Oxmo Puccino

"Noé ? Il n'est pas méchant mais bon... ce n'est pas un bel homme ! Il a le coeur vide, alors il achète tout ce qu'il peut pour le remplir !"

- Je préfère le bonheur de la solitude plutôt que le malheur d'une vie mal fagotée.

Ceux que tu aimes vraiment, tiens-les tel une poignée de sable, pendant la tempête n'écarte jamais les doigts ou toute ta vie tu le regretteras amèrement.

Personne n'est qu'un seul, c'est pour cela que tout le monde cherche sa moitié.

Dans son atelier de couture, des centaines de vêtements somptueux sont suspendus à des tringles. C'est un temple secret de la mode, un musée inconnu, que Vénus garde pour elle. Elle y vit heureuse, elle y vit cachée.
Rosie s'imagine avec ces costumes sur les épaules. Avec cet uniforme rouge et bleu de cavalerie décoré de gros boutons et de liserés tout dorés dont les épaulettes à franges ressemblent à de gros peignes pour bébé. Elle se voit aussi vêtue de cette sublime robe de défilé, dont le tissu semble composé de centaines de petites cordelettes bleu saphir serrées par une colle invisible à la taille, puis indépendantes les unes des autres jusqu'aux chevilles. Rosie est prise d'un fou rire lorsqu'elle imagine Edmond dans cette robe.
La splendeur de ses vêtements donne une idée des doigts de fée dont Vénus a été dotée. Ses cheveux sont un mariage de rouge et de bleu sans être violets, ils tombent sur ses épaules en cascade, comme une chute d'eau, ses oreilles percées avec élégance offrent une écoute qui ferait parler un chien, ses mains délicates donnent l'envie de la laisser jouer du piano sur son dos, ses yeux clairs sont un doux piège pour n'importe quel gentilhomme fragile, c'est peut-être la raison pour laquelle elle arbore un masque en guise de dernier rempart, un masque de loup en cuir blanc, surplombant des pommettes bien équilibrées. Et tout ce qui entoure ce morceau de cuir est si rayonnant que finalement le masque n'est pas de trop.

Donner de l'amour est facile, savoir recevoir est plus difficile. Il faut être mûr pour comprendre que l'amour est gratuit.

L'inégalité est inéluctable tant qu’il y aura des coeurs humains battant sur cette planète. L'égalité dépend de ce qu'on attend de la vie et de ce qu'on lui donne.

Ces dernières semaines, Edmond avait avalé son humour, il ne plaisantait plus. Il marmonnait dans son coin et avait l'impression de faire partie du gang des révoltés du salon, ces gens qui parlent mais qui n'agissent pas.

Sur ces mots, Edmond finit de s’habiller et prend la route, bille en tête, décidé à tordre le destin et à faire revenir ce foutu Soleil. Quoi qu’il en coûte.

Savais-tu qu'un cactus avait une fleur ? Au milieu des piques se cache toujours un cœur.

Oxmo Puccino

Néanmoins, je le recommande, car Proust, cest comme le yoga - de loin, on hésite, la première fois, on subit, quand on y a pris goût, on ne peut plus s'en passer.

La première impression à prendre corps dans la tête de Rosie: " Il me fait penser à ces gens décrits dans les Gens de la capitale, ce livre que j'adore. Ils sont toujours pressés pour rien. " Noé rédige nerveusement les notes qu'il doit envoyer à son ingénieur, il pense à haute voix, répète la prochaine scène de licenciement puis griffonne tout excité ses fantasmes. Grâce à son mini-Soleil, il doit être la seule personne au teint doré de toute la région. Noé a la petite trentaine, il fait plus jeune que son âge, mais ses vêtements décontractés ne font pas de lui un surfeur. C'est un jeune loup des affaires, arrogant et impulsif, il a le débit qui mitraille et ne laisse pas aux autres le temps de finir leur phrase, persuadé d'avoir tout compris avant eux.
- Je ne veux pas qu'on revienne sur cette histoire de plage suspendue ! On m'enrhume, on m'enfume, on m'enclume avec des histoires d'eau salée, j'aurai ma plage, et assez d'eau pour amarrer ! Bientôt je vais me remettre en colère, je le sens ! Je vais faire une pause.
Il tape dans ses mains pour réduire la luminosité de son Soleil et s'adresse à Rosie en retirant ses lunettes.

Quand elle arrive au sommet, elle découvre l'autre coteau de la colline pour la première fois de sa vie.
Mais Arj-en-ville n'a plus rien d'une ville, elle ressemble plutôt à un parc d'attractions au milieu d'un jardin d'une cinquantaine d'hectares, propriété de Noé. Il a racheté Arj-en-ville il y a quelques années. Après un coup de Trafalgar dont lui seul a le secret, il a fait raser la plupart des maisons pour y laisser ce parc étrange. Dans le lot des négociations, il a promis aux habitants de conserver l'appellation " en ville " pour qu'ils gardent au mois un souvenir d'avant le déluge, tout en s'octroyant le droit de nommer son domaine l'Arj-de-Noé.

De là-haut, la vue est dégagée, elle cherche à se rassurer quant à son itinéraire mais rien ne s'éclaircit. Les routes s'entortillent, les paysages se mélangent, elle n'est plus sûre de la direction qu'elle doit prendre. Elle fouille dans son sac pour checker le plan dessiné le matin. Pas de plan. Elle s'attaque à ses poches de nouveau. Gourde, lampe de poche, paquet de biscuits, mais pas de plan. L'ombre dans sa tête gagne du terrain, son courage flanche. Le rocher qu'elle a escaladé en trois bonds paraît à présent si élevé, cinquante mètres de hauteur peut-être, et il va falloir redescendre. Elle prend une respiration pour se donner de la bravoure, pose sa main au front même s'il n'y a pas de lumière pour l'éblouir, et ce simple geste l'aide à se concentrer. De l'extérieur, on pourrait trouver cette main au front insensé, on pourrait en rire, mais peu à peu, les routes et les paysages se rangent et tout s'éclaircit pour Rosie. Elle avait raison, si elle passe par la gauche et qu'elle longe la forêt des On-dit, elle arrivera à la colline.