Citations de Rabah Belamri (30)
si dans tes yeux
la mer rallie les blés
je convierai la main
à cueillir le fruit d'ambre
sur ta peau
Ton odeur s'éloigne
la porte se ferme
l'espace resserre ses barreaux
sur le silence
dans la neige des mots
la maison est vide
ton nom seul dort
sous la cendre avec la braise
ton nom mûri de désirs
comme une prière de moisson
Le peu de vision qui lui resta jus qu 'à ce jour d' octobre où son père rapporta du souk un bâtonnet de sulfate de cuivre .Hassan se cabra , puis , cédant aux prières de sa mère qui lui demandait d 'essayer rien qu' une fois pour voir , il passa le bâtonnet entre ses paupières longuement , méticuleusement ,comme s' il voulait provoquer l' irréparable ,sortir de la nébuleuse où il se trouvait depuis neuf mois , entrer franchement dans '
l' opaque puisque guérir s'avérait impossible .L 'effet fut foudroyant : les yeux de Hassan se mirent à couler comme des sources et ,peu à peu ,la nuit se posa sur les paupières, vaste ,traversée par un serpent de turquoises qui semblait relier le ciel à la terre ,qui dansait .Au fil des jours , le noir absorba
le serpent bleu et vert libéra une myriade de points de lumière insaisissable.
-C' est péché de croire ce que racontent ces voleurs .Comment ces mécréants pourraient-ils entrer dans les desseins de Dieu ! ( page 173 )
Le lendemain, en ouvrant le coffre, la princesse s'étonna : le petit oeuf avait grossi au point de doubler de volume. Il continua à grossir et, au bout d'une semaine, il devint aussi volumineux qu'un oeuf de dinde. Un jour, pendant que Hind le regardait, la coque se fendit et il en sortit un serpent mince et long. La princesse, effrayée, voulut appeler au secours, mais le serpent, agile, s'enroula autour de son cou.
- Si tu cries, je t'étrangle. Je suis le malheur que tu as acheté pour une mesure de semoule. Tu dois me servir jusqu'à ta mort, car je suis ton maître
- Ne me tue pas, serpent, je ferai ce que tu désires.
dans la maison
mon père est étendu sur la natte
frêle comme un chagrin d'enfant
le jardin dort sous la fenêtre
sur sa gorge couverte de cendres
le soir pose un songe d'eau
là-bas
entre l'oued et la falaise des désespérés
la tendresse de ma mère se mêle aux racines du thym
une mémoire de larmes me prend par les épaules
p.97
Le guérisseur demanda vint-cinq mille -de quoi nourrir décemment une famille entière pendant un mois .Youssef qui faisait effort sur lui-même pour ne pas sauter à la gorge du charlatan ,ne discuta pas : il lui remit cinq mille et
le congédia sans cérémonie . Sa colère , il la retourna contre sa femme .
3
même le ciel des prophètes prend feu
à ta crinière
ô Boraq de désir
tes ailes bleuies d'audace
inversent l'œil de la mort
4
ce matin
l'île penche sous son poids de lumière
une fillette court sur la dalle des prières
je reçois les embruns de son rire
poème inédit (extrait 2)
- Pourquoi prie-t-elle pour son retour ?
- Le sein, mon enfant. Le sein qu'il a tété lui a tout pardonné. Ainsi sont faites les mères. Leur foie saigne pour leurs enfants, fussent-ils des brigands, fussent-ils des ingrats.
toute route choisie
conduit à l’opaque de la douleur
les années passent
le sang se raréfie
vers où la roche cardinale
pour ouvrir la poitrine
aux vents de l’oubli
se couvrir de mots magiques
comme le prince blessé d’amour
remonter le temps
par une route oblique
revenir au théâtre d’innocence
dans les racines de l’amandier
reprendre le geste
qui met le feu à l’âme
Le chien fou de ma nuit
Est revenu dans l'arène de l'enfance
Il n'y eut pas de corps à corps
Mon âme en pièces
Ses mâchoires démises
L'aube avait tendu entre nos énigmes
La corde des répits
ton cri ma mère
guerrier d'éternité
dormant dans ma gorge
je bâtissais dans son oubli
un jardin clair
quand une épine de ma phrase
a effleuré sa paupière
oh maintiens ton regard clos
demeure en ta nuit gardienne de chimères
n'envahis pas la page d'une salive amère
poème inédit
je ne dors plus
les mots m’ont poussé sur la pierre de la porte
mon regard franchit la nuit
se pose sur une haie de ronce
près d’une aile apportée par le vent
plus loin que la terre
dans la poussière des syllabes mortes dans la gorge
un poème poursuit sa route avec une aile unique
il ira jusqu’au miroir de la flamme
nous à la frange de l’aube
l’imagination comme une brume tourne ses pages
avec un pépiement de jeune oiseau
de nouveau le rêve se perd à peine effleuré
ne laissant sous la paume qu’une trace de plume
l’énigme est toujours là
l’interrogation s’apaise
le sommeil est déjà loin
je remonte le drap
et je me love dans un vœu de poème
ton bras sur ma poitrine
comme langue
partie d’un tourbillon de tracas
chargées d’outils ou de remords
comme hirondelle
affolée de bleu
captive d’un bouquet de chardons
comme flamme
espérant la goutte d’accueil
à la porte du cœur
tu creuses le poème
Voilà ce que nous avons entendu
Et voilà ce que nous avons dit.
Notre contre serpente comme un ruisseau
Et nous l'avons raconté à des seigneurs
(Formule pour clore le conte)
sans fin
la tendresse soustrait l’âme
aux vents qui séparent
sans fin
une erreur de portulan courbe son voyage
ô pluie
que fermera le dernier poème
lumineuse blessure
à chaque éveil du rossignol
comme éclair
rappelé à la chair
quand la source nocturne reprend le visage
l’âme revient dans la gorge
manger l’herbe d’amertume
Nous prenons un chemin
puis un autre
le pas trébuche sur les racines
la forêt établie dans ses pensées de fête
joue à brouiller la mémoire
nous cherchons en vain l'étang du renard
(" Corps seul")