Dans la bourgade de Dockwood, la vie suit paisiblement son court. Le paysage quitte lentement son habit d’été pour revêtir les couleurs de l’automne. La chute des feuilles annonce cette douce métamorphose. Les affiches publicitaires vantant les soldes d’été racoleurs sont recouvertes par la nouvelle campagne marketing des promotions de la rentrée.
Les salariés ont retrouvé le chemin du travail, les élèves celui de l’école. Les habitudes quotidiennes ont repris le dessus. Les écureuils ont déjà commencé à faire leurs provisions d’hiver, le manteau feuillu des arbres a quitté ses verts coloris et se pare de roux et d’ocres chaleureux…
Jon McNaught nous fait vivre une journée à Dockwood.
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Quelle lenteur dans ce récit ! Cela m’a pris au dépourvu !! D’autant que cet album s’intéresse à décrire une tranche de vie assez banale, presque insignifiante. Je m’attendais à être portée par un récit qui m’a finalement imposé son calme. Pourtant, même si je suis restée spectatrice, j’ai apprécié cette lecture.
« McNaught capte ces détails insignifiants de la vie ordinaire – un oiseau perché sur une branche, une lettre postée, un lever de soleil, une odeur de cuisine, un écureuil dans un arbre- et dilate le temps à l’infini pour mieux révéler l’essence des objets et l’état intérieur des personnes » (extrait de la chronique de Planete BD).
Cet ouvrage propose deux courtes nouvelles. La première raconte la journée-type d’un jeune homme tandis que la seconde nous propose de partager la fin d’après-midi de deux collégiens.
Revenons sur la première nouvelle qui me donne envie d’être bavarde. Un jeune homme travaille dans une Maison de retraite et se déplace avec les transports en commun. Pour le lecteur, le trajet matinal de cet homme est l’occasion de découvrir un paysage urbain égayé par des couleurs automnales. Les arrêts effectués par le bus sont autant de prétextes saisis par l’auteur pour nous forcer à contempler la chute d’une feuille ou l’intervention d’un colleur d’affiches. Sitôt le personnage arrivé à destination, c’est avant tout le côté ritualisé des tâches qui m’a marquée. Affecté aux cuisines, il va tout d’abord se changer puis vont se succéder quantité de petites tâches quotidiennes qui le conduiront jusqu’au moment où il débauche. Ainsi, on participe à la préparation du prochain repas des pensionnaires, à sa distribution… on s’arrête sur des petits détails lourds de sens comme la télévision qui tourne en boucle et se contente de meubler les lieux à l’aide de son bruit de fond ronronnant. J’ai apprécié ce contraste entre l’effervescence médiatique qui ne souffre aucun temps mort et la vie ritualisée des pensionnaires de la structure.
La seconde nouvelle est plus vivante puisqu’elle nous permet de découvrir la fin d’après-midi de deux collégiens. Bien que leur conversation soit sensiblement plus animée, on reste ici encore sur l’observation passive des événements et l’on se laissera surprendre par une scène d’action surprenante… Ainsi s’achève l’album qui laisse finalement le lecteur sur une douce réflexion sur le temps qui passe.
De cette lecture, je garde également en tête les couleurs qui nous accueillent immédiatement. Bleus et oranges sont finalement les principaux acteurs de ce récit et nous font évoluer dans une ambiance chaleureuse, à la fois sereine et mélancolique. L’organisation des cases permet au lecteur de ne pas se laisser envahir par la monotonie des lieux. La composition de base de chaque page propose une découpe en 6 bandes de 4 cases mais Jon McNaught casse régulièrement ce rythme en insérant çà et là des visuels plus petits ou plus gros, ce qui nous oblige à moduler notre rythme de lecture en permanence. De fait, on accepte très bien cette succession silencieuse de petits clichés qui guident notre regard de manière spontanée.
L’album est assez silencieux en raison des nombreux passages muets. Le reste du temps, une voix-off timide accompagne le lecteur. Elle est ponctuellement remplacée par des échanges assez concis entre des personnages qui entretiennent des rapports professionnels ou amicaux courtois. Aucun ne se livre personnellement, les rapports humains sont assez convenus.
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