Solange est une princesse moderne. Elle grandit dans une petite ville isolée et ses hormones la titillent. Toutes ces questions sans réponse, tout ce monde caché dont les codes semblent ne pas avoir de secrets pour les adultes… Bref, elle voudrait bien le faire, oui mais comment s’y prendre ? Comment ne pas passer pour une fille facile, garder sa dignité et pourtant engager des gestes obscènes ? Comment séduire et puis d’abord qui ?
La vie de Solange, où les moment difficiles de l’adolescence quand des pulsions violentes font sortir de l’enfance et provoquent des comportements surprenants que l’on découvre en même temps qu’on les adopte. Comment écrire ce mélange de pulsions de vie et de mort, et l’inconscience qui jette l’enfant dans un monde nouveau qu’il aspire ardemment à découvrir, malgré la brutalité qu’il ne cesse de révéler ? Et cette brutalité, n’est-ce pas précisément ce que cherche l’adulte en devenir ?
Pour rapporter la semi-conscience de l’adolescente qui traverse la puberté, c’est-à-dire sa capacité imparfaite à saisir pleinement la réalité de ce qu’elle vit, Darrieussecq écrit par petites touches. Des phrases isolées les unes des autres par des lignes en blanc qui évoque tout ce qui peut se passer d’ininterprétable entre des phénomènes objectifs, ou consécutivement à des questions sans réponses, qui, eux, sont rapportés. Bien sûr, le lecteur, lui, avisé et plus mûr que le personnage principal, se rend parfaitement compte de ce qui se passe, de la nature des troubles qui envahissent le cerveau de l’héroïne, voire des tentatives de manipulations de ses interlocuteurs, et des conséquences qu’ils augurent. Mais rien n’en est dit explicitement. Le lecteur comprend que le personnage principal est embarqué dans une réalité qui la dépasse, mais à laquelle elle ne renonce pas. Elle ne sait pas ce qu’elle cherche, mais elle se lance sans retenue, projetée par son corps et sa soif inextinguible de réponses, dans ce monde si surprenant, quitte à commettre quelques bêtises. De ce jeu interactif avec la lucidité du lecteur, proposé par ce traitement typographique particulier, procède un humour provoquant, explosif et irrésistible, qui capte l’attention du lecteur avec autant d’intensité que celle de l’héroïne est emprisonnée dans l’impétueuse réalité où elle est actrice.
Ce qui est remarquable c’est cette vivacité du récit, cette tempête continuelle qui bouleverse l’esprit de l’adolescente et l’entraîne dans une vie qu’elle apprend à découvrir et qu’elle n’a pas le choix de refuser. De toute façon, elle n’est pas vraiment contre, loin de là. Nymphomane la Solange ? Qu’on le dise tout de même aux esprits prudes, la volonté de transcription réaliste de l’auteure l’oblige à ne passer aucun détail de la crudité de cette période. Toute sensation, tout détail, tout organe qui entre dans le champ de perception de l’héroïne est rapporté au lecteur avec autant de vivacité perceptive qu’ils ont surgi à l’esprit de Solange. Mais faut-il s’en offusquer : l’adolescence est faite de ce conflit entre une pulsion à agir et une condamnation morale qui de toute façon, a perdu d’avance. Et c’est en grande partie grâce à la crudité - la sincérité d’un témoignage exhaustif ? - qu’est rendu le réalisme et l’incroyable voyage dans le temps du roman. Qu’une l’auteure réussisse, la quarantaine passée, à faire éprouver au lecteur, par les mots, le typhon qui chamboule l’esprit à la puberté, ou la vérité d’un monde qui n’existait pas avant et dont nous croyons avoir oublié les codes - les avoir condamnés ? - c’est là la performance incroyable de Marie Darrieussecq et l’expérience jubilatrice du lecteur.
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Je l’avais déjà lu mais comme l’auteure a participé à La Grande Librairie du 17 novembre, j’ai voulu lire un ouvrage d’elle, à défaut de son dernier : Pas dormir. Clèves dormait à la bibliothèque et j’ignorais l’avoir déjà emprunté et lu. Finalement, je l’ai relu en entier pas d’un seul coup parce que c’est assez pénible de voir le sexe de l’homme cité presqu’à chaque page et la fin m’a rappelé quelque chose : la triste fin de Lulu, le chien de Monsieur Bihotz (pour ne pas en dire plus et déflorer l’ouvrage). Je comprends mieux pourquoi je ne l’avais pas commenté. Pas grand-chose à en dire si ce n’est que c‘est très bien écrit, très vivant mais que la vie passionnée d’une jeune pubère ne m’intéresse guère. Boum, bal, surprise-partie et les émois d’une adolescente qui s’éveille à l’amour, c’est loin tout cela. Heureusement que ce n’est qu’un roman car vu les prouesses sexuelles de Solange, dans la vraie vie, à moins d’être complètement stérile, elle serait en train de courir tous les centres de contraception ou les hôpitaux pour avorter. C’est facile d’être une fille facile dans un roman. Sinon dans le contexte de l’époque, dans les années 80, si on s’en réfère à une indication dans le livre que les russes ont envahi l’Afghanistan, c’est : la dernière décennie d'un monde bipolaire et la fin de la guerre froide qui a marqué l'histoire du XX e siècle depuis 1947. La chute du mur de Berlin le 10 novembre 1989 est un symbole important de la fin de cet affrontement. Les années sida en France sont comprises dans la période (1983-1995). A la fin du livre, la mère de Rose lui a fait tout un sermon sur la contraception – « aucun garçon ne s’en souciera pour toi ». Mais elle a tellement d’autres choses à penser. Tête de linotte. Dans la vraie vie, tu serais vite rattrapée par tes bêtises. Un livre à la fois plaisant et déplaisant. ¨Pour moi, trop de sexe affiché. Marie Darrieussecq, ce n’est pas Henri Miller, tout de même ! Finalement, pas envie de lire d’autres livres d’elle pour le moment.
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Critique de Camille Thomine pour le Magazine Littéraire
Avec Clèves, Marie Darrieussecq raconte sans détours l'expérience de la puberté d'une jeune fille. Immensité polaire et désolée de White , errances spirituelles de Bref séjour chez les vivants, spectres rémanents de Naissance des fantômes ou de Tom est mort et, même, dénuement de l’exil ovidien dans Tristes Pontiques ; voilà plusieurs années que l’imaginaire de Marie Darrieussecq ondule autour d’absences, d’auras, de vides. Mais avec Clèves sa plume acérée remord aux plis palpables et chauds de la chair, ces replis tantôt roses, fermes, appétissants, tantôt poisseux, moites et fétides, qui obstruaient déjà chaque page de Truismes, en 1996.
C’est encore l’histoire d’une métamorphose : non celle d’une femme en truie, mais celle d’une petite fille en femme, Solange, au fil de ces années cruciales et délicates qui courent de la prépuberté au passage du bac. Premières règles, premier baiser, première fois ; ces mains dont on ne sait plus que faire et cette intarissable voix qui résonne dans la tête : «Est-il possible que les femmes aient ça et que tout le monde fasse comme si de rien n’était ?» ; «Est-ce que ça se voit quand on l’a fait ?» ; «Il doit la trouver bête» ; «Il faudrait qu’elle dise quelque chose» ; «Est-ce que les gens la regardent ?»
Solange, petite souillon doublée d’un ange, déjà avide et encore innocente, toujours pucelle et pourtant... Une «petite bouée dans le déluge», ballottée entre un père extraverti, une mère insomniaque et cet étrange voisin qui prend tellement à coeur son rôle de nourrice. A priori, ce Clèves-là – le nom du village où grandit la fillette – n’a pas grand-chose à voir avec celui de la princesse. Sauf s’il s’agit d’une princesse inversée : la crudité des mots en place des bienséances et la lascivité en place du renoncement... Un tel titre, bien sûr, ne doit rien au hasard ; a fortiori chez Darrieussecq, qui accorde tant de soin aux «seuils» de ses romans : même confusion des sentiments, même obsession du regard, même règne du faux-semblant que chez Mme de La Fayette. Même finesse dans l’analyse, surtout, à commencer par cette façon dont la romancière intériorise l’écoulement du temps. Et elle délivre ici la parfaite mesure du temps adolescent. Ce temps segmenté de l’urgence, égrené par étapes, comme un compte à rebours – «ça y est, ça va arriver [...] elle va sortir avec un garçon» ; «ça se passe en ce moment même. Elle est en train de faire ça»... –, et capricieux aussi : dilaté à l’excès dans l’attente d’un coup de fil et « compact, gorgé, exaspéré » dans l’emballement du désir.
Car le voyage intérieur ne se limite pas aux seuls soubresauts de la pensée. Rarement le style de «défricheuse» de Marie Darrieussecq aura trouvé meilleur terrain d’auscultation que ce corps en éveil, cette chair palpitante, frôlée, frottée ou malmenée, explorée du dehors et du dedans par chacun de ses pores et orifices. Ce sont ici les frémissements mêmes de la peau, les afflux du sang et du sperme, qui impriment au roman son rythme pulsatile. Dans le lacis des très courts paragraphes, des impressions s’imbriquent en un millefeuille d’images fugaces et de phrases obsédantes. Il y a des réminiscences de prières, des refrains de chansons, des définitions du Nouveau Larousse – pénis, vulve, orgasme... – et des bribes de dialogues, de romans ou d’histoires salaces, des racontars et des dictons. Qu’il ne faut pas «se baigner quand on les a», qu’il faut «le faire vraiment pour que les seins poussent, qu’un homme peut violemment posséder une femme»... Autant d’appendices de langage, appris par coeur ou pris au vol, que Solange tourne et retourne, frictionne en tous sens comme pour voir ce que ça fait ; ce que la langue dit de l’expérience, et vice versa. Et l’on reconnaît bien ici la signature de Darrieussecq, qui avouait dans les premières pages du Bébé une forme d’amitié pour les lieux communs, ces «pierres» que l’on soulève «pour voir, par-dessous», capables d’énoncer, «malgré l’usure», une part de réalité.
«Dire le non-dit : l’écriture est ce projet», affirmait alors la romancière. Et parce qu’il fait voler en éclats les tabous, l’afféterie et les raccourcis, c’est bien vers ce projet que tend son roman Clèves .
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Tellement d’espaces blancs reflétant tellement de choses cachées.
Tellement rapide à lire et digeste.
Tellement de bites.
Tellement facile à lire et en même temps les phrases lues restent tellement imprévisibles.
Tellement simples et limpides les titres des trois parties « les avoir », « le faire », « le refaire » ; il faut tellement peu attendre pour comprendre la signification de « les avoir ».
Tellement de tellement qu’on se demande si cela ne relève pas de l’exercice oulipien.
Tellement proche de la « catastrophe imminente » « avec la lune fracassante et blanche ».
Tellement lucide, « C’est le fait de savoir où j’en suis qui fait que je suis terriblement paumée. » (page 253)
Tellement à dire sur ce grand truc qui semble terriblement et tellement obsessionnel pour tellement de gens.
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La princesse de Clèves, modèle de vertu, se serait-elle réincarnée en Solange, Lolita de banlieue qui n'a pas froid aux yeux?
D'un siècle à un autre, d'une jeune femme à l'autre...un sacré grand écart,celui de l'innocence perdue d'une ado déjantée dont le père zéro pointé et la mère entre guillemets brillent par leur absence....de neurones!
Une analyse pointue d'une certaine jeunesse zonarde en mal de repères qui "baise" pour baiser, se masturbe et "s'encule" sans grande jouissance, ni de leur côté, ni du notre,car Marie Darrieussecq, normalienne,agrégée de Lettres modernes, manie le "cru" comme une machette dans la jungle amazonienne de kermesses imbibées d'alcool et d'écoles où les braguettes se baissent aussi vite que les culottes.
"Délivrez nous de la tentation!" Et pourtant c'est pas faute de réciter le Notre Père vingt fois par jour! Pauvre Solange!
1980. Le Pays Basque en été est-il toujours peuplé de jeunes fêtards en manque de sexe?On s'interroge! Entre Laetitia,Arnaud,Rose,Sixtine,Nathalie,Raphaël, Delphine, Solange, c'est tout kif-kif ! Pauvre France!
Où est l'amour dans ces expériences de "bites" pures et dures pipées dés le départ ?
Et ce Monsieur Bilhotz avec "sa tête à désherber", qui regarde "psy-show" et explique à Solange son "tyran intérieur", un sacré gogo qui montre un peu trop souvent son chose "couleur crête de dindon comme les cannas".
Ca la mènera où tout ça Solange? Suivra-t-elle le chemin des mots salés du dico un à un ou les conseils de son horoscope érotique?Paradoxe éternel, le choix n'est que souffrance!!
De bons passages truculents comme celui des "cafards" et de leur abri anti-atomique,celui de la leçon anti-sida du père, mais trop c'est trop! "Un trou est un trou" et y a trop de trous dans ce Clèves là!
Une ironie vitriolée qui fait mal!
A moins que ce ne soient à nouveau les effets de la psychanalyse entreprise par l'auteur qui après avoir extirpé Truismes en 1996 ( un franc succés qui a été adapté au cinéma) des méandres de son inconscient ne se lâche à nouveau?
Ou peut-être bien ... autre chose, une simple réinterprétation de La princesse de Clèves de Madame de La Fayette avec changement de lieu,d'époque et de prénoms?
On lui donnerait le bon Dieu sans confession à Marie!
A quand le prix?
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Marie Darrieussecq part d’un constat: De curiosités d’écolière et/ou conversations pseudo-intimes puis tâtonnements sentimentaux, c’est par approximations successives que la plupart des femmes « fabriquent » leur féminité, leur rapport à la vie amoureuse, et sexuelle.
Ainsi, elle place son héroïne, une ado des années 80 , dans une famille déstructurée (père mythifié, mais évanescent; mère aux abonnés absents). Ravages du système patriarcal et ou carence des modèles parentaux, la jeune fille se construira presque inéluctablement dans l’obsession du sexe. Pour ne pas déplaire, pour être aimée, elle se fabriquera peu à peu une libido exacerbée, s’amourachant d’un garçon sans intérêt mais ravageant sans remords la vie de son père de substitution .
Je note en passant que le livre est construit sur trois verbes: AVOIR, FAIRE , et REFAIRE. Est-ce un hasard s’il manque le mot ÊTRE ? Car pour Solange le sens de la vie se résume à son sexe: faire et refaire l’amour, et non pas être une femme, dans toutes ses dimensions.
Passons sur l’accumulation des termes désignant les organes sexuels, des plus crus aux plus « cliniques », dictionnaire à l’appui. Un peu dérangeant, à la longue… Mais Marie Darrieuscq, psychanalyste, nous rétorquerait sans doute que le sexe est la grande affaire de l’humanité, et surtout dans cet âge particulièrement perméable aux influences extérieures que constitue l’adolescence.
Sur le plan stylistique , plusieurs grands morceaux de bravoure, néanmoins. Par exemple le rendu hilarant de l’accent anglais(« il lui parle de Wose qui est crwuelle et ne le rwegarde même pas dans la wou , dans la quoi, dans la wou »), ou encore une conversation incohérente mais délicieusement planante après partage d’un « joint ». Idem pour les échanges de confidences entre filles, avec circulation incessante de potins sans cesse repris et enrichis.
Bref, pour retracer l’évolution de cette jeune fille plutôt dérangée, un humour discret, mais implacablement cruel.
Au final, malgré ses désarrois d’adolescente, qui par moments peuvent nous toucher, on s’attache peu à cette « « Solange » obnubilée par ses premiers émois sexuels.
Et qui ne voit ni la détresse de sa mère, laquelle plonge inexorablement dans la dépression; ni l’aide désintéressée que certains cherchent à lui apporter. Ni l’immense tendresse que lui porte cet homme un peu bizarre qui l’a vue grandir, et qu’elle va utiliser puis jeter comme un kleenex.
Égoïsme de l’adolescence, dira-t-on. Il est ici particulièrement sur-développé.
Est-ce le portrait d’une génération déboussolée, sans ossature morale, sans culture (en dehors de quelques hits musicaux), sans ouverture sur le monde, et pour qui le sens de la vie se réduit à une copulation forcenée, est-ce vraiment cela que Marie Darrieusecq, en écrivain-sociologue ( ou moraliste?) a voulu nous mettre sous les yeux?
Elle dresse pourtant le contre-modèle absolu de cette Solange en la personne de Rose, jeune fille éduquée avec le « sens des valeurs » et dans le respect des autres.
Un peu trop manichéen pour moi…. Presque une trop belle personne.
C’est pourquoi le vrai beau personnage du livre , à mes yeux, c’est l’étrange « Monsieur Bihotz », ce rustre tatoué, aux délicatesses de dentellière.Figure sacrificielle, qui, à son corps défendant , plongera avec elle dans la transgression.
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Une grande déception... tant dans les idées développées que dans le style !
La métamorphose de la fillette à l'ado puis à la femme à la manière de Darrieussecq n'est pas du tout celle que je souhaite aux femmes.
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Je passe peut-être à côté de quelque chose, mais ma décision a vite été prise, une fois n'est pas coutume je ne finirais pas ce livre puisqu'il me fait si mal aux yeux, rien ne sert de se torturer !
Le style de Marie Darieussecq m'a coûté dès les premières lignes, la violence de la répétition du mot "baiser" et autres expressions colorées toutes plus crues et visuelles les unes que les autres, assénées page après page, l'ambiance malsaine et qui semble devoir aller toujours plus loin dans le laid, la violence et le salace... Je n'ai pas pu continuer, quand c'est trop, c'est tropico ! (un peu de légèreté s'il vous plaît !)
Mais je suppose que l'auteure a réussi son coup de provoc' puisque mon refus de finir ce livre m'a poussée à la réflexion : ai-je arrêté par peur de cette réalité des adolescents d'aujourd'hui ? Il m'encourage en tout cas à devenir une future maman ouverte et à l'écoute des transformations physiques et mentales de ses enfants ! Il m'a surtout fait m'interroger sur ma relation avec les livres : j'aime lire pour le plaisir du beau mot, pour être invitée dans un ailleurs, que celui-ci me fasse rêver, souffrir ou tomber en amour, tant que le mot me séduit... Et surtout, je HAIS les gros mots !
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Une petite jeune fille découvre, entre l'ennui d'un village et la boutique de sa mère, la sexualité d'une façon très crue. Elle fait le tour de beaucoup de pratiques sexuelles différentes, mais question sentiments et réflexion, elle demeure plutôt passive.
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Au vu des critiques déjà sur Babelio, voila un livre qui ne laisse pas indifférent!
Il est vrai que le fil du roman (l'éveil sexuel d'une adolescente) et la description centrée sur les étapes de la progression de Solange pour assouvir ses désirs forment un sujet un peu mince.
Pourtant, j'ai trouvé intéressantes les relations amicales et surtout leurs évolutions entre Solange et ses amies.
En l'occurrence le mot "amies" est surement inadapté: peut être faudrait il davantage parler de curiosité, de compétition (laquelle est allée le plus "loin"), de superficialité, de relations qui cherchent à se nouer, se nouent et se détendent au fur et à mesure que l'admiration initiale s'étiole. Certes, peu de soleil et d'amitié dans ces relations. Mais sommes nous tellement sûrs de l'absence de ces différentes composantes dans les amitiés adultes?
Un autre élément rend ce roman difficile à "acheter": on ne ressent guère de sympathie pour cette adolescente assez indifférente à tout ce qui n'est pas la satisfaction de son désir. Mais pourtant, on ne peut s'empêcher de ressentir une certaine tristesse lors de ses désillusions prévisibles, devant la découverte progressive de la noirceur qui accompagne le clinquant qu'elle désire tant.
Le style est effectivement très éloigné des canons, le vocabulaire outrancier. Mais dans ce cas, je l'ai trouvé assez adapté et en accord avec l'objet du roman, de la noirceur et des désillusions qui le parsèment.
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Je l'ai finit par acquis de conscience, mais je n'apprécie pas du tout le style d'écriture de l'auteur. Les adolescent(e)s ne pensent peut-être qu'à ça, mais il y a différentes manières de l'exprimer. Transposer à l'écrit un vocabulaire que Marie Darrieussecq pense ''jeune'' nous plonge ici dans l'histoire d'une jeune fille obsédée par le fait de les avoir (ses règles), de le faire (la première fois, l'amour), puis de le refaire, en s'interrogeant sur le plaisir, la frigidité, et un peu moins sur la pilule et la contraception. Si on comptait le nombre de ''trou'' et de ''bite'', on pourrait souligner toutes les pages en rouge, et marquer dans la marge ''répétition''! (pardon, défaut professionnel).
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Bien avant de me décider à lire Clèves, j'avais entendu l'auteure déclarer que son roman, en parlant du désir des femmes, peut déranger. Sauf que "la femme" dont il est ici question n'est qu'une gamine à peine pubère ! Et ça, ce n'est pas dérangeant mais carrément choquant, surtout lorsqu'il est question de relations intimes avec des hommes adultes.
Malgré tout, j'ai plutôt apprécié cette histoire et la façon dont elle est écrite, sans trop être gênée par l'extrême verdeur du langage. Les nombreux détails, tissu Liberty, coupe mulet, Kim Wilde etc restituent bien l'atmosphère des années 80 pendant lesquelles l'auteur a vécu son adolescence. Par contre, je reste plutôt dubitative quant à la nature dévergondée de la petite Solange, encore à l'âge des timides découvertes mais affichant un appétit sexuel qui semble trop excessif pour paraître crédible. Mais peut-être existe-t-il des gamines extrêmement précoces qu'une «sensualité exacerbée» pousse à avoir des audaces dignes d'une courtisane rompue à l'art de la "galanterie"... Ce qui n'empêche pas Solange d'être naïve comme toutes les filles de son âge, de confondre amour et désir et de prendre ses rêves pour la réalité.
N'ayant pas lu Mme de Lafayette, je ne peux pas deviner comment La Princesse de Clèves a pu inspirer ce roman à Marie Darrieussecq qui y dessine une carte du tendre vraiment très particulière, aussi indécente qu'incandescente.
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Chaque roman de Marie Darrieussecq a son identité, son écriture.
Dans « Clèves », l'autrice immerge le lecteur dans le dédale des pensées et de la vie de Solange, adolescente.
Le langage est simple. Les paragraphes sont courts fait parfois d'une phrase ou d'un unique mot. Réflexions et actions s'enchaînent rapidement dans la tête de Solange.
Si le roman peut paraître choquant, c'est un récit sans filtre, sans complaisance.
Marie Darrieussecq ne cherche pas le scandale, mais la sincérité.
Son réalisme dérange, à la hauteur des bouleversements et des tortures de la puberté.
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