Citations de Leye Adenle (33)
Elle s'est retournée pour me regarder. Je n'avais pas réfléchi à ce qu'il fallait dire, alors je l'ai tirée vers moi et je l'ai embrassée.
Pour commencer, aller seul dans un lieu de drague au Nigeria n’était pas mon idée. Enfin, ce n’est pas tout à fait vrai. Le Nigeria était le pays où mon ex, Melissa, mi-nigériane, mi-irlandaise, était née, et je voulais avoir des histoires à lui raconter en rentrant. Je voulais aussi sortir de l’hôtel Eko et voir ce pays dont j’avais tellement entendu parler.
Du haut de ses quatre-vingts ans, il avait encore le pouvoir de choisir sénateurs et ministres, et de virer les gouverneurs selon son bon plaisir. On ne l'avait pas surnommé pour rien le "parrain des parrains".
Tu crois qu'on peut tout recommencer ?
Il était illégal pour des civils de posséder des armes de guerre, mais il avait beau être inspecteur de police, il ne pouvait rien faire d’autre que regarder et faire semblant de ne pas voir.
Elle aurait tant voulu pouvoir les convaincre de ne plus faire ce métier , mais c'était un rêve illusoire et fugace , qu'ele se refusait à considérer trop longtemps , Qu'auraient elles fait , alors ?
Elles seraient mortes de faim ? Elles seraient devenues des domestiques , violées par leur patron ? Des mendiantes , dans la rue , violées par les types du quartier ? Elle connaissait ces filles , ces femmes . Elle comprenait leur monde . Pour elles , la prostitution n'était pas un choix - c'était une absence de choix .
La prostitution n’était pas un choix – c’était une absence de choix
Amaka jeta un coup d’œil à sa montre en même temps que l’homme qu’elle suivait. Elle se trouvait au comptoir du Soul Lounge. En entrant, elle avait compté quatre filles pour chaque homme, serveurs inclus. Les filles étaient beaucoup plus jeunes que les hommes auxquels elles tenaient compagnie. Leurs sacs Gucci et Louis Vuitton étaient posés sur la table, bien en évidence, à côté des bouteilles de Moët. Sur certains de ces sacs, le nom sur l’étiquette s’épelait GUSSI. Amaka était la seule femme en tenue de bureau : jupe noire et chemisier de soie rouge. Elle fit glisser ses mains sur ses cuisses et remonta sa jupe pour dévoiler un peu plus ses longues jambes.
C’était la chose la plus dingue que j’avais jamais entendue : on lui avait tranché les seins ?
– Putain, c’est quoi ces conneries ?
Quand tout le monde s’est tu pour se tourner vers moi, j’ai compris que j’avais crié.
– Ils lui ont tranché les seins, a répété Waidi. Là, maintenant. Dehors.
Il avait forcément mal compris ce que la fille lui avait dit. Je l’ai cherchée du regard, mais mes yeux n’ont rencontré que des visages pétrifiés.
– Ils ont fait quoi ?
Waidi a empoigné un sein imaginaire et, de l’autre main, il a fait le geste de trancher.
– Ils lui ont coupé les seins, a-t-il dit.
Que s’est-il passé ? ai-je demandé. Je me suis penché au-dessus du bar pour lui secouer le bras. – Que s’est-il passé ?
À cet instant précis, la musique s’est arrêtée et l’éclat de ma voix a couvert celui de cent autres voix frénétiques.
– Ils ont balancé une fille dans la rue, a-t-il répondu. Ils lui ont tranché les seins et ont balancé son corps dans le caniveau. Là, maintenant.
– Prostituées… a-t-il grommelé. Ses traits étaient juste assez animés pour exprimer sa désapprobation, comme si l’endroit où il travaillait n’avait pas été un lieu de drague accueillant toutes sortes de professionnelles, et peut-être aussi de professionnels ; comme si son propre salaire n’avait pas dépendu de leur assiduité. – Les flics font une descente et elles pensent qu’elles seront en sécurité ici, ajouta-t-il.
Les cris se sont faits plus perçants, et j’ai soudain pris pleinement conscience de ma situation : j’étais un blanc, voyageant en Afrique pour la première fois, mandaté pour écrire un reportage sur des élections présidentielles qui n’auraient lieu que dans plusieurs semaines, et dont l’issue, de toute manière, était courue d’avance. C’était seulement mon deuxième jour à Lagos, et le premier soir où je sortais seul – exactement ce qu’on m’avait déconseillé de faire.
Pour commencer, aller seul dans un lieu de drague au Nigeria n’était pas mon idée. Enfin, ce n’est pas tout à fait vrai. Le Nigeria était le pays où mon ex, Melissa, mi-nigériane, mi-irlandaise, était née, et je voulais avoir des histoires à lui raconter en rentrant. Je voulais aussi sortir de l’hôtel Eko et voir ce pays dont j’avais tellement entendu parler.
Il est moins douloureux pour l’ego de recevoir la charité quand on n’en pas vraiment besoin.
Même si elle n’avait rien à redire sur la manière dont les autres filles gagnaient de l’argent, Florentine ne sortait jamais en boîte avec elles. Les filles s’y rendaient tous les vendredis soir, généralement dans les clubs pour expatriés de Victoria Island, et elles rentraient le lendemain matin, quand elles n’étaient pas absentes tout le week-end, regagnant le campus le lundi aux aurores, déposées quelquefois par des berlines de luxe avec chauffeur.
L’amie de Florentine, par exemple, avait acheté des cheveux brésiliens à une autre étudiante, qui se rendait régulièrement à Dubai pour se procurer des vêtements, des bijoux et des cheveux humains, afin de les revendre à ses condisciples. L’amie de Florentine avait payé ces cheveux deux cent cinquante nairas, mais au bout d’une semaine, elle se les fit enlever, car les autres filles arboraient à présent des cheveux péruviens, et elle tenait absolument à suivre la mode. Elle donna à Florentine les mèches indésirables et quand Florentine se les fit arranger, tout le monde tomba d’accord sur le fait qu’elle était plus belle encore que l’actuelle Miss Unilag.
En voyant les bijoux de luxe et autres téléphones dernier cri des étudiants d’Unilag, et les grosses voitures tokunbo qu’ils conduisaient, on avait peine à croire que la pauvreté existait au Nigeria
Lors de sa première année de fac, n’ayant pas les moyens de vivre au foyer étudiant, elle s’était installée chez une tante éloignée, qui l’avait fait dormir par terre dans le salon à côté du chauffeur et de la domestique, lesquels entretenaient une liaison intime. La tante payait en outre ses frais de scolarité et lui donnait un peu d’argent pour prendre le bus jusqu’à l’université. Au cours de cette première année, Florentine avait perdu vingt kilos et séché la moitié des cours.
Puis elle rencontra une vieille amie à l’université et s’installa avec elle sur le campus, et la tante cessa de lui envoyer de l’argent.
Florentine n’était pas son vrai nom, Florentina non plus, même si elle répondait aux deux. Elle était étudiante en deuxième année de communication de masse, à Unilag, l’université de Lagos. Et même s’ils ne finançaient ni ses études ni ses frais personnels, ses parents étaient déçus qu’elle n’ait pas obtenu d’assez bonnes notes à l’examen d’entrée pour suivre des études de médecine, de droit ou d’ingénieur.
Elle lui raconta les choses qu'elle voulait lui faire ; comment elle allait les lui faire, et pendant combien de temps. Elle laissa ses lèvres frôler les oreilles de chief. Le souffle de l'homme se fit plus court. Il porta ses mains entre ses cuisses, juste sous la bedaine, et se rajusta à travers les plis de son costume blanc. Elle lui confia que son seul regret était que Debby ne puisse pas se joindre à eux, mais si cette nuit se passait bien, d'autres occasions se présenteraient sûrement.