Jean Auel parle de la série "Le clan de l'ours des cavernes"
-Tout le monde peut parler à un cheval, mais il n'écoute pas n'importe qui, expliqua Ayla.
L'énorme étendue d'eau rappelait plus la mer qu'un simple fleuve,et la surface tumultueuse et miroitante ne trahissait qu'une infime partie du pouvoir dévastateur qu'abritaient ses profondeurs.
Les voyages sont faits d'adieux, se dit-elle.
Le feu alimenté par la résine ardente, devait lutter contre les raffales de pluies.
Jondalar et Zelandoni se regardèrent sans savoir quoi dire. De temps à autre, Ayla émettait un commentaire qui leur donnait un aperçu de la vie qu'elle avait menée avec le Clan et les amenait à comprendre combien son enfance avait été différente de la leur. Cela leur faisait aussi prendre conscience que le peuple du Clan était à la fois semblable et différent d'eux.
Dans le monde matériel, un homme était plus grand, plus fort, bien plus puissant qu'une femme, mais dans le monde terrible des forces invisibles, la femme était l'héritière naturelle d'une force potentiellement plus conséquente. Pour les hommes la faiblesse physique de la femme était précisément ce qui permettait d'établir l'équilibre entre elles et eux. Qu'on permit aux femmes de réaliser toute la force qu'elles avaient en puissance, et c'en serait fini de cet équilibre.
Le Peuple du Clan avait atteint l'apogée de son évolution. Comme la gigantesque créature qu'ils vénéraient, parmi d'autres qui partageaient leur environnement, ils étaient sur une terre encore en formation, alors que la leur était désormais achevée.
Cette race d'hommes qui avait assez de conscience sociale pour veiller sur les faibles et les malades, assez de spiritualité pour enterrer les morts et vénérer un grand totem, cette race d'hommes aux cerveaux volumineux mais démunis de lobes frontaux, qui ne réalisa guère de progrès pendant près de cent mille ans, était condamnée à disparaître, au même titre que le mammouth et le grand ours des cavernes.
Les êtres humains qui vivent en communauté limitée à deux personnes ou aussi vaste que le monde - et quelle que soit la forme que prend leur société, établissent entre eux une certaine hiérarchie.

Au signal d'Ayla, chaque Mamutoï du Camp du Lion ramassa une pierre et la déposa précautionneusement sur le linceul, construisant peu à peu le cairn qui recouvrirait la tombe. Ayla commença alors la cérémonie proprement dite, sans traduire les gestes qu'elle faisait. Elle utilisa les mêmes signes que Creb avait faits sur la tombe d'Iza, et qu'elle avait reproduits pour honorer Creb quand elle l'avait trouvé sous les décombres de la grotte. Elle se lança ainsi dans une danse gestuelle dont l'origine remontait à la nuit des temps, et dont la beauté majestueuse en étonna plus d'un.
Ayla n'employait pas les signes simplifiés qu'elle avait appris à ceux du Camp du Lion, mais ceux plus complexes que chaque position du corps enrichissait de nuances subtiles. De nombreux signes étaient si ésotériques qu'Ayla n'en connaissait pas le sens profond, mais elle utilisait aussi des signes plus courants que le Camp du lion comprenait. Ils s'aperçurent donc que le rituel était destiné à faciliter l'accès à l'autre monde. Mais les autres Mamutoï voyaient seulement une danse gestuelle où les bras et les mains dessinaient des mouvements gracieux qui évoquaient l'amour et la perte, le chagrin et l'espoir mythique de l'au-delà.
L'enfant nue quitta l'auvent de peaux de bêtes pour courir vite vers la crique nichée au creux d'un méandre de la petite rivière. Elle ne pensa pas à jeter un regard derrière elle. Rien, depuis qu'elle était venue au monde, n'avait jamais menacé son refuge et ceux qui le partageaient avec elle.