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Citations de Rachel Cusk (144)


Je voulais qu'il soit plus que ce qu'il était, ou bien je désirais, d'une certaine manière, être moins que je n'étais et, parce que je voulais ces choses, ma volonté en était stimulée - dans tous les cas, j'avais la sensation qu'une entité inconnue résidait entre nous, laquelle éveillait une partie dangereuse de moi-même, celle qui avait l'impression de ne pas avoir réellement vécu. C'était cette même partie - ou l'un de ses aspects - qui m'avait poussée vers Tony, alors que d'emblée je ne l'avais pas entièrement reconnu lui non plus ni n'avait imaginé qu'il puisse m'attirer. Tony aussi m'éveillait, mais plus particulièrement à la présence en moi d'une image masculine figée, à laquelle il ne correspondait pas. Afin de le voir, je devais avoir recours à une faculté à laquelle je ne me fiais pas complètement. Toute ma vie durant, ainsi que je m'en suis peu à peu rendu compte, cette image, sous diverses formes, m'avait incitée à reconnaître certaines personnes et à les considérer comme réelles, tandis que d'autres passaient inaperçues et demeuraient sans profondeur.
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Il y avait tant de compartiments où j'avais conservé des choses, et je décidais lesquelles montrer aux autres, eux-mêmes isolés dans leurs propres compartiments ! Jusqu'alors, il m'avait semblé que Tony était la personne la moins cloisonnée que je connaisse ; en tout cas, il s'en tenait désormais à deux compartiments seulement : d'un côté ce qu'il disait et ce qu'il faisait, de l'autre ce qu'il ne disait ni ne faisait. Mais j'ai eu l'impression que L. était le premier individu que je rencontrais à former un tout entièrement indivisé, et une impulsion me poussait à le capturer, comme on le ferait d'une créature sauvage qu'il est nécessaire de prendre au piège, tandis que je m'avisais dans le même temps que sa nature consistait à ne pas être capturé, et que je serais tout bonnement contrainte de m'incliner devant lui dans un état d'atroce liberté.
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À cette époque de l’année -le printemps-, les tubercules que nous y entreposons commencent à germer, même si nous les conservons dans une complète obscurité. Il leur pousse ces petits bras blancs et charnus car elles savent que la saison nouvelle est là et, parfois quand j’en observe une, je me rends compte qu’une pomme de terre en sait davantage que la plupart des humains.
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’j'aimerais mon revenir avec toi, Jeffers, à cette matinée parisienne avant que je ne monte dans ce train où se trouvait le diable bouffi aux yeux jaunes : j’aimerais te la faire voir.
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A cours de ces journées, j'ai souvent réfléchi, Jeffers, à la notion de pérennité et à son importance, ainsi qu'au fait que nous en tenons si peu compte quand nous prenons des décisions et passons à l'action. Si nous envisagions chaque instant comme s'il s'agissait d'un état permanent, un lieu où nous nous retrouverions peut-être contraints de demeurer à jamais, la plupart d'entre nous choisiraient bien différemment la teneur de cet instant-là ! (p 200)
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Dans les histoires sentimentales, afin de développer l'intrigue amoureuse, on emploie souvent comme procédé narratif la fait qu'une personne en évite une autre, l'idée étant que certaines natures révèlent quel est l'objet de leur désir en donnant l'impression de le dédaigner. (p 168)
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Avec les lettres de Tony, j'ai fait pour la toute première fois l'expérience de la satisfaction - découvert que mes espoirs et mes désirs les plus secrets étaient comblés, de même que le sentiment que tant de choses étaient possibles dans la vie. Elles étaient toujours plus nombreuses, plus longues, plus belles et plus ponctuelles que ce à quoi je m'étais attendue, et elles ne me décevaient jamais. Je ne savais pas exactement ce que Tony m'apporterait, mais jamais je n'aurais imaginé que ce puisse être cette rivière scintillante de mots qui courait en moi, m'irriguait et me ramenait lentement à la vie. C'est ce qui me permet, encore aujourd'hui, de vivre avec son silence, car je sais que cette rivière existe, et que moi seule suis autorisée à posséder ce savoir. (p 162-163)
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Certains écrivent simplement parce qu'ils ne savent pas comment vivre dans l'instant, ai-je dit, et il leur faut d'abord le reconstituer afin d'y vivre plus tard. (p 144)
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Parce qu'en réalité je n'étais pas sans attrait, et assurément pas davantage à cette époque qu'à d'autres périodes de ma vie ; ou plutôt, quelle qu'ait été ma valeur marchande en tant que femme, les puissantes émotions qui m'assaillaient et qui faisaient que je me considérais comme laide ou repoussante ne provenaient pas d'une réalité ou d'un regard extérieurs, mais de l'intérieur de mon être propre. (p 77)
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Notre paysage est l'une de ces énigmes qui attirent les gens, et auxquelles ils ne comprennent finalement rien. Il est plein de désolation, de mystère, et il n'a encore confié son secret à personne. Dux fois par jour la mer monte et recouvre le marais, emplissant ses anses et ses anfractuosités, emportant ensuite la trace de ses pensées - du moins j'aime à le croire. (p 26-27)
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Quand on a toujours été critiqué d'aussi loin qu'on se souvienne, il devient plus ou moins impossible de se situer dans un espace ou dans un temps qui aurait précédé la formulation de cette critique : de se persuader, en d'autres termes, que l'on existe soi-même. La critique est plus réelle que soi : en fait, il semble que c'est elle qui nous a créés.
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L’art véritable revient à s’efforcer de capturer l’irréel.
(page 200)
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J’ai alors compris, je pense, que sa maladie l’avait délivré de son identité, de son histoire et de sa mémoire de manière si brutale et absolue qu’il avait enfin été capable de voir pour de bon. Or, ce n’était pas la mort qu’il avait vue, mais l’irréalité.
(page 194)
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C’était une belle soirée : la lune brillait tant que nos ombres étaient projetées sur le sol sablonneux et l’air était si tiède, sans un souffle de vent, que nous le sentions à peine frôler notre peau. La marée était haute, les anses remplies d’eau, et un éclat opalescent s’étalait sur les flots, tandis que la lune, depuis l’horizon le plus lointain qui soit, gravait à nos pieds son chemin froid et blanc.
(page 187)
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Oh, pourquoi vivre était-il si douloureux, et pourquoi se voyait-on offrir ces instants de bien-être pour ensuite devoir mesurer à quel point, le reste du temps, la douleur nous accablait ?
(page 152)
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Je ne pense pas que les parents comprennent forcément leurs enfants tant que cela. On voit ce qu’ils ne peuvent s’empêcher d’être ou de faire, plutôt que leurs intentions, et cela conduit à toutes sortes de malentendus. Par exemple, de nombreux parents se persuadent que leurs enfants ont du talent, alors que ceux-ci n’entendent nullement être des artistes !
(page 79)
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Il me semble que les enfants, en règle générale, n’aiment guère les vérités énoncées par leurs parents : ils se forgent très tôt leurs propres idées, ou bien ils expriment des convictions fallacieuses dont on ne peut jamais les détromper, puisque leur conception de la réalité repose intégralement dessus.
(page 44)
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Cette dépendance se dresse sur le versant d’une pente douce, séparée de notre grande demeure en contrebas par un bosquet derrière lequel le soleil se lève et illumine nos fenêtres le matin ; le soir, il se couche derrière ces mêmes arbres et illumine les fenêtres de la dépendance.
(pages 30-31)
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Rachel Cusk
Les aspects de la vie les plus étouffants, dit Angeliki, sont souvent ceux où nos parents ont projeté leurs propres désirs. Par exemple, on se lance dans notre existence d’épouse et de mère sans se poser de questions, comme si un élément extérieur nous propulsait ; à l’inverse, la créativité d’une femme, ce dont elle doute et qu’elle sacrifie toujours en faveur d’autres choses – alors qu’elle n’imaginerait pas une seconde sacrifier les intérêts de son mari ou de son fils – vient d’elle, d’un élan intérieur.
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Mais qu’est-ce que tu racontes là, Paniotis ! s’exclama Angeliki. Que tes enfants ont émigré à cause du divorce de leurs parents ? Mon ami, j’ai peur que tu ne te croies un peu trop important. Les enfants partent ou restent selon leurs ambitions : leur vie leur appartient. Je ne sais comment en sommes venus à nous convaincre qu’au moindre mot de travers nous les marquons à vie alors que, évidemment, c’est ridicule, et, de toute façon, pourquoi leur vie devrait-elle être parfaite ? C’est notre propre idée de perfection qui nous tourmente, et elle s’enracine dans nos désirs.
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