Kate Banks

Le petit garçon toucha du doigt les coins pointus du livre.
Puis il grimpa sur les genoux de sa maman.
Il sentait la douceur du tissu tout contre lui.
Elle le prit dans ses bras.
Et tourna la page.

À mesure qu'on grandit, on prend aussi ses distances, me suis-je dit. Et j'ai brutalement réalisé que la distance qui nous séparerait ne cesserait ce croître.

« C’est marrant comme la mémoire est fragile. Comme nous ne nous souvenons pas des choses de la même manière. Comme nous transformons nos pensées inconsciemment. Ou comme nous oublions. […] Parce que nous oublions tout, nous ne retenons rien […] Fisher dit que la vérité n’existe que dans le moment. Avec le temps, les souvenirs se transforment et tout devient mensonge. La vérité s’estompe comme un coucher de soleil. Et nous sommes obligés de modifier nos souvenirs et de combler les détails jusqu’à ce qu’ils deviennent notre propre vérité. Ou simplement un pur produit de l’imagination. »

Les semaines passèrent, puis les mois.
Le chat mesurait le temps d'après l'usure de ses coussinets.

"Garde tes vœux pour ce qui est réalisable. Tout ne l'est pas. Pas dans cette vie en tout cas."

Si la lune pouvait parler ...
elle raconterait la tanière, dans un pays lointain, et la lionne qui lèche ses petits.

Mais je ne peux m'empêcher de conjuguer des verbes dans ma tête. Le verbe être. Je suis. " être ou ne pas être ", a dit Hamlet. Je suis. Mais qui suis-je? Telle est la question.

Tout à coup, la chatte dresse une oreille.
Quelqu'un frappe.
C'est la pluie qui vient réveiller le jardin.
Le printemps est arrivé à la grande maison bleue.
Les crocus sortent de terre.
Un escargot pointe les cornes hors de sa coquille.
Dans le grenier, l'oiseau fait son nid avec des brindilles et des petits bouts de tissu.

Puis la musique s'arrête net, comme dans un jeu de chaises musicales. je me retrouve sans chaise ou m'asseoir. Et je suis triste. La tristesse me traverse le corps et réveille d'anciens chagrins. D'autres blessures, depuis longtemps oubliées, si confortablement installées dans mes os qu'elles font partie de moi même.

Elle en possédait toute une collection, de toutes les couleurs imaginables. Afin que ses mains demeurent parfaites, il lui fallait les protéger, éviter la moindre coupure ou égratignure, les ongles cassés, les taches de vieillesse, les rides.

Elle les conduit à l'ombre d'un grand arbre.
Les branches murmurent au monde un mystérieuse berceuse.
Et les oiseaux s'en viennent et s'en vont.
Et les jeunes arbrisseaux deviennent de beaux arbres majestueux.

Baboon suivit sa mère en haut d'un arbre. Sur une branche, un singe était perché. Il ressemblait à Baboon.
- Lui aussi, c'est le monde ? demanda Baboon.
- Oui, répondit sa mère. Et toi aussi.

Sur un parterre de mousse se trouvait une poupée de chiffon.
Le lapin s'en approcha et il la renifla.
Il connaissait le parfum doux et frais après la pluie.
Il connaissait la senteur du chèvre-feuille sauvage portée par la brise.
Mais cette odeur-là, le lapin ne la connaissait pas.

Ils n'avaient jamais vu de poupée de chiffon, ni de route, ni de maison, ni d'enfant, ni de fenêtre allumée... mais l'amour, ça, ils savaient ce que c'était.

Et les jours s'en viennent et s'en vont.
Et le petit renard grandit en force et en intelligence.