LA CHRONIQUE DE GÉRARD COLLARD - LE DICTIONNAIRE AMOUREUX DU JAPON
La facilité de sa musique, ces airs que chacun est capable de fredonner, ils sont en fait si difficiles à interpréter correctement ! Je dis bien, « correctement ». Je n’envisage même pas la virtuosité ! Rien n’est plus trompeur que l’apparente facilité des choses. Votre blessure souligne la perfection de votre visage mais elle me paraît trop évidente pour être honnête !
C’est bien entendu la musique, seul espace de consensus dépassant les frontières, qui permit de déjouer l’obstacle à priori infranchissable pour une jeune Française d’aller vivre chez l’ennemi héréditaire, au milieu des plaies vives laissées par le conflit et les rancœurs montantes causées par l’humiliation du traité de Versailles.
Pour accomplir son dessein, c’était l’endroit idéal. Il n’avait pas eu à chercher bien longtemps. Certains lieux s’imposent d’eux-mêmes. Ils sont eux aussi, pourrait-on dire, dans l’ordre des choses et du monde. En tout cas, cet endroit était dans l’ordre de ses choses et de son monde à lui.
Quand la mort le décide, elle rôde, elle prend son temps, elle folâtre autour de sa victime, elle s’ébat, elle butine sa douleur. Elle se fait parfois désirer mais elle finit toujours par l’emporter.
Le temps qui passe est le père ingrat de l'indifférence...
...Des hommes et des femmes dans des amours interdites, dont les parents, pour une raison ou pour une autre, rejettent l'union. Ou encore des couples qui ont atteint un niveau de félicité qu'il leur paraît impossible de surpasser et qu'épouvante l'idée d'une vie morne après tant de fortune et d'harmonie ! Alors ils se jettent du haut des chutes et s'écrasent sur les rochers dans le bassin...
L’égalité des sexes est une baliverne. Elle suppose une véritable réciprocité. Or, pour des raisons biologiques et de pure physique mécanique, ce n’est pas possible : l’homme perce, pénètre et ensemence, et quand il s’est rincé la verge plus rien n’y paraît ; la femme est pénétrée, déchirée et ses tissus intimes sont imprégnés de semence, et tout cela est indélébile.
J'ai regagné mon bureau au troisième étage du magasin, slalomant entre les cartons de marchandise, bousculant sans m'en rendre compte les personnes qui se trouvaient sur mon passage. Les employées intérimaires s'arrêtaient pour me laisser passer en me saluant d'une brève inclinaison de la tête. Elles ne savaient pas, elles ne sauraient pas. Tout juste constateraient-elles que j'ai disparu et qu'un nouveau responsable m'avait remplacé, qui l'ânonnerait chaque matin avant l'ouverture des portes le même discours lénifié supposé les encourager pour le reste de la journée. Nous étions interchangeables, tous sans exception. Même costume sombre, même coupe de cheveux, même absence d'imagination, même trajectoire sans histoires... Comment ne m'en étais-je pas aperçu plus tôt ?
Les gens se retenaient alors de manifester leur joie trop bruyamment, par pudeur et par égard pour ceux, plus nombreux, qui continuaient à attendre et qui ne recevaient pas de message, leur portable restant désespérément muet bien que les communications aient été rétablies.
On ne meurt pas d’une blessure au ventre. Cela peut durer plusieurs heures, parfois plusieurs jours. C’est souvent la septicémie qui l’emporte plutôt que l’éventration.