Alec regarda sa montre : il lui restait un peu de temps avant l'arrivé d'Émile, mais il lui aurait été impossible de se rendormir. Tout était passé si vite, tout lui avait semblé si fluide, si naturel -pourquoi la bonne société était-elle si persuadé que l'amour entre deux hommes était contre nature ? Alec avait bien souvent imaginé ce moment. II l'avait espéré de tout son coeur, autant qu'il l'avait redouté : serait-il à la hauteur ? Ne serait-il pas trop maladroit, trop pudique ? Son aventure malheureuse aux Tuileries lui avait fait penser quil ne connaitrait jamais ce genre de plaisirs. Il n'oserait pas. Il devait étre différent des autres, condamné à la chasteté autant qu'a la solitude.
Il aurait certes trouvé agréable qu'on le désire, mais il aspirait à autre chose. Il voulait être aimé et aimer quelqu'un en retour, de toutes ses forces.
Elle était objectivement charmante, mais malheureusement, l'objectivité entrait rarement en jeu lorsqu'il s'agissait de tomber amoureux.
L’entorse n’allait pas guérir tout de suite, mais une autre douleur était en train de prendre le pas : celle du désir et il ne connaissait aucun médecin en mesure de la soigner
Il n’eut d’autre choix cette fois que de regarder son visage, et ses pires craintes furent confirmées : le jardinier lui plut comme rarement on lui avait plu
La pauvre fille se retrouve à épouser ni nom, ni fortune, ni santé. Remarque, à vingt ans révolus, ce n’est pas comme si elle avait l’embarras du choix.
Alec aurait préféré qu’il soit plus couvert : ses bras brunis par le soleil suffirent à déclencher chez lui une émotion dont il se serait bien passé
Les étoiles se moquaient bien des titres : futur duc et jardinier se trouvaient à égalité devant elles
Il ne fallait pas parler trop fort, pas se faire remarquer, ne jamais sortir de son rang
N'était-ce pas un comble, pour un jardinier, de n'avoir pas droit à un jardin secret ?