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Critiques de Jean-Marc Rochette (565)
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Himalaya Vaudou

Le dessin est original, autant que l'histoire!

Des "personnalités" sélectionnées par la télévision essaient d'atteindre le sommet de l'Himalaya pour interviewer un écologiste radical, surnommé le "Père Noël". Ce dernier transforme petit à petit l'humanité en animaux. Le jugement très dur de l'action nocive de l'espèce humaine sur la planète est contrebalancé par les couleurs vives et la loufoquerie de l'arme utilisée pour sauver la planète.

Un bon moment!
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Himalaya Vaudou

Je n'ai pas été subjugué par ce livre. Par les magnifiques dessins de Jean-Marc Rochette, oui, mais pas par le scénario. Il s'agit d'une fable qui tente de faire passer des messages d'humanisme, et de lutte contre les dérèglements climatiques, la perte de biodiversité, ou les problèmes posés par la population humaine, la pression qu'elle impose sur le reste du vivant, et le péril qu'elle porte ainsi en son sein envers elle-même. Mais j'ai trouvé le propos très maladroit, et les artifices de scénario très... artificiels. L'ambiance montagneuse n'est qu'un prétexte et n'apporte rien (nonobstant les dessins somptueux). Pourquoi différents personnages meurent au début du livre, mystère.

Ce qui est par contre stupéfiant, c'est que ce livre date de 2009. Avoir eu conscience de ces sujets il y a 11 ans est, je trouve, exceptionnel.

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Himalaya Vaudou

Panique à bord de la planète nommée Terre. Attirée par le titre et les images du netteté incroyable. J'aurai pu croire à des photos.

Mais que font les têtes pensantes ? Politicien, chef de grand groupe... ils ne font pas grand chose pour la planète alors ils se transforment en animal pour qu'il y est moins de maltraitance envers notre planète.

Bizarrement arrive un personnage avec les traits de Nicolas Hulot qui semblerait être le seul à passer les épreuves, ou passer entre les gouttes face au périple pour aller rencontrer le grand maitre, vaudou, gourou ? De quel droit se proclame t'il maître ?



BD orientée écologie et qui met en évidence l'hypocrisie de chacun en fonction de ce qui l'arrange.
Lien : https://masatgieraa.blogspot..
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Himalaya Vaudou

Je n’ai pas aimé! Du tout! Ni le récit, trop facile, trop dans l’air du temps, ni les personnages, sans nuances, ni les visages, trop caricaturaux. A la rigueur, la seule chose que j’ai réussi à apprécier dans cet album, c’est au début la difficile ascension de la cordée sur les pentes montagneuses.

Les dessins brutaux aux traits grossiers et aux couleurs très vives ne m’ont pas déplu quant à eux!

Une déception dans l'ensemble cependant.
Lien : http://liratouva2.blogspot.c..
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L'or et l'esprit, tome 1 : Le tribut

Jean-Marc Rochette est un auteur protéiforme, qui a oeuvré aussi bien dans l'humour, entre autres avec Edmond le Cochon ou Jack Palmer avec Pétillon, que dans le réalisme. Dans cette veine, il a signé, sur des scénarios de Jacques Lob et Benjamin Legrand, quelques excellentes bandes dessinées de science fiction. Il est aussi actif dans l'illustration et et la peinture.

Sa bande dessinée la plus connue reste le Transperceneige, fable post-apocalyptique de Jacques Lob, seul scénariste primé à Angoulême. Mais il ne faut pas négliger ses collaborations avec Benjamin Legrand. Outre la suite du Transperceneige et Requiem Blanc, j'ai une affection particulière pour L'or et l'esprit.

La Terre s'épuise dans une guerre intergalactique qu'elle est en train de perdre. Loin des combats, un groupe de soldats et des scientifiques sont englués sur une planète particulièrement inhospitalière, "Deux Lunes", à priori sans intérêt stratégique. Ils espèrent y découvrir une nouvelle source d'énergie qui pourrait leur permettre de reprendre l'avantage contre leurs adversaires. Ignorant la nature de ce qu'il cherchent, ils explorent à l'aveuglette, tentant d'établir le contact avec les indigènes. Mais ils sont prêts à tout, et plus encore pour arriver à leurs fins.

L'argument est classique, mais la représentation de cet univers prend le contre-pied total de l'imagerie habituelle de la SF. Alors que nous sommes plus habitués à un dessin précis, rarement avare en détails, Rochette adopte un style quasi impressionniste rendu encore plus intrigant par le choix d'une palette monochromatique, au gré des saisons qui se succèdent sur ce monde étrange. A chaque saison, sa couleur, et son enfer. L'environnement n'en apparaît que plus inquiétant. Faune, flore et humains sont noyés dans un brouillard épais et une pluie persistante. Les arbres apparaissent comme des ombres menaçantes. Les animaux surgissent de nulle part... les soldats paraissent complètement déplacés dans un monde qui n'est pas le leur. Leur présence semble même rendre ce monde complètement fou.

Pour accentuer cette opposition, les planches se déroulant dans le QG terrien, seul endroit à peu près sûr pour les humains, tranchent par un trait plus classique et une palette grisâtre et métallique, à l'opposé des teintes glauques et organiques des planches se déroulant à l'extérieur.

La grande originalité de cet album, vous l'aurez compris, est qu'il ne se contente pas d'utiliser le dessin pour une représentation purement descriptive des événements. Ses variations enrichissent le récits d'impressions et de sensations étonnantes, jusqu'à une conclusion surprenante, qui rappelle que Rochette est également peintre.

On pense à la Guerre éternelle de Marvano, d'après Joe Haldeman, mais il y a surtout un univers complètement original qui augurait d'une série malheureusement mort-née. Ce Tribut peut malgré tout se lire de manière indépendante, malgré une conclusion abrupte.

Un deuxième épisode, l'aigle de Lafcadio, est paru dans les pages d'(A Suivre) mais ne sera jamais repris en album avant une intégrale sortie récemment chez l'excellent éditeur Cornélius. J'y reviendrai en temps utile.
Lien : http://labdmemmerde.blogspot..
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La Dernière Reine (BD)

Un hommage aux montagnes, aux ours, à la nature, à l'amour, à la reconstruction de l'âme.

Quel plaisir de découvrir cette histoire, ce graphisme.

Une dernière reine, une vraie pépite à garder à jamais sur ses étagères et à transmettre de génération en génération.

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La Dernière Reine (BD)

Voici vraiment un BD de son temps... c'est à dire que parfois, on a vraiment l'impression qu'aujourd'hui est si proche des années 1930/40.. Oui, le dessin est superbe...mais enfin le discours sous jacent de cette BD m'a semblé tellement réactionnaire qu'il pourrait faire écho à celui des années Vichy... Du genre : "La terre elle ne ment pas", "l'art moderne est l'œuvre de dégénérés, vive l'art réaliste" ou encore "la ville, c'est le mal"...enfin bref... Oui l'homme est en train de ravager son milieu naturel, d'anéantir de multitudes de formes de vie... Oui il faut réveiller les consciences pour alerter sur ce drame qui se joue, par notre faute...Mais ceci ne doit pas nous faire oublier que l'art c'est chercher, aller plus loin, déconstruire, surprendre... que la ville est aussi le lieu du mélange, de la diversité, ou l'activité artistique est riche et intense. Et pour revenir à l'histoire pure et simple,...well,... c'est vraiment pas finaud... : Un "héros" , une "force de la nature" (pas un p'tit gringalet des villes, ca non ! ), sur lequel le sort s'acharne d'une manière incroyable, une histoire d'amour à l'eau de rose...Bref aucune nuance dans cette BD, c'est manichéen d'une force...

Alors, vu tous les avis dithyrambiques Il semblerait que très peu de gens l'aient perçu comme cela... pour ma part, j'ai vrai malaise en terminant la lecture de cette BD….
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La Dernière Reine (BD)

Pendant des générations, les ancêtres d'Edouard Roux ont été les défenseurs et les protecteurs des ours dans le Vercors. Le dernier ours du Vercors a été abattu à la fin du 19ème siècle, Edouard a assisté à cet abattage et au non respect de la dépouille de l'animal majestueux.



Edouard Roux va participer à la 1ère guerre mondiale, à la guerre des tranchées. il échappera à la mort mais reviendra complètement défiguré, rejoignant ainsi le régiment des gueules cassées. Il doit porter une sorte de cagoule pour cacher son infirmité, il est comme dans une grotte protectrice. Grâce à un ami, il rencontrera à Paris, Jeanne Sauvage, sculptrice animalière, qui s'est spécialisée dans la création de masque pour redonner vie aux héros de la grande guerre, héros aux gueules cassées, mis en marge par la société pour laquelle ils ont engagé leur vie et perdu leur identité. Le travail fabuleux de Jeanne permet à Edouard de retrouver sa place d'homme et non de bête curieuse.

Edouard fera découvrir le Vercors à Jeanne, sa maison qui accueillera leur amour naissant. Il lui révélera aussi la grotte contenant une représentation ancestrale d'une ourse. Le talent de Jeanne en fera une sculpture admirée de toutes et tous. Mais il devait être écrit que le bonheur ne pouvait durer pour ses deux êtres singuliers. L a dernière reine sauvera Edouard du suicide ou du moins le retardera, Edouard consacrant son énergie pour la protéger, lui donner un avenir.



J'ai découvert le graphisme si particulier de Jean-Marc Rochette. J'ai été fasciné par les paysages. Mais aussi par le jeu des couleurs. Le trait qui me semblait noir au début est finalement très poétique. Tout est en estompe, en douceur en opposition à la violence et à l'ignorance des hommes. Edouard, de la lignée des gardiens, accomplira sa mission jusqu'au bout. L'homme protégeant la nature contre l'homme, c'est une belle parabole et cela nous rappelle et nous ramène à des valeurs essentielles : préserver la vie, la biodiversité, respecter les rythmes de la nature.











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La Dernière Reine (BD)

Un chef d'œuvre, voilà le mot que j'avais en tête quasiment à chaque page que je tournais. La puissance du dessin, sublime, nerveux, poétique tout en étant si délicat . Edouard Roux, issu d'une famille un peu particulière, en marge et en résonance avec la nature et les animaux, est une gueule cassée. Il montera à Paris pour rencontrer Jeanne Sauvage, qui lui redonnera son humanité, un visage. Edouard, homme des montagnes et de la nature, Jeanne, sculptrice animalière. Une formidable histoire d'amour naîtra de cette rencontre.

Comme je l'ai écrit, les dessins sublimes sont à la hauteur de cette formidable histoire, de ces vies traversées par les drames et la nature.

J' ai eu la chance qu'une amie très chère à mon coeur m'offre une édition d'exception, en noir et blanc, qui renforce -je pense- la puissance du trait, accentue l'essentiel. Jean-Marc Rochette est un immense artiste, qui a tant de choses à nous dire et montrer.
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La Dernière Reine (BD)

Quelle joie de voir paraître un nouvel album de Jean-Marc Rochette ! Avec La Dernière Reine, nous découvrons l'histoire d'Édouard, un gars du Vercors, proche de la nature. Roux et fils d'une fille-mère, son enfance n'a pas été si simple dans son village "Ta gueule, le rouquin. T'es bien le fils de la sorcière et de l'ours" où il a vu mourir en 1898 le dernier ours du Vercors. Devenu un homme, il fait partie en 1916 d'un régiment d'infanterie dans la Somme. De cette guerre, Édouard reviendra défiguré. Meurtri, il cache son visage sous un sac en papier. C'est grâce à sa rencontre avec Jeanne Sauvage, une artiste vivant sur la Butte Montmartre à Paris, qu'il va retrouver son visage et un nouveau souffle à sa vie "Jeanne, tu me fais si beau, moi, le plus laid des hommes. Pourquoi ? Parce que tu es magnifique Édouard."



C'est un voyage à travers le temps, au détour duquel nous croisons l'ours, la beauté des sentiments amoureux, le monde de l'art, le féminisme, les légendes, la guerre, l’injustice et la bêtise des hommes. Les réflexions écologiques sont interpellantes et profondes. Au cœur de ce récit tout en pudeur, la place de la nature est magnifique. L'ambiance est superbe avec une majorité de couleurs froides, des touches de couleurs chaudes et des contrastes sombres. Difficile de lâcher la lecture pour d'autres activités, tant l'histoire remplie d'émotions accapare notre esprit et nous entraîne vers une fin forte en émotion. Nous avons adoré le monde sauvage, la nature grandiose, les superbes montagnes, les animaux, les regards intenses, l'amour qui unit Jeanne et Édouard, et bien d'autres choses...



Intense, tragique et émouvant, c'est un récit doté d'une grande force, et aussi un superbe hommage à la nature et à la vie sauvage. Un immense coup de coeur
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La Dernière Reine (BD)

Un plaidoyer implacable, un hymne à l’amour et au sauvage dont la violence n’a d’égal que son effarante beauté. Un récit à la fois intime et universel au héros bicéphale (ce couple à l’étrange et romantique complémentarité) parfait, à la conclusion terrible et inévitable amenée comme une étrange délivrance aux allures de désespoirs. Un grand roman graphique dont l’épilogue témoigne jusqu’à la dernière case de ce qui est immortel et nous dépasse avec des atours de simplicité et de bestialité.
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La Dernière Reine (BD)

"Tant que dans la montagne régneront les ours, le soleil, se lèvera le matin. Mais, au soir où mourra la dernière reine... alors ce sera le début du temps des ténèbres."



Et au soir où périra l'Innocent, les ténèbres recouvriront la terre... et l'âme de ceux qui ne veulent pas accepter de vivre dans l'harmonie de toute chose !





Edouard Roux, est l'ami des solitaires parce qu'habité de solitude lui-même, l'ami des animaux sauvages, celui qui souffre quand on les traque, qui souffre de voir leur liberté s'amenuiser, de voir leurs vies s'écourter devant l'appétit toujours plus vorace de l'homme et de sa bêtise.



Edouard Roux, parfait dans ce qu'il est pour se confondre dans cette matière humaine "chair à canons" que le vingtième siècle a généré pour sa soif de barbarie et l'orgueil des nations.

S'il ne laisse pas la vie dans cet interminable et abominable conflit, il y perd son visage... Gueule cassée, il erre dissimulé sous une étoffe. Qui accepterait de le regarder dans les yeux ? Qui accepterait de contempler ce que l'entêtement humain peut produire comme désastre ? Même retourner vers sa mère, il ne l'ose et pourtant, il ne doit avoir honte de rien, lui l'Innocent, ce sont les Grands de ce monde qui devraient lui demander pardon de ce qu'ils l'ont fait devenir. Plus d'avenir pour Edouard, plus d'identité, l'indifférence du dégoût dans les regards qui l'effleurent encore...

Et il rencontre Jeanne... Jeanne magicienne qui lui redonne apparence, et quelle apparence, celle d'un kouros, inflexible et intimidant… d'un pur, comme si le masque devenait reflet de l'âme.



En échange de cette "renaissance", Edouard fait découvrir à Jeanne dont il s'éprend passionnément, son paradis, le Vercors, ses montagnes sauvages, la faune qui y habite encore, ses arbres qui bruissent dans le vent, le sol qui se recouvre de neige et garde en mémoire l'empreinte de ces invisibles qui le foulent... Et l'ourse, cette merveille éternelle nichée au creux d'une grotte, celle qui se laisse contempler par les doux, les sages, ceux qui sont assez humbles pour parvenir jusqu'à elle, ceux qui écoutent la montagne et les arbres raconter, cette ourse de pierre, témoignage qui incarne ceux de son espèce victimes de la barbarie des hommes, qui narre l'histoire de ces ours qui ont possédé en leur coeur et leur corps ces terres boisées du Vercors… malgré les hommes.



Mais lisez pour rencontrer Edouard, pour le regarder avec les yeux de Jeanne, pour vous rapprocher de l'ourse… pour accepter d'ouvrir votre coeur et d'y laisser murmurer le chant d'une nature partagée entre tous.

Lisez pour comprendre que l'homme vit porteur des époques antérieures, que l'homme est dépositaire de l'histoire passée… et que s'il ne le comprend, ni ne l'accepte, il périra après avoir fait tant périr…



Edouard qui a déjà mille fois payé à la société pour une dette qu'il n'a jamais contractée, paiera encore bien davantage, à cette société humaine qui le renie, le déteste, refuse de le comprendre. Edouard va "mourir pour ses idées et de mort lente" mais surtout de ce qu'on nommerait de mort lasse, sans se défendre de l'opprobre... Dans quel monde accepter de vivre si ceux que l'on aime par dessus tout ne sont plus, si ceux pour qui on se bat disparaissent... Si la flamme de l'innocence s'éteint dans le coeur des hommes, si les ténèbres ont déjà commencé leur ascension malgré la vie encore fragile de la "peut-être" dernière Reine…





Une lecture magnifique, et je garde dans mon coeur tous ces regards d'animaux libres, toutes ces prunelles étincelantes où se niche le reflet de ceux qui savent…

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La Dernière Reine (BD)

Jean-Marc Rochette est connu du grand public parce qu’il est le dessinateur du mythique « Transperceneige » (6 tomes en tout commencé en 1982) adapté bien des années plus tard par le réalisateur sud-coréen Bong Joon Ho et décliné ensuite en sérié Netflix « Snowpiercer ». Il s’était fait rare dans le paysage français, exilé en Allemagne pour se consacrer à la peinture et puis il est revenu habiter près de Grenoble dans le massif des Ecrins et il y a retrouvé l’envie et l’inspiration pour replonger dans le 9ème art en évoquant sa passion des montagnes. Il a commencé tout d’abord par une bd autobiographique en2017 : « Ailefroide » qui raconte comment il se destinait à devenir guide de montagne et le terrible accident qui a changé sa vie, puis « Le Loup » (2019) dans lequel il met en scène un berger-son sosie graphique- et sa confrontation à l’animal. Voici enfin le volume qui clôt cette trilogie montagnarde parue aux éditions Casterman identifiable par une maquette de couverture identique et l’utilisation d’un des bleus dont il a le secret (après le bleu Klein, il faudrait créer un bleu Rochette !). La couverture ressemble à celle des deux premiers volumes, certes, mais nulle redite ici, bien au contraire, le scénario s’avère profondément original et brasse les époques et les lieux.



UN DOUBLE RECIT



« La dernière reine » en effet est construite sur un récit double : d’une part il s’agit d’une histoire d’amour entre Edouard Roux, un colosse gravement défiguré lors de la guerre 14-18 et la sculptrice animalière Jeanne Sauvage qui va lui redonner un visage et de l’autre ce sont des séquences souvent muettes qui remontent très loin dans le temps (-300 000) pour nous faire suivre à travers les siècles le destin des ours du plateau du Vercors impitoyablement chassés par les humains.



Ces deux trames narratives se fondent harmonieusement parce qu’Edouard enfant a assisté au massacre de « la dernière reine », le dernier ours du Vercors (en 1898) et que sa famille entretient des liens privilégiés avec les ours au point que les autres enfants le stigmatise, traitent sa mère de sorcière, l’accuse de copuler avec les animaux et surnomment Edouard « fils de l’ours » alors qu’il s’agit simplement d’un enfant sans père. Ces deux récits s’éclairent aussi l’un l’autre parce que la férocité dont l’homme fait preuve à l’égard des animaux, il n’en est pas dépourvu à l’égard de ses semblables : le roman s’ouvre dans une prolepse sur la condamnation à mort d’Edouard puis, reprenant une chronologie traditionnelle, se poursuit sur sa persécution par les autres enfants et par la boucherie de 14. Jeanne elle -même n’est pas épargnée parce que le milieu de l’art parisien ne va en faire qu’une bouchée … l’artiste fait d’ailleurs dire à son héros « il faut fuir les hommes. Les forêts sont devenues trop petites pour cacher les ours et ceux qui s’aiment ».



LE MILIEU ARTISTIQUE PARISIEN DE L’ENTRE-DEUX GUERRES



Milieu de l’art parisien ? Et oui on quitte les montagnes pour un temps lorsqu’ Edouard se rend à Paris pour que Jeanne répare sa gueule cassée et y reste par amour. Et là on découvre une nouvelle facette du talent de Rochette. Il a travaillé durant trois ans à son roman et nous fait découvrir le groupe des 12 (des sculpteurs animaliers) dont le chef de file n’est autre que Pompon le créateur du célèbre ours blanc du Musée d’Orsay et qui connut parmi ses membres Jane Poupelet… le modèle de Jeanne.

On croise aussi Cocteau, Picasso et les artistes de Montmartre et de Montparnasse et puis surtout l’artiste favori de l’auteur : Chaim Soutine dont on le voyait admirer enfant « Le bœuf écorché » au Musée des beaux -arts de Grenoble dans « Ailefroide ». Il est montré ici comme un poète « qui peint des harengs comme des brassées de fleurs » au contraire de Duchamp qui incarne tout ce que les deux héros ( et leur auteur) exècrent : la marchandisation de l’art.



UN PERSONNAGE FEMININ FORT



Autre nouveauté dans cet album : un personnage féminin très fort de celui qu’on accusait d’être viriliste. Modelée sur le personnage réel de Jane Poupelet cette sculptrice du groupe des 12 qui créait également des masques pour les gueules cassées, Jeanne répare littéralement un homme déconstruit par la guerre qui se cache la tête dans un sac (comme Elephant man).. Pour montrer son importance et son côté Pygmalion, Rochette inverse d’ailleurs les codes habituels de la sexualité dans les scènes d’amour : c’est Jeanne qui l’ausculte, qui lui demande de se déshabiller, qui lui dit qu’elle le trouve beau, qu’il a un corps magnifique et qui le sculpte… L’auteur ne s’interdit plus une histoire d’amour et il a raison. Loin d’être planplan ou fleur bleue celle-ci est magnifique et pudique à la fois. C’est d’ailleurs grâce à elle qu’on échappe au pessimisme absolu.



UN GRAPHISME EXPRESSIONNISTE AU SERVICE d’UNE ŒUVRE PESSIMISTE



Le graphisme est à l’encan de la narration : certaines planches sont de véritables œuvres d’art au trait puissant et hachuré (voir également le recueil paru chez Maghen « Vertiges » en 2020) sublimées par des couleurs numériques lumineuses pour évoquer les scènes de montagne et d’amour. On pensera ainsi aux pages muettes qui montrent en quatre cases panoramiques le coucher ou le lever du soleil sur les cimes et instaurent une véritable respiration dans la narration. L’auteur apporte un soin tout particulier également à sa représentation des animaux (auxquels il consacre d’ailleurs un ouvrage « Bestiaire des Alpes » paru aux « Etages » la maison d’édition qu’il a cofondée avec sa compagne). Mais l’on trouve dans « La dernière reine » plus souvent des pages sombres ; le noir est omniprésent y compris dans la neige et il y a même une pleine page entièrement noire. L’artiste joue sur les masses et les ombres pour faire ressentir au lecteur une ambiance de fin du monde et souligner son pessimisme. Il met d’ailleurs en leitmotive dans la bouche de ses personnages un dicton : « le jour où la dernière reine disparaîtra, alors sera venu le temps des ténèbres ». Cette prédiction constitue clairement un message environnemental désabusé. Le bédéaste confesse d’ailleurs : « l’environnement me touche car on arrive à un niveau de tragédie proche des ténèbres. Je suis très inquiet […] dans ce livre je voulais qu’on perçoive cette inquiétude. C’est pourquoi « La dernière Reine » est un récit assez noir » au propre comme au figuré.



UNE SOMME ARTISTIQUE ET AUTOBIOGRAPHIQUE



Paradoxalement, ce récit à multiples facettes est peut-être l’œuvre la plus autobiographique de l’artiste. Il y a mis énormément de lui-même et s’il apparait en cameo (p.221) sous les traits d’un promeneur, il est en fait dans tous ses personnages : il a vécu seul avec sa mère lui aussi et devint en quelque sorte une gueule cassée comme Edouard après son terrible accident en montagne. C’est un artiste en quête de son grand œuvre comme Jeanne et il a d’ailleurs commencé son roman en sculptant l’ours et enfin il se retrouve peut-être aussi dans la dernière reine solitaire arpentant ses montagnes …car l’auteur a travaillé à ces planches durant deux années qu’il a passées dans une vallée de l’Oisans, coupée du monde en hiver, plusieurs mois durant, car la route qui y mène n’est pas déneigée. Rochette s’est donné corps et âme à son livre au point d’en tomber malade d’épuisement quand il achevait sa dernière page.



Mais cela en valait la peine : ode à la nature, avertissement écologique, satire du milieu de l’art parisien, récit historique, merveilleuse histoire d’amour : « La dernière reine » est tout cela et bien plus… c’est un ouvrage clé qui synthétise les thématiques récurrentes de son œuvre. Il déclare lui-même « C’est mon Everest, je ne crois pas que je ferai mieux un jour » : Avec cette œuvre-somme Rochette atteint les sommets. Chef d’œuvre !



Chronique complète sur notre blog ainsi que compte-rendu de l'expo Rochette à Grenoble et interview de l'auteur


Lien : https://bulles2dupondt.fr/20..
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La Dernière Reine (BD)

Une bonne découverte proposée par ma médiathèque pour les Bd bulles concours.



Les graphismes ne sont pas là tasse de thé mais ça ne m'a pas empêché de prendre plaisir à la lecture.



Je remercie ce concours de découverte car sans cela je ne me serais pas dirigée vers cette bd.
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La Dernière Reine (BD)

Je n’ai pas pris plaisir à lire cette histoire. Trop de noirceurs sans doute. Noirceur dans les thèmes abordés : la guerre et les gueules cassées, la vilénie humaine dans bien des domaines. Noirceur aussi dans les couleurs choisies, toujours sombres, à la limite de la netteté, il faut scruter parfois les dessins pour distinguer les vues, les personnages. Une lecture fatigante.



Et pour moi, trop de clichés.

Une histoire d’amour un peu simplette (une artiste tombe éperdument amoureuse de son modèle), un tableau manichéen (la ville c’est mal, la montagne c’est bien : les hommes ne sont plus connectés à la nature), un discours écologique de base (l’homme détruit tout).



Mais à côté de ça, je reconnais l’amour d’une région : l’histoire d’un lieu, le Vercors ; la réflexion sur la place de l’homme et de la nature ; la critique sur le monde de l’art et le pouvoir de l’argent.



Une lecture mitigée donc, mais dont je garde quand même quelques belles images (avec un super spot pour les éclairer), le talent de Jean-Marc Rochette est bien là.





Gueule cassée de 14-18, Édouard Roux trouve refuge dans l'atelier de la sculptrice animalière Jeanne Sauvage. Elle lui redonne un visage et l'introduit dans le milieu des artistes de Montmartre. En échange, Édouard lui fait découvrir la majesté du plateau du Vercors et l'histoire du dernier ours qu'il a vu tué quand il était enfant. Au cœur du Cirque d'Archiane, il lui dévoile la Dernière Reine et incite Jeanne a créer le chef d’œuvre qui la fera reconnaître.

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La Dernière Reine (BD)

L'auteur Jean-Marc Rochette déclare que la dernière reine sera sa dernière œuvre en BD préférant poursuivre dans la sculpture et la peinture où il y a plus de liberté. Il a été fortement secoué par l'affaire Bastien Vivès et les commissaires politiques et de la moralité qui sévissent dans ce milieu où tous les coups sont désormais permis. On peut comprendre et respecter sa décision.



C'est donc une œuvre testament qu''il nous laisse en héritage. Autant dire, que c'est réellement un magnifique récit qui nous entraîne sur des sentiers encore inexplorés entre art, guerre et belle histoire d'amour entre uns sculptrice et une gueule cassé. On peut affirmer que c'est sa meilleure œuvre tant la puissance du récit emporte tout sur son passage.



Evidemment il y a un hymne à l'amour véritable mais également celui de la préservation de la nature que les hommes détruisent petit à petit. Le décor sera celui du Paris des années folles qui a suivi la première Guerre Mondiale où on voulait revenir à un peu plus de légèreté après le grand traumatisme qui avait secoué le pays. Beaucoup de soldats l'ont payé de leur vie et les survivants de leur corps et de leur âme.



Nous aurons également droit à de magnifiques paysages situés dans le Vercors qui garde encore un parfum de nature et de liberté. A noter qu'on passe d'un univers à l'autre en un rien de temps mais que le dosage est quasiment parfait au niveau de la transition.



Au niveau du dessin, c'est quand même très sombre avec des couleurs qui ne favorisent pas l'éclat et la lumière parfois indispensable. On a l'impression que l'on ne sort pas des tranchées. Il y a eu une utilisation à outrance d'encres noires qui donnent ce rendu. Mais bon, il faut s'y habituer et on est facilement pris dans l'intrigue grâce à une narration bien pensée et agréable.



La fin est véritablement poignante et triste à mourir. J'ai rarement lu quelque chose d'aussi fort où l'on a envie de crier à l'injustice (mais pas de tout casser). Il faut dire que notre système judiciaire est profondément biaisé à la recherche constante de bouc émissaire parmi les individus les plus défavorisés de la société.



C'est une très belle histoire tragique que j'ai adoré parce qu'il y avait des personnages qui sonnent vrais et qui sont charismatiques. C'est certainement la BD qu'il faut absolument lire pour ne pas passer à côté.
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La Dernière Reine (BD)

Depuis quelques mois, j'ai fait l'impasse sur les bandes dessinées et je rattrape mon retard avec quelques titres incontournables.

Tout d'abord ce splendide album de Rochette, « La dernière reine ».

Cette dernière reine, c'est la dernière ourse encore présente dans le massif du Vercors.

Enfant, Edouard Roux a assisté à une battue pour exterminer les derniers ours présents et tenté de s'interposer, ce qui lui vaudra une réputation de rebelle délinquant.

Après la première guerre, devenu une « gueule cassée », il n'ose pas revenir au village et se fond dans la foule parisienne.

C'est là qu'il rencontrera Jeanne Sauvage, sculptrice animalière, qui lui confectionnera un masque (oui comme dans « Au-revoir là-haut ) qui lui changera la vie et le rapprochera à jamais d'elle.

Et quoi de mieux, pour enrichir son inspiration, que lui faire découvrir son merveilleux Vercors et ses légendes...



Tout est beau dans cette bande dessinée !

Le scenario, riche, met en scène les légendes immémoriales sur les ours, la boucherie de la première guerre, le Paris des années 20 et son effervescence artistique, la magnificence du Vercors, et une histoire d'amour improbable et tragique !

Le dessin et les couleurs, sombres, sépias, avec des bleus profonds et des taches de rouge grevés de quelques rares morceaux de ciel bleu, collent complètement au récit.

Tout nous émerveille et nous émeut dans cette histoire et on ne se lasse pas de détailler chaque épisode et son atmosphère particulière.

Une bande dessinée à relire et à offrir !

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La Dernière Reine (BD)

Un récit à deux facettes. Des planches décrivant l’évolution de la relation entre l’homme et la nature dans le Vercors s’entremêlent avec l’histoire d’un homme, Édouard Roux, « gueule cassée » de la première guerre mondiale.

Dans ce livre, l’humanité ne tient pas le bon rôle à quelques exceptions près. La principale exception s’appelle Jeanne et son histoire d’amour avec Édouard est très touchante.

Le scénario principal est bien ficelé. Les graphismes sont soignés. J’ai passé un bon moment de lecture, mais je n’ai pas non plus été « transportée ».
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La Dernière Reine (BD)

Bien que furieusement sombre et bouleversant, ce nouveau chef-d’œuvre nous réconcilie avec une grande vérité : l’amour et la beauté triomphent de tout. Toujours.
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La Dernière Reine (BD)

Avec son personnage d’Edouard Roux, Rochette nous plonge dans le passé du Vercors et rend un vibrant hommage à la nature et aux quelques espèces sauvages qui ont encore la chance d’y vivre en toute tranquillité.

Edouard est issu d’une longue lignée de femmes qui ont de tout temps vénéré les ours. Enfant, il a assisté avec révolte à la mise à mort du dernier ours du Plateau du Vercors dont le corps supplicié fut exposé à la vindicte populaire avant d’être empaillé et exposé au musée de Grenoble. Gueule cassée de la guerre 14-18, il se terre à Grenoble jusqu’à sa rencontre avec Jeanne, sculptrice animalière qui lui confectionne un masque et lui redonne goût à la vie. Pour lui exprimer sa gratitude, il va lui faire découvrir les secrets du plateau du Vercors dont sa famille est gardienne depuis la nuit des temps. Il va lui montrer qu’elle peut vivre de sa passion et l’amener à réaliser le chef d’œuvre qui la fera reconnaitre.

Les dessins de Rochette, au style brut, épais, comme tracés dans l’urgence sont faits de tonalités froides et sombres comme l’est l’âme de ces hommes avec leur violence, leur peur et leur bêtise. Par cette magnifique et bouleversante histoire, Rochette rend hommage à la nature et aux ours . Ces ours qui, depuis des millénaires sont les cibles de la sauvagerie des hommes.

C’est un album plein d’humanité qui nous amène à réfléchir sur cette société qu’est la nôtre, qui exploite le monde, épuise les ressources de la nature et non seulement réduit de plus en plus les territoires sauvages mais déciment les derniers représentants d’espèces animales ancestrales. Un album qui ne laisse aucun doute sur la nature humaine.

Et si l’homme était un loup pour l’homme ?

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