la pointe d'un index inquisiteur sur le flanc plat, et l'ai senti scarifié de fin sillons, qui formaient des figures.
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Après avoir nagé à l’abri d’un parasol sur la terrasse et après un moment madame Verte m’avait appelé au grillage séparant nos maisons au prétexte de me donner quelques courgettes et demandé si tout allait bien et si je n’avais besoin de rien, et je lui avais dit avouez que c’est ma mère qui vous a demandé de veiller sur moi madame Verte et elle avait menti non en riant et était retourné cultiver son jardin. J’avais repris ma lecture depuis peu quand depuis l’arrière de la maison un bruit comme l’éboulement d’un flanc de montagne ou le rugissement — tel que je l’imagine— d’un brontosaure, un bruit inouï en tout cas dans le calme plat des Épines Rousses, m’en a tiré brusquement.
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Inutile de lutter: ma monture à moi s'appelle Rosalie et doit avoir soixante-quinze ans. Repeinte et rafistolée à l'envi, ma haridelle n'a qu'une vitesse et un frein symbolique, et sa pédale gauche grince chaque fois qu'elle passe le point haut de sa révolution et nous traversons vignes et champs ensoleillés dans son chant de canard bègue.
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Lente montée de chaleur la musique familière cesse de l'être et écoutée déjà mille fois se retrouve peu à peu nouvellement inouïe. Je perçois chacun de ses temps de ses instants chaque instrument me parle bientôt isolément avant de rejoindre les autres et d'enfanter avec eux une harmonie parfaite et les yeux fermés là sur mon lit qui tourne je la comprends enfin à cent pour cent la musique et m'en émerveille. Puis sans cesser de tout saisir des sons mon esprit s'empare bientôt d'autre chose : derrière mes paupières closes un fourmillement de couleurs est apparu qui se rejoignent se disjoignent se mêlent se marient explosent et bavent et recommencent et j'ouvre les yeux et alors la beauté infinie du papier qui tapisse les murs de ma chambre, négligée d'avoir été là sous mes yeux depuis mon enfance, m'apparaît dans tout son sublime et je passe un temps éternel - le temps a cessé d'exister - à en regarder le motif de lignes verticales si longtemps méprisé, si longtemps cru simple, et je saisis soudain tout son sel j'embrasse son effort d'abnégation de ses lignes (...)
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Mais comme elle soulevait la bâche transparente dans le soleil revenu afin qu'il évapore l'eau qui du ciel avait tout gagné quelques heures plus tôt, la tablette brune couchée là sans vie m'a soudain comme sauté aux yeux de son corps de bois sombre. Sorte de sole solide, ni rectangle ni ovale, plaque allongée plate et trapue à la fois aux angles arrondis aux tranchants émoussés, évidente et tout de même étrange, elle s'affinait sur l'un de ses côtés, poisson de bois sans nageoires, sans queue ni tête. Le contact de l'eau sur une partie de sa surface l'avait rendue bicolore, pie, camée miel et châtaigne, cuir sec/cuir humide, caramel/chocolat. M'arrêtant alors je vis que comme d'écailles elle semblait partout recouverte de marques irrégulières, de petits dessins grossiers alignés, et sans réfléchir soudain curieux j'ai tendu vers elle ma main qui serrait un billet donné un peu plus tôt par mon père, et posé la pointe d'un index inquisiteur sur le flanc plat, et l'ai senti scarifié de fins sillons, qui formaient des figures.
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Elle était logique et têtue et m’entraînait sur un terrain que je savais glissant, je le sentais et ne pouvais m’en prendre qu’à moi-même, je m’étais fourré seul dans cette situation délicate et il fallait rapidement que je parvienne à passer à autre chose.
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anodins. Le passé est là en continu, tout le passé, chaque détail, sans filtre, réveillé par n’importe quelle date entendue, n’importe quel mot ou nombre, n’importe quel objet. De tels cas, pour extrêmes qu’ils soient, nous permettent de mesurer à quel point il est handicapant de porter avec soi l’intégralité de son passé, de littéralement le traîner comme un sac, si l’on veut vivre vraiment le présent, y être librement la personne qu’on est aujourd’hui. Il apparaît clairement que pour cela en effet il faut laisser derrière soi, au moins en partie, celui qu’on a été et avancer, dépasser les histoires, les visages, les affections.
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Parfois dans mon métier mentir peut se révéler nécessaire, pour rendre plus crédible ce qu’on sait être la vérité, et certes je n’étais pas très fier d’avoir inventé cette histoire de prénom, mais la fin justifiait les moyens. Cela dit, ne prenant aucun plaisir à mentir, je ne souhaitais pas m’attarder sur le sujet.
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Je prenais des notes dont je savais que je n’aurais pas besoin de les regarder pour me souvenir presque mot pour mot de ses réponses lapidaires. J’ai levé les yeux vers son visage. Elle avait un air boudeur et ses doigts torturaient maintenant avec lenteur le bout des accoudoirs de Gilbert. Parler de son mari ne faisait rien pour la détendre, décidément, alors je suis passé à autre chose.
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Et puis il y avait Coralie, la femme de ma vie, celle avec qui, nous nous l’étions promis, je vivrais le reste de mes jours… alors avec le temps l’instant où cette fille était apparue, quelque beau qu’il eût été, s’était délité, dissous, fondu dans le sirop des souvenirs de tous les autres instants. En apparence. Car bien que semblant oublié, il avait de toute évidence laissé une empreinte dans mon esprit, puisque quand la même fille est entrée dans la pièce à nouveau, une tout autre pièce, et vingt ans plus tard, je l’ai reconnue tout de suite. C’est drôle, la mémoire.
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On a peine à imaginer aujourd’hui comment, au cœur d’une Europe qui non seulement se pacifie mais se construit aussi politiquement, un territoire à peine plus grand que l’île de France a pu être le théâtre d’un tel déferlement d’attentats et de mitraillages, d’assassinats et de représailles, de détentions sans procès ou de procès truqués, de morts par grève de la faim, de trahisons, d’enlèvements, d’exécutions sommaires et de lynchages. Des milliers de personnes mourront : militaires, paramilitaires, politiciens et civils innocents. Des dizaines de milliers d’autres seront blessées, mutilées, traumatisées ou perdront un ou plusieurs de leurs proches. Hommes, femmes, enfants, tués par l’armée, la police, les paramilitaires du camp opposé ou de leur propre camp, seront les victimes de ces bien nommés Troubles.
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(…) la société irlandaise a prouvé, des Vikings aux Anglo-normands, sa capacité à assimiler ses envahisseurs, à les faire siens, au point qu nombre des résistants descendent en fait de conquérants plus anciens.
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