AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Sofia Samatar (11)


De bien des manières, il était un monde à lui seul, aussi plein et complet qu'une sphère.
Commenter  J’apprécie          160
Ses yeux étaient d’un vert minéral, de la couleur des mers où surviennent les naufrages, de la couleur des melons pas encore mûrs, de la couleur du lichen, de la couleur du verre.
Commenter  J’apprécie          140
Le silence. La fin de toute poésie, de toute romance. Plus tôt, effrayé, vous commenciez déjà à sentir comme une suggestion de ce silence ; tant de pages ont été tournées, le livre était si lourd d’un côté, si léger de l’autre, se réduisant alors que la fin approche. Néanmoins, vous vous consolez bien vite. Vous n’êtes pas encore à la fin de l’histoire, à cette terrible page blanche comme un volet fermé. Il y a encore quelques pages sous votre pouce, qui restent à explorer et à chérir. Oh, est-il possible de lire plus lentement ? Non. La fin approche, inexorable, à la même vitesse mesurée. La dernier page, le dernier mot précieux. Et là : la fin du livre. (…) Le silence advient, pareil à l’absence de son à la fin du monde. Vous levez les yeux. Vous êtes dans une chambre, dans une vielle maison. Ou peut être sur une chaise, dans le jardin ou même sur une place ; peut-être étiez vous en train de lire dehors et, soudainement, vous prenez conscience des chariots dans la rue. La vie reprend ses droits, les ombres des feuilles vous surprennent. Quelqu’un vient vous demander ce que vous voulez manger au dîner, deux jeunes garçons passent devant vous en courant et en criant, ou peut-être n’est-ce que le vent qui soulève un rideau, la blancheur qui se déverse dans la pièce et les papiers qui bruissent sur le bureau. C’est le son du monde. Mais pour toi, lecteur, ce n’est qu’un silence, vide et désolé.
Commenter  J’apprécie          90
« Un livre », nous dit Vandos d’Ur-Amakir, « est une forteresse, un lieu empli de pleurs, la clé d’un désert, une rivière dépourvue de pont, un jardin de ronces. » Fanlewas le Sage, le grand théologien d’Avalei, écrit que Kuidva, le Dieu des Mots, est « un maître exigeant, porteur d’un fouet plombé ». On raconte que Tala d’Yenith conservait ses livres dans un coffre en acier qui ne pouvait être ouvert en sa présence, au risque de la voir s’écrouler au sol en hurlant. Elle écrivit : « À l’intérieur des pages se trouvent des feux qui peuvent embraser, roussir les cheveux et cuire les paupières. » Ravhathos parlait en ces termes de la vie des poètes : « la route juste et fatale, sur laquelle même la poussière et les pierres sont chères au cœur » et il nous avertit que les personnes venant de vivre une période prolongée de lecture ou d’écriture ne devraient pas être dérangées pendant les sept heures qui suivent cette activité, « car ils sont descendus au plus profond d’un Puits qu’ils ont dévalé sur une Pente de Feu mais dont ils remontent sur une Échelle de Pierre ».
Commenter  J’apprécie          40
Je lui ai raconté l’histoire de Tialon et Lunre, et elle pleura. Je lui ai tout raconté, tous mes secrets. Je me sentais en train de me désintégrer, de m’effacer, de me changer en fumée, je devenais pure pensée, pure énergie, comme elle. Je désirais cette dissolution, je la recherchais avec avidité. Ce n’était jamais assez. Jamais, même si nous nous accrochions l’un à l’autre comme deux orphelins perdus dans la forêt.
– Maintenant, tu n’as plus peur de moi, murmura-t-elle en frissonnant.
– Non, dis-je, me penchant vers elle et ne touchant que le marbre.
Je ne pouvais pas la toucher. Et pourtant, elle semblait si proche, la lueur de sa peau contre ma main, sa voix comme une musique privée pour mes oreilles. Je lus son anadnedet, encore et encore. Je voulais encore écrire, m’inscrire sur ses pages parmi les mots olondriens et kideti. Ma propre poésie éparpillée comme des graines. Je l’imaginais jouant avec ses amies et je pouvais la voir clairement : les yeux doux et dictatoriale à la fois. Et il me semblait qu’elle était la réponse à un désir que j’avais porté toute ma vie sans le savoir.
Commenter  J’apprécie          30
Je l’ai nommé la Visible, la Neuvième Merveille, l’Impératrice des Soupirs. Viens, ai-je dit, et je te montrerai la magie du Nord, je te montrerai tes propres mots conjurés en un vallon. Un livre, ange, un jardin de ronces. Je tiendrai la plume pour toi et lancerai un filet pour pêcher tes mots. Entre les dauphins des rivières et les loups. Entre le Sud profond, le pays des éléphants et l’ambre, et ce lieu : la contrée des cyprès et de la neige.
Commenter  J’apprécie          30
Les actions de mon père, guidées par ses propres secrets et ses calculs labyrinthiques, étaient pour moi parfaitement incompréhensibles. Il appartenait à un autre monde, un monde d’intrigues, d’affaires, de contrats et d’achats clandestins de terres dans toute l’île. De bien des manières, il était un monde à lui seul, aussi plein et complet qu’une sphère. Il ne fait aucun doute que toutes ses décisions lui apparaissaient comme parfaitement logiques. Même celle qui l’amena un jour, lui, un îlien patriotique, à me confier à un tuteur venu de Bain : Maître Lunre.
Commenter  J’apprécie          10
Lorsque j’étais étranger en Olondre, je ne connaissais rien des splendeurs de ses côtes, ni de Bain, la Cité-Port, dont les lumières et les couleurs se déversent dans l’océan telle une cascade de roses. Je ne connaissais pas l’immensité du marché aux épices de Bain, dont les effluves capiteuses rendent fous les marchands. Je n’avais jamais vu se lever les brumes matinales à la surface de la verte Illoun chantée par les poètes ; je n’avais jamais vu de femme porter des joyaux dans ses cheveux ou contemplé l’éclat cuivré de dômes, ni ne m’étais tenu sur les plages mélancoliques du Sud tandis que le vent soufflait sa tristesse de la mer. Au plus profond du Fayaleith, le Pays des Vins, votre cœur peut s’arrêter de battre face à la pureté de la lumière qui y règne ; il s’agit de la lumière que les natifs de l’endroit appellent « le souffle des anges » et on prétend qu’elle peut guérir les maladies cardiaques et les poumons fragiles. Plus loin encore se trouve Balinfeil où, durant les mois d’hiver, les gens portent des capes en fourrure d’écureuil blanc et qui, durant les mois d’été, alors que la terre est tapissée de fleurs d’amandier, est le séjour de la déesse Amour. Mais de tout cela, je ne connaissais rien. Je ne connaissais que l’île où ma mère huilait rapidement ses cheveux à la lueur d’une chandelle et me terrifiait avec ses histoires du Fantôme Sans Foie, dont les sandales claquaient sur le sol à cause de ses pieds placés à l’envers.
Commenter  J’apprécie          10
Doutez de la page et préservez ce doute, car un livre est une forteresse, un lieu empli de pleurs, la clé d’un désert, une rivière dépourvue de pont, un jardin de ronces.
Commenter  J’apprécie          10
Avec une stupéfaction que je ressentis physiquement sous la forme d’un frisson manquant de me faire défaillir, je reconnus le moment où ce qui est imaginé devient réalité. Car en dépit de leurs fleurs soigneusement cultivées, c’étaient là les rues à propos desquelles Fodra écrivit : « Ici règne l’automne, et tout y est désert. » Les antiques portes de fer étaient rongées par la rouille, les murs suintaient une moisissure verte, les maisons paraissaient encerclées par des allées vides trop étroites pour les chariots. C’étaient bien les rues que cette jeune femme maudite, exaltée et asthmatique, dont la poésie séduisit une nation entière, appelait « l’intolérable quartier ». « Oh rues de ma cité, murmurai-je, vos murs ne sont que tapisseries défraîchies. »
Commenter  J’apprécie          00
— En Olondre, les mots pèsent plus que l’air. Ils peuvent vivre éternellement, ici.
Je brandis le livre, serrant sa tranche.
— Ici, ils sont vivants.
Commenter  J’apprécie          00

Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Sofia Samatar (102)Voir plus

Quiz Voir plus

Mâle ou Femelle ?

Scanie, avril 1992. Louise Akerblom, agente immobilière et jeune mère de famille, disparaît dans des conditions mystérieuses. Pendant ce temps, en Afrique du Sud, un groupe d'Afrikaners fanatiques prépare avec soin un attentat contre une importante figure politique. Quelques jours plus tard, le corps de Louise, le front troué d'une balle, est repêché dans un puits. L'inspecteur Wallander et son équipe enquêtent. Henning Mankell

Le lion blanc
La lionne blanche

12 questions
28 lecteurs ont répondu
Thèmes : romans policiers et polars , théâtre , romanCréer un quiz sur cet auteur

{* *}