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Citations de Jeffrey Eugenides (238)


A l'époque les passagers partant pour l'Amérique avaient coutume de monter sur le pont avec une pelote de coton. Ceux qui restaient à quai gardaient en main l'extrémité du fil. Tandis que le Giulia s'éloignait au son de sa corne de brume, une centaine de fils de coton se tendaient au-dessus de l'eau. Les gens criaient leurs adieux, agitaient frénétiquement les bras, tenaient à bout de bras des bébés pour qu'ils voient une dernière fois ceux dont ils ne garderaient pas le souvenir. Les hélices bouillonnaient ; les mouchoirs voletaient et, sur le pont, les pelotes de coton se mirent à se dévider. Rouge, jaune, bleu, vert, elles se déroulaient toutes les dix secondes, puis de plus en plus vite à mesure que le bateau prenait de la vitesse. Les passagers tenaient leur fil aussi longtemps que possible, conservant le contact avec les visages qui se faisaient de moins en moins discernables. Mais finalement, une par une, les pelotes arrivèrent à leur fin. Les fils de coton s'envolèrent, s'élevant dans la brise.
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Elle gardait le visage baissé, se déplaçant dans son oubli du monde, les tournesols de ses yeux fixés sur le drame de sa vie que nous ne comprendrions jamais.
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Nous savions que les filles étaient nos jumelles, que nous existions tous dans l'espace comme des animaux qui avaient la même peau, et qu'elles savaient tout de nous alors que nous étions incapables de percer leur mystère. Nous savions, enfin, que les filles étaient en réalité des femmes déguisées, qu'elles comprenaient l'amour et même la mort, et que notre boulot se bornait à créer le bruit qui semblait tant les fasciner.
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Les compagnies pharmaceutiques s'y prenaient dans le mauvais sens. Au lieu de partir d'une maladie et de développer des médicaments pour la soigner, elles développaient des médicaments puis cherchaient à quoi ils pouvaient servir.
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Nous prîmes conscience que la version du monde qu'ils nous donnaient n'était pas le monde auquel ils croyaient vraiment, et qu'en dépit de toute la peine qu'ils prenaient à traquer les mauvaises herbes ils n'avaient rien à foutre de leurs pelouses.
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Jeffrey Eugenides
Les livres m'ont affecté, m'ont changé, m'ont fait prendre des décisions, m'ont fait faire des choses qui ont eu des conséquences énormes. Lire peut être dangereux, comme une révélation.
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Les émotions, d'après mon expérience, ne sont pas recouvertes par de simples mots. Je ne crois pas en la "tristesse", la "joie" ou le "regret". Peut-être la meilleure preuve de la nature patriarcale du langage est le fait qu'il simplifie les sentiments. J'aimerais avoir à ma disposition des émotions hybrides compliquées, des constructions germaniques, comme par exemple "Le bonheur qui accompagne le désastre". Ou : "La déception de coucher avec son fantasme". J'aimerais montrer comment " La conscience de la mort suscitée par des parents vieillissants" est liée à "La haine des miroirs qui commence à l'âge mûr".
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Cécilia, la plus jeune, treize ans seulement, avait été la première. Elle s’était ouvert les poignets dans son bain comme un stoïcien, et quand ils la trouvèrent flotter dans sa mare rose, les yeux jaunes comme une possédée et son petit corps exhalant l’odeur d’une femme mûre, les infirmiers furent tellement effrayés par sa tranquillité qu’ils restèrent hypnotisés.
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Je m'étais trompé pour [le docteur] Luce. J'avais pensé qu'après avoir parlé avec moi il déciderait que j'étais normale et me laisserait tranquille. Mais je commençais à comprendre quelque chose à propos de la normalité. La normalité n'était pas normale. Elle ne pouvait pas l'être. Si la normalité était normale, personne ne s'en soucierait. On pourrait la laisser se manifester d'elle-même. Mais les gens – et particulièrement les médecins – avaient des doutes quant à la normalité. Ils n'étaient pas sûrs que la normalité fût à la hauteur de sa tâche. Ils se sentaient donc enclins à lui donner un coup de pouce.
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Selon Saunders, le roman avait connu son apogée avec le roman matrimonial et ne s'était jamais remis de sa disparition. A l'époque où la réussite sociale reposait sur le mariage, et où le mariage reposait sur l'argent, les romanciers tenaient un vrai sujet d'écriture.
Les grandes épopées étaient consacrées à la guerre, le roman au mariage.
L'égalité des sexes, une bonne chose pour les femmes, s'était révélée désastreuse pour le roman. Et le divorce lui avait donné le coup de grâce.
De l'avis de Saunders, le mariage ne signifiait plus grand-chose, et il en allait de même pour le roman.
Qui utilisait encore le mariage comme ressort dramatique? Personne.
On n'en trouvait plus trace que dans les fictions historiques.
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Tout d'abord, nous ne remarquâmes pas les boulettes de papier roulés glissés par la grille dans le casier de Trip, ni les brises équatoriales provoquées par tant de sang échauffé qui le poursuivaient dans les couloirs ; mais finalement, confrontés à des grappes de filles intelligentes rougissant à l'approche de Trip, ou se tirant sur les nattes pour refréner leurs sourires, nous nous rendîmes compte que nos pères, frères et oncles avaient menti et que personne ne nous aimerait jamais pour nos bonnes notes.
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Faire l'amour sur le toit était déjà de la folie,
mais faire l'amour sur le toit en hiver était un signe de dérangement,
de désespoir, d'autodestruction qui n'avait plus rien à voir
avec les petits plaisirs furtifs qu'on s'offre derrière un arbre ou sous la pluie.
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Les féministes des universités se moquaient des gratte-ciel, dans lesquels elles voyaient des symboles phalliques. Elles disaient la même chose des fusées spatiales, alors qu'il était évident, en y réfléchissant un peu, que la forme de celles-ci était due non pas au phallocentrisme mais aux lois de l'aérodynamique. Un vaisseau Apollo en forme de vagin serait-il arrivé sur la lune? C'était l'évolution qui avait créé le pénis. Il s'agissait d'une structure utile pour remplir certaines fonctions. (...) Mais non: n'importe quelle réalisation de quelque ampleur - un long roman, une grande statue, un bâtiment imposant - devenait, aux yeux des "femmes" que Mitchell connaissait à la fac, des manifestations de l'insécurité des hommes quant à la taille de leur pénis.
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Quand tu as cinq ans, tu es en vie depuis moins de deux mille jours. A cinquante ans tu en a vécu près de vingt mille. Une journée quand tu as cinq ans te paraît plus longue parce qu'elle représente une plus grande partie du tout
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Tandis que moi, même aujourd'hui, je persiste à croire que ces signes noirs sur le papier blanc ont la plus grande signification, que si je continue à écrire je serai peut-être capable de mettre en boîte l'arc-en-ciel de la conscience.
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Lire un roman après avoir lu de la théorie sémiotique était comme courir les mains vides après avoir couru avec des haltères. En sortant de Sémiotique 211, Madeleine se précipitait à la Rockefeller Library, au niveau B, où les rayons exhalaient une vivifiante odeur de moisi, et elle prenait un livre - n'importe lequel, Chez les heureux du monde, Daniel Deronda - pour recouvrer sa santé mentale. Quel plaisir quand une phrase découlait logiquement de la précédente! Quel délicieux sentiment de culpabilité de se plonger dans un récit narratif!
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En réalité, même les garçons les plus nuls étaient plus aptes à demander à une fille de sortir avec eux, parce que leur poitrine de moineaux et leurs genoux cagneux leur avaient appris la persévérance, tandis que Trip n’avait jamais eu à composer le numéro de téléphone d’une fille. Tout cela était nouveau pour lui : apprendre par cœur les phrases clés, prévoir les différentes conversations possibles, faire les exercices de respiration de yoga avant de plonger la tête la première et les yeux fermés dans l’océan crépitant d’électricité statiques des lignes de téléphone. Il n’avait pas enduré l’éternité de la sonnerie avant qu’on ne décroche, ignorait le coup au cœur qu’on éprouvait en entendant la voix incomparable soudain jointe à la sienne, l’impression que cela faisait d’être trop près pour même la voir, d’être en fait à l’intérieur de son oreille. Il n’avait jamais éprouvé la douleur des réactions molles, la crainte du : « Oh… salut », ni l’annihilation soudaine du : « Qui ? »
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D'après une vieille légende chinoise, un jour de l'an 2640 av. J-C., la princesse Si Ling-chi était assise sous un mûrier quand un cocon de ver à soie tomba dans sa tasse de thé. Elle l'en retira, et remarqua que le cocon avait commencé à se défaire dans le liquide chaud. Elle tendit l’extrémité libre à sa servante et lui ordonna de s'en aller. La servante quitta la chambre de la princesse, sortit de la Cité interdite et fit un kilomètre dans la campagne avant que le cocon soit entièrement dévidé. (À l'Ouest, la légende devait se transformer lentement durant trois millénaires, jusqu'à devenir l'histoire d'un physicien et d'une pomme. Cependant, le sens est le même : les grandes découvertes, qu'elles fussent de la gravité ou de la soie, tombent toujours du ciel sur des gens qui paressent sous un arbre.)
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" Nous autres Grecs, nous sommes des gens tristes. Le suicide signifie quelque chose pour nous. Mettre des guirlandes de Noël après que votre propre fille l'a fait - ça n'a pas de sens. Ce que ma yia yia n'a jamais compris en Amérique, c'est pourquoi les gens font semblant d'être heureux tout le temps. "

[p180]
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T'as déjà vu un rayon vert? me demanda-t-il.
- Non.
- On dit qu'on ne peut pas photographier un rayon vert, mais moi je l'ai fait. J'ai toujours un appareil photo avec moi au cas où je tombe sur un truc dément de ce genre. Et un jour j'ai vu un rayon vert et j'ai sauté sur mon appareil et je l'ai eu. J'ai la photo chez moi.
- C'est quoi un rayon vert?
- C'est la couleur que fait le soleil quand il se lève et qu'il se couche. Pendant deux secondes. C'est à la montagne qu'on le voit le mieux.
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