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Citations de Raphaël Malkin (34)


Personne ne peut être entièrement anonyme. Ces gens devaient exister, se répétait-il en boucle. Mais il n’avait rien. Si les vents soufflaient dans son dos, il se trouvait malheureusement dans un désert. Après quelques semaines d’enquête qui lui avaient semblé défiler comme autant d’années, il se résolut à passer à autre chose. C’était la fatalité de son métier : les affaires s’empilaient, une nouvelle urgence chassait la précédente. Tant pis."
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L’os du nez, lui, avait subi plusieurs fractures au même endroit. Selon Clyde Snow, ce ne pouvait pas être la coïncidence de plusieurs accidents. Cette femme avait été frappée encore et encore à cet endroit. Peut-être le jour de sa mort. Dans tous les cas, ce qui suivait avait de quoi alimenter cette hypothèse. C’était le clou du rapport : le Dr Snow avait identifié une importante dislocation des os du cou, résultat d’un étranglement. Pas de doute, on l’avait tuée. Sur les quelques photos en très gros plan accompagnant son résumé, Clyde Snow avait entouré au feutre une longue série de fissures sous la gorge.
C’est un meurtre, se répéta Jackie Walker Jr. en se grattant le front. Il y avait pensé dès qu’il s’était approché du talus. On ne mourait pas comme ça, au milieu de nulle part. L’inspecteur prit le temps de relire plusieurs fois le rapport. Bout à bout, les différents éléments étayés par Clyde Snow dessinaient une trajectoire de vie. Elle semblait avoir été pénible. Elle avait été trop courte. Désormais, il lui fallait un visage.
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La mort datait de l’été précédent, courant août ou peut-être au tout début du mois de septembre. C’était une femme et elle était noire. Elle devait avoir entre 35 et 45 ans. Svelte, elle mesurait probablement 1,75 mètre. Une étude attentive des fines tresses retrouvées sur la cime de son crâne pouvait, par ailleurs, faire penser qu’elle avait porté des perruques. Les éléments en or qu’il avait retrouvés dans l’herbe concernaient les dents du devant. Cette femme avait très probablement souffert de sa mâchoire gauche. Elle devait avoir eu beaucoup de mal à mâcher. L’une de ses incisives était en « grain de riz », selon le jargon de la médecine dentaire : elle avait une forme très aiguisée, trop même, comme une canine de Dracula. Considérant la teinte générale des dents, entre la rouille et le cramoisi, l’inconnue devait aussi avoir très certainement fumé du tabac à longueur de journée au cours de ses dernières années.
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À plusieurs milliers de kilomètres au nord du comté de Jackson, le professeur Clyde Snow et son assistante Fontaine Young examinèrent les ossements pendant près de cinq heures. Des données biométriques précises furent récoltées : l’écart entre les yeux, le degré d’angle des narines, la hauteur du crâne ou bien encore la longueur du mastoïde, un os situé juste derrière l’oreille. Quelques jours plus tard, Jackie Walker Jr., rentré dans le Mississippi, reçut un compte rendu d’autopsie détaillé signé de la main du Dr Snow.
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l’anthropologue détailla la méthodologie qu’il avait théorisée afin de procéder à un travail peu courant pour l’époque : l’étude des squelettes pour faire parler les morts. Jackie Walker avait écouté la démonstration comme il écoutait d’ordinaire les sermons de son pasteur.
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le célèbre médecin légiste Clyde Snow (...) était le directeur du Civil Aeromedical Institute. Le site basé à Oklahoma City était un important complexe scientifique dépendant de l’administration fédérale où un bataillon de médecins tâchait de mener à bien des analyses scientifiques dans le cadre d’affaires criminelles hautement sensibles. Flanqué de son éternelle blouse blanche, le Dr Snow devait bientôt diriger avec ses équipes un examen, comme il n’y en avait jamais eu auparavant, du corps du Président assassiné John Fitzgerald Kennedy.
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De retour au bureau du shérif du comté de Jackson, l’inspecteur en chef s’empressa de taper son rapport, en prenant soin d’y faire figurer chacune des maigres informations dont il disposait : la date, le lieu, les chasseurs et les dents en or. Une page de dix-neuf lignes dactylographiées qu’il conclut ainsi :
« L’enquête se poursuit afin d’identifier le corps et de déterminer les causes de la mort. »
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Plus tôt au cours de l’année 1977, l’inspecteur Jackie Walker Jr. s’était rendu dans un hôtel de Mobile, la grande ville la plus proche, située de l’autre côté de la frontière d’État, dans l’Alabama. Aux côtés d’une centaine d’officiers venus des quatre coins d’Amérique, il avait assisté à une importante conférence consacrée au futur de la criminologie. Parmi les différents intervenants de renom qui avaient défilé à la tribune se trouvait le célèbre médecin légiste Clyde Snow.
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Le policier les ramassa une à une entre son pouce et son index comme on ramasse des petits cailloux à la plage. À y regarder de plus près, il y avait là des trésors : une dent était en or et une autre était sertie d’un genre de triangle décoratif fondu dans le même métal. Jackie Walker Jr. ordonna que l’on place cette nouvelle découverte, ainsi que le reste du squelette, dans des sacs que venaient d’apporter les services d’une maison funéraire appelée à la rescousse.
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L’inspecteur s’approcha doucement du fatras d’ossements. Penché, les mains sur les genoux, il les observa. (...) En s’aidant d’un bâton, il retourna chaque racine, suivit un à un les sillons fendant le sol. C’est ainsi qu’il remarqua ce que les chasseurs n’avaient pas vu. Plantée dans la terre, la suite quasi complète des dents qui manquaient au crâne.
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Arrivé au cœur du sous-bois dans un bruit de tôle à faire jaillir une volée de sauterelles brunes, Jackie Walker Jr. resta un instant au volant. Avant de sortir de sa voiture, il fit ce qu’il avait toujours fait depuis qu’il était un policier en civil. Il sortit son pistolet de service de la boîte à gants et le glissa dans un étui de cuir qu’il portait à la cheville, sous son pantalon de costume.
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Jackie Walker Jr. connaissait bien le bayou. Adolescent, il avait passé de nombreuses vacances à crapahuter dans l’ombre de son oncle, un chasseur de lièvre émérite. Sur le beau terrain de dix hectares qu’il possédait, il lui avait appris à aiguiser son regard et à saisir au loin le mouvement des bêtes qui filaient en colonne à l’heure du coucher du soleil.
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À cet instant précis, l’inspecteur en chef Jackie Walker Jr. était occupé à toquer aux portes des mobil-homes d’un trailer park à l’autre bout du comté. Une ennuyeuse histoire de cambriolage le soir de Noël. Lorsqu’à la radio de sa voiture banalisée il saisit ce qui se tramait dans ce fichu sous-bois, l’inspecteur se mit aussitôt en route, porté par la ferveur des jeunes recrues. Les restes d’un corps, en voilà une vraie urgence, se dit-il.
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Quelques minutes plus tard, le talus au fond duquel gisaient toujours les os était officiellement sanctuarisé. Scène de crime. Dans une radio que le foisonnement luxuriant du sous-bois faisait grésiller, l’un des policiers s’occupa de mettre au parfum l’homme chargé des enquêtes criminelles lié au bureau du shérif.
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(...) un officier qui devait avoir les pieds sur son bureau leur indiqua en soufflant que le lieu de leur découverte ne dépendait pas de sa juridiction. Si leur histoire en valait vraiment la peine, ils devaient joindre l’échelon supérieur du mille-feuille hiérarchique de la police : le bureau du shérif du comté de Jackson, là où les uniformes sont beiges. Au comté de Jackson, on ordonna finalement aux chasseurs de retrouver deux patrouilleurs sur le seuil d’une épicerie de bord de route installée non loin du sous-bois dont ils ne voulaient plus s’approcher désormais.
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Il fallait donner l’alerte. Ils rejoignirent aussi vite qu’ils purent la petite maison de l’un d’entre eux dans un quartier noir de Moss Point, la première ville après la brousse, en espérant que, derrière eux, aucune bête ne viendrait s’en prendre au squelette. À l’aide d’un gros téléphone à cadran, ils appelèrent le commissariat local où un officier qui devait avoir les pieds sur son bureau leur indiqua en soufflant que le lieu de leur découverte ne dépendait pas de sa juridiction.
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Au creux d’un talus de terre, ils découvrirent avec effroi des ossements épars, noircis par les poussières de la forêt.
Il y en avait tout un baluchon, et ce n’était certainement pas les restes d’un lièvre. Ce n’était pas non plus les restes d’un opossum ni d’un rat musqué, autres espèces qui peuplaient les parages. Leur taille. Leur forme. Ce crâne. Ce que les chasseurs venaient de découvrir n’était autre que l’ultime trace d’une vie humaine. Ici, quelqu’un était mort.
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Soudain, au pied d’un poteau électrique isolé, les chiens se mirent à aboyer furieusement.
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À mesure que les chasseurs continuaient d’avancer, l’air se chargeait d’une odeur poisseuse qui faisait penser à une forte sueur. C’était le signe que l’on se rapprochait du bayou serpentant en silence à la sortie des fourrés. La terre devenait molle. La mousse se décollait. On venait de fêter Noël, et il faisait chaud et humide comme en plein cœur d’une jungle.
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Il n’y avait pas de fleurs sur leur chemin. Pas d’ajoncs jaunes ni de jacinthes bleues, comme il en pousse pourtant partout dans la région, en toutes saisons. Sous l’ombre de vieux arbres étranglés de branches, de mauvaises herbes, hautes et drues, griffaient la toile de leurs pantalons.
Ce mardi 27 décembre 1977 après l’heure du déjeuner, trois hommes s’enfonçaient à pas lents dans un sous-bois recroquevillé sur lui-même, quelque part aux confins du Mississippi.
Ils étaient armés de fusils qu’ils portaient en travers de la poitrine avec un aplomb qui disait qu’ils avaient fait ça toute leur vie.
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