L'homme n'existe pas à cause de la loi, la loi existe à cause de l'homme
(p.47)
Qu'est-ce donc que la culture? Toute culture est une culture de la vie, au double sens où la vie constitue à la fois le sujet de cette culture et son objet. C'est une action que la vie exerce sur elle-même et par laquelle elle se transforme elle-même en tant qu'elle est elle-même ce qui transforme et ce qui est transformé. "Culture" ne désigne rien d'autre. "Culture" désigne l'autotransformation de la vie, le mouvement par lequel elle ne cesse de se modifier soi-même afin de parvenir à des formes de réalisation et d'accomplissement plus hautes.
L'échange auquel elle prétend ne se produit plus dans la lumière de la cité, par le biais de ses monuments, de sa peinture, de sa musique, de son enseignement - de ses médias. Il est entré lui aussi en clandestinité : ce sont de brefs propos, des indications hâtives, quelques références que des individus esseulés se communiquent l'un à l'autre lorsque, au hasard des rencontres, ils se reconnaissent marqués du même signe. Transmettre cette culture, permettre à chacun de devenir ce qu'il est, d'échapper à l'insupportable ennui de l'univers techno-médiatique, à ses drogues, à son excroissance monstrueuse, à sa transcendance anonyme ....
Mais le savoir-mouvoir-les-mains, le savoir-tourner-les-yeux - le savoir de la vie n'est objectif d'aucune façon et en aucun sens, il n'a aucun objet parce qu'il ne porte pas en lui la relation à l'objet, parce que son essence n'est pas cette relation.
La destruction de l'Université par le monde de la technique revêt une double forme : c'est d'abord l'abolition de la frontière qui, à titre d'indice de leur différenciation fonctionnelle, séparait jusqu'à présent Université et société ; c'est, en second lieu, cette barrière une fois abattue, l'irruption de la technique au sein même de l'Université et l'anéantissement de celle-ci en tant que culture.
Ce qu'est la vie, au contraire, la science n'en a aucune idée, elle ne s'en préoccupe nullement, elle n'a aucun rapport avec elle et n'en aura jamais.
Le spectacle de la beauté qui s'incarne dans un être vivant est infiniment plus émouvant que celui de l'œuvre la plus grandiose.