SMEP - Barbara Constantine
La présentation du livre "Le Violon d'Auschwitz" de Maria Angels Anglada par l'éditeur : Auschwitz, 1944. Les privations, les coups, les humiliations. Un prisonnier juif, Daniel, lutte pour la survie de son âme. Surprenant un concert organisé par Sauckel, le commandant du camp, il révèle son talent de luthier pour sauver son ami Bronislaw, violoniste de génie accusé à tort d'avoir joué faux. Il va alors devoir fabriquer un violon qui imite le son d'un Stradivarius, car de cet instrument dépend leur salut... Composant un mélange subtil entre réalité et fiction, des documents historiques entrecoupent le récit comme autant de pauses glaçantes. Dans la tradition littéraire d'un Primo Levi, l'auteur mène une danse effroyable entre l'horreur de la barbarie et le sublime de la musique. C'est une leçon d'harmonie qu'offre la Catalane Maria Àngels Anglada. Son Violon est artisan de volupté, de fraternité. D'humanité. Laure Mentzel, Le Figaro. La présentation du livre "Tom, petit Tom, tout petit homme, Tom" de Barbara Constantine par l'éditeur : Tom a onze ans. Il vit dans un vieux mobile home avec Joss, sa mère (plutôt jeune : elle l'a eu à treize ans et demi). Comme Joss adore faire la fête et partir en week-end avec ses copains, Tom se retrouve souvent seul. Et il doit se débrouiller. Pour manger, il va chaparder dans les potagers voisins... Mais comme il a peur de se faire prendre et d'être envoyé à la Ddass (sa mère lui a dit que ça pouvait arriver et qu'elle ne pourrait rien ...
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Brille le miel au coeur des ruches,
que le vin coule à flots, que les coupes débordent!
Et quand la jeune épouse enfourne le bon pain,
s'illumine l'amour!
(extrait du poème Vahé de Daniel Varoujan)

Mais hors du camp, hors de cette île d'un monstrueux archipel, rien ne s'arrêtait. Il sentit une bouffée d'air qui n'était plus si froid, comme une caresse unique au pays de la haine. Dans son ancienne rue, à Cracovie, les hirondelles ne tarderaient pas à arriver. Le printemps fleurira comme jamais, se dit-il. Il fleurira sur les corps des milliers de morts. Ce n'était pas une pensée très réconfortante, mais c'était la vérité. Il trouva le café plus amer, la tranche de pain plus petite et mesquine, comme si cette réflexion l'avait diminuée. Au bout de quelques minutes, il regarda le ciel- il ne s'en était pas soucié auparavant car il le voyait toujours couvert de nuages ou de brume- et il y découvrit de grands espaces bleus. Il reçut un coup de bâton dans le dos car il s'était arrêté dans le rang qui se dirigeait vers les ateliers. Oui, le printemps approche, pensa-t-il à nouveau en étouffant un cri. Il fleurira sur l'engrais de nos morts.
Terre pourpre, exilée-héritage,relique,
offrande,talisman-alors
même que sous ma plume un poème
est en train de naître,souvent je pleure
à la vue de cet infime lambeau
d'Arménie,je rugis-me rivant l'âme
dans le creux de la main,
j'arme mon poing!
(extrait du poème La terre pourpre de Daniel Varoujan)
J'ai là, sur ma table, dans une coupe,
un peu de terre d'Arménie.
L'ami qui m'en a fait cadeau croyait
m'offrir son coeur-bien loin de se douter
qu'il me donnait en même temps celui
de ses aïeux.
(extrait du poème La terre pourpre de Daniel Varoujan)
Il était Daniel, facteur de violons de son métier. A cet instant, il ne se souvenait que de son travail - sa fierté. Il avait même oublié la faim et ses yeux brillaient à cause de l'intensité de l'attention.
C'était peut-être la raison pour laquelle la tempête les avait surpris de la façon la plus inattendue; il n'avait pas distingué les signes menaçants, les nuages qui s'assombrissaient, absorbé par un métier qui le passionnait. Au début de la tyrannie, il s'était accroché l'étoile jaune de David sans savoir que c'était le signe de la mort, comme on marque les pins qui vont subir la hache; et il ne s'était en fait pas éveillé à la nouvelle réalité brutale avant le jour terrible où ils avaient saccagé son atelier-dans un passé récent, la vieille synagogue du quartier où il s'était senti en sécurité dans son enfance, sous le long talith de son père qui l'emmenait souvent dans les fêtes, avait brûlé. Depuis, pensait-il maintenant, chaque jour ils s'enfonçaient d'un pas dans les eaux marécageuses qui finiraient par les engloutir tous.
Même si cela peut paraître étrange, les réfugiés, ici, à Athènes, chantent souvent.Ce n'est pas pour oublier nos peines, mais pour ne pas oublier nos chansons.
Il se trouvait à l'un des moments les plus délicats de son travail, qui consistait à mettre en place à l'intérieur de l'alto l'âme, cette petite pièce en épicéa, aux veines fines et denses, qu'il était sur le point de laisser partir, parfaitement verticale, parfaitement droite, juste derrière le pied droit du chevalet. Mais que lui arrivait-il ? Il avait les mains moites, l'âme glissait, elle s'échappait avant l'heure ! Elle était trop courte, inutilisable. Il allait devoir tout recommencer. Mais l'alto devenait profond, profond...
Des mains qui le secouaient le réveillèrent à ce moment. L'alto se trouvait sans âme. Cela lui sembla être un mauvais présage.
Il avait tout appris de son père : il utilisait uniquement du bois de plus de cinq ans d’âge. Du bon épicéa des montagnes et de l’érable, des arbres où avaient niché les hirondelles. Où le vent avait chanté, comme le ferait ensuite l’archet.
Au début de la tyrannie, il s'était accroché l'étoile jaune de David sans savoir que c'était le signe de la mort, comme on marque les pins qui vont subir la hache ; et il ne s'était en fait pas éveillé à la nouvelle réalité brutale avant le jour terrible où ils avaient saccagé son atelier-dans un passé récent, la vieille synagogue du quartier où il s'était senti en sécurité dans son enfance, sous le long "talith" de son père qui l'emmenait souvent dans les fêtes, avait brûlé. Depuis, pensait-il maintenant, chaque jour ils s'enfonçaient d'un pas dans les eaux marécageuses qui finiraient par les engloutir tous.