Je te salue vieux Sahara
Toile immense
Plage orpheline
Solitaire ouvrage je t'offre une ligne
Un horizon de vers où je mets ta force
Elle contient l'univers dans ses métaphores
Si quelqu'un te parle avec des flammes
Réponds-lui avec de l'eau
Sache que le seul combat qui se gagne
C'est le duel qui devient duo
Je sais que les braves savent se battre
Et lutter pour leurs droits jusqu'à l'aube
Mais dis-leur que la paix guérit et la guerre périt
Quand la plus belle âme des deux ennemis pardonne à l’autre
En jetant du sel sur le sol de la savane
Foulé par le peuple oiseau gitan du Sahel
J’entends d’ici des vers de vingt-quatre syllabes
Qui s’égarent comme des volutes de fumée de cigare
La nuit la poésie se fabrique des ailes
En nouant les plumes de ses auteurs les unes aux autres
Je suis venu avec les mots et les sourires
De toutes les muses du monde et je suis sous vos ordres
J’entends d’ici le médicament contre la peur
Le tam-tam tribal peul qui bat dans le lointain
Il dit : « À demain matin, l’étoile est dans ta main
Le soleil s’est juste couché, il ne s’est pas éteint. »
…
Cette nuit il s'est passé quelque chose Certains livres d'Histoire disent qu’un révérend noir avait fait un rêve
Mais ce rêve erre encore
Chez nous on l'appelle le rêve errant du révérend
xxi° siècle après Jésus-Christ
Dehors les gens se croisent
Comme les pièces maîtresses d’un jeu secret
Laissez passer la guerre
Ici on l'appelle la peur de la paix
Cette nuit il s'est passé quelque chose
C'est le rêve errant du révérend
Je suis venu enfreindre un silence
Et déjà la pénombre me demande pardon
Profession poète cracheur de feu
Lointain descendant d’un griot dragon
Je me souviens avoir fait les vœux que les étoiles voient de loin
Quand elles m'ont demandé, toi qui étudies la quiétude, qui es-tu
J'ai répondu, c'est moi l'humain.
C'est l'automne des bloc-notes
Beaucoup de feuilles sont mortes, j'ai trop de mots
Poésie trompe-l'œil, ça tombe comme des trombes d'eau à la saison des vents violents.
La nuit la poésie se fabrique des ailes
En nouant les plumes de ses auteurs les unes aux autres
D’après les légendes colportées par les gens
La force de quelqu’un dépend de la cause qu’il défend
Certains disent qu’ils s’interdisent de ne pas récupérer
L’air sain que les usines voisines nous ôtent
D’autres disent à votre guise il y a des portes closes qui se brisent
Sous le poids des cris de joie et des chants
La nuit la poésie se fabrique des ailes
En nouant les plumes de ses auteurs les unes aux autres
Je suis venu avec tous les conteurs de la terre
Tous les orateurs depuis la nuit des temps
Avec tous les poètes de la planète morts ou vifs
Nous parlons toutes les langues et vous êtes nos hôtes
Et la chorégraphie de notre spectacle
C’est une tempête d’encre océane orchestrée par des vents
J’entends d’ici des vers de vingt-quatre syllabes
Enrobés d’une voix grave comme un violon tsigane
Et je cligne des yeux en regardant au-dessus des arbres
Chaque ligne est le signe que j’attends du ciel
…