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Critiques de Maurice Fombeure (7)
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Les étoiles brûlées. Une forêt de charme

Il y a un intérêt particulier à lire ce poète dont parfois, comme moi, on ne connaît que le nom et un extrait d'anthologie. Ses textes sont très paradoxaux: il existe une tension entre forme et fond, tension qui fait que parfois l'un et l'autre s'inversent.



Bousculé, taraudé des gens,

Des vélos à trompe d'argent,

Au bas d'un ciel couleur de rouille

En la rue des Quatre Sergents



Si les premiers poèmes semblent engoncés par cette forme classique, par un mètre bien défini et des rimes riches, bien vite l'imagination se libère : puissante, illuminée, fantaisiste, rieuse, potache même.



Oui ! Les rimes dérapent, débordent le sujet du poème, s'emparent du propos, le maltraitent et, de-ci de-là, atteignent l'absurde.



Colibacilles

Ô la nuit de tes cils.

Pénicilline

Ô tes joues de praline.

« My darling

Clémentine »



Fombeure possède un vocabulaire hors norme, il mêle à ses poèmes de nombreux noms propres et nous emporte dans la mer agitée d'une poésie de mots merveilleux qui dépasse l'attendu cortège de souvenirs.



Rue de 'Homme Armé -sans armes-

Rue du Roi Doré

Un arbre pleure ses larmes

Chuchote de tous ses charmes

Au fin fond de la forêt.

Le soir fument les guérets.

Rue Pastoureau et rue du Blanc Mantel

Rue Pastourelle et rue des Blancs Manteaux

Voici les rues, voici même,

Voici la ville



Un poète à redécouvrir dont les accents surréalistes ou même (oserais-je) Dada restent pourtant enracinés dans les lieux de son enfance et en empathie avec une humanité plongée dans l'absurde de sa vie mortelle et dérisoire.



Je porte le poids d'un monde

Qui mourra bien avant moi



Un poète à écouter qui dans la douceur enfin conquise, parle de son unique amour ("Ô mon pain quotidien, ma sereine merveille") rédempteur qui transgresse la mort.



Et ton cœur lentement chuchote jusqu'à moi

Doux comme une souris dans le palais des livres

Le rire silencieux de l'herbe déserte



Un poète fraîcheur dans notre monde perclus de convenances où plus rien ne se dit, ne peut se dire, que violences et cataclysme annoncé.

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Arentelles

 

 

Poète de lecture courante, directe,

vivante, Maurice Fombeure pratique

une poésie tout à fait abordable.



Il adore pasticher les vieilles chansons,

dans un climat de joyeuseté contagieuse.



Sa fantaisie narquoise est un vrai rafrai-

chissement poétique, sur fond de mélan-

colie.



Avec lui la poésie cesse de faire mal à la

tête.



Verdeur, pittoresque, virtuosité bonne

santé campagnarde, une « poésie aux

joues rouges » comme le remarque fort

justement Robert Sabatier, dans son

Histoire de la Poésie Française du XXème

siècle.



Paul Claudel dira de lui :

« il faut lire Maurice Fombeure, c'est

quelqu'un qui parle français, un certain

français, un certain vers français, clair

et gai comme du vin blanc, et aussi adroit

et prompt dans son empressement

dactylique que le meilleur Verlaine, la

veine de François Villon et de Charles

d'Orléans. »





Ainsi ces quelques lignes qui suivent :



" BONJOUR AU VILLAGE

FLEUVES sans armures,

Forêts sans roseaux,

J'entends vos murmures

Au fond de mes os.

Rois de l'herbe tendre,

Assurés trompeurs

Vivant de sommeil,

Émaillés de pluie.

Sur cette rosace

J'ouvre ma voix lasse

et je dis « Bonjour »,

Bonjour au village

Posé dans le jour,

Bonjour à l'écluse

Qui chante toujours.

Bonjour à l'armoire :

Elle est la mémoire

Des vivants, des morts :

Grand-père à lunettes

Grand'mère à bandeaux.

Les deux chats ronronnent

Au sommeil du feu,

Les poules caquètent

Sous les figuiers bleus.

Terre des prodiges

Terre des mirages,

O mes jours anciens

Au fond d'une enfance

Dont je me souviens,

Au bord d'une vie

Qui n'a pas donné

Ce qu'elle tenait

Dans ses mains amies.

p.7-8





" LES CHANSONS DES PAUVRES GENS

À Jeanne Thiébaut.

LES chansons des pauvres gens

Ne sont pas des chansons tristes,

Anneaux d'argent elles disent,

Fiançailles et roses blanches ;



Des fées au bord des fontaines,

Des princesses sur les tours,

Le rire y paraît à peine

Vite, comme naît l'amour.



Des prairies baignées de lune

Où dansent des rubans bleus.

Quand elles parlent des morts

La terre leur est légère.



La douleur des pauvres gens

Ne pèse pas sur leurs chants ;

Elle y vient comme elle passe

Sans tambours et sans emphases.



Les chansons des pauvres gens :

Les filles de la Rochelle

Y font la guerre en chantant

Sur un brigantin d'argent.



Les chansons des pauvres gens :

Sont fausses comme nos rêves,

Mais l'espoir y chante et pleure

Plus vivace que la vie.

p.19-20





" LES HÔTES DES FORÊTS

PHANTASMES de la fièvre

Fantômes de rouliers

Aux cabans étoilés,

Fuyant comme des lièvres

Les cris du premier coq.

À la lisière bleue

Des forêts frémissantes,

Fougères à longs cils

Clairières du silence,

Lente flûte des pluies

Les harpes du grésil.

Squelettes de sorciers

Couleur d'arbre et de terre

Au bissac de mystère.

O sombres besaciers.

Des cerfs maléficieux

Vous suivent sur la mousse

Bossus comme les cieux,

Ennuagés de mouches.

Carrefours des orfraies

Loin du carroi des routes

Des armées en déroute

Que d'effarants secrets

Chuchote à mots couverts

Cette orée frémissante.

Les chênes décharnés

Battant sur le ciel nu

De la branche et de l'aile.

Les pleurs des tourterelles

Si rauques ingénus,

Ou les cris reconnus

Des ageasses batrelles,

Hantent mes nuits des villes.

O forêts du délire

Vous soufflez dans mon cœur,

Du zénith au nadir

Tout constellé d'horreur.

p.21-22





" ENCORE UN MATIN

Dans les sidéraux interstices

Nous avons lu notre destin.

Prophète aveugle, aigle, aruspice,

Tout s'efface au petit matin,



Avec les brumes des guérets,

L'écharpe blanche des rivières,

L'étoile au front de la forêt,

Le vent qui secoue sa crinière.



Le premier cheval qui s'ébroue

Arpente le plan cadastral.

L'homme s'épaule d'une houe

Premier levé — c'est ordinal —



Le son des fontaines chantantes,

Le bruit vif et vide des seaux,

Le départ d'une heure éclatante

Sous les colombes, les Verseaux.



Du fond des songes et des toiles,

Je sentais dans le vent d'amour

Qui me transmuait jusqu'aux moelles

La promesse aveugle d'un jour.

p.34-35





" MUSIQUES DE LA NUIT

PENDANT que tourne au loin

Le quadrille des ombres



Sous la lune d'été

Roucoulent des tambours.



S'évaporent des flûtes

Aux plaines noyées d'eau



L'orgue de Barbarie

Remoud de vieux chagrins



Aux escales de lunes

Naissent de lourds soupirs



Trombones du silence

Olifants de la brise



Tout s'use, se récuse

Ainsi la cornemuse



Fêlure du sommeil,

De la mélancolie.

p.36-37





" FLEURS DE LA VIE

DANS ce domaine posthume

Où tu venais passer l'été

Et que des parents économes et obstinés

Pour toi avaient acheté en se privant sur le sucre et le café



Un hippogriffe hypocrite

Pose sa griffe aux fruits mûrs.

Le soldat dans sa guérite

Écrit : « M…. pour l'adjudant »



Par delà le jardin brodé d'abeilles

L'institutrice épèle

« P-h-i-l-o-m-è-l-e

« Femme changée en rossignol ».



Le forgeron bat son enclume

Sur les rotondes de la mer.

L'aube fraîche sent la moule

Ruisselant d'algues et d'échos.



Bon chrétien, fleur d'antiphonaire

Passe le baron des Adrets,

Sa moustache de mousquetaire

Coupe le vent comme un agrès.



Mais l'impalpable mélancolie

Tisse et veille sur tout cela,

Le vent souffle une embellie

Et le vaisseau fantôme nous tire sa bordée.



Les fleurs pourrissent dans les jardins,

On voit des ombres dans le soleil,

Le curé perd à la manille

— C'est la grande peur de l'an mil —

p.42-43





" AH ! RETROUVER

AH ! retrouver aux fenêtres bancales

Sur le coteau qui penche vers la mer

La floraison d'étoiles zodiacales

Et le cheval noir et bleu de la mer.



Ah ! retrouver aux sources où la lune

Sème ses pas sur le sommeil d'argent

L'éternité de chacun sa chacune

Sous les tilleuls aux soupirs indulgents.



Ah ! retrouver le respir de sa race

Au bord des feux, des silences d'hiver.

Nos pas anciens y laisseraient leur trace

Vers les forêts qui soufflent à couvert.



Ah ! retrouver les jolies catholiques

Qu'on admirait le dimanche matin

Aux prés fleuris de la mélancolique

Colchique où point un automne incertain.



Ah ! retrouver jusqu'au fin fond des âges

Le pain d'enfance et des larmes de sel,

Au seuil moussu de ces calmes villages

Où quelque coq s'enroue dans l'irréel.



Ah ! retrouver nos peines et nos jours

À l'écart de ce tumulte dément

En quelque coin de ce cœur lourd d'amour

Que la vie blesse et panse doucement.

p.56-57

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A dos d'oiseau

Dans toute société, c'est bien connu, il y a les généraux et il y a les trouffions. Mais comme disait ma grand mère, quand il s'agit d'aller... quelque part, il n'y a pas deux façons de baisser son pantalon. Eh oui, nous sommes tous pareils en ce bas-monde, les grands et les petits, les généraux et les trouffions, les Victor Hugo et les... Maurice Fombeure. Avec chacun son importance, chacun sa valeur, chacun son utilité...

Maurice Fombeure (1906-1981) n'est pas le plus connu des poètes français. Pourtant il vaut largement le détour. Essentiellement parce que c'est un poète de la terre et des champs, des villages et des fontaines, un homme épris des vieilles ballades et des chansons de l'ancien temps, un homme pour qui l'amour reste une magnifique aventure, un homme qui sait rire et sourire, et parfois pleurer, un homme enfin qui conjugue ses envies d'absolu avec une acceptation pleine et entière du quotidien.

Dans le diagramme de la poésie française, Fombeure est, disons, juste après Paul Fort et Francis Jammes, au même niveau que René-Guy Cadou et l'école de Rochefort. Autant dire qu'il est en bonne compagnie.

"A dos d'oiseau" est un recueil de 1942, actualisé et complété en 1971 : il se compose de plusieurs sous-recueils : "Silences sur le toit" (1930), "Bruits de la terre" (1937) et "Chansons de la grande hune" (1939). On y trouve ce qui fait la quintessence de la poésie de Fombeure, cette proximité avec la nature, les choses simples, les sentiments dénués de tout calcul (amour, amitié, nostalgie, foi) et toujours cet humour omniprésent, espiègle et malicieux, jamais méchant ou destructeur.

Fombeure n'est pas tout-à-fait un inconnu pour les écoliers. Peut-être vous souvenez-vous de ce poème magnifique (qui ne figure pas dans ce recueil malheureusement, mais que vous trouverez quand même dans les citations) :

LES ECOLIERS



Sur la route couleur de sable

En capuchon noir et pointu

Le « moyen », le « bon », le « passable »

Vont, à galoches que veux-tu

Vers leur école intarissable

Ils ont dans leurs plumiers des gommes

Et des hannetons du matin,

Dans leurs poches, du pain, des pommes,

Des billes, ô précieux butin

Gagné sur d’autres petits hommes.



Vous la sentez, l'odeur de la gomme neuve de la rentrée, celle des crayons, et le parfum de la maîtresse...

Fombeure est un poète populaire, et c'est justice, parce que, loin des grandes envolées lyriques, des messages philosophiques ou politiques, il s'attache à nous arrimer à notre quotidien à notre maison, à notre terre, et ça, ça n'a pas de prix.





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A dos d'oiseau

142 poèmes regroupés sous 3 sections, elles-mêmes subdivisées :

SILENCES SUR LE TOIT/CHANSONS DE LA GRANDE HUE/BRUITS DE LA TERRE.



Un amoureux de la langue,

recueil inauguré par une dédicace de Paul Claudel,

élogieux

"Quand on aime de tout son coeur la bonne vieille terre française, les villages français, les petites villes françaises, toutes les choses et tous ces êtres autour de nous qui parlent français, un certain français, un certain vers français, clair et gai comme du vin blanc, et aussi adroit et prompt dans son empressement dactylique que le meilleur Verlaine.La veine de Villon et de Charles d'Orléans."

Cet hommage à la terre française s'expose par les mots:

de la"cocarde",

du "coq",



"pays natal" Bordeaux" "de la musette",

références qui frôlent le céleste les "cieux" et "étoiles" "la Grande Ourse" parsèment le recueil ...

Et puis moi, qui adore les mythologies et cosmogonies en tout genre, je servie, "Jason" Ulysse"," les sirènes"...

Certains poèmes sont dépourvus de destinataires mais d'autres le sont, nommément les amis et complices, "à Jean Cocteau" "A.C" A Francis Bout-de-l'An"les femmes"A Carmen" etc...
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A dos d'oiseau

Magnifique et trop(beaucoup trop) méconnu............
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La Rivière aux oies

L'auteur raconte son enfance campagnarde et provinciale et sa découverte de Paris
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Le vin de la Haumuche

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