Alan Parks : Remise du prix du Salon du polar se met au vert 2018-2019
Susan prépare un doctorat à l'université de Glasgow (…)
Comment s'intitule votre thèse, déjà, Susan ?
- " La sexualité déviante en tant que nouvelle marchandise ; exploitation, capitalisme, fétichisation et avènement de l'individu désincarné."
- Alléchant, dit McCoy. Il faudra que je lise ça quand vous aurez terminé. Drôle de sujet pour une femme ,tout de même. (…)
- Que voulez-vous que je vous dise ? Le cours de couture était déjà plein.
Les hommes comme Dunlop Senior ne terminaient pas dans une chambre miteuse d’hôpital public, avec des cicatrices partout sur les mains et des entailles de sabre dans le dos. Pas eux. Ils traversaient le monde sans qu’il ne leur arrive jamais rien, quoi qu’ils fassent.
Paddy's Market était situé sous les arcades de la voie ferrée, au bord de la Clyde. C'était le marché de ceux dont les enfants n'avaient pas de chaussures et dont le dîner se limitait à des tartines de confiture, ou à une portion de frites s'ils avaient de la chance. Ils étaient encore nombreux à Glasgow ; pour eux, pas de HLM flambant neuf ni de télé couleur en location. C'était là qu'ils venaient tous les vendredis acheter et vendre des morceaux de biscuits dans des sacs plastique, des voilages déchirés --n'importe quoi. Paddy's était une sorte de grand magasin perverti : on y trouvait de tout, mais rien qui fasse envie.
Se faufilant entre un type au visage ensanglanté criant dans le vide et un vendeur au landau remplit d'allume-feux volés, McCoy passa sous les arches, à l'abri de la pluie. Là, les emplacements étaient payants, c'était donc la zone des produits haut de gamme : tabac volé, costumes d'hommes morts puant la sueur et la naphtaline, pièces de moto, écharpes de fourrure raidies par les années. Les produits de qualité. La frontière était très nette. Il y avait sous les arcades et dehors sous la pluie. Deux mondes bien distincts. p 85-86
- Je me suis cassé la jambe dans un accident de ski quand j'avais quatorze ans. Une vilaine fracture. Il était prévu que j'entre dans l'armée.
Il sourit.
- Quand il n'en a plus été question, j'ai décidé de l'étudier. Ç'a été le travail de ma vie, j'y ai pris un immense plaisir. Enfin, jusqu'à aujourd'hui. Aujourd'hui, je voudrais ne m'être jamais intéressé à l'histoire militaire, j'aurais préféré étudier le grec ancien, n'importe quoi qui m'aurait évité d'entrer dans cette pièce.
On n'arrête pas les braqueurs, ils se font arrêter tout seuls. Y en a toujours un qui se sent lésé et qui pense qu'il peut baiser les autres. Ils se tirent dans les pattes, ils font du bruit, ils achétent des conneries, ils se font remarquer.
" 12 septembre, 108 kilos. 13 septembre, 108 kilos. 14 septembre , 108 kilos 500..."
Il ne leur fallut pas longtemps pour parcourir les deux faces de la cassette C30, toute entière occupée par la même litanie. (...)
- Qu'est-ce que c'est , ce truc, demanda Wattie.
- Va savoir, dit McCoy, en allumant une cigarette. Il est peut-être inscrit à Weight Watchers.
Les gens méprisent les filles qui travaillent ici [ un bordel ], poursuivit-elle, ils pensent qu'elles ne valent rien. Mais ce sont des êtres humains , ni meilleurs ni pires que les autres.
Et moi qui croyais que j'avais eu du bol finalement, que j'allais pouvoir boucler cette affaire sans trop me fouler.
- Ça n'arrive jamais.
McCoy ne connaissait que Glasgow. Il était allé une fois à Manchester pour rendre visite à une petite amie qui ne voulait pas vraiment de lui là-bas. il n'était jamais allé à Londres, jamais allé à l'étranger,n'avait jamais pris l'avion. Aujourd'hui, même les jeunes allait en Espagne pour les vacances.
Muir s'écarta, et soudain McCoy découvrit le spectacle qu'il voulait à tout prix éviter.Un homme gisait sur le sol, son costume gris noir de sang. McCoy se força à regarder son visage, le regretta aussitôt.