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Citations de Nicole Malinconi (50)


Un jour, dans le jardin, plus aucun tremblement ni sursaut dans les feuilles.
Plus de feuilles.
Ni brindille chapardée, ni plume perdue dans l'herbe.
Plus de frôlements près de la vasque ;
finis, les sifflements, les roulades, les éclats,
les appels.
Le buisson est vide.
Ils se cachent.
Ils se taisent.
Ils manquent.
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Heureusement que je t’ai.
Heureusement qu’on s’a.
Si je ne t’avais plus.
Si je ne t’avais pas eue.
Quand je ne t’aurai plus.
Dans la vie, je n’ai que toi.
Quand je t’ai eue.
Quand tu ne m’auras plus.
Si tu ne m’avais pas.
Je n’aurai eu que toi.
Je t’aurais.
Tu m’as eue.
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L'impuissance, le désespoir ou l'angoisse ne sont l'affaire que de qui regarde, de qui a les mots pour dire qu'il a vu mourir un canard.
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Le chardonneret

Pour un comme lui qui n'a jamais fait que voler de chardon en chardon, s'accrochant à n'importe quelle minuscule frêle tige, tête en bas s'il le faut pour décrocher ses graines favorites, poussant ses allures d'acrobate jusqu'à faire son nid en bout de branche, à tout vent, puis s'en allant siffler avec les autres dans les haies, et qui tout d'un coup se voit ainsi attaché, le fil à la patte, il y a de quoi s'élancer aussitôt et tâcher de déguerpir de là au plus vite, et insister en dépit de cette chaîne qui le rabat à chaque coup sur le perchoir ; et même là, continuer à s'agiter, le bec ouvert, comme à bout de souffle. (p. 32)

ndl : Ouvrez, ouvrez la cage aux oiseaux...
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Alors je caresse les cheveux gris défaits. Je pense: le corps de ma mère. Cette chair-là. C'est comme retrouver un terrain après un désastre. Quand il ne reste que du silence et plus rien à dire. Quand le silence emplit les oreilles comme une terre. Et qu'on pleure sur l'horreur et sur ce qui est perdu; sur le mensonge aussi de ce que l'on croyait impérissable.
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Une pie plonge du haut de l'immeuble. Disons plutôt qu'elle tombe comme une pierre.
À la voir piquer ainsi vers le sol, on pourrait croire qu'il y a là, au fond, un point précis que nous ne voyons pas, une proie immobile, offerte à son regard de pie, irrésistible ; alors on se penche à la fenêtre.
On la voyait déjà foncer comme un rapace, bec en avant, mais la voilà qui atterrit dans l'herbe, rebondit, pattes jointes, et s'éloigne de son point de chute par petits sauts, comme si de rien n'était. Pour peu, on se sentirait roulé.
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C'était le jour où ma fille est née, le 24 novembre. Il n'était pas là; j'ai accouché seule, à la maternité; il est arrivé le lendemain, disant qu'il avait à m'annoncer une bonne nouvelle et une mauvaise nouvelle, qu'il me laissait choisir celle que je voulais en premier.
La mauvaise nouvelle, c'est qu'il avait tué Bernard (son complice lors des enlèvements de jeunes filles); la bonne nouvelle : il avait acheté un mobil-home.
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Vous l'avez enterré ( le rouge-gorge ) dans le jardin en vous disant que, si ça tombe, c'était lui, le petit dodu solitaire qui venait sautiller, cet hiver, sur la terrasse. On ne le voyait pas souvent ; il venait quand les autres ne rodaient pas autour de la mangeoire , ou bien, il les chassait carrément, mais à chaque fois, à le voir promener ses couleurs dans la grisaille, c'était comme si, un instant, vous sortiez de l'hiver, et vous vous surpreniez à sourire en le regardant.
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La femme porte des lunettes épaisses; on voit ses yeux tout petits à travers les lunettes; les yeux sont loin, comme reculés dans la tête, on ne sait pas d’où elle vous voit.
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Plus tard, très loin de son enfance, on entend parfois un air, une pastorale ou une romance dont on a fini par connaître le nom. On dit : écoute, cette musique, et on est là, revoyant en soi-même le lieu, et plus encore, l'instant de cet air-là, ce bref moment où l'enfance s'ouvrait sur la vie inconnue qu'on allait avoir et dont on ne savait rien, sinon qu'elle semblait à la mesure de la musique que l'on entendait. On voit peut-être que l'on ne peut guère en dire davantage et que pourtant, tout au long des années écoulées, on n'a cessé de rechercher cet instant perdu. Et on dit que cette musique, va savoir pourquoi, elle vous fait toujours quelque chose.
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Ça commence quand elle ouvre la fenêtre la nuit, pour appeler les gendarmes et qu'elle se laisse tomber n'importe où. L'homme dit que c'est à cause de tout ce qu'elle prend pour dormir, depuis tant d'années. Toutes ces saloperies, il dit. Et qu'elle n'a jamais prétendu abandonner. Et que si elle avait eu un peu de volonté, mais non.
Elle, quand l'homme la relève, elle demande où elle est, elle appelle sa mère ; demande à l'homme d'aller la chercher ; elle n'entend pas l'homme lui dire que sa mère est morte depuis des années ; elle m'appelle moi aussi, avec sa mère.
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La douleur, à ce point-là, ça anime le corps d'autres gestes, ça supprime toute pudeur. Plus de contrôle. Comme si, à ce moment-là, régnait seule la loi propre du corps, hors des mots, hors d'atteinte. Le corps est livré, abandonné à cette lame de fond.
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Dans les villes, près des gares, il y a un quartier chaud. Dans toutes les villes. C'est depuis toujours, depuis les gares peut-être, depuis qu'il existe des lieux d'arrivée avec des hommes venant de loin, arrivant là sans rien, sans personne, dans l'ignorance de la vie de cette ville-là, inquiets sans doute de trouver où manger, où dormir, pressés de jouir d'une femme pour ne pas succomber à la nostalgie de ce qu'ils ont quitté.
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Comment elle s’appelait ? Ça va me revenir. Ça reviendra. Une longue tresse noire qu’elle dénouait quand elle venait à la messe. Maddalena ! Elle s’appelait Maddalena. Quand tu te souviens du nom que tu ne retrouvais plus, c’est comme s’il y avait du soleil.
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Est-ce que j’étais malheureux [dans mon village d’Italie] ? Au fond, je me le demande. Est-ce que je disais: pauvre de moi, quand j’étais dans l’olivier ? Et quand j’allais dans le tonneau vide qui avait séché, pour gratter les cristaux de vin déposés au fond, accrochés aux parois, est-ce que je me lamentais ?
[…]
Pourquoi est-ce que maintenant je dis: malheureux que j’étais, tandis que je ne l’étais pas ? Enfin je crois.
C’est quand j’ai eu l’idée de vouloir autre chose, que j’étais malheureux. Le malheur, ça vient quand tu recherches quelque chose que tu n’as pas.
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L'effraie

Bien plus tard cette nuit où elle venait de s'envoler, quatre formes blanches étaient apparues sur le bord du trou, blotties l'une contre l'autre, se bousculant parfois, un peu vacillantes ; quatre petites faces lunaires qui déjà se mettaient à onduler de gauche et de droite elles aussi, comme avec précaution , et nous faisaient sourire sans bruit. Elles se dépêchaient de reculer dans le trou, chaque fois que le souffle rugueux s'approchait, et l'effraie plongeait dans le nid. (p. 76)
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Dans l'embrasure, son corps n'a pas bougé. On a parlé tellement vite. Et d'une traite. On est parvenu à la figer. Telle qu'elle a ouvert la porte. Dans la position d'avant qu'elle sache. D'avant qu'on parle. C'est tout ce qui reste d'avant qu'elle sache, la position de son corps. Au moindre geste qu'elle fera, on sera dans l'irrémédiable.
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Elles disent:

On va la camphrer.
On va la piquer.
On va la couper.
On va l'aspirer.
On va la sonder.
On va l'intuber.
On va la monter.
On va la descendre.
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Dire qu’il y a des gens qui sont capables de ça; ils écrivent la musique qu’ils entendent à l’intérieur et c’est comme s’ils écrivaient un roman. Les musiciens, c’est quelque chose. Moi je dis que c’est supérieur. Comme s’ils avaient un esprit plus haut que les affaires courantes du monde; comme si ça ne les préoccupait pas, les affaires courantes, parce qu’ils sont au-dessus. Avec eux, on est aussi transportés au-dessus; on est comme dans l’atmosphère.
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Les mains, ça supporte beaucoup. ça endure . Puis un jour, ça vous lâche. ça vous donne un age que vous n'avez pas.
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