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Citations de Léon-Gontran Damas (68)


Léon-Gontran Damas
Nous les gueux
nous les peu
nous les rien
nous les chiens
nous les maigres
nous les Nègres
Nous à qui n’appartient
guère plus même
cette odeur blême
des tristes jours anciens
Nous les gueux
nous les peu
nous les riens
nous les chiens
nous les maigres
nous les Nègres
Qu’attendons-nous
les gueux
les peu
les rien
les chiens
les maigres
les nègres
pour jouer aux fous
pisser un coup
tout à l’envi
contre la vie
stupide et bête
qui nous est faite
à nous les gueux
à nous les peu
à nous les rien
à nous les chiens
à nous les maigres
à nous les nègres
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SOLDE
Pour Aimé Césaire

J'ai l'impression d'être ridicule
dans leurs souliers
dans leurs smoking
dans leur plastron
dans leur faux-col
dans leur monocle
dans leur melon

J'ai l'impression d'être ridicule
avec mes orteils qui ne sont pas faits
pour transpirer du matin jusqu'au soir qui déshabille
avec l'emmaillotage qui m'affaiblit les membres
et enlève à mon corps sa beauté de cache-sexe

J'ai l'impression d'être ridicule
avec mon cou en cheminée d'usine
avec ces maux de tête qui cessent
chaque fois que je salue quelqu'un

J'ai l'impression d'être ridicule
dans leurs salons
dans leurs manières
dans leurs courbettes
dans leur multiple besoin de singeries

J'ai l'impression d'être ridicule
avec tout ce qu'ils racontent
jusqu'à ce qu'ils vous servent l'après-midi
un peu d'eau chaude
et des gâteaux enrhumés

J'ai l'impression d'être ridicule
avec les théories qu'ils assaisonnent
au goût de leurs besoins
de leurs passions
de leurs instincts ouverts la nuit
en forme de paillasson

J'ai l'impression d'être ridicule
parmi eux complice
parmi eux souteneur
parmi eux égorgeur
les mains effroyablement rouges
du sang de leur ci-vi-li-sa-tion

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Rendez-les moi mes poupées noires
qu’elles dissipent
l’image des catins blêmes
marchands d’amour qui s’en vont viennent
sur le boulevard de mon ennui

Rendez-les moi mes poupées noires
qu’elles dissipent
l’image sempiternelle
l’image hallucinante
des fantoches empilés féssus
dont le vent porte au nez
la misère miséricorde

Donnez-moi l’illusion que je n’aurai plus à contenter
le besoin étale
de miséricordes ronflant
sous l’inconscient dédain du monde

Rendez-les moi mes poupées noires
que je joue avec elles
les jeux naïfs de mon instinct
resté à l’ombre de ses lois
recouvrés mon courage
mon audace
redevenu moi-même
nouveau moi-même
de ce que Hier j’étais
hier
sans complexité
hier
quand est venue l’heure du déracinement

Le sauront-ils jamais cette rancune de mon coeur
A l’oeil de ma méfiance ouvert trop tard
ils ont cambriolé l’espace qui était le mien
la coutume
les jours
la vie
la chanson
le rythme
l’effort
le sentier
l’eau
la case
la terre enfumée grise
la sagesse
les mots
les palabres
les vieux
la cadence
les mains
la mesure
les mains
le piétinement
le sol

Rendez-les moi mes poupées noires
mes poupées noires
poupées noires
noires
noires"
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Léon-Gontran Damas

Parce qu'une joue
en appelle une autre
voici que contre
la mienne
ta joue est là
pour que l'une
et l'autre
en oublient
et pardonnent
toute inutile
violence


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MALGRÉ LES SARCASMES DES UNS
malgré l'indulgence des autres
et au grand dam des uns
et au grand dam des autres
plaise à mon coeur
mis un instant à nu
d'afficher sur les murs et autres lieux de la ville
de crier à tue-tête sur les toits de la ville
à bas TOUT
vive RIEN
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"TOUJOURS CES MOTS
toujours les mêmes
dont il ne semble pas
qu'elle ait encore
jamais jamais
saisi sur l'heure
toute l'inutile cruauté"
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JE NE SAIS RIEN EN VÉRITÉ…


JE NE SAIS RIEN EN VÉRITÉ
rien de plus triste
de plus odieux
de plus affreux
de plus lugubre au monde
que d’entendre l’amour
à longueur de journée
se répétant à messe basse

Il était une fois
une femme vint
une femme vint à passer
dont les bras étaient chargés de roses
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Nous les gueux
nous les peu
nous les rien
nous les chiens
nous les maigres
nous les Nègres
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ILS SONT VENUS CE SOIR
Pour Léopold-Sedar Senghor


ils sont venus ce soir où le
tam
   tam
      roulait de
               rythme
                       en
                            rythme
                                     la frénésie
des yeux
la frénésie des mains
la frénésie
des pieds de statues
DEPUiS
combien de MOi MOi MOi
sont morts
depuis qu'ils sont venus ce soir où le
tam
   tam
      roulait de
               rythme
                       en
                            rythme
                                     la frénésie
des yeux
la frénésie
des mains
la frénésie
des pieds de statues
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Je suis né disais-tu au bout …


Extrait 10

Et n’enlevaient ce fort goût d’amertume
que laisse à la bouche au réveil une nuit d’insomnie
ni la tiédeur du soleil matutinal qui ranimait déjà toutes choses
ni la volubilité des vieilles édentées en madras calendé
martelant la chaussée d’aise au sortir du premier office
où le dieu de la veille
fut à nouveau loué
glorifié prié
et chanté à voix basse

ni l’odeur rose des dahlias du jardin qu’argentait la rosée
ni les cris savoureux de la rue qu’assoiffaient
la bié nan-nan
côrôssôl
papaye
coco

Et la maison était triste et basse
où la vie se déroulait mollement
en bordure de la rue étroite et silencieuse
qu e le bruit de la ville
traversait à peine
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Mort au Cancre
au pou
mort au Chancre
au fou
et
sus au dévoyé
ont encore hurlé
ceux qui nombreux disent tous m'avoir à l'œil me regarder vivre
et ceux
ceux parlons-en
qui vagissent de rage et de honte
de naître aux Antilles
de naître en Guyane
de naître partout ailleurs qu'en bordure
de la Seine ou du Rhône
du Danube ou du Rhin
ou de la Volga
(...)
Ceux qui se refusent une âme
ceux qui se méprisent
ceux qui n'ont pour eux-mêmes et leurs proches
que honte et lâcheté
(...)
BLACK-LABEL À BOIRE
pour ne pas changer
Black-Label à boire
à quoi bon changer
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Léon-Gontran Damas
Nous les gueux
Nous les peu
nous les rien
nous les chiens
nous les maigres
nous les nègres

Nous à qui n'appartient
guère plus même
cette odeur blême
des tristes jours anciens

Nous les gueux
nous les peu
nous les riens
nous les chiens
nous les maigres
nous les nègres

Qu'attendons-nous

les gueux
les peu
les rien
les chiens
les maigres
les nègres
pour jouer aux fous
pisser un coup
tout à l'envi
contre la vie
stupide et bête
qui nous est faite
à nous les gueux
à nous les peu
à nous les rien
à nous les chiens
à nous les maigres
à nous les nègres...
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En file indienne


Et les sabots
des bêtes de somme qui martèlent eu Europe
l’aube indécise encore
me rappellent
l’abnégation étrange
des trays * matineux repus qui rythment aux Antilles
les hanches des porteuses
en file indienne

Et l’abnégation étrange
des trays matineux repus qui rythment aux Antilles
les hanches des porteuses
en file indienne
me rappelle
les sabots
des bêtes de somme qui martèlent en Europe
l’aube indécise encore.

* tray : plateau en bois que les marchandes portent sur la tête
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IL EST DES NUITS
Pour Alejo Carpentier

Il est des nuits sans nom
il est des nuits sans lune
où jusqu'à l'asphyxie
moite
me prend
l'âcre odeur de sang
jaillissant
de toute trompette bouchée

Des nuits sans nom
des nuits sans lune
la peine qui m'habite
m'oppresse
la peine qui m'habite
m'étouffe

Nuits sans nom
nuits sans lune
où j'aurais voulu
pouvoir ne plus douter
tant m'obsède d’écœurement
un besoin d'évasion

Sans nom
sans lune
sans lune
sans nom
nuits sans lune
sans nom sans nom
où le dégoût s'ancre en moi
aussi profondément qu'un beau poignard malais

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AVEC UN RIEN MÊME DE DÉDAIN
dans le regard ouvert de stupeur
la lune
jaune ronde et belle
semble dire à voix basse

En auront-ils bientôt fini les fous
de mitrailler le ciel
de s'en prendre aux étoiles
de tonner sans vergogne
contre ces nuits
où j'eusse aimé
dormir
dormir un seul
et long soûl
d'homme ivre

et
rêver
rêver encore
tout à l'aise encore
d'ELLE

Graffiti - 1952
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Hoquet


Extrait 1

Et j’ai beau avaler sept gorgées d’eau
trois à quatre fois par vingt-quatre heures
me revient mon enfance dans un hoquet secouant mon instinct
tel le flic le voyou
Désastre
parlez-moi du désastre
parlez-m’en

Ma mère voulant d’un fils très bonnes manières à table
  les mains sur la table
  le pain ne se coupe pas
  le pain se rompt
  le pain ne se gaspille pas le pain de Dieu
  le pain de la sueur du front de votre Père
  le pain du pain

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IL N’EST POINT DE DÉSESPOIR


Il n’est point de désespoir si fort soit-il
qui ne trouve au carrefour sa mort à l’aube
et bien parce qu’il n’est point de désespoir
qui ne trouve au carrefour sa mort à l’aube
l’écho avec son œil mauvais
la langue saburrale
a bel et bien tort
de prendre
cet air entendu quelque part
et de répéter à tout venant tout vent
trop tard

trop tard

Car
l’écho que j’ai à l’œil
de vouloir se donner l’air
d’avoir l’œil mauvais
et la langue saburrale
ignore
que le désespoir est mort à l’aube
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Savoir-vivre


On ne bâille pas chez moi comme ils bâillent chez eux
avec la main sur la bouche
je veux bailler sans tralalas
le corps recroquevillé
dans les parfums qui tourmentent la vie
que je me suis faite
de leur museau de chien d’hiver
de leur soleil qui ne pourrait pas même tiédir
l’eau de coco qui faisait glouglou dans mon ventre au réveil

Laissez moi bâiller la main

sur le cœur
à l’obsession de tout ce à quoi j’ai en un jour
donné le dos.
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Hoquet


Extrait 6

  Il m’est revenu que vous n’étiez encore pas
  à votre leçon de violon
  un banjo
  vous dites un banjo
  comment dites-vous
  un banjo vous dites bien un banjo
  non monsieur
  vous saurez qu’on ne souffre chez nous
  ni ban
  ni jo
  ni gui
  ni tare
  les mulâtres ne font pas çà
  laissez don çà aux nègres.
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VOUS DONT LES RICANEMENTS


VOUS DONT LES RICANEMENTS
d’obscurs couloirs d’air
me donnent
la chair de poule

Vous dont le visage
bouffi rappelle
ce masque qu’empruntait souvent à plaisir
par-delà les mornes agrestes
la lune
la lune de mon enfance sordide

Vous dont je sens
vous dont je sais le cœur
aussi vide de tendresse
que les puits de chez nous d’eau
au dernier carême

Vous dont la présence
proche ou lointaine
énerve ma vie
comme la vieille folle du coin
mon premier sommeil

Vous dont le crime est d’en vouloir
à l’image
qu’il m’a plu
d’avoir un matin
d’ELLE

Vous dont les ricanements
vous dont le visage
vous dont le cœur
la présence
le crime

Et puis vous tous
enfin vous autres
saisirez-vous jamais un rien même
à ce poème
mon drame
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